Emma ou le Soupçon

Emma ou le Soupçon, opéra en un acte, de Marsollier, musique de Fay. 24 vendémiaire an 8 [16 octobre 1799].

Théâtre de l'Opéra Comique National, rue Favart

Titre :

Emma ou le Soupçon

Genre

opéra comique

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

24 vendémiaire an 8 [16 octobre 1799]

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra Comique National, rue Favart

Auteur(s) des paroles :

Marsollier

Compositeur(s) :

Fay

Almanach des Muses 1801

Ernest a épousé une jeune Ecossaise nommée Emilie, contre la volonté du comte Ernest so, père. Obligé de fuir la maison paternelle, il s'est retiré avec sa femme à Altona, et ils ont pris, lui le nom de George, elle le nom d'Emma. George est jaloux. Il a vu un jeune officier se promener sous les fenêtres de sa femme, et le soupçon tourmente son ame. Cependant sa détresse est telle qu'il ne peut payer son loyer, et qu'il est obligé de se séparer d'Emma pour aller travailler à une manufacture d'armes. Le jeune officier profite de son absence et se présente chez Emma, lui fait une déclaration qu'elle reçoit fort mal. George de retour est furieux de ce qu'Emma ne lui parle point du jeune officier qu'il sait être venu chez lui ; une lettre qu'on apporte augmente ses inquiétudes et ses transports jaloux. Bientôt l'officier paraît ; il vient réparer son indiscrétion. George ne lui laisse pas le temps de s'expliquer, l'appelle en duel, sort avec lui, et le blesse dangereusement.

Le comte Ernest qui a entendu parler d'Emma vient lui offrir ses services. Emma excite son intérêt en lui faisant connaître quel est son époux, à quel danger sa jalousie l'expose. Le comte cache à Emma que c'est son fils dont il est question ; mais George paraît : il a blessé son adversaire, et cet adversaire est Edmont son frère. George est arrêté ; on le mène devant un juge : il a reconnu son père. Ce juge, pénétré d'un vif ressentiment, est au moment de condamner George ; mais Edmont, qui n'a été que blessé, paraît, et décide le comte à pardonner à son frère.

Fonds intéressant ; dénouement un peu brusque.

Musique trop travaillée, de l'obscurité, des réminiscences.

Courrier des spectacles, n° 968 du 25 vendémiaire an 8 [17 octobre 1799], p. 2 :

[L’article s’ouvre par le résumé de l’intrigue, une histoire de mariage secret. Un jeune homme a dû fuir avec celle qu’il a épousée sans l’aveu de son père, et le jeune couple éprouve bien des difficultés matérielles. Le mari doit aller travailler, ce qui le rend jaloux de sa femme laissée seule à la maison. Un jeune officier concrétise cette jalousie : il se rend chez eux et tente de séduire la pauvre jeune femme, qui lui fait honte de son attitude et l’amène à un repentir sincère. mais le mari arrive, provoque le jeune officier en duel et le blesse. C’est là qu’intervient le père du jeune homme : désireux d’aider la jeune femme (dont il ignore qu’elle a épousé son fils), il est de plus appelé à juger son fils (qui se cachait sous un faux nom). La situation devient complexe : l’officier se révèle être le frère du jeune mari, et il pardonne à son frère, et le père pardonne à son fils son mariage secret. Le critique choisit de dire à quelles conditions la pièce serait bien meilleure : son sujet est « très-intéressant », mais il faudrait changer le caractère du jeune mari, accorder moins de place à des personnages secondaires, utiliser des détails moins convenus et trouver un dénouement moins brutal. La musique n’est pas mieux traitée : on attendait beaucoup de Fay, et il a déçu : musique sans originalité, peu mélodieuse, inutilement compliquée. Mais certains effets ont été applaudis. Auteurs nommés, malgré les réticences de certains, acteurs au jeu plein d’âme.]

Théâtre Feydeau.

L’un des fils du comte d’Ernest, contre la volonté de son père, a épousé une jeune Ecossaise peu fortunée nommée Emilie. Obligé de fuir la maison paternelle, il s’est retiré a Altona, où ,pour n’être pas reconnus, ils ont pris le nom l’un de Georges, et l’autre d’Emma. Georges est dévoré de la jalousie la plus forte ; les caresses d’Emma ne font qu’augmenter les soupçons qu’il conçoit sur sa fidélité ; il a vu se promener sous les fenêtres un jeune officier, il croit Emma d’intelligence avec lui. Georges cependant qui éprouve les atteintes du besoin au point de ne pouvoir payer le terme échu de son loyer à un certain M. Hopkins, est obligé de laisser sa femme seule pour aller travailler à une manufacture d’armes. M. Hopkins , à qui Georges laisse entrevoir, ses allarmes, croit bien faire que de lui réserver un appartement moins cher, et de proposer celui qu’occupent alors les époux à une femme qui vit dans l’aisance : cette femme est Marthe qui a pour ainsi dire pris soin de la jeunesse d’Emilie, et qui veut lui continuer son amitié en la soulageant dans sa détresse,

Cependant le jeune officier se présente sur le ton le plus léger chez Emma, et lui déclare son amour. Emma témoigne sa surprise et son indignation sur les propositions de ce jeune homme ; elle le fait rougir de son inconséquence : et cette leçon fait sur lui une telle impression qu’il sort bien décidé à réparer son erreur par des bienfaits. Georges de retour, est furieux de voir qu’Emma garde le silence sur l’officier qu il sait être venu chez lui ; une lettre que 1’on apporte de la part du jeune homme augmente encore szs soupçons. Cet officier paroît bientôt lui-même : il venoit pour réparer sa faute. Georges aveuglé par la jalousie, ne lui laisse pas la liberté de s’expliquer, le provoque en duel, l’entraîne sur les remparts, et le blesse à mort.

