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Les Chevaliers de Malte, ou l'Ambassade à Alger

Les Chevaliers de Malte, ou l'Ambassade à Alger, mélodrame en trois actes et à grand spectacle de Monperlier et *** [Hyacinthe Albertin et J.-B. Dubois], musique de Leblanc, ballet de Hullin, 4 novembre 1813.

Théâtre de la Gaîté.

La pièce a d'abord été jouée à Lyon, au Théâtre des Célestins, au début du mois de mars 1813.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, 1818 (nouvelle édition) :

Les Chevaliers de Malte, ou l'Ambassade à Alger, mélodrame en trois actes et à grand spectacle, Par MM. Monperlier et ***, musique de M. Leblanc, ballet de M. Hullin, Représenté pour la première fois à Paris, sur le Théâtre de la Gaîté le 4 novembre 1813.

Journal des arts, des sciences, et de littérature, Volume 12, n° 211 (Quatrième année) du 15 mars 1813, p. 356 :

[Les Chevaliers de Malte sont une production lyonnaise, et le critique parisien ne se prive pas du plaisir d'ironiser sur l'œuvre, qui utilise tous les poncifs du genre, « un traître bien noir, bien terrible ; des conjurés, et surtout des déguisemens : moyen admirable et facile, sans lequel les inventeurs ne pourraient réussir », et sur l'auteur, à la fécondité extraordinaire. La pièce a eu droit à un très grand article dans le Journal de Lyon, et elle est défendu ardemment par « les amis de l'auteur », au point que le journal prévient les critiques du danger qu'il y aurait à ne pas la louer.]

Dans les premiers jours du mois, il a été représenté, au théâtre des Célestins, à Lyon, une pièce à grand spectacle, intitulée : Les Chevaliers de Malte, ou les Français à Alger. Ce mélodrame est encore de M. Montperlier, qui, décidément en fait un toutes les semaines. On y trouve un traître bien noir, bien terrible ; des conjurés, et surtout des déguisemens : moyen admirable et facile, sans lequel les inventeurs ne pourraient réussir. La pièce a produit de l'effet, grâce aux nombreuses invraisemblances qu'elle renferme. Le Journal de Lyon assure que les amis de l'auteur portent aux nues cette nouvelle production ; puis il ajoute : « Malheur aux critiques qui s'aviseront de n'être pas de l'avis de ces messieurs ! » L'analyse des Chevaliers de Malte occupe cinq colonnes du Journal de Lyon. Rien n'est plus naturel, puisque le mélodrame de M. Montperlier est une production nationale. On ne saurait jamais trop s'occuper des mauvaises ou des bonnes œuvres de ses compatriotes.

Journal de Paris, n° 309 du 5 novembre 1813, p. 1-2 :

[Le compte rendu s'ouvre par le traditionnel de l'intrigue, une histoire amoureuse située à la frontière entre Arabes et Chrétiens : un chevalier de Malte amoureux de la sœur du dey d'Alger (et le critique en profite pour souligner une erreur des auteurs : un dey n'est pas un roi !) qui est devenu musulman, a eu un enfant et s'est mis au service du dey. La pièce raconte, à partir de là, le retour du « transfuge » à ses devoirs de chrétien. Il pourra conserver son épouse musulmane, qui accepte de se convertir et est récompensé par le poste d'ambassadeur après du dey. La pièce a été crée à Lyon, création présentée comme un essai permettant de corriger la pièce. Elle a connu en province un succès que surpasse encore celui de Paris. L'auteur pourtant n'a pas su faire une intrigue vraisemblable, il ne connaît ni les « mœurs du Levant », ni les règles de l'ordre de Malte. Mais cela ne trouble pas le public, sensible à l'intérêt qui « se soutient jusqu'à la fin ». Style, décors, costumes, tout est soigné? Quant au ballet,il comporte « deux pas d'une originalité piquante ». Les auteurs sont nommés, y compris le peintre des décors.]

THÉATRE DE LA GAIETÉ.

Première représentation des Chevaliers de Malte, ou l'Ambassade à Alger,
mélodrame en trois actes, à grand spectacle.

