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Dancourt, ou la Poste aux Quiproquos

Dancourt, ou la Poste aux Quiproquos, vaudeville en un acte, d'Armand Gouffé et Georges Duval, 6 thermidor an 8 [25 juillet 1800].

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Dancourt, ou la Poste aux quiproquos

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

 

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

6 thermidor an 8 [25 juillet 1800]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Armand Gouffé et Georges Duval

Courrier des spectacles, n° 1239 du 7 thermidor an 8 [26 juillet 1800], p. 2 :

[Le personnage au centre de la nouvelle pièce est un comédien de la fin du 17e siècle, et le critique ouvre son compte rendu par un rappel de qui il était, et de la gloire dont il était honoré. La pièce repose sur une anecdote qui est une véritable machine à quiproquos, les personnages de la pièce étant pris tour à tour pour un autre par une aubergiste imaginative. Cette cascade de quiproquos se résout avec une grande facilité, chacun retrouvant son identité à la grande surprise de l'Hôtesse. Le critique se contente de « reconnaître beaucoup de facilité dans les couplets », allant jusqu'à la grâce et l'esprit. Il en cite un second, après celui qu'il avait cité d'entrée, avant de dire que la deuxième représentation devrait mieux se passer que la première, sans doute houleuse, et il donne les moyens d'améliorer la pièce (des acteurs sachant leur rôle, plus de longueurs, et des costumes pour ces dames permettant de rendre plus vraisemblable la confusion que commet l'hôtesse entre la fille du lieutenant de police et madame Dancourt. Les noms des auteurs sont donnés sans commentaire.]

Théâtre du Vaudeville.

Dancourt, né en 1661, destiné d’abord à entrer dans la société des Jésuites, avoit préféré le barreau. Mais bientôt il le quitta pour le théâtre, où il fit briller ses talens comme auteur et comme acteur. Ce que Regnard étoit à l’égard de Molière dans la haute comédie, Dancourt l’étoit dans la farce. A ce trait qu’il nous soit permis d’ajouter celui-ci :

Air : J’ai vu partout dans mes voyages.

Depuis vingt ans la France entière
De Molière portoit le deuil,
Momus, sans oublier Molière,
Montra Dancourt avec orgueil.
Molière garde chez Thalie
Un rang qui n'est pas disputé ;
Si Molière a plus de génie,
Dancourt n’a pas moins de gaité.

Une anecdote plaisante de la vie de ce célèbre comédien a fourni le sujet de la pièce donnée hier avec succès à ce théâtre sous le titre de Dancourt, ou la Poste aux Quiproquo.

Dancourt se disposant à jouer à Nantes un rôle de marquis, entra sur la scène avec l’acteur qui, chargé ordinairement de ce rôle, ne voulut point ce jour-là permettre qu’il le jouât. De-là une querelle, un souflet, un coup d'épée ; Dancourt vainqueur , s’enfuit avec la Thorillière, et tous deux sans avoir eu le tems de changer d’habits, arrivent à l’auberge de la Poste, sous le costume l’un de Marquis, l’autre de Frontin. Quelques instans auparavant, le Lieutenant de police de Nantes, dont on venoit d’enlever la fille promise en mariage à un original de Paimbeuf, étoit venu à la recherche dans la même auberge. Les renseignemens qu’il a donnés sur les ravisseurs, les noms de marquis, l’habit richement galonné, un air mystérieux, tout fait croire à l’hôtesse que Dancourt et la Thorillière sont réellement coupables, et elle les enferme sous clef dans une chambre. L'épouse de Dancourt qui suit les traces de son mari, s’informe de l’hôtesse si il [sic] est arrivé ; celle-ci qui la prend pour la fille du Lieutenant de police, veut en l’enfermant dans une chambre séparée, s’assurer d’elle, et la remettre entre les mains de celui qu’elle croit son père. L’oubli de la clef la force de descendre ; madame Dancourt va au-devant de son mari dont on lui a caché l'arrivée, tandis que la véritable fille du Lieutenant de police arrive dans l’auberge, où elle cherche un asyle contre ses ravisseurs. L’hôtesse trompée par la ressemblance, s’imagine voir la même personne qu’auparavant, et elle lui ouvre la chambre. Ainsi assurée de sa prisonnière, elle va pour en instruire la maréchaussée, lorsque le gendre prétendu lui annonce l’arrestation de la fille du Lieutenant de police. Elle soutient l’avoir enfermée sous clef, il lui assure qu’elle est prisonnière ailleurs.

