Le Dîner imprévu,

Le Dîner imprévu, opéra-comique-vaudeville en trois actes, par M. Desfontaines, 28 avril 1792.

Théâtre du Vaudeville.

On désigne parfois sous le titre le Dîner imprévu ou le chanoine de Milan la pièce d’Alexandre Duval, le Souper imprévu ou le Chanoine de Milan (1796).

Titre :

Dîner imprévu (le)

Genre

opéra-comique

Nombre d'actes :

3

Vers / prose

en prose avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

28 avril 1792

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

M. Desfontaines

Compositeur(s) :

M. Desfontaines

Journal de Paris, n° 122 du 1er mai 1792, p. 494 :

[Un reproche paradoxal : la pièce est trop longue pour le Théâtre du Vaudeville, où on n'aurait jamais joué de pièce en trois actes. Pour le critique, « les meilleures folies […] sont les plus courtes. Et pourtant, la pièce, vue « avec plaisir », est pleine de « détails agréables, & ce genre de graces & d'esprit qui distinguent les ouvrages de M.Desfontaines ».]

Vendredi 27 avril, on a donné à ce Théâtre le Diner imprévu. L'Auteur est M. Desfontaines. C'est la première Pièce en trois actes que l'on ait représentée au Vaudeville qui semble fait pour des cadres moins étendus.

Les traits du Vaudeville doivent être aiguisés par l'Epigranne, par une folie aimable & ingénieuse ; & les meilleures épigrammes, comme les meilleures folies, sont les plus courtes.

Quoi qu'il en soit, le Diner imprévu a été vu avec plaisir ; on y a goûté beaucoup de détails agréables, & ce genre de graces & d'esprit qui distinguent les ouvrages de M.Desfontaines.

Journal encyclopédique ou universel, volume 73 (janvier à juin 1792) (Slatkine reprints, 1967), p. 494-495 (année 1792, tome IV. vingt Mai, n° XIV), p. 122-125) :

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Le Dîner Imprévu, opéra comique en 3 actes. Colette aime Mathurin, jeune garçon très-pauvre, d'un village voisin ; Thomas, pere de Colette , engage Rosette, sa plus jeune fille, qui lui a fait innocemment la confidence des amours de sa sœur, à lui rendre compte de tout ce qui se passera ; mais Mathurin met Rosette de son parti , en lui donnant un rossignol dans une cage. Thomas est moissonneur ; comme il va travailler dans les champs, il ordonne à Colette de lui apporter son dîner à midi. Cependant Colette & Mathurin , ne sçachant comment faire pour vaincre la résistance de Thomas, se décident à implorer la protection de l'épouse de leur seigneur, qui justement est à la chasse de leur côté. La marquise arrive en effet ; les deux amans la prient de leur être favorable, & la marquise engage Colette à aller au château, & à faire porter par son ordre, à Thomas un excellent dîner. Thomas s’impatiente. Inquiet du retard de sa fille, il s'endort de besoin au pied d'un arbre: Pendant son sommeil, Mathurin arrive, déguisé en maître d'hôtel : il est suivi de plusieurs cuisiniers, qui étalent sur l'herbe, auprès de Thomas, des pâtés, des gigots, des gâteaux, & surtout des bouteilles de bon vin. Thomas se réveille : il a rêvé qu'on lui servoit un excellent dîner, & reste fort agréablement surpris, en voyant près de lui son songe réalisé, Le faux maître d'hôtel se met à ses côtés ;. Colette arrive aussi, & tous trois se mettent à manger avec un vif appétit. Pendant le dîner, Mathurin se dit amoureux de Colette. Cette derniere feint de la résistance : mais Thomas, étourdi de ce qu'un maître d'hôtel veut épouser sa fille, engage cette derniere à renoncer à son Mathurin, qu'il n'a jamais vu, mais dont il ne veut pas pour gendre. Colette feint de céder aux ordres de son pere, avec d'autant moins de regret, que le maître d'hôtel ressemble, dit-elle, à son Mathurin. Cependant les chasseurs rentrent au château. Thomas s'habille & s'y rend, pour demander au seigneur qu'il donne son agrément au mariage de son maître d'hôtel avec Colette. Le ſeigneur, fort étonné, fait venir ce maître d'hôtel ; c'est Dubois, homme très-vieux & très-peu fait pour plaire à une jeune personne. Cet imbroglio se dénoue par l'aveu que viennent faire les deux amans du tour qu'ils ont joué à Thomas. Le seigneur, voyant qu'un maître d'hôtel tourne la tête de ce dernier , donne à Mathurin la survivance de Dubois, & Thomas consent au mariage des amans.

Tel est le sujet du Dîner imprévu. On voit que c'est une petite comédie dont le fonds, quoique léger, est assez plaisant. Le public a paru desirer que l'action en fût plus resserré ; en effet, nous croyons que cet ouvrage, séduit en deux 2 actes, acquerroit plus de rapidité & de gaieté. Le choix des airs, qui sont cependant bien adaptés, n'a pas paru non plus assez frais ; & sans doute , c'eut un des charmes du vaudeville que d'offrir des airs nouveaux & connus, au milieu d'autres airs dans l'ancien chansonnier. Quoi qu'il en soit, cette jolie comédie offre des situations très gaies, des couplets tournés avec grace & partout de l'esprit. C'est le cachet de M. Desfontaines, un de nos auteurs modernes qui sçache le mieux tourner le vaudeville : il a fait cette piece sur un ouvrage de lui, qui a eu autrefois du succès à la comédie italienne. Parmi les jolis couplets qui ont été très appaudis, nous nous contenterons de citer ceux-ci : c'est la jeune Rosette qui raconte à son pere ce que font Colette & Mathurin lorsqu'ils sont seuls.