Infidèle à son Dieu, parjure à ses sermens, le jeune Edouard Dorvillé, chevalier de Malte et neveu du grand-maître, est entré au service d'Ibrahim, dey d'Alger (auquel on donne le titre de roi). Des exploits brillans, d'importans services ont illustré le nom d'Almanzor qu’Édouard a adopté, et lui ont mérité l'amitié et la confiance d'Ibrahim. Quel motif a pu déterminer un chrétien, un chevalier de Malte à consacrer aux éternels ennemis de sa foi et de son ordre l'épée dont on ne l’avait armé que pour les combattre. L'amour a causé son crime. Il adore la belle Almaïde, sœur d'Ibrahim ; il en est aimé, et de cette tendre et secrète union il est résulté un petit musulman.

La faveur dont jouit Almanzor auprès du dey excite la jalousie des courtisans. Osmin, aga des janissaires, a juré sa perte, et le traître ose même conspirer contre son souverain.

Sur ces entrefaites, une ambassade arrive à Alger ; elle est composée de plusieurs chevaliers de Malte, à la tête desquels figure le grand-maître, oncle d'Edouard. Ils réveillent dans le cœur du transfuge la voix de l'honneur et de la religion, et le déterminent à retourner à Malte avec eux. L’amour n’aura point à gémir de sa résolution, puisqu'Almaïde consent à le suivre et à se faire chrétienne. Le projet de leur fuite est découvert, Ibrahim va prononcer l’arrêt de mort des coupables ; mais tout a coup la conspiration d'Osmin éclate, et le dey perdait le trône et la vie sans la bravoure des chevaliers qui le sauvent de la fureur des conjurés. Le reconnaissant Ibrahim rend la liberté aux esclaves chrétiens, et le grand-maître qui avait depuis longtemps obtenu des dispenses pour le mariage d'Edouard avec une certaine Félicie, consent au mariage d'Edouard avec Almaïde, et le nomme ambassadeur auprès du dey d'Alger.

Cette pièce est une production de !’industrie lyonnaise ; M. de Montperlier a établi à Lyon une fabrique d’ouvrages dramatiques dont il expédie de temps en temps quelques-uns à Paris. Pour les rendre plus dignes d’un théâtre de la capitale, il prend la précaution de les faire essayer sur celui des Célestins, et nous les recevons revus et corriges.

Les Chevaliers de Malte ont été déjà représentés à Lyon avec un succès très flatteur, mais moins brillant encore que celui qu'ils viennent d'obtenir à Paris ; la pièce n'a rien perdu à voyager. L'action n'en est pas très vraisemblable ; il est même permis de penser que l'auteur n'a pas une connaissance bien exacte des mœurs du Levant, ni des lois et des statuts qui gouvernaient l’ordre de Malte ; mais à ces bagatelles près, son mélodrame a des droits aux suffrage des amateurs. Il présente un intérêt qui se soutient jusqu’à la fin. Le style en est assez pur, mais ce qui doit bien plus que le style lui donne une .grande vogue, c'est le soin dispendieux avec lequel il est monté. Les costumes sont de la plus grande richesse, et les décorations ne le cèdent point aux costumes ; celle du troisième acte surtout est d’un bel effet.

M. Hullin, pour faire sa paix avec le public, lui a offert le cadeau d’un très-joli ballet, où l'on a remarqué deux pas d’une originalité piquante. La musique est de M Leblanc, et les décors ont été peints par M. Allaux. Les chevaliers de Malte, parmi tous leurs vœux, ne faisaient point celui de pauvreté ; ainsi les chevaliers de la Gaieté pourront s'enrichir sans scrupule.

