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La Bascule

La Bascule, opéra comique, en un acte & en prose, mêlé de vaudevilles ; par J. Fr. Mussot, dit Arnould, 12 février 1791.

L’attribution de la pièce ne va pas de soi : si André Tissier l’attribue à Mussot, dit Arnould, elle est attribuée à Gabiot par l’Esprit des journaux français et étrangers et par la Biographie universelle, ancienne et moderne, volume 16 (Paris, 1816), p. 217.

Théâtre du lycée des arts pour la reprise le 13 septembre 1793.

Titre :

Bascule (la)

Genre

opéra comique mêlé de vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

12 février 1791 (à l’Ambigu Comique)

Théâtre :

Théâtre du lycée des arts (le 13 septembre 1793)

Auteur(s) des paroles :

Mussot, dit Arnould

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1793, volume 9 (septembre 1793), p. 323-328 :

[On apprend à la fin du compte rendu que la Bascule est une fausse nouveauté, déjà abondamment jouée deux ans auparavant sur un autre théâtre. Mais elle a subi « des changemens très considérables », ce qui en fait une sorte de nouveauté.

Sur un ton ironique, le critique fait un long résumé de la pièce, dont il souligne ainsi le caractère convenu. Puis il fait à l’auteur, sur le même mode, des critiques assez fortes : style peu soigné, versification peu poétique, utilisation d’un moyen déjà utilisé pour des « dénouemens forcés ». L’interprétation est satisfasante, « à l’ensemble près » (ce qui n’est pas un défaut mineur). Et le costume de Caillard habillé en jeune homme alors qu’il joue un vieillard, est condamné : « si M. Caillard se costume en jeune homme de dix-huit à vingt ans, comment pourrions-nous croire que Lucas a une fille prête à se marier ? » (la vraisemblance !).

La pièce a eu du succès, on a demandé l’auteur, qui a paru, mais « l’auteur des accompagnemens » n’a pas voulu se faire connaître.]

THÉATRE DU LYCÉE DES ARTS.

La Bascule, opéra comique, en un acte & en prose, mêlé de vaudevilles ; par Gabiot.

L'aurore avec ses doigts de rose vient d'ouvrir les portes de l'orient, ou, pour parler un peu plus naturellement, puisqu'il s'agit d'un opéra comique & d'une intrigue villageoise, le jour paroît à peine, lorsque l'aimable Colin se rend sous la fenêtre de la sensible Georgette. Il n'est rien d'étonnant à cela, l'amour est un bon réveille-matin pour les jeunes gens, & il faut que le cœur soit tout-à-fait sourd pour ne pas l'entendre. Ce qu'il y a de surprennant, c'est que Georgette ne soit pas déjà descendue pour se trouver au rendez-vous en même-tems que son bon ami Colin. Mais comment y seroit-elle, puisque sa mere, en sortant, a fermé la porte, dont elle a emporté la clef ? Colin s'impatiente ; il appelle, & Georgette se met à la fenêtre pour lui conter tout cela. Eh bien ! lui répond l'amoureux, il y a bon remede à ceci ; attends : « Je vais m'appuyer sur ce bout de la bascule, l'autre va jusqu'à ta fenêtre ; assieds-toi dessus, & je te descendrai tout doucement. »

Georgette suit ce conseil, & voilà Georgette dans la rue, où elle trouve que la bascule est un fort bon moyen pour sortir d'une maison sans avoir besoin de clef, & où elle paie à Colin les fraix du voyage, en lui donnant un doux baiser. Ils parlent ensuite de leurs petites affaires. Que t'a dit ta mere au sujet de notre mariage ? lui demande Colin. Elle m'a tourné le dos, en m'opposant que j'étois trop jeune. Mais ton oncle le Bailli, que t'a-t-il répondu ? Il m'a ri au nez, reprend tristement Colin. Nous voilà bien avancés ! Mais comment cela ne seroit-il pas ? La mere Mathurine aime Colin, & le Bailli est amoureux fou de Georgette. Voici donc bien des entraves, car le Bailli & Mathurine qui surviennent, & qui savent que nos jeunes gens s'aiment, vont les enfermer de nouveau chez eux.

Cependant Mathurine voudroit bien pouvoir entretenir Colin pendant quelques instans, & le Bailli ne sauroit vivre sans voir Georgette. Comment arranger tout cela ? Rien de plus simple. Le Bailli parle de mariage à Mathurine, qui feint de ne pas rejetter sa proposition. Lorsqu'il sera permis au vieux pénard d'aller chez la mere, il pourra trouver le moyen de se rapprocher de la fille ; & lorsque Mathurine entrera librement, il faudroit qu'elle fût bien mal-adroite, si, sous quelque prétexte, elle ne parvenoit pas à l'écarter pour avoir un tête-à-tête avec le charmant Colin. Ainsi donc, sans avoir la moindre envie de s'unir l'un à l'autre, le Bailli & Mathurine conviennent d'aller chez le tabellion faire dresser leur contrat.