Le comte d’Ernest, homme bienfaisant, a été informé de la détresse d’Emma, il vient lui offrir les services que sa fortune le met à même de rendre. Emma excite son intérêt en lui faisant connoître quel est son mari, et le danger auquel sa jalousie l’expose ; le comte cache à Emma ce qu’il éprouve en apprenant que c’est son fils même qui est sorti pour se battre, et promet d’arrêter ce différend : mais Georges est de retour, il a terrassé son adversaire, et cette victime de sa fureur est Edmond son frère. Bientôt on vient l’arrêter. Il est amené devant un juge dans lequel il reconnoît son père. Ce juge disposé au ressentiment, voudroit cependant n’écouter que la nature : il est sur le point de condamner Georges, mais Edmond qui n’a été que blessé, paroit et détermine le comte à pardonner à son frère.

Cette pièce dont le fonds est très-intéressant, auroit produit tout un autre effet, si le caractère de Georges eut été présenté sous des couleurs mieux ménagées, si des personnages peu importans ne formoient le principal lien des divers ibcidens, si ces derniers n’étoient pour la plûpart prévus, et si le dénouement, que la présence d’Edmond rend blessé rend plus naturel, n’eut pas été précipité, au point de ne produire aucune impression.

La musique ne répond nullement à ce que le cit. Fay avoit fait espérer par ses compositions précédentes : pénétré d’excellent modèles, il a paru trop souvent leur imitateur, sur-tout dans l’accompagnement ; le chant a peu de clarté, les morceaux n’ont point de motifs déterminés, ils sont rarement mélodieux, quoique le travail en soit quelquefois étonnant, au point peut-être d’en rendre l’exécution trèsdifficile : en général cette musique flatte peu, parce qu’on n’y découvre point d’idées neuves. Cependant on y a reconnu des effets qui ont été justement applaudis.

Les auteurs ont été demandés pendant assez longtemps : le parterre très-agité avoit à lutter contre quelques improbateurs dont les murmures ont cédé au vœu de la majorité. On est venu nommer les cit. Fay et Marsolier.

Les acteurs, principalement les cit. Gaveaux et la citoyenne Scio ont mis beaucoup d’ame dans leur jeu.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an VIII, Ier trimestre, n° 4 (10 brumaire), p. 239 :

Théâtre Feydeau.

On a donné au théâtre Feydeau un opéra comique intitulé Emma, ou le Soupçon, qui a faiblement réussi. La pièce est, à proprement parler, une macédoine de mille situations connues. C'est un jaloux victime de sa jalousie et entraîné à des excès punissables, c'est tout juste le sujet d'un drame bien sombre et bien invraisemblable, mais où l'on trouve quelquefois la plume d'un écrivain distingué.

Quant à la musique elle ressemble à tout et ne ressembla à rien ; elle est forte en ritournelles.

Les auteurs ont été demandés, ce sont les C. Marsollier et Fay. On dit qu'ils ont fait, depuis la première représentation, des corrections heureuses.

L. C.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 5e année, 1799, tome IV, p. 130 :

[Le compte rendu s’ouvre, comme le plus souvent, par l’analyse de l’intrigue, qui tourne autour d’un mariage secret et d’un duel qui mettent à mal toute une famille – mais tout finit par s’arranger. Le critique porte ensuite un jugement négatif, situations forcées, peu adaptées au genre lyrique. Il s’agit pourtant d’une oeuvre due à un auteur expérimenté. Rien sur la musique, rien sur le jeu des acteurs, qui sont simplement nommés, comme les deux auteurs.]

THÉATRE FEYDEAU.

Emma.

Georges, un des fils du comte d'Ernest, a épousé contre la volonté de son père, Emilie, jeune écossoise peu fortunée. Obligé de quitter la maison paternelle, il s'est retiré dans le fond de l'Ecosse, et il y vit avec sa femme du travail de leurs mains. Georges, d'un caractère jaloux, tourmente sa femme sans aucun sujet, et se rend malheureux soi-même. Un jeune officier, qu'il a vu se promener souvent sous ses fenêtres, lui a surtout inspiré des inquiétudes. Ce jeune homme vient en effet, pendant l'absence de Georges, se présenter chez Emma sans la moindre précaution, et lui déclare sa passion ; mais elle sait lui faire sentir son inconséquence, et le jeune officier sort bien déterminé à réparer cette faute par des bienfaits. Une lettre qu'on vient apporter de sa part, augmente encore la fureur du mari ; et, lorsqu'il revient bientôt lui-même dans l'intention de réparer sa faute, Georges, sans vouloir l'entendre, le provoque au duel, l'entraîne avec lui, et le blesse à mort.

Georges est amené devant le juge, dans lequel il reconnoît son père ; et c'est là aussi qu'il apprend que son adversaire est son frère. Celui-ci, qu'on a cru mort, n'est que blessé ; au moment où le juge va condamner Georges, son frère paroît, détermine le comte à pardonner, et atteste la conduite vertueuse d'Emma.

Cette pièce, jouée la première fois le 24 vendémiaire, dont les situations sont forcées, et en général mal adaptées au genre lyrique, a eu un très-foible succès ; elle est pourtant d'un auteur accoutumé à en obtenir.

Les auteurs ont été demandés ; celui des paroles, le C. MARSOLL1ER ; celui de la musique, le C. FAY. Les acteurs sont les CC. Gaveaux, Juliette et Fay, et la C.e Scio.

Dans la base César, le seul auteur cité est Marsollier des Vivetières (le Chevalier du Grand Nez).

D'après César, la pièce a été jouée 7 fois, du 15 octobre (en fait, le 16) au 1er novembre 1799, au Théâtre Feydeau.

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