AIR........

Si Mathurin dessus l'herbette
Cueille la rose du matin,
II vient l'apporter à Colette ;
Puis il la place sur son sein.
Moi, qui ne suis que la cadette,
Je ne sais si c'est de l'amour.
Mais je voudrait, dessus l'herbette,
Recevoir la rose à mon tour.

A l'ombrage de la coudrette,
Si Colette va sommeiller,
Par un baiser pris en cachette,
Mathurin court la réveiller.
Moi, qui ne suis que la cadette,
Je ne sais si c'est de l'amour :
Mais je voudrois, sous la coudrette,
Être réveillée à mon tour. (*)

Mesdemoiselles Féraud & Fleury, ont très-bien joué les deux sœurs, & MM. Bourgeois, Henri & Chapelle, ont fait remarquer, dans les rôles. de Thomas , Mathurin & Dubois, les progrès qu'ils font tous les jours.

(*) Nous ne connoissons point l’air sur lequel ces couplets sont timbrés ; mais nous proposons à nos lecteurs de les chanter sur le vaudeville des Jumeaux de Bergame : La fois que vous m’avez promise, &c.

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1792, volume 7 (juillet 1792), p. 338-340 :

Le a8 avril, on a donné avec succès la premiere représentation du Dîner imprévu, opéra-comique en trois actes, par M. Desfontaines.

Mathurin aime Colette, fille de Thomas ; mais il n'a rien, & Thomas veut un gendre qui ait quelque chose. L'épouse du seigneur du village chasse dans la forêt ; les amans s'y rendent, lui font l'aveu de leur amour, implorent sa protection & l'obtiennent. Thomas a recommandé à sa fille de lui apporter à dîner vers midi ; la dame du lieu imagine de faire servir à Thomas un dîner splendide, & fait donner au château des ordres en conséquence. Thomas arrive, attend Colette, s'ennuie, bâille & s'endort. Le besoin le réveille. Il rêvoit qu'il étoit à un grand repas, qu'il mangeoit, qu'il mangeoit.... Ah !... Il se retourne & voit un festin qu'on a servi pendant son sommeil. Mathurin, qu'il ne connoît que de nom, se présente sous l'habit & le titre de maître-d'hôtel de Monseigneur, & l'engage à prendre part au repas qu'il a fait dresser pour lui. On boit, on rit, on chante. Le faux maître-d'hôtel déclare qu'il est amoureux de Colette. Grande surprise, grande joie de la part de Thomas. Et vite, le bon-homme s'habille, & va demander l'agrément de Monseigneur, pour le mariage de Colette avec son maître-d'hôtel. Le seigneur est fort étonné ; Dubois est vieux, cassé, incapable d'exciter de l'amour. Le quiproquo égaie un instant ; mais l'espiéglerie se découvre, & la générosité des patrons consomme le bonheur des jeunes amans.

Voilà, en substance, ce que c'est que le Dîner imprévu de M. Desfontaines. C'est la même chose à-peu-près, que la Chasse, opéra du même auteur, donné, au théatre italien, en 1778. Le premier acte est charmant, il présente les plus jolis tableaux & des situations intéressantes & simples. Le second & le troisieme devroient être réduits en un ; l'action y gagneroit beaucoup.

Le choix des airs ne nous a pas toujours paru fort heureux, il auroit pu être plus soigné. Quoi qu'il en soit, cette jolie comédie offre des situations très-gaies, des couplets tournés avec grace, & par-tout de l'esprit. C'est le cachet de M. Desfontaines. Nous citerons les couplets de la jeune Rosette, qui raconte à son pere ce que font Colette & Mathurin, lorsqu'ils sont seuls.

Si Mathurin dessus l'herbette
Cueille la rose du matin,
II vient l'apporter à Colette ;
Puis il la place sur son sein.
Moi, qui ne suis que la cadette,
Je ne sais si c'est de l'amour.
Mais je voudrait, dessus l'herbette,
Recevoir la rose à mon tour.

A l'ombrage de la coudrette,
Si Colette va sommeiller,
Par un baiser pris en cachette,
Mathurin court la réveiller.
Moi, qui ne suis que la cadette,
Je ne sais si c'est de l'amour :
Mais je voudrois, sous la coudrette,
Être réveillée à mon tour.

Quand Mathurin parle à Colette,
Si vous venez pour nous chercher.
Ma sœur, qui sans cesse vous guette,
Vous attrape, & le fait cacher.
Moi, qui ne suis que la cadette,
Je ne sait si c'est de l'amour:
Mais je voudrois être Colette,
& vous attraper à mon tour.

D’après la base César, la pièce a eu 18 représentations, du 28 avril 1792 au 12 mai 1793.

Ajouter un commentaire

Anti-spam