Greuze, ou l’Accordée de village

Greuze, ou l’Accordée de village, comédie-vaudeville en un acte, par Madame de Valory, 31 mai 1813.

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Greuze, ou l’Accordée du village

Genre

comédie-vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

31 mai 1813

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Madame de Valory

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1813 :

Greuze, ou l’Accordée de village, comédie-vaudeville en un acte ; Par Mme. de Valori. Représentée, pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 31 mai 1813.

Le texte de la pièce est précédée d’une longue Notice sur Greuze et sur ses ouvrages, et d’une dédicace à mademoiselle Greuze, signée C. de Valori.

Dans Google Books, la pièce est attribuée à Caroline Tochon comtesse de Valory (et on y ajoute M. de Beaunoir).

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 18e année, 1813, tome III, p. 445-446 :

[Comme l’auteur est une dame, le critique s’oblige à la galanterie, et modère son jugement : pièce « d’une couleur douce », qui aurait pu avoir « un peu plus de vigueur », envers laquelle « le public a été indulgent ». De toute façon « il n'y a rien dans la pièce qui ne soit avoué par le goût, et elle doit faire honneur à Madame de Valory », phrase qu’on est libre d’interpréter de façon plus ou moins favorable...]

Greuze, ou l’Accordée de village, vaudeville en un acte, joué le 31 mai.

Cet ouvrage est le tribut de la Reconnoîssance. Une jeune Dame, élève de Greuze, a voulu en tracer le portrait ; et, pour le mieux peindre, elle a fait un tableau dans la manière de son maître. Il étoit assez ingénieux de placer Greuze au milieu de ces scènes naïves qu'il a si bien représentées. L'ouvrage est d'une couleur douce ; on auroit pu lui donner un peu plus de vigueur : mais le public a été indulgent, et nous aurions mauvaise grâce à nous montrer moins galant que lui. D'ailleurs, il n'y a rien dans la pièce qui ne soit avoué par le goût, et elle doit faire honneur à Madame de Valory.

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome VI, juillet 1813, p. 292-296 :

[Une idée à retenir : cette pièce est d’une dame, et on ne peut donc en dire du mal. Bien sûr, elle est d’une « douceur un peu fade », elle est remplie « de petites maximes rebattues, de niaiseries, sentimentales, pastorales, patriarchales », mais elle est d’une dame (dont le nom est cité sans qu’on sache si elle a été nommée). Après tout, cette femme peut progresser et apprendre à écrire pour le théâtre (savoir tourner un couplet, lier des scènes, mettre du trait et de la vivacité dans le dialogue, tout cela s’apprend. Après ces préliminaires, un rapide résumé de l’intrigue, en effet peu intéressante, sert de tremplin vers des anecdotes sur la vie de Greuze, puis vers une évaluation de son œuvre picturale. Retour final vers la pièce, dont on rappelle qu’elle est d’une dame, ce qui explique la bienveillance du parterre. Mais la versification n’a tout de même pas la belle facilité de celle de Lemierre, ni « la douceur des sentimens » exprimés.]

Théâtre du Vaudeville.

Greuze, ou l'Accordée de Village.

