Le Fou supposé (Désaugiers an 11)

Le Fou supposé, comédie en un acte et en vers, de Marc-Antoine Désaugiers, 12 floréal an11 [2 mai 1803].

Théâtre Français, rue de Louvois

Titre :

Fou supposé (le)

Genre

comédie

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en vers

Musique :

gavotte ?

Date de création :

12 floréal an 11 (2 mai 1803)

Théâtre :

Théâtre Français

Auteur(s) des paroles :

Marc-Antoine Désaugiers

Almanach des Muses 1804

Cadre un peu usé. Quelques jolis vers. Demi-succès, qui doit engager l'auteur à s'exercer sur des sujets plus heureux.

Courrier des spectacles, n° 2249 du 13 floréal an 11 [3 mai 1803], p. 2 :

[On va au théâtre de la rue de Louvois pour rire, et il est inutile de se proposer un but plus élevé pour y réussir. Le sujet de la pièce nouvelle est dénué de fonds, mais il est riche en détails drôles et le style de l’auteur est facile. Mais si la pièce a été écoutée dans le calme, le dénouement a paru trop brusque. L’intrigue repose sur la volonté d’un jeune homme d’épouser une jeune veuve contre la volonté paternelle. Son moyen ? Simuler la folie. Il a déjà essayé le procédé sans grand succès pour tenter d’échapper à ses dettes, mais il réussit avec son père qui accepte le mariage que son fils lui impose, d’autant que la jeune veuve prend les dettes de son futur mari à son compte. La simulation de la folie, qui constitue le dénouement, a paru un moyen « déplacé et peu naturel », et le critique invite l’auteur à trouver un autre dénouement à sa pièce, par ailleurs amusante. Autre grande qualité, elle est écrite en vers, ce qui est si rare dans les pièces courtes. La fin de l’article est consacré à nommer l’auteur et les interprètes, tous jugés positivement, et qui ont su jouer avec ensemble.]

Théâtre Louvois.

Première représentation du Fou supposé.

On ne va point à ce théâtre pour pleurer à une tragédie, pour s’attendrir à un drame, mais pour rire à une comédie. Un auteur a donc atteint en partie le but qu’il s’est proposé lorsqu’il est parvenu à faire rire et à désarmer par-là le critique le plus sévere. La pièce nouvelle en est une preuve. Il n’y a point de fonds, mais ce défaut est racheté par des détails très-gais, et par une facilité de style qui présage à l’auteur des succès plus certains lorsqu’il voudra traiter un sujet plus étendu.

Son succès n’a point été contesté jusqu’au dénouement, qui a paru trop brusque et qui en effet tombe des nues. On peut en juger par cette courte analyse :

Gercour a des dettes, mais pour éloigner ses créanciers il feint d’être malade et fou. Son pere lui-même est dupe du stratagème. Un de ses créanciers,1e juif Isaac, reconnoit la fourberie, et se voyant joué il va chercher une sentence et les recors. Une veuve que Gercour aime et dont il est aimé vient sous les habits d’un jeune homme lui offrir sa bourse, et au moment où elle sort elle est arrêtée par les recors ; qui d’abord vouloient arrêter le pere. Gercour à cette nouvelle vole au secours de son amante, mais Isaïe survient le consigne, et il n’est délivré que par le retour de la jeune veuve qui se charge de payer les créanciers et qui obtient du pere le consentement à son mariage, malgré l’engagement que celui ci a pris avec un de ses amis pour unir son fils à sa fille.

Le moyen dont Gercour se sert pour forcer son pere à consentir à cet hymen, celui de contre-faire de nouveau l’insensé, a paru déplacé et peu naturel. Il seroit à désirer que l’auteur trouvât un autre dénouement, car il y a dans sa pièce des scènes très-plaisantes qui la feront voir avec plaisir.

Elle est écrite en vers, et ce mérite n'est pas peu de chose dans un moment sur-tout où la plupart de ceux qui font des comédies en un acte, croient avoir beaucoup fait lorsqu’ils ont écrit une ou deux scènes comiques de mauvaise prose.