Dancourt et la Thorillière sortent et s’amusent aux dépens du prétendu, aux dépens du Lieutenant de police lui-même, qui les traite de fripons et qui les menace de les faire punir. Dancourt croit que c’est pour son duel : mais quand le Lieutenant parle de fille enlevée, Dancourt, que sa femme vient de rejoindre, se nomme, et par un mot d’explication, fait cesser le quiproquo. L’Hôtesse toute ébahie , va ouvrir à la prisonnière , et le Lieutenant de police retrouve sa fille.

On ne peut s’empêcher de reconnoître beaucoup de facilité dans les couplets ; quelques uns sont faits avec grâce et avec esprit ; nous citerons entr'autres celui-ci :

Air : Aimé de la belle Ninon.

C’est assez que le souvenir
Souvent nous pèse et nous désole ;
Il faut savoir dans l'avenir
Trouver un point qui nous console.
On ne doit prévoir que le bien ;
Assez tôt le mal nous arrive ;
Du moins puisqu’il n'en coûte rien,
Embellissons la perspective.

La seconde représentation de ce vaudeville plaira sans doute d’avantage ; les rôles mieux sçus, quelques légères coupures dans des sènes [sic] trop longues, et sur-tout plus de ressemblance entre les habits de madame Dancourt et de la fille enlevée, tout, nous osons le prédire, contribuera à un succès encore plus décidé. Les auteurs sont les citoyens Armand- Gouffé et Georges-Duval.

F. J. B. P. G ***.          

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 6e année, 1800, tome II, p. 425-426 :

[Le succès de la pièce est, avec le nom des auteurs et la date de création, la première information que donne le compte rendu, avant le résumé d’une intrigue riche en quiproquos, résolus de façon facile (mais le critique ne dit pas ce qu'il pense de ce dénouement). Le jugement porté ensuite est équilibré : des longueurs (comme d’habitude !), mais les couplets en compensent l’effet négatif (« du comique et de jolis couplets, souvent originaux, quelquefois trop contournés ». Sont également critiqués l’abus de l’éloge de Dancourt (dont la gloire éclipse ainsi le travail des auteurs) et le style, trop peu soigné, et parfois trivial et équivoque (la morale, toujours la morale !). Deux des interprètes sont distingués.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Dancourt ou la Poste aux quiproquos.

C'est le début des CC. Armand Gouffé et Georges Duval au théâtre du Vaudeville ; leur pièce a été jouée le 6 thermidor avec succès.

Dancourt, se disposant à jouer à Nantes un rôle de marquis, entra sur la scène avec l'acteur ordinairement chargé du rôle, parla le premier, reçut un soufflet, répondit par un coup d'épée, et s'enfuit tout habillé avec la Thorillière son beau-frère. Ils arrivent à Meaux, et attendent à la poste M.me Dancourt qui doit venir les y joindre : arrive presque en même temps le lieutenant de police de Nantes, avec un original de Painbeuf destiné à sa fille, qu'un prétendu marquis lui a enlevée. L'hôtesse prend Dancourt pour le frippon, l'enferme d'un côté, et, tandis qu'elle va chercher une clef-pour enfermer aussi M.me Dancourt qui est survenue, et qu'elle prend pour la fille enlevée, celle-ci arrive. M.me Dancourt la laisse, et l'hôtesse l'enferme, trompée par sa ressemblance. Mais le futur de Painbeuf a fait arrêter M.me Dancourt au sortir de l'auberge, la prenant pour sa prétendue qu'il ne connoît pas. Tout s'explique à l'arrivée du lieutenant qui reconnoît sa fille, et qui apprend à Dancourt que son antagoniste est hors de danger. Quelques longueurs de situation sont rachetées par du comique et de jolis couplets, souvent originaux, quelquefois trop contournés. L'éloge de Dancourt est trop souvent répété : c'est alors lui qu'on applaudit, et non pas les auteurs. On pourroit encore reprocher aux auteurs de n'avoir pas assez soigné leur style, et d'y avoir laissé des phrases équivoques et triviales. Le C. Carpentier a déployé beaucoup de comique dans le joli rôle du prétendu de Painbeuf, ainsi que M.me Duchaume dans celui de l'hôtesse.

