Bérenger, ou l’Anneau de mariage

Bérenger, ou l’Anneau de mariage, vaudeville, de MM. Lafortelle et Victor, 4 février 1809.

Théâtre du Vaudeville.

Victor, c'est, semble-t-il, Victorin Fabre.

Titre :

éBerenger, ou l’Anneau de mariage

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

4 février 1809

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Lafortelle et Victor [Victorin Fabre]

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1809 :

Bérenger, ou l’Anneau de mariage, vaudeville en un acte, Par MM. Lafortelle et Victor. Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 4 Février 1809.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 14e année, 1809, tome I, p. 393 :

[Un fonds usé, des moyens qui ne sont pas neufs, juste « quelques détails gracieux », cela ne fait pas une bonne pièce.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Berenger, ou l’Anneau de mariage, vaudeville joué le 4 février.

Cette pièce dont le fonds est puisé dans un ancien fabliau n'a pas obtenu beaucoup de succès. Les maris ramenés à leur femme sont un sujet un peu commun, et comme les moyens n'avoient rien de neuf, malgré quelques détails gracieux, on a peu goûté cette production de MM. Lafortelle et Victor,

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome III, mars 1809, p. 264-269 :

[Le compte rendu commence assez mal pour l’auteur et sa pièce : sur un ton peu aimable, le critique conteste la valeur historique d’une pièce dont les personnages ne sont pas conformes à ce qu’on sait d’eux, et relève une série d’anachronismes. Après ce début difficile, il entreprend de nous donner l’analyse d’une intrigue qu’on peut juger compliquée, avec un mariage non consommé, une rivale qui fait ses confidences à l’épouse légitime, laquelle se travestit pour reconquérir son mari. Comme prévu, la fin est conforme à ce qui était attendu, le mari prend conscience que sa femme est celle qu’il aime... La fin, ce sont aussi des sifflets, malgré l’activité des « amis de la pièce », et si les auteurs ont été nommés, le critique suggère que c’était par la curiosité du public de savoir « quels auteurs il avait sifflés.]

Théâtre du Vaudeville.

Bérenger, ou l’Anneau de Mariage.

Je voudrais savoir à quelle époque un comte Bérenger a voyagé en Espagne, après avoir épousé une comtesse de Toulouse, fille d'un comte Raymond. Tous les renseignemens que je puis donner sur son compte, c'est qu'il se dit chevalier provençal, qu'il parle de Pétrarque et assure avoir assisté à un tournois donné par le sire de Couci en l'honneur de la belle Laure. Du reste, il chante

Qu'aux boudoirs , comme au champ d'honneur,
C'est l'audace qui rend vainqueur.

