Le Dîner au pré Saint-Gervais

Le Dîner au pré Saint-Gervais. comédie en un acte et en prose, de J.-B. Radet et *** [madame Kennens], 29 brumaire an 5 [19 novembre 1796].

Théâtre du Vaudeville.

On cite habituellement comme coauteur une certaine madame Kennens, que je ne connais que par la brève mention qu'en fait madame de Genlis dans ses Mémoires [Paris, 1857], p. 337 : « Madame Kennens, dont l'esprit, la douceur, la sensibilité et le talent d'écrire rendent le commerce si agréable et si sûr ».

Almanach des Muses 1798.

Une des plus jolies bagatelles de ce théâtre. Tableau très-naturel de la partie de campagne d'une famille de bons et honnêtes Parisiens. Il s'y glisse un Gascon qui les amuse beaucoup.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, au Théâtre du Vaudeville, an V, 1797 :

Le Dîner au pré Saint-Gervais, comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, Par J. B. Radet et ***. Représentée pour la première fois, au Théâtre du Vaudeville, le 29 Brumaire an 5 (19 novembre 1796, v. style).

Journal littéraire ; par J. M. B. Clément, de Dijon, première année, tome second, (1797 (an V)), n° XV, du 5 Frimaire, p. 95-96 :

[La pièce est un vrai vaudeville, avec un gascon, une rivalité entre ce gascon et l'amant de la jeune fille de la maison, une lettre de l'amant, un malentendu sur l'auteur et la destinataire de la lettre, et un dénouement heureux, comme d'habitude. Le critique regrette le manque d'action, le peu de piquant des couplets, mais ces reproches ne sont plus fondés après les modifications faites pour la deuxième représentation. L'article s'achève par un couplet (sans doute un de ceux qui « sont très-applaudis »).]

THÉÂTRE DU VAUDEVILLE.

Le 29 du mois dernier, ce théâtre a joué, pour la première fois, le Dîner au Pré Saint-Gervais.

Un bon marchand de la rue St-Denis va dîner au Pré St-Gervais, avec sa femme, sa fille Augustine, M. de Beaussac, parvenu gascon, à qui cette dernière est promise, une cousine cauchoise et son mari. La jeune personne déteste M. de Beaussac,

     Mortel fort haïssable,
        Mauvais plaisant,
     Qui se croit amusant
Par un caquet intarissable.

Elle aime en secret d'Armand, fils d'un fabricant de Lyon, réduit à cultiver comme une ressource nécessaire, l'art de peindre le portrait, dont il faisoit un amusement avant la révolution.

Augustine confie son amour à la cousine ; elle lui montre une lettre de d'Armand. Celle-ci n'a pas le tems de la. lire jusqu'au bout ; leur conversation est interrompue par la réunion de toute la famille ; la cousine garde la lettre. M. de Beaussac a cru délicat de se procurer le portrait d'Augustine, sans qu'elle s'en apperçût ; et pour y réussir, il a fait venir secrètement, au Pré St-Gervais, un peintre qu'il sait, dit-il, être habile à saisir la ressemblance à la volée. Ce peintre est d'Armand, lui-même, qui se prête au projet du gascon, sans se douter qu'il soit son rival. La reconnoissance des deux amans est heureuse et comique.

On s'assied sur le gazon ; on dîne gaiement ; on danse une périgourdine. Beaussac déploie tous ses moyens de plaire et ne parvient qu'à redoubler l'aversion d'Augustine.

La cauchoise, en tirant son mouchoir, laisse tomber la lettre de sa cousine ; le gascon la ramasse, en s'écriant « Ah ! le billet doux ! je tiens un billet doux ! » La prudente cousine le reclame ; Beaussac refuse ; la jalousie du mari s'éveille ; Augustine avoue tout pour détromper son cousin, et tranquilliser la famille que cet incident a troublée. Beaussac n'a plus qu'à solliciter lui-même en faveur de son rival ; c'est le parti qu'il prend, et les parens d'Augustine acceptent d'Armand pour leur gendre.

Cette intrigue, toute légère qu'elle est, suffit assurément pour faire une pièce en vaudeville ; mais il falloit que l'action fût un peu plus vive ; les tableaux présentés sont vrais ; mais ils ne sont point animés ; les couplets ont de la tournure et même une sorte d'élégance ; mais ils ne sont pas assez piquans. Au théâtre du Vaudeville, genre qui ne vit que de saillies, et d'épigrammes, l'oreille attend toujours un trait à la fin du couplet, et quand elle est trompée, l'indifférence ou l'humeur se manifestent.

Au reste, ces reproches sont moins fondés depuis la seconde représentation du Pré S. Gervais, qui a décidé son succès. La pièce marche et finit mieux ; et plusieurs couplets sont très-applaudis. Nous citerons celui-ci, que chante Beaussac pour déterminer M. Dénis à donner sa fille à d'Armand :

Air du Vaudeville des Visitandines.

Un marchand ne doit jamais faire
Que des marchés avantageux.
Or, calculez bien cette affaire ;
Le profit n'en est pas douteux.                              (Bis)
Qu'à moi votre fille s'unisse,
Vous n'aurez fait qu'un seul heureux ;
Avec lui vous en faites deux,
C'est cent pour cent de bénéfice.                          (Bis)

Dans la base César, un seul auteur, Radet, et 89 représentations, du 19 novembre 1796 au 28 septembre 1799 (13 fois en 1796, 48 fois en 1797, 20 fois en 1798, 8 fois en 1799.

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