L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-neuvième année, tome XII, fructidor an VIII [août-septembre 1800], p. 192-195 :

[Un vaudeville à succès, sur un acteur du XVIIe siècle. Le compte rendu s’ouvre sur l’habituel résumé de l’intrigue, que le critique juge ensuite peu neuve. mais la pièce est plaisante et bien dialoguée. Malheureusement, la représentation n’est pas à la hauteur : des actrices mal costumées au point d’empêcher l’indispensable illusion, et des interprètes qui ne savent pas leur rôle. Réussir dans ces conditions est un exploit. La fin de l’article cite des couplets redemandés ou vivement applaudis.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Dancour marquis, ou la Poste aux quiproquos.

La première représentation de ce vaudeville a obtenu dernièrement beaucoup de succès.

Dancour, auteur-acteur, a une affaire d'honneur au moment où il va entrer en scène sur le théâtre de Nantes ; il blesse son adversaire, & croyant l'avoir tué, il s'enfuit précipitamment sous le costume du Chevalier à la mode, & suivi de son camarade & ami Latorilliére, qui est déguisé en Frontin. D'un autre côté, la fille du lieutenant de police de Nantes est enlevée par un marquis, & le magistrat met tous ses gens à la poursuite du ravisseur. Les personnes qui courent après le marquis, arrivent précisément dans l'auberge où se trouvent Dancour & son ami ; trompées par les apparences, elles prennent ces deux fugitifs pour les auteurs du rapt, & elles avertissent aussitôt le lieutenant de police, gui vient lui-même s'assurer des faits. De cette situation naissent plusieurs autres quiproquos : on prend l'épouse de Dancour pour la demoiselIe enlevée, mais cette dernière se fait connoître, & l'on découvre enfin la vérité. Le lieutenant de police, heureux d'avoir retrouvé sa fille, fait mille amitiés au célèbre Dancour ; lui apprend que son adversaire n'est pas mort de sa blessure, & l'engage à revenir à Nantes, où le public regrette vivement son absence.

Tel est le sujet de cette pièce. L'intrigue n'en est peut-être pas neuve, mais elle donne lieu à des scènes si plaisantes, si bien dialoguées, qu'on fait grâce au fond en considération des détails. Le succès de ce vaudeville en fait d'autant plus l'éloge, que deux circonstances sembloient devoir s'opposer à ce qu'il réussit. Les deux actrices qu'on devoit prendre l'une pour l'autre, s'étoient habillées d'une manière tout-à-fait disparate, ce qui détruisoit jusqu'à la possibilité de l’illusion ; & la plupart des acteurs n'étant pas sûrs de leur mémoire, sembloient plutôt répéter que jouer leurs rôles.... Honneur à la pièce que de pareils inconvéniens ne font pas tomber tout à plat !

Parmi les couplets qui ont été redemandés, ou vivement applaudis , nous avons remarqué les suivans : Dancour & Latorillière réfléchissent sur le sort qui leur est réservé :

DANCOUR.

AIR : Aimé de la belle Ninon.

C'est assez que le souvenir
Souvent nous pèse et nous désole,
Il faut savoir dans l'avenir
Trouver un point qui nous console :
On ne doit prévoir que le bien,
Assez tôt le mal nous arrive ;
Du moins, puisqu'il n'en coûte rien,
Embellissons la perspective.

LATORILLIÈRE.

AIR : Trouverez-vous un parlement ?

Je ferai reconnoître en moi
Le fils de ce Latorillière,
Qui des valets tenoit l'emploi,
Et figuroît avec Molière.

DANCOUR.

Près de lui ton père, en effet,
Avec honneur a su paroître ;
Mais conviens, s'il fut bon valet,
Que Molière fut un
bon maître.

Quelques personnes pensent que le mot grand eût été préférable à celui de bon, & nous sommes de cet avis.

Lorsque Dancour est découvert, les hommes qui le prenoient pour un voleur, chantent en chœur, sur l'air de la Chimène, contredanse :

Ah vraiment ! la méprise est unique,
Et la faute indigne de pardon ;
C'est Dancour, cet aimable comique,
    Que l'on prenoit pour un fripon.

DANCOUR.

Ah! sans peine ici je vous excuse,
        De prendre un auteur
            Pour un voleur ;
Bien souvent le public qui s'abuse,
            Prend un voleur
            Pour un auteur.

Les auteurs ont été demandés & nommés ; ce sont les CC. Armand-Gouffé & Duval.

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