Je suis bien aise de savoir que du temps de Pétrarque et de la belle Laure, c'est-à-dire, au quatorzième siècle, on connaissait déjà les boudoirs. Il donne aussi des préceptes de conduite galante, que j'indique aux philologues, et qui pourront leur fournir des lumières sur le mot galant, qu'ils prétendaient n'avoir été formé que tout au plutôt au seizième siècle, et que jusqu'à présent ils n'avaient trouvé dans aucun auteur antérieur à cette époque. Passé cela, ce comte de Bérenger n'a rien ni dans son langage, ni dans ses actions, ni dans son costume qui indique un chevalier, un provençal, un troubadour. Vous pourrez le supposer du pays qu'il vous plaira, et vous imaginer, si cela vous fait plaisir, que son aventure est de l'année passée, à moins que vous ne puissiez découvrir dans l'histoire le temps où ce prince souverain, que nous appellions Raymond Bérenger comte de Toulouse ; s'est partagé en trois pour nous donner un comte de Raymond, un comte de Bérenger et une comtesse de Toulouse, personnages si peu considérables qu'on ignore leur alliance en Europe, quoiqu'elle ait été publique. En sorte qu'à Madrid, où le comte de Bérenger vit en simple particulier, sous son propre nom, on ne se doute pas qu'il ait jamais épousé une comtesse de Toulouse qui se trouve aussi à Madrid simple particulière. II l'a épousée malgré lui, forcé par son père qui l'avait retenu en prison pour l'y déterminer, au lieu de lui faire faire connaissance arec sa prétendue qu'il n'avait jamais vue. On les a mariés à minuit dans une chapelle assez mal éclairée ; probablement d'ailleurs le jeune comte qui avait de l'humeur, a tourné la tête de l'autre côté pendant la cérémonie : ensuite de quoi il s'en est allé sans avoir regardé sa femme, au grand regret de la comtesse, qui, pour elle, avait regardé du coin de l'œil, et avait vu assez clair dans la chapelle pour s'enamourer de son ingrat époux ; elle lui a écrit, et il a répondu qu'il ne consentirait jamais à être sérieusement le mari de la comtesse qu'elle n'eût trouvé moyen de s'emparer de son. anneau ; ce qui est une idée assurément fort singulière. Voilà donc la comtesse courant après ce mari et cet anneau. Elle trouve le premier à Madrid. fort occupé d'une Dona Camille, qu'il a manifesté l'intention d'épouser. Cependant, comme il est un peu embarrassé de sa première femme, à la vivacité de son langage et à la lenteur de ses procédés, on pourrait croire ses intentions fort différentes ; car Dona Camille le trouve fort actif à avancer ses affaires auprès d'elle, et fort lent à les terminer par le mariage ; en sorte que s'il est permis de parodier un couplet de ce vaudeville, à mesure que

L'amour fait un pas en avant,
L'hymen en fait deux en arrière.

Heureusement pour Dona Camille, qui, dit-elle,

. . . . Du veuvage
Ne pourra se consoler
Que par le mariage,

elle fait confidence de son amour à son amie Elvire, qui se trouve être la comtesse de Toulouse, et qui, pour parvenir à la possession de l'intéressant anneau, la prie de la présenter à Bérenger sous l'habit d'un page. Camille, qui ne veut pas être la femme du mari d'un autre, prend son parti de bonne grace. Bérenger reçoit assez mal le prétendu page qu'il prend d'abord pour un espion, et qui lui devient beaucoup plus suspect, depuis qu'il l'a surpris aux genoux de Camille, que la comtesse suppliait de vouloir bien lui laisser son mari que celle-ci a eu un moment, je ne sais pourquoi, la fantaisie de reprendre. Le comte est arrivé au moment le plus vif de ses supplications, et serait un peu inquiet de voir son page aux pieds de sa maîtresse s'il n'était rassuré, dit-il, par la certitude d'épouser celle-ci dans le jour même. Cela est en effet très-rassurant. Ce qui lui donne ce consolant espoir, et ce qui avait donné à Camille quelque velléité de le couronner, c'est qu'on a appris que les tribunaux qui, comme chacun sait, avaient au quatorzième siècle le pouvoir de dissoudre les mariages, apparemment d'après le nouveau code civil et la loi du divorce, viennent de prononcer la nullité de celui du comte, et que, pour être démarié, il n'a plus qu'une signature à donner. La circonstance devient pressante. Le faux page laisse entrevoir au comte qu'il sait son secret, l'oblige à lui donner son anneau pour prix de sa discrétion, et il ne l'a pas plutôt qu'il se découvre au comte et que celui ci est enchanté de l'avoir pour femme ; en sorte que le vaudeville finit par des couplets sur l'Hymen, l’Amour et l’Amitié.

Il a fini aussi par des sifflets. Quelques couplets assez bien tournés et sur-tout extrêmement tournés, l'avaient fait d'abord applaudir assez vivement ; les amis de la pièce ont voulu s'en tenir au premier avis et regarder le reste comme non avenu ; en sorte qu'au moment où le parterre se disposait à s'écouler tranquillement,

Sans en demander davantage,

on a insisté pour qu'il sût quels auteurs il avait sifflés, et après un peu de bruit on a nommé MM. Victor et Lafortelle.

P.          

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