L’auteur de cette comédie est le citoyen Desaugiers. Le citoyen Closel et madame Pélissier ont fait preuve d’intelligence dans les rôles de Gercour et de sage-femme.

Les citoyens Picard frères et Valville sont très plaisans dans ceux de médecin, de maitre de danse et d’Isaac : ils ont tous mis beaucoup d’ensemble dans cette représentation.

L'Opinion du parterre, volume 2 (germinal an XIII), p. 262 qualifie cruellement la pièce de Desaugiers de « babiole ».

La Décade philosophique, littéraire et politique, an XI de la République, IIIme trimestre, n° 23 (20 floréal), p. 312 :

[Jugement plutôt encourageant : le cadre n’est pas neuf, mais les vers sont bien écrits, il faudrait seulement appliquer un style qui n’est pas sans qualités (ni sans défauts, d’ailleurs), à « des plans un peu mieux conçus ».]

Théâtre Louvois.

Le Fou supposé, en un acte et en vers.

Un jeune homme, pour éviter les poursuites de ses créanciers et pour faire réussir son mariage, imagine de contrefaire la folie. Ce cadre usé ne présente rien de neuf ; mais l'auteur paraît avoir du talent pour écrire en vers, et son style fait desirer qu'il s'exerce sur des plans un peu mieux conçus. C'est le style qui a fait réussir l'ouvrage malgré ses défauts. L'auteur est le C. Désaugiers.                     L. C.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, VIIIe année, tome VI, p. 413-414 :

[Le compte rendu s’ouvre sur la comparaison de la nouvelle pièce avec une pièce homonyme, qui était de bonne qualité et a obtenu du succès (« intrigue […] assez agréable », « dialogue naturel »; « situations fort comiques ». La nouvelle pièce « n'a de commun avec l'autre que le titre ». L’intrigue est évoquée en quelques phrases qui soulignent son absence de nouveauté, ce qui conduit à la mise en cause des « auteurs de notre siècle », dépourvus de « génie créateur ». Mais il faudrait le faire avec talent, et « nos copistes » produisent des « imitations [qui] sont bien loin des originaux ». L’auteur est décrit comme venant du boulevard, et en pleine ascension. Pièce qui a réussi par son style et par les interprètes.]

Théâtre Louvois.

Le Fou supposé.

On a joué, il y a un an ou deux, sur un théâtre du boulevard, une fort jolie petite pièce d’un des auteurs du théâtre Louvois, sous le titre du Fou supposé. Quoique le principal personnage de cette pièce eut quelque ressemblance avec le Francaleu de la Métromanie, l'intrigue étant assez agréable, le dialogue naturel, et les situations fort comiques, elle eut un succès mérité. Celle qu’on a joué au théâtre Louvois, n'a de commun avec l'autre que le titre.

Un jeune homme, pour faire réussir son mariage et éviter les poursuites de quelques créanciers, imagine de contrefaire le fou. De là naissent quelques scènes assez gaies, qui ne sont rien moins que neuves. Nous observerons, en passant, que maintenant on ne peut rendre compte d’une pièce nouvelle, sans en citer une foule d’anciennes. Les auteurs de notre siècle n’ont pas un génie créateur ; ils imitent, et on peut dire, avec vérité, que leurs muses sont filles de mémoire. Lorsque l'on pille, a dit Voltaire, qui pilloit quelquefois, il faut tuer. C’est ce que ne font pas nos copistes ; leurs imitations sont bien loin des originaux. Les meilleures scènes du Fou supposé sont tirées de Molière, de Regnard, etc.

L'auteur, qui n’avoit encore brillé qu’au second rang, c'est-à-dire, sur des théâtres secondaires, s’est élevé rapidement. Il a été joué presqu’en même temps à Louvois et au Vaudeville ; c’est M. DÉSAUGIERS. Sa pièce a réussi, grâce au style, au jeu de M.me Pelissier, et au talent de Clozel, qui a très-bien dansé la gavotte, et qui a su faire valoir le rôle difficile du Fou supposé.

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