Dorval ou le Fou par amour, drame historique en un acte, en vers, de Ségur jeune, 29 janvier 1791.
Théâtre de la Nation.
-
Titre :
|
Dorval ou le Fou par amour
|
Genre
|
drame historique
|
Nombre d'actes :
|
1
|
Vers / prose
|
en vers
|
Musique :
|
non
|
Date de création :
|
29 janvier 1791
|
Théâtre :
|
Théâtre de la Nation
|
Auteur(s) des paroles :
|
Ségur jeune
|
Sur la page de titre de la brochure :
Le Fou par amour, drame historique, en un acte et en vers ; Par M. de Ségur, (ci-devant Vicomte de). Représenté, pour la première fois, sur le théâtre de la Nation, le 29 Janvier 1791.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1791, volume 3 (mars 1791), p. 309-312 :
[Une pièce sur un sujet « à la mode » (on refait Nina, en mettant un homme là où il y avait une femme, et vice versa). Pièce qui n’a « ni intrigue, ni dénouement » (ce qui permet de voir ce qui n’est pas un dénouement pour le critique). Mais le jugement porté est plutôt positif : « en un mot, cet ouvrage est agréable, & le style, sans être également soigné par-tout, offre des traits saillans & des vers bien faits ».
La Nina ou la Folle par amour est le drame lyrique de Marsollier, musique de Dalayrac, créé en 1786 à l'Opéra-Comique, et qui a connu un grand succès.]
THÉATRE DE LA NATION.
Une anecdote connue, & mise au jour dans un tems où le succès de Nina engageoit à faire des recherches sur les personnes à qui l'amour avoit fait perdre la raison, a fourni le sujet de Dorval ou le Fou par amour, comédie en un acte, en vers, donnée le 29 janvier, sur ce théatre.
Dorval, jeune officier, blessé dans une bataille, a été porté dans un hôpital, où des sœurs charitables lui prodiguent tous les soins de l'humanité. Dorval rétabli, devient amoureux de sœur Adélaïde, qui le paie de retour : mais la mort enleve cette amante chérie. Dorval perd soudain la raison, & sa folie est d'autant plus singulière, qu'il s'imagine voir sans cesse Adélaïde à ses côtés, qu'il lui parle, qu'il la suit & semble entendre ses réponses. Un homme riche & compatissant, voisin de l'hôpital où Dorval a perdu celle qu'il adoroit, prend chez lui cet infortuné jeune-homme, &,cherche, avec le secours d'un médecin, à le guérir de sa folie. Cet honnête homme a une fille, qui sonpire en secret pour Dorval ; & comme elle a connu Adélaïde, elle a imaginé de dessiner ses traits de mémoire, pour distraire Dorval du fantôme qui le poursuit. Cette scene est délicieuse : Dorval, assis avec sa jeune amie sur un banc de gazon, l'engage à prendre son crayon, & à bien saisir la ressemblance d'Adélaïde qu'il voit, & qu'il croit également visible pour tout le monde; mais il désespere d'en avoir un portrait bien ressemblant. Cette crainte lui fait dire ce joli vers :
Sa grace est son secret, cessons de le chercher.
Il sait bien qu'elle est morte ; mais il croit l'avoir ressuscitée. Hélas ! dit-il,
Si je ne l'eusse arrachée au cercueil,
Tout l'univers seroit en deuil !
Cependant le médecin, qui apperçoit un rapprochement singulier entre les traits de la jeune amie & ceux. d'Adélaïde, engage la premiere à prendre l'habit d'une sœur hospitaliere, & à se présenter, au clair de la lune, aux yeux de Dorval, que cette espece d'apparition peut guérir. Son conseil est suivi : mais l'infortuné, saisi, frappé d'étonnement, ne peut que dire, avec un cri de désespoir : Ciel ! j'en vois deux !... Ce mot connu termine la piece, & le rideau tombe.
On voit que cet ouvrage n'offre ni une comédie ni un drame, puisqu'il n'a ni intrigue ni dénouement ; mais on y remarque des scenes fort agréables, & l'on y éprouve un intérêt qui va jusqu'à arracher des larmes. Forcé de donner à l'actrice le tems de s'habiller en sœur hospitaliere, l'auteur a mis dans la bouche de Dorval un monologue trop long, mais bien versifié. L'insensé se croyant toujours avec Adélaïde, apperçoit son valet ; & craignant qu'on ne forme des soupçons sur ce qu'il appelle un tête-à-tête, il lui dit :
N'allez pas soupçonner sa vertu, sa décence,
Ces momens sont bien doux, mais remplis d'innocence.
Ces deux vers ont été applaudis à deux reprises, parce qu'ils portent le cachet de la délicatesse. En un mot, cet ouvrage est agréable, & le style, sans être également soigné par-tout, offre des traits saillans & des vers bien faits. On a demandé l'auteur, & M. Fleury a nommé M. de Segur cadet. M. Fleury mérite beaucoup d’éloges, pour le jeu & l'abandon qu'il a mis dans le rôle de Dorval ; & Mde. Petit a joué celui de la jeune amie avec sensibilité, naïveté & décence, trois qualités qui rendent cette actrice de plus en plus chere au public.
D’après la base César, la pièce de Ségur a été jouée 5 fois au Théâtre de la Nation, du 29 janvier au 21 février 1791.
Ajouter un commentaire