Ecbert

Ecbert, premier roi d’Angleterre, ou la Fin de l’heptarchie, mélodrame en 3 actes, de Philippe-Aristide-Louis-Pierre Plancher de Valcour, musique de Leblanc, ballets d’Aumer, 10 brumaire an 11 [1er novembre 1802].

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Almanach des Muses 1804

Sur la page de titre de la brochure, Paris, se vend au théâtre de la Porte S.-Martin, an xii (1802.) :

Ecbert, Premier roi d'Angleterre, ou la Fin de l'heptarchie, mélodrame, en trois actes et en prose, à grand spectacle, mêlé de Chants et de Danse. Représentée, pour la première fois, sur le théâtre de la Porte S.-Martin, ci-devant salle de l'Opéra, le 11 brumaire, an 11.

Il s’agit d’un mélodrame de Philippe-Aristide-Louis-Pierre Plancher de Valcour (La France littéraire, volume 7, p. 202).

Courrier des spectacles, n° 2067 du 12 brumaire an 11 [3 novembre 1802], p. 3 :

Théâtre de la Porte-St-Martin.

Première représentation d'Ecbert

Assez Iong-tems Pizarre avoit régné seul sur la scène de la Porte St-Martin. On lui destinoit un successeur, et on avoit choisi Egbert ; mais il falloit faire ensorte que son installation ne fît point de mécontens. Point du tout, les mesures étoient si mal prises, que l’infortuné monarque à peine reconnu, a été détrôné. Voudra-t il soutenir ses droits, et réclamer contre l’arrêt prononcé hier par un public nombreux ? Il paroit en avoir l’intention, et ce soir il fait un nouvel appel à ce public sévère , que n’ont pu désarmer les actions et les discours des héroïnes de sa cour, les agrémens et la magnificence des fêtes qu’il lui a offertes, la voix séduisante d’un Barde, etc.

(A demain les détails.)

Courrier des spectacles, n° 2068 du 13 brumaire an 11 [4 novembre 1802], p. 2-3 :

[Les détails promis la veille arrivent à point. L'intrigue est longuement résumée, et il faut féliciter le critique de se retrouver au milieu de tous ces noms et de toutes ces péripéties. Son mérite n’est pas mince. Il n’a plus ensuite qu’à donner son sentiment, et il ne s’en prive pas. La pièce est un tissu d’invraisemblances mal enchaînées, il y a des rôles inutiles et le style est « incorrect et boursouflé ». Échappent à la critique les décorations et le ballet, qui ont sauvé la pièce. Dès la seconde représentation des changements ont été faits : plus de meurtre sur la scène, mais un récit (la justification donnée par le critique n’est sans doute pas la seule qu’on puisse envisager !). Il reste à changer le rôle d’Edmond, d’en faire « un Barde véritable », et la pièce pourra survivre. Avant de parler des artistes, retour rapide sur le ballet, qui est jugé vraiment magnifique. Deux interprètes sont mis en avant, une débutante, très belle, mais qui ne semble pas bonne actrice, et le chevronné Vigny, irréprochable. L’article s’achève très normalement par le trio des auteurs, paroles, musique et ballets.]

Théâtre de la Porte-St-Martin.

Isemburge, reine de Northumberland, voulant venger la mort d’Andred son époux, qui a succombé sous les coups d’Engild, roi de Worcester, et d’Egbert son fils a vaincu en bataille rangée un de leurs alliés le roi de Mercie. Cette victoire est due principalement à un chevalier inconnu à la cour et qui porte le nom d’Adolphe : il est épris des charmes de Roséïde, fille d’Isemburge, dont l’alliance est vivement recherchée par Senofrid roi d’Essex, forcé par Egbert de se réfugier à la cour de Northumberland.

Roséïde, sensible au mérite et à l’amour d’Adolphe, le surprend avec Primerose, nièce de la reine, et en conçoit tant de jalousie qu’elle chasse le chevalier de la cour sans vouloir entendre sa justification. Adolphe, irrité des mépris de la princesse part pour la frontière, où il trouve l’armée d’Engild qui marche contre celle d’Isemburge, commandée par Senofrid. Celle-ci a dabord l’avantage, mais un chevalier noir à la tète d’un corps de cavalerie l’a bientôt dissipée et forcée à se rendre prisonnière. Il renvoie à Isemburge les chefs et une partie des troupes, et lui-même vient proposer la paix, toujours sous le nom d’Adolphe. Sénofrid lui répond que pour terminer la guerre, il défie Egbert à un combat singulier. Isemburge croit que cet honneur doit aussi bien appartenir à Adolphe, et Roséïde tire d’une urne le nom du guerrier qui doit combattre Egbert ; celui du chevalier sort, que l’on juge de son embarras, c’est lui-même qui est Egbert. N’importe , il fixe l’heure et le lieu du combat, puis il charge son écuyer de prendre son armure, tandis que sous l’armure noire du prince Egbert, il lui livrera un combat simulé. Le jaloux, l’ambitieux Sénofrid, brûle d’immoler son heureux rival ; il a posté des assassins qui, trompés par l’armure, croyent tuer Adolphe et font périr son écuyer ; Roséïde elle-même abusée par les derniers mots de celui qu’elle prend pour son amant, revêt son armure et marche contre Egbert qu’elle accuse d’être l’auteur de la mort de son cher Adolphe. Désarmée, elle est remplacée par Sénofrid qui est vaincu à son tour. Cependant sa vengeance l’appelle dans la capitale d’Engild, elle cherche Egbert pour l’assassiner. Sénofrid qui, pour pénétrer plus aisément dans le palais, a pris les armes noires d’Egbert, y vient dans la même intention, Roséïde le tue, Engild croit avoir perdu son fils, mais l’arrivée de celui-ci rassure le roi qui fait venir Roséïde, et en présence de la reine Isemburge, l’unit à son fils Egbert.

Tel est le fonds du mélodrame en trois actes, représenté sous le titre d' Egbert, Premier Roi d'Angleterre.

Des invraisemblances nombreuses , des scènes froides et décousues, des rôles inutiles, un style incorrect et boursouflé, voilà les ennemis qui ont nui le plus au succès de cet ouvrage. De belles décorations et un ballet charmant l’ont soutenu jusqu’à la fin. A la première représentation Roséïde assassinoit sur le théâtre Sénofiid, qu’elle prenoit pour Fgbert ; les quiproquos que ce meurtre faisoit naître avoient excité le mécontentement du public. A la seconde, l’auteur a mis cette action en récit, et il a bien fait. Il pourroit encore supprimer le rôle de Primerose, inutile à l’action, faire d’Edmond un Barde véritable , et il épargneroit à l’acteur chargé de ce rôle, le déplaisir d’entendre les murmures, les éclats de rire qui accompagnent la reconnoissance. La représentation d’hier a été, à l’exception de ce moment, assez paisible, et Egbert a gagné sa cause. Le ballet mérite d’être vu. C’est un des plus beaux, des plus agréables qui soient au théâtre.

Une nouvelle actrice , madame Derneville, a débuté avant-hier par le rôle de Roséïde, il est difficile d’avoir un physique plus avantageux ; mais il faut du travail pour plaire à un public qui exige dans une actrice plus que de la beauté. Le citoyen Vigny qui remplit le rôle du Barde a chanté avec infiniment de goût une romance au premier acte, et a été vivement applaudi dans tout son rôle.

Les auteurs sont , pour les paroles, le citoyen Valcour ; pour la musique, le cit. Leblanc ; et pour les ballets le cit. Aumer.                                      F. G. B. P. G* * *.

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