L'Auteur soi-disant

L'Auteur soi-disant, comédie en un acte et en vers, par M. Georges Duval, 30 août 1806.

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Almanach des Muses 1807.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, 1806 :

L'Auteur soi-disant, comédie en un acte et en vers ; Par M. Georges Duval. Représentée, pour la première fois, sur le théâtre de la porte Saint-Martin, le 30 août 1806.

Courrier des spectacles, n° 3495 du 31 août 1806, p. 2 :

La journée d’hier a été doublement heureuse pour M. Georges Duval ; deux pièces nouvelles qu’il a fait représenter l’une au Théâtre Montansier, sous le titre de Chapelle à Bachaumont, l’autre intitulée : l'Auteur soi-disant. au Théâtre de la Porte St Martin, ont complellement réussi. Un autre auteur a travaillé conjointement avec M. Georges-Duval au vaudeville de Chapelle à Bachaumont, mais il a gardé l’anonyme. Demain nous parlerons plus amplement de ces deux ouvrages.

Courrier des spectacles, n° 3496 du 1er septembre 1806, p. 3 :

[Le compte rendu s'ouvre par un petit règlement de compte : la pièce abonde en vers visant un auteur que le critique ne nomme pas, mais que le public reconnaît fort bien,et dont il se moque abondamment. Loin de condamner ces traits de sature, le critique s'en amuse, ce qui est inhabituel : normalement, pas d'attaques personnelles sur la scène, surtout entre collègues. Mais la pièce doit plus son succès à ses traits caustiques qu'aux longueurs qui l'encombrent. L'intrigue, résumée ensuite, n'est pas faite pour surprendre : un procureur atteint de métromanie veut donner sa fille à un intrigant qui l'a ébloui en lui lisant une tragédie dont il se dit l'auteur. Mais la demoiselle préfère un jeune homme, absent depuis longtemps, mais qui arrive opportunément le jour où on doit la marier. Il reconnaît dans l'intrigant un ami à qui il a confié le texte de sa pièce. Et quand le père de la demoiselle éprouve des déboires professionnels, il les débrouille, sauvant ainsi son potentiel futur beau-père de la ruine, quand l'intrigant renonçait dans le même temps à épouser... C'est donc le chanrmant jeune et serviable jeune homme qui épouse Rosalie. Inutile de nommer l'auteur, il a été cité la veille. Il ne reste plus qu'à parler des interprètes, dont un qui est prié de moins faire de grands gestes, et de cesser de confondre comédie et mélodrame.

Petite remarque : les noms de deux personnages donnés dans l'article diffèrent de ceux que propose la brochure : le père se nomme Distiveau, et non Destiveau, et l'intrigant s'appelle Saint-Phar, et non Dorval.]

Théâtre de la Porte St-Martin.

L’Auteur soi-disant, comédie eu un acte, et en vers.

L’auteur de cette comédie n’a pas été chercher bien loin ses personnages ; il les a trouvés sous sa main, et il a peint leurs ridicules sous les traits les plus caustiques. On a reconnu les personnages, et c’est déjà un grand avantage quand le public riant des travers qu'on lui met sous les yeux, peut dire de l'homme qu’on ne lui nomme pas : Hic est, c’est lui. Nous ne nous permettrons pas de désigner dans cette feuille, plus qu’on ne l’a fait en scène, les personnes que l’on a voulu y représenter : il nous suffira de dire que la pièce est remplie de vers dont l’application a été généralement sentie, et que les épigrammes contre deux hommes connus ont excité des éclats de rire fréquens et universels. Bref, la pièce a réussi. Il y a des longueurs ; mais un grand nombre de vers heureux et de traits piquans ont racheté victorieusement ce léger défaut. On ne s’ennuie guère quand on rit.

Un Procureur nommé M. Destiveau, dominé par la manie de faire des vers et des distiques pour tous les établissemens publics, est entretenu dans sa folie par Dorval, jeune homme qui se dit poëte, parce qu’il a mis son nom à cinquante ou soixante bluettes dans lesquelles il n’a inséré qu’au ou deux couplets ; et comme il le croit un génie supérieur, d’après la lecture que lui a faite son parasite d’une tragédie en cinq actes, il veut se l’associer et lui donner sa fille en mariage. C’est le lendemain que le contrat doit se signer, au grand regret de la demoiselle qui, depuis son enfance, a nourri l’espoir d’être un jour unie à Doliguy. Ce dernier est absent, et aux yeux du père, les absens ont tort. Doligny d’ailleurs n’aime pas les vers ; quelle comparaison peut exister entre lui et un nourrisson des Muses ?

Doliguy arrive au moment où on ne l’attend point. Le valet de M. Destiveau est dans ses intérêts ; le hazard le sert aussi  : car il rencontre dans la maison son ancien ami Dorval, le même à qui, en partant, il a confié sa pièce, fruit de ses loisirs. Il découvre en lui son rival.

Tout a coup on vient annoncer à M. Destiveau que l’appel qu’il avoit interjetté an tribunal vient d'être refusé, parce que dans sa requête, il avoit mêlé étourdiment deux ou trois distiques échappés à sa plume en la rédigeant, et qu’il est responsable de trois cent mille francs. Ce rejet detruit tontes ses espérances et sa fortune. Doliguy qui est neveu du Président, court au tribunal ; et durant ce tems, Dorval qui n'est guidé que par l'intérêt, se fait une espèce de mérite de renoncer à l’union projettée. Doliguy revient bientôt, il a plaidé la cause de Destiveau, il a obtenu que l’appel fût reçu, et cette heureuse nouvelle détermine le Procureur à lui accorder la main de sa fille. Dorval se retire, et prudemment abandonne le champ de bataille à son heureux rival, qui détrompe son beau-pere sur le mérite de ce flagorneur, que l’on peut comparer au geai paré des plumes du paon.

Cette comédie est jouée avec beaucoup de talent par MM. Bourdais, Fusil, Odry, et Mlle. Rose. On doit recommander à M, Philippe de se battre moins les flancs et de parler avec plus de modération. I1 y a une différence entre la manière de jouer la comédie et celle de jouer le mélodrame.

 

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