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La Dédaigneuse

La Dédaigneuse, comédie en trois actes et en vers, de Pierre-Jean Duret, 8 frimaire an 12 [30 novembre 1803].

Théâtre Français.

Le nom de l’auteur est donné par l’Opinion du parterre, repris dans la base Cesar.

Titre :

Dédaigneuse (la)

Genre :

comédie

Nombre d'actes :

3

Vers / prose ?

en vers

Musique :

non

Date de création :

8 frimaire an 12 [30 novembre 1803]

Théâtre :

Théâtre Français

Auteur(s) des paroles :

Duret

Almanach des Muses 1805

La fable de la fille à marier mise en action. Pièce qui n'a obtenu qu'une représentation.

En fait, la base La Grange lui attribue quatre représentations.

Courrier des spectacles, n° 2461 du 9 frimaire an 12 (1er décembre 1803), p. 2 :

[Le critique manque d’enthousiasme pour une pièce dont il souligne les raisons de l’échec : d’abord la moralité de certains personnages, mais aussi les critères habituels : intérêt, nul ; situations comiques, absentes ; bienséances, mises à mal dans les comportements des personnages comme dans le langage. Tout cela justifie la réaction négative du public, des murmures aux sifflets et aux interruptions. Le résumé de l’intrigue montre une intrigue de mariage bien compliquée autour d’un personnage féminin qui refuse tout parti, si bien qu’elle finit par être refusée de celui qu’elle choisit, tandis que, à cause d’elle, sa sœur refuse elle aussi le parti qui se propose. L’article s’achève par l’évaluation des acteurs principaux, jugés de façon positive, avec une réticence marquée pour l’actrice qui joue « le rôle ridicule de Clarice », la dédaigneuse.]

Théâtre Français de la République.

Première représentation de la Dédaigneuse.

Les auteurs dont les ouvrages ont été dédaignés par les Comédiens français doivent se trouver bien vengés par l'accueil que le public fait aux pièces qu’ils ont acceptées ; ils n’ont pu prolonger l’existence de leur pauvre Malade, et la Dédaigneuse vient de mourir subitement.

De sept personnages qui paroissent dans cette comédie deux sont révoltans, Clarice et Marchanze ; deux autres, Déricourt et Lucile, sont fort agréables ; les trois derniers, Delorme, Didier et Lisette, sont insignifians. Nul intérêt dans l’ouvrage, point de situations comiques, les bienséances souvent violées sans produire aucun effet agréable, de la trivialité dans la conduite et quelquefois même dans les expressions, tels sont les défauts qui devoient nécessairement faire tomber cette comédie. Les murmures ont éclaté dès le premier acte ; ils ont bientôt été suivis des sifflets. Les acteurs, souvent interrompus, ont eu beaucoup de peine à finir leurs rôles.

Clarice a dédaigné tous les partis qui se sont présentés pour elle. Arrivée à sa vingt-neuvième année elle n’est point encore corrigée de ce défaut.

Mais son dédain n'avoit pour objet que le sexagénaire Didier et l’étourdi Marchanze, qui à vingt-un ans ne lui convient pas plus que son vieux tuteur, elle seroit plutôt à louer qu’à blâmer ; mais un jeune homme charmant et plein de qualités aimables , Déricourt , qu’elle a distingué cinq ans auparavant, et à qui elle a refusé sa main parce qu’il n’étoit alors que capitaine, revient honoré du grade de colonel, et elle le traite avec le dernier mépris, disons avec la derniere insolence.

Sa conduite est d’autant plus imprudente qu’elle a une sœur charmante. Lucile est naïve, tendre ; cinq années ont ôté des charmes à sa sœur et ont ajouté aux siens. Déricourt a des yeux ; d’ailleurs c'est un militaire estimable qui n’est dans aucun cas fait pour endurer un affront : il trouve une consolation auprès de Lucile. La dédaigneuse, qui est pour le moins autant présomptueuse, ne veut pas croire au nouvel amour de Déricourt ; elle s’efforce de persuader à sa jeune sœur que le dépit seul a fait parler le colonel. La naïve Lucile dit avec toute la grâce de Mlle Mars : C’est possible...

Cependant le vieux Didier, qui avoit chargé Marchange [sic], son pupile, de parler pour lui, fait lui-même ses propositions ; il est éconduit. Marchanze n’a pas été plus heureux pour son propre compte, mais alors il recherche plutôt la fortune de Clarice que son cœur. En moins de deux heures le jeu l’a enrichi, et il est devenu fort dédaigneux à son tour.

Delorme, le pere des deux demoiselles, apprend que Déricourt a vu Clarice, et desire l’entretenir pour affaires importantes. Il conçoit l’espoir de la marier ; Clarice elle-même se flatte de régner toujours sur le cœur du colonel. Il la détrompe en demandant la main de Lucile. Notre dédaigneuse ne sait comment en tirer vengeance. Une voix du parterre lui a crié : Epousez Didier. Ne trouvant pas cette recette bonne, elle choisit Marchanze qui la refuse. Didier, plus compatissant, renouvelle ses offres, mais Lucile a trop de fierté pour consentir à une pareille alliance, et sort pleine de dépit.

Fleury a rendu le rôle de Déricourt avec cette supériorité de talens qu’il a toujours déployée dans les Jeunes Premiers. On ne peut sur-tout donner trop d’éloges à la maniere dont il a dit un monologue, dans lequel il compare les deux sœurs.