A. Martainville.          

Journal des arts, des sciences, et de littérature, Volume 15, n° 258 (Quatrième année) du 10 novembre 1813, p. 184-185 :

[Après l'article consacré en mars à la représentation lyonnaise, c'est la création parisienne qui fait l'objet d'un compte rendu un peu condescendant. L'intrigue est résumée de façon assez précise, mais pour en montrer le caractère « assez bizarre ». Le chevalier devenu musulman redevient chrétien, et épouse la princesse à laquelle il a fait « un enfant de l'amour », ce qui oblige le critique à évoquer celle qu'il aurait dû épouser, et qui a la noblesse d'âme de renoncer à son beau fiancé. Pour le critique, ce rôle est inutile, et pourrait être supprimé. Sinon, il fait l'éloge de la mise en scène (décors, costumes, ballets, « explosion d'un vaisseau »). Les acteurs ont bien joué, même s'ils auraient pu crier un peu moins.]

THÉATRE DE LA GAITÉ.

Les Chevaliers de Malte ou l'Ambassade à Alger, mélodrame en trois actes par M. Montperlier, musique de Leblanc, ballets de Hullin.

La ville de Lyon ne se borne pas maintenant à nous envoyer ses étoffes, elle nous expédie aussi des vaudevilles et des mélodrames de la fabrique de M. Montperlier. L'auteur, il est vrai, réclame lui-même l'honneur de voir ses productions retouchées par un confrère de Paris, ce qui prouve combien les littérateurs de province sont modestes.

Voici le sujet des Chevaliers de Malte ; on va voir que la combinaison en est assez bizarre.

Le chevalier Edouard d'Orville a abandonné la croix pour le turban, et J. C. pour Mahomet. L'amour l'a rendu ingrat envers le grand-maitre, son oncle et son bienfaiteur, qui le croit mort, tandis que sous le nom d'Almanzor, il est devenu l'un des principaux seigneurs de la Cour d'Ibrahim, dey d'Alger. La faveur dont jouit le chevalier renegat est telle qu’Ibrahim, devenu veuf sans héritier, a déclaré qu'Almanzor serait son successeur. Alınaïde, sœur du souverain, a poussé de son côté l'attachement encore plus loin, car de sa tendresse et de celle d'Almanzor, est résulté un enfant de l'amour. Le chef des janissaires, doublement jaloux d'Almanzor, a juré sa perte, et n'a pas oublie d'ourdir, comme cela se doit, une conspiration bien noire contre Ibrahim, afin de s'emparer du trône. Sur ces entrefaites, arrivent une douzaine de chevaliers de Malte, nommés ambassadeurs auprès d'Ibrahim : à leur tête est le grand-maître. – Almanzor, ou plutôt Edouard, est reconnu, on le ramène à la foi de ses pères, et oubliant tout ce qu'il doit à son ami Ibrahim, il se résout à le quitter, ainsi qu'Almaïde et son enfant. Mais le complot est découvert : -Ibrahim menace de toute sa vengeance les coupables ; on tremble-déjà pour eux....... Tout à coup, Ibrahim est assailli par les janissaires; il périrait victime de leur lâche trahison, sans le secours des généreux chrétiens.

Des chevaliers français , tel est le caractère !

Almaïde, devenue chrétienne, épouse Edouard dont les vœux sont relevés, Ibrahim cède à la reconnaissance ; mais comme il ne saurait se passer d'Edouard, le grand-maître nomme celui-ci ambassadeur à Alger.

Je n'ai rien dit d'une femme qui, sous les habits de chevalier, joue un rôle assez étrange et parle le langage des coulisses plutôt que celui de la scène. Elle a été promise à Edouard, mais elle renonce à ses prétentions en faveur d'Almaïde. Sa présence est absolument inutile, et l'on ferait bien de supprimer ce personnage. Il y a de beaux effets dans le mélodrame, on l'a d'ailleurs orné de belles décorations, de costumes nouveaux, de ballets et de l'explosion d'un vaisseau. Depuis long-temps, le public de la Gaité n'avait été témoin d'un succès aussi complet que celui-ci.

Marty et Lafargue ont fait valoir les rôles d'Edouard et d'Ibrahim ; ils crient un peu de temps en temps l'un et l'autre, mais ils sont excusables, car aux boulevarts, c'est le plus sûr moyen d'être applaudi, et les applaudissemens justifient tout. Le ballet est très-brillant et executé d'une manière satisfaisante par Barré, Mlle. Legros et Marty.

S.          

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