L'Enfance de J. J. Rousseau

L'Enfance de J. J. Rousseau, comédie en 1 acte, en prose, mêlée d'ariettes, Par le c. Andrieux, musique du c. Dalayrac. 4 Prairial [an 2] (23 mai 1794).

Opéra comique national de la rue Favart

Titre

Enfance de J. J. Rousseau (l’)

Genre

comédie mêlée d’ariettes

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

ariettes

Date de création :

4 prairial an 2 (23 mai 1794)

Théâtre :

Opéra Comique National de la rue Favart

Auteur(s) des paroles :

Andrieux

Compositeur(s) :

Dalayrac

Almanach des Muses 1795.

Rousseau représenté, comme il s'est peint lui-même dans ses mémoires. Anecdote intéressante de son enfance. Il insère dans un journal de Genève, des lettres de Caton le censeur, et les fait transcrire par son petit cousin Bernard, qui les porte à l'imprimerie, et perd la dernière que l'on remet au greffier Masseron, ennemi secret de cette famille. Ce Masseron s'imagine qu'elles sont de Rousseau le père, et les dénonce au conseil de Genève. Le jeune Jean-Jacques, qui, jusqu'alors a gardé l'anonyme, ne balance plus a se faire connoître, dès qu'il voit son père compromis. C'est moi qui les ai faites, dit-il avec fermeté ; s'il y a de la gloire à écrire, il y a de la lâcheté à ne point avouer ses ouvrages. Le conseil ordonne qu'il lui sera décerné une couronne civique. Une foule de citoyens se porte chez le jeune Rousseau, et au moment où il y pense le moins, un enfant porté sur les bras de plusieurs bonnes mères, pose sur sa tête, la couronne civique qu'il a méritée.

De l'esprit, des graces, du naturel. Musique très-agréable, analogue au sujet.

Sur la page de titre de la brochure (de la collection Marandet), Paris, chez Maradan, seconde année de la République :

L'Enfance de Jean-Jacques Rousseau, comédie en un acte, mêlée de musique. Représentée, pour la première fois, sur le Théâtre de l'Opéra-Comique national, le 4 prairial, l'an second de la République. Les paroles sont d'Andrieux : la musique est de d'Alayrac.

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1794, volume 7 (juillet 1794), p. 292-294 :

[Compte rendu qui peut paraître bien indulgent envers une pièce qui raconte une anecdote (qui semble purement inventée) de la jeunesse de Rousseau. Cette entorse à la vérité ne choque guère le critique : « Cette intrigue n'a peut-être pas toute la vraisemblance qu'on eût pu désirer. » Il joue un peu sur les mots : les idées développées dans les écrits (imaginaires) en cause concordent avec celles que Rousseau développera à l’âge adulte... « D'ailleurs, cette piece vaut sur-tout par ses détails » : l’anecdote est fausse, mais les détails sont vrais. Les auteurs sont chaleureusement félicités, tous deux étant bien connu. les paroles montrent de belles qualités : esprit, finesse et grâces du style, et même civisme. Et le compositeur a su utiliser la musique même de Rousseau, promu « célebre compositeur ».]

THÉÂTRE DE L'OPÉRA COMIQUE NATIONAL, RUE FAVART.

L'Enfance de J. J. Rousseau, drame, mêlé de musique.

L’Enfance de J.--J, Rousseau n'est pas l'époque la moins intéressante de la vie de cet homme célebre. Les entretiens d'un pere, ardent ami de la liberté ; la lecture de Plutarque, & des historiens de l’antiquité, développerent en lui, dès la plus tendre enfance, cet esprit fier, cet amour de la liberté, qui depuis ont caractérisé ses écrits, & ont eu une influence si marquée sur sa conduire.

Cet âge fut d'ailleurs le seul moment heureux de sa vie ; on yoit par ses confessions, avec quelle sensibilité ce grand homme se rappelloit ses premieres années, & tâchoit d'étouffer, par leur souvenir, le sentiment actuel de ses malheurs. Cette piece devoit donc être écoutée favorablement. On y retrouve les traits nombreux que Rousseau nous a laissé dans ses confessions. L'auteur ne pouvoit les mettre sur la scene sans s'écarter en partie1 de l'histoire ; aussi l'intrigue est toute de son invention.

Rousseau, à l'âge de 13 ans, est encore dans la maison paternelle : échauffé par la lecture des grands Hommes de Plutarque, il a fait imprimer dans le journal de Genève plusieurs lettres lsur des sujets de politique & de morale, sous íe nom de Caton le censeur. C'est son cousin Bernard qui se charge de les copier, & de les porter chez l'imprimeur.

Ces lettres produisent dans Geneve une grande sensation : Masseron, le Greffier, ennemi secret du pere de Rousseau, le soupçonne d’en être l’auteur, & l'une de ces lettres ayant donné de l'ombrage au petit-conseil, il s'en .procure la minute, & la fait dénoncer au conseil ; sur la nouvelle que l'auteur de ces lettres va être poursuivi, Jean-Jacques, que ni la louange, ni la critique, n'ont pu engager à se découvrir, se déclare publiquement l’auteur de ces écrits. Cet acte de courage est: bientôt récompensé par la décisions du conseil, qui lui décerne une couronne, & l'engage à poursuivre une carriere si bien commencée.

Cette intrigue n'a peut-être pas toute la vraisemblance qu'on eût pu désirer. Rousseau n'a écrit que très-tard, & ce n'est pas à 13 ans qu'un enfant traite avec succès ses sujets les plus sérieux de la politique ; mais ces réflexions justes en général, seroient déplacées, quand il s'agit de Rousseau ; celui qui fit à 40 ans le contrat social, étoit à 13 ans plus qu'un homme ordinaire.

D'ailleurs, cette piece vaut sur-tout par ses détails : on y retrouve tous les personnages que Rousseau dépeint dans ses confessions ; son pere, son cousin Bernard, Vulsin, le pere de Sophie, & ce Masseron, qui décide affirmativement que Jean-Jacques ne seroit jamais qu'un ouvrier ; la tante de Rousseau y est aussi, & l’auteur n'a pas négligé cette romance, que Rousseau, dans ses dernieres années, chantait encore avec tant de plaisir.

L'auteur des paroles est Andrieux. Ce nom, connu déjà si avantageusement dans la republique des lettres, nous dispense de faire mention des charmans détails qui sont le mérite. principal de cette piece, ainsi que l'esprit, de la finesse & des grâces du style ; nous observerons seulement-que l'auteur a su faire, sans affectation, des rapprochemens civiques parfaitement à l’ordre du jour.

La musique est de Daleyrac, non moins connu & non moins estimé dans son genre qu'Andrieux dans le sien. Il a eu l'idée ingénieuse d'associer Rousseau lui-même à son travail, & de lui faire partager son succès en employant plusieurs airs tirés du Devin du village, & des romances de ce célebre compositeur.

Dans la base César, 20 représentations du 23 mai 1794 au 8 mars 1796.

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