Emilie, ou les Caprices

Emilie, ou les Caprices, comédie en 3 actes et en vers par Beffroy de Reigny (le Cousin Jacques)  : 21 Messidor an 7 [9 juillet 1799].

Théâtre des Jeunes Artistes

Almanach des Muses 1800

Pièce de Beffroy de Reigny, plus connu sous son pseudonyme de Cousin Jacques.

A la fin de la pièce, l'auteur fait figurer la note suivante, p. 80 de l'édition proposée par l'Imprimerie Moutardier (elle figure dans Google Books, sans page de titre) :

N. B. Comme il faut absolument que les bavards et les verbiageurs préfèrent le risque d'ennuyer au désagrément de se taire, on se doute bien que messieurs les docteurs modernes, qui ne savent pas lire, mais qui veulent à toute force écrire, n'ont pas épargné dans maint et maint journal les lieux communs et les sottises scientifiques sur la pièce d'Emilie. Le public en a fait justice ; et ce serait peine perdue de condescendre à des réponses. Je me bornerai donc à cette seule observation : un de ces savans du jour, pour faire parler de lui à tort et à travers, a dit que j'avais pillé le Dépit amoureux, les Fausses infidélités, et la Feinte par amour. 1°. Je déclare et je proteste, à ma honte, que je ne connaissais aucune de ces trois pièces, quand j'ai fait Émilie. J'ai une malheureuse et singulière manie, moi ; c'est de ne rien lire en fait de pièces de théâtre, parce que je crains toujours de copier les autres sans le vouloir, et de n'étre plus moi-méme. 2°. S'il était vrai que ma pièce fût la copie de ces trois pièces, il s'en suivrait que deux de ces mêmes pièces seraient aussi la copie de la première en date ; et Barthe et Dorat ne seraient que des plagiaires. OR, messieurs les sermoneurs gens d'esprit (qui n'avez pas tout dit, quoique vous en disiez toujours trop) je vous certifie sur mon honneur que je veux bien être plagiaire avec ces deux hommes-là, et passer pour copier comme eux.

Courrier des spectacles, n° 869 du 22 Messidor an 7 [10 juillet 1799], p. 2-3 :

[La comédie nouvelle a été très appréciée du public, signe d’un retour vers le bon goût après les abus d’un théâtre spectaculaire. Le résumé de l’intrigue montre en effet le recours aux bonnes ficelles de la comédie, la veuve et ses deux prétendants si différents, le serviteur dévoué, le déguisement en femme, qui fait comprendre à la jolie veuve qui elle doit choisir, le sage plutôt que l’extravagant. Tout finit par un mariage qui montre le triomphe du sérieux sur le futile. La pièce est drôle, avec des longueurs que le jeu des artistes et la qualité des vers fait disparaître (y avait-il vraiment des longueurs ?). L’auteur est nommé : encore le Cousin Jacques !]

Théâtre des Jeunes Artistes.

Hier on a donné à ce théâtre Emilie ou les Caprices, comédie en trois actes et en vers, et les applaudissemens unanimes et réitérés qu’elle a reçus ont bien prouvé que malgré le spectacle, les décorations et les grands coups de théâtre des autres pièces, on revient toujours au bon goût.

Emilie est veuve, et instruite par les désagrémens qu’elle a essuyés dans son premier mariage, elle veut mettre à l’épreuve ses amans, parmi lesquels elle a sçu distinguer Valere et Dorival. Ce dernier, vif, enjoué, extravagant, a fixé de puis quelques jours l’ame irrésolue d’Emilie, malgré les représentations de Frontin, vieux serviteur qui est son guide et son mentor. Mais pour cette fois Frontin et ses avis déplaisent à l’amant qui finit par le chasser pour quelques vérités sévères qui le blessent. Frontin, disgracié, fait part de son malheur au rival de son maitre, à Valere, jeune homme sensé et philosophe qui lui offre sa bourse et ses services. Pendant ce tems Emilie pour éprouver Dorival, lui fait prendre un bonnet de femme, et l’affuble d’un schall par-dessus son habit. C’est dans cet accoutrement grotesque et ridicule que notre étourdi parcourt la maison, et se pré sente à Valère et à Frontin. Celui-ci qu’un reste d’attachement empêche de quitter son jeune maître croit devoir flatter sa manie et en rire, afin de mieux ensuite lui en faire sentir le ridicule. Lisette, suivante d’Emilie, annonce une fâcheuse nouvelle : sa maîtresse, dit-elle, vient de se trouver mal, et il faut que sans perdre un instant Dorival coure chercher un médecin : Emilie n’en veut un que de sa main. Voilà Dorival parti, Frontin le suit ; mais le peuple s’attroupe autour de Dorival qui est mené chez un commissaire. Cette affaire compromet même la réputation d’Emilie, qui s’apperçoit un peu tard de la folie qu'elle a faite de négliger Valère. Elle a un entre tien avec lui, et la sagesse de ses procédés, la solidité de ses raisonnemens l’emportent sur la futilité de Dorival qui rend justice à son rival modeste et plus heureux.

Voilà le fonds de cette comédie , qui est semée de traits piquants, et de détails frappans par leur vérité. Il y a peut-être quelques longueurs, mais le jeu des jeunes artistes, joint à une versification aisée et légère, les a fait disparoitre.

L’auteur a été généralement demandé, et le Cousin Jacques a été nommé.

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