Théâtre espagnol

Les mots du théâtre au XVIIIe siècle.

Théâtre espagnol.

Chamfort et Laporte, Dictionnaire dramatique, tome III, p. 242-245 :

Théâtre Espagnol. Les Espagnols peuvent disputer à toutes les autres Nations le rétablissement de la véritable Comédie- Ils donnèrent d'abord de petites Farces en un Acte, qu'on appelloit Entremessés, ou Jornadas, Journées. L'action de cet acte rouloit sur un fait ridicule ; cela est très-conforme aux Mimes Latines. Ces Entremessés se représentoient dans les carrefours à l'occasion de quelque Fête sacrée ou profane

Ces passe-tems de la populace firent place à la Comédie, qui commença, comme en Gréce, sans ornement & sans choix du local. LesThéâtres d'Espagne conservent encore les noms qu'on leur donna dans les commencemens, Corrales, qui veut dire basse-cours. Quand on veut leur donner un nom plus honnête, Patios, grandes-cours. Ceux des grands Seigneurs se nomment Coliseo.

Le milieu du quinzieme siecle fut l'époque du rétablissement de la bonne Comédie chez les Espagnols, que les François & les Italiens ne datent que du seizieme & dix-septieme.

D. Lope de Rueda & Navarro, qui étoient contemporains, mirent en trois Actes la Comédie, qui auparavant étoit divisée en quatre, & ils appellerent Jornadas ce qu'on nommoit Actos dans ces premiers tems

Les Poëtes Dramatiques Espagnols les plus connus sont Lopès deVega, Calderon, Mureto, Solis, Salazar & Molina. A l'égard de leurs Ouvrages , ils surpassent en nombre tous ceux des François & des Italiens réunis.

Ce n'est point par ignorance, que les Espagnols n'ont pas suivi les régles d'Aristote ; D. Lopes de Vega nous dit que D Lope de Rueda les a observées, & que si les Poëtes Espagnols ne s'y sont point attachés, c'est moins par ignorance que par la nécessité de plaire à la Nation. Malgré tout cela, on peut regarder ce Théâtre comme une source intarissable pour toutes les Nations.

Les Comiques du Théâtre Espagnol sont plus dans le goût des Italiens que des autres Peuples ; On appelle Gracioso, celui qui joue le principal comique : ce Personnage ressemble à celui d'Arlequin.

II y a ordinairement des Soubrettes comiques dans les Pièces Espagnoles, que l'on nomme de Capa y Epada. Ces Pièces sont du genre de la Dame invisible, ou de l'Esprit Follet, &c.

On peut conclure de tout cela, que le Théâtre Espagnol, quoique dénué de régles, peut servir de modèle à tous les Théâtres de l'Europe, soit par la singularité des idées, soit par le nombre prodigieux & la variété des Sujets de Comédie, qui n'appartiennent qu'à lui. Voyez Actes Sacramentaux.

En Espagne, les Théâtres font presque quarrés ; ils ont trois étages, avec des Loges, au premier & au second rang : au-dessous est un Amphithéâtre, garni de bancs ; c'est-là que se placent les femmes. Dans la Loge en face du Théâtre, il y a toujours un Intendant de Police. Le Juge Royal assiste aussi au Spectacle avec trois Archers derrière lui ; il se place ou sur le Théâtre, ou dans une des deux Loges qui lui font destinées, aux côtés de la porte qui est vis-à-vis du Théâtre. Les personnes qui ne veulent point être vues, sont au second rang des Loges. Sur la même ligne, & dans toute la façade du fond, est l'endroit destiné pour les Moines. On est assis aux deux côtés du Parterre, sur des gradins ; & il y a un autre endroit, appellé Pacio, où il y a des bancs, & qui est de la largeur du Théâtre. Les Espagnols composerent plutôt que les autres Nations polies Je l'Europe, des Poëmes. Dramatiques, où l'on remarque quelque méthode. On fait remonter l'époque de ce Théâtre au milieu du quinzieme siecle. Leurs Pièces étoient d'abord de petites Farces satyriques depuis ; l'étonnante fécondité de leurs Poëtes donna à ce peuple le plaisir de la variété- Lopès de Vega a, dit-on, composé lui feul plus de quinze cens Piéces Dans les Drames Espagnols, on trouve quelquefois de ces beautés de détails, fruits d'une imagination échauffée. Au reste, les François n'ont point dédaigné d'aller puiser à cette source ; entre nos Auteurs, Rotrou, Corneille & sur-tout Molière, sont ceux qui ont le plus emprunté des Pièces Espagnoles.

Références :

Pedro Calderón de la Barca (1600-1681) est l’auteur de plus de 200 pièces, dont la Vie est un songe.

Tirso de Molina (1570-1648) est un auteur de théâtre, à qui on doit la prmeière pièce sur le mythe de Don Juan, el Burlador de Sevilla.

Augustion Mureto dont on connaît 36 pièces, d’après Luigi Riccoboni, Réflexions sur les différents théâtre de l’Europe (1738), p. 66. Je n’en sais pas plus.

Navarro, un des tout premiers auteurs de théâtre avec don Lope de Rueda, est ignoré de Wikipedia.

Don Lope de Rueda (vers 1510-1565), un des tout premiers auteurs de théâtre avec Navarro.

Salazar n’est pas connu.

Antonio de Solis y Ribadeneyra (1610-1686) est un dramaturge et historien espagnol.

Lope de Vega (1562-1635) est un des auteurs majeurs du Siècle d’or espagnol, à l'œuvre gigantesque; dont une œuvre théâtrale majeure, qui fonde la Comedia nueva.

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