Le pere Lucas, qui a tout entendu, & qui croit que nos gens sont de bonne-foi, laisse partir le Bailli, & arrête Mathurine, qui lui avoue qu'elle ne fait que ruser pour se rapprocher de Colin. Ce nouveau projet de mariage n'est pas plus agréable à Lucas que celui du Bailli ; car, que lui importe que Mathurine épouse l'oncle ou le neveu, puisque, dans l'un & l'autre cas, il lui sera impossible, à lui qui, par amour ou par intérêt, fait depuis long-tems la cour à Mathurine, d'obtenir la main de cette veuve ? Il faut donc aussi qu'il intrigue à son tour pour empêcher tout cela. Que fait-il ? Il promet à Mathurine & au Bailli de seconder leurs vues, & il se dispose en même-tems à les tromper l'un & l'autre.

C'est pour cela qu'il va chez Colin, qu'il le fait sortir à l'aide de la bascule, & qu'il lui apprend tout ce qui se passe. O ciel ! comment se tirer de ce terrible embarras ? Le Bailli lui-même en fournira le moyen. Il arrive, il fait part à Lucas du grand désir qu'il a de voir Georgette ; mais comment pénétrer chez elle ? Rien de plus simple, lui dit Lucas, mettez-vous sur cette bascule ; pour vous obliger, je passerai sur l'autre bout, je vous éleverai jusqu'à la hauteur de la fenêtre de votre maîtresse, & vous pourrez ainsi pénétrer dans la maison.

Le Bailli donne dans le piege : Lucas l'éleve ; mais faisant tourner la bascule sur son point d'appui, il l'éloigne de la terre & de la fenêtre autant qu'il lui est possible. Alors Mathurine, le tabellion, le magister, Colin & Georgette paroissent. Ils reprochent au Bailli ses mauvaises intentions, & le menacent d'appeller tout le village pour le couvrir de honte, s'il refuse de donner son consentement au mariage de son neveu avec Georgette, & à celui de Mathurine avec Lucas. Le Bailli fait des difficultés. A la bonne heure qu'il cede la fille, mais la mere, c'est impossible ; il vient de signer un contrat qui l'engage. N'importe, dit Mathurine, je suis encore assez jeune pour ne vouloir pas du refus de ma fille. Comment, M. le Bailli, s'écrie alors le tabellion, vous qui êtes chargé de maintenir la décence & les bonnes mœurs, vous vouliez séduire & corrompre l'innocence ? J'en suis fâché; mais je suis obligé d'en prendre acte, & d'en dresser procès-verbal à telles fins que de droit. Après de semblables menaces, que peut faire le Bailli ? Rien ; aussi consent-il à tout ; & il faut convenir, lecteur bénévole, que si vous eussiez été à sa place, vous en auriez fait tout autant.

Mais si vous eussiez été à celle de l'auteur de la Bascule, vous auriez sans doute un peu plus soigné votre style ; vous vous seriez piqué d'être plutôt poëte que versificateur, & vous n'auriez pas voulu, dans un sujet qui produit de l'effet au théâtre, employer la même ruse qui a déjà amené les dénouemens forcés, des Vendangeurs & d'Arlequin machiniste. Pourquoi donc l'auteur n'a-t-il pas fait ce que très-certainement vous n'auriez pas manqué de faire ?

A l'ensemble près, cette piece a été bien rendue par les différens acteurs. Nous ferons observer à M. Caillard, que le rôle du pere Lucas ne doit pas être joué avec le costume d'un jeune homme, & cela parce que le pere Lucas nous apprend lui même qu'il est veuf, & que sa fille est sur le point d'épouser Jeannot. Or, si M. Caillard se costume en jeune homme de dix-huit à vingt ans, comment pourrions-nous croire que Lucas a une fille prête à se marier ?

Quoi qu'il en soit, la Bascule a réussi, & on en demanda l'auteur, qui parut. Le public désiroit encore de voir l'auteur des accompagnemens ; mais il ne jugea pas à propos de se faire connoitre.

La Bascule avoit déjà paru, il y a quelque-tems, sur le théatre de l'Ambigu comique ; mais n'étant pas imprimée, & l'auteur y ayant fait des changemens très-considérables, nous avons pu la considérer comme une piece nouvelle.

César : l'auteur est Jean-François Mussot, dit Arnould. La pièce a été créée le 12 février 1791 au Théâtre de l'Ambigu-Comique, où elle a été jouée 74 fois jusqu'au 23 janvier 1793(53 fois en 1791, 20 fois en 1792 et 1 fois en 1793). Reprise le 13 septembre 1793 au Théâtre du Lycée des Arts, elle y a été joué 28 fois jusqu'au 18 mars 1794. Elle reparaît à l'Ambigu-Comique le 22 octobre 1793 où elle est jouée 65 fois jusqu'au 22 mars 1799 (7 fois en 1793, 20 fois en 1794, 22 fois en 1795, 3 fois en 1796, 8 fois en 1798, 5 fois en 1799). Et le Théâtre du Vaudeville la joue une fois le 14 juin 1795. soit 168 représentations.

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