Mademoiselle Mars a été elle même dans le personnage de Lucile ; c’est-à-dire la plus parfaite Ingénuité que nous ayons vu-paroître sur la scene.

Mademoiselle Mezeray a soutenu autant qu’il lui a été possible le rôle ridicule de Clarice.

Les autres rôles sont peu importans.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an XII, 1er trimestre, n° 8 (20 frimaire), p. 504-505 :

[Article repris dans Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome quatrième, nivôse an XII [décembre 1803], p. 278.

Compte rendu sévère, et centré sur des considération générales plutôt que sur les détails de la pièce : ce qui est en jeu, c’est la politique même du Théâtre Français, qui ne peut attirer le public qu’avec des pièces d’une autre qualité : il ne suffit pas d’adapter des fables de La Fontaine en y mettant « quelques épigrammes légères contre le beau sexe », « quelques détails de versification, assez bien tournés », il faut du vraisemblable (et il semble que le respect de l’unité de temps en fasse partie : il faut plus de vingt-quatre heures pour le déroulement de l'action), de l’action aussi. Il ne reste à sauver de cette pièce que quelques éléments isolés. Inutile de refaire le sujet de la fille qui ne veut pas se marier, il a déjà été traité de Molière à Favart.]

Théâtre Français.

La Dédaigneuse, comédie en trois actes, en vers.

Le répertoire de ce théâtre ne s'enrichira pas avec des pièces telles que la Dédaigneuse. L'auteur a voulu mettre en action la fable du Héron et celle de la Fille difficile de La Fontaine : mais comment n'a-t-il pas senti tout d'abord, en se pénétrant de son sujet, que la fable en récit mettait entre la peinture du caractère et le dénouement de l'action une gradation de tems qui ne pouvait avoir lieu dans une comédie, et qui pourtant est nécessaire à la vraisemblance morale de cette leçon ? De plus il est à peu près constant aujourd'hui que si nous applaudissons à quelques épigrammes légères contre le beau sexe, comme pour nous venger en quelque sorte de l'empire qu'il exerce sur nous, cependant nous nous révoltons assez volontiers contre le projet de lui faire jouer un rôle trop humiliant et trop humilié.....

En supposant même que l'esprit de l'auteur se sentit capable de triompher de ces deux obstacles, n'était-on pas en droit d'exiger que sa Dédaigneuse eût au moins dans son amabilité de quoi motiver les hommages nombreux qu'elle doit ensuite dédaigner ? C'est précisément ce que l'auteur a négligé.

Les comédiens français ne désarmeront pas la sévérité dont le public se glorifie et semble avoir pris l'habitude envers eux, s'ils ne sont pas plus difficiles dans le choix des ouvrages. Celui-ci n'a pu les séduire que par quelques détails de versification, assez bien tournés ; mais l'ensemble de l'action et du coloris aurait dû leur faire présager le sort qu'ils ont fait subir à l'auteur.

Parmi ces détails échappés au naufrage, nous citerons la scène du père et de la fille, où celle-ci lui donne successivement les raisons qui lui ont fait dédaigner tant de partis, et lui trace le portrait de l'époux qu'elle attend pour s'humaniser. Ce portrait est fait à merveille, et les deux vers que lui répond son père, déjà comiques et bien tournés par eux-mêmes, le deviennent davantage par la situation: 

Si ce phénix vécut, il est mort sans famille.
Renoncez à le voir, car vous resteriez fille.

Mais en général c'est un sujet manqué, et ce n'était pas la peine de rappeler l'Armande des Femmes savantes, l'Enfant gâté ou la Belle orgueilleuse de Destouches, la Belle-Arsène de Favart, pour ne faire qu'une esquisse imparfaite de ce caractère.               L. C.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 9e année, 1803, tome IV, p. 260-261 :

[Compte rendu d’un échec d’une pièce qu’on a tenté de sauver en la modifiant, mais en vain (la tentative de modifier une pièce qui a été sifflée, ne marche pas à tous les coups !). Les causes de l’échec sont «  le caractère principal manqué », et l’immoralité de certains détails, qui ne sont pas vraiment des détails d’ailleurs : deux personnages sont mis en cause. On note que le fait qu’ils aient « malheureusement quelques modèles dans la société » n’empêche pas que le public refuse leur présence sur la scène. Il ne suffit pas de « jolis vers, un peu clairsemés » pour sauver une pièce.]

La Dédaigneuse, comédie en trois actes et en vers, a été sifflée, corrigée, rejouée et resifflée. C'étoit la fable de La Fontaine, intitulée la Fille, qu'on avoit voulu mettre en scène; mais, et quelques détails choquans, tels que les rôles d'un fat et d'un vieux financier vraiment immoraux, quoiqu'on en trouve malheureusement quelques modèles dans la société, ont tout-à-fait indisposé le public. De jolis vers, un peu clairsemés cependant, n'ont pu sauver la pièce.

L'Opinion du parterre, germinal an XIII, p. 151-152 :

8 Frimaire.

Première représentation de la Dédaigneuse, comédie en trois actes et en vers, par M. Duret, grand faiseur de petites lignes rimées dans le feuilleton du Bulletin de l'Europe. Chute complète, malgré laquelle la pièce eut quatre représentations.

D’après la base La Grange de la Comédie-Française, la pièce est l’oeuvre de Pierre-Jean Duret et a été jouée quatre fois en 1803, à partir du 30 novembre.

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