Comédien

Les mots du théâtre au XVIIIe siècle.

Comédien.

Chamfort et Laporte, Dictionnaire dramatique, tome I, p. 272-273 :

COMEDIENS On donne ce nom en général aux Acteurs & Actrices qui montent sur le Théâtre, & jouent des rôles, soit dans le Comique, soit dans le Tragique, dans les Spectacles où l'on déclame : car à l'Opéra on ne leur donne que le nom d'Acteurs ou Actrices, Danseurs , Filles de Chœur, &c.

Nos premiers Comédiens ont été les Troubadours , connus aussi sous le nom de Trouveurs & Jongleurs : ils étoient tout à la fois Auteurs & Acteurs, comme on a vu Moliere, Dancourt, Montfleury, le Grand, &c. Aux Jongleurs succéderent les Confreres de la Passion, qui représentoient des Piéces appellées Mystères, & c'étoit effectivement les Mystères de la Religion Chrétienne. Vinrent ensuite les Troupes de Comédiens , qui sont ou sédentaires comme les Comédiens François, les Comédiens Italiens établis à Paris, & plusieurs autres Troupes, qui ont des Théâtres fixes dans plusieurs grandes Villes du Royaume , ou qui courent les Provinces , & vont de Ville en Ville, & qu'on nomme Comédiens de Campagne.

Il y a lieu de s'étonner de la maniere différente dont les Grecs & les Romains traiterent la profession de Comédien : elle fut honorée dans la Grèce à un tel point, que l'on choisit quelquefois, parmi les Acteurs célebres, des Ambassadeurs de la République. Chez les Romains, au contraire, les Comédiens furent si fort avilis, qu'ils étoient dans une espèce d'incapacité de s'obliger en Justice, ayant la permission de rompre à leur gré tout engagement fait sous caution, & même avec serment.

L' Angleterre, de notre tems, n'a point fait difficulté d'accorder à la célèbre Olfield, un tombeau à Westminster, à côté de Newton & des Rois.

En France, les loix & l'opinion sont moins favorables aux Comédiens ; l'Eglise Romaine les excommunie, & leur refuse la Sépulture Chrétienne, s'ils n'ont pas renoncé au Théâtre avant leur mort. Ces foudres, lancées dans un tems où de misérables Jongleurs représentoient des Farces aussi ridicules que scandaleuses, continuerent de frapper un Théâtre, qui est devenu l'école des mœurs & des vertus. La fonction de Comédien exige de la figure, de la dignité, de la voix, de la mémoire, du geste, de la sensibilité, de 1'intelligence, de la connoissance même des mœurs & des caractères ; en un mot , un grand nombre de qualités, que la Nature réunit rarement dans une même personne.

Peut-être seroit-il à souhaiter qu'ils ne fussent ni Ambassadeurs, ni enterrés auprès des Rois, ni avilis, ni excommuniés ; qu'ils fussent des Citoyens obligés d'avoir des mœurs ,& jouissant d'une considération proportionnée à leurs talens.

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