On pourrait dire de cette pièce ce qu'une grande princesse disait des ouvrages de Florian : Quand je les lis, il me semble que je mange de la soupe au lait. Ce mot, rapporté par Grimm, exprime assez bien la douceur un peu fade de cet assemblage de petites maximes rebattues, de niaiseries, sentimentales, pastorales, patriarchales, qu'on entend dans l’Accordée de Village. Tout cela est le plus honnête du monde ; mais cette morale, excellente en elle-même, débitée sur le théâtre du Vaudeville, trouve des auditeurs si mal disposés, qu'il arrive, je ne sais comment, qu'au lieu d'être édifié, on s'ennuie un peu. Au reste, c'est sur l'intention plutôt que sur l'exécution, que cette pièce doit être jugée.. Elle a été inspirée par un sentiment très-louable : c'est un hommage rendu à un maître chéri par une élève reconnaissante, et ce motif doit être pris en considération. L'auteur,. qui est une femme, paraît ne pas connaître encore bien la scène ; mais elle est jeune, dit-on, et cette connaissance peut s'acquérir avec le temps. Il y aura bien du malheur, si le talent de tourner un couplet n'arrive pas ensuite. Pourquoi l’art de lier les scènes, de mettre du trait, de la. vivacité dans le dialogue, ne viendrait-il pas à son. tour ? D'ailleurs, Mme. de Valory ne sera pas toujours inspirée par la reconnaissance : plus maîtresse d'elle-même en traitant quelqu'autre sujet, elle ne laissera pas, comme cette fois, entièrement étouffer son esprit par le sentiment.. Espérons donc et attendons ; le temps est un grand maître. Au pis aller, si rien de tout cela n'arrivait, Mme. de Valory en serait quitte pour ne plus faire de pièce en vaudevilles, et sans doute elle n'en serait ni moins aimable, ni plus malheureuse.

Dans l'Accordée de Village, l'auteur suppose que Greuze, épris d'une jeune paysanne, veut l'épouser, quelque peu de convenance qui se trouve eutr'eux. Les conseils de son ami Lemierre le font renoncer à ce projet. La petite paysanne, nommée Thérèse, aime beaucoup Greuze, et paraît fort douce. Lemierre rend donc un mauvais service à son ami en s'opposant à ce mariage. On sait que Greuze épousa, par la suite, une espèce de Xantippe, un vrai démon dont la méchante humeur empoisonna sa vie. Par malheur, il en était amoureux, et ne pouvait vivre avec elle ni sans elle. Les deux époux se querellaient sans cesse et sans fin. Un jour qu'ils étaient à table, l'altercation devint si vive, que Mme. Greuze se saisit d'une carafe, et la jetta à la tête de son mari ; celui-ci esquiva le coup, et la carafe alla briser une glace, derrière lui. Quelques jours après, Greuze, en contant son aventure à un jeune peintre, ajouta, avec ce ton d'inspiré qui lui était propre : Savez-vous, mon ami, quelle terrible vengeance j’en ai tiré ? (L'ami attendait avec anxiété) j'en ai fait un dessin admirable. C'était se venger en artiste : la gravure a perpétué le souvenir de cette dispute matrimoniale.

Greuze, si justement célèbre aujourd'hui, avait été fort pauvre dans sa jeunesse. Il fut souvent réduit à peindre des enseignes pour vivre, et pour subvenir aux frais des tableaux qu'il essayait de produire. Il se fit bientôt remarquer par un talent vraiment original et directement opposé à la manière des peintres de son temps. C'est avec raison qu'on dit, dans la pièce, que ses tableaux sont des tableaux moraux. Il ne s'est pas contenté, comme les peintres qui traitent des sujets familiers, de représenter une femme qui pèle une orange, ou un vieillard qui taille une plume ; ses compositions retracent des scènes touchantes qui réveillent la sensibilité, touchent le cœur, et inspirent la vertu. Il n'est pas nécessaire d'être connaisseur pour les aimer, ils sont à la portée de tout le monde : aussi nul peintre n'a vu graver ses ouvrages avec plus d'empressement. On trouve les estampes des tableaux de Greuze dans les appartenons des grands, des riches, chez de modestes bourgeois, de pauvres artisans, et chez les plus simples habitans des campagnes. Il est fâcheux que le musée ne possède aucun des ouvrages de cet artiste.

On savait d'avance que l'Accordée de Village était d'une dame : le parterre s'est montré galant ; la pièce a été achevée et n'a pas été sifflée. Je ne sais si c'est le voisinage de Lemierre qui a porté malheur à l'auteur ; mais la dureté de certains vers contrastait d'une manière bizarre avec la douceur des sentimens qu'ils devaient exprimer.

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