La Généreuse Supercherie

La généreuse supercherie, comédie en trois actes, en prose, 7 octobre 1793.

Théâtre de Louvois.

Titre :

Généreuse Supercherie (la)

Genre

comédie

Nombre d'actes :

3

Vers / prose

en prose

Musique :

non

Date de création :

7 octobre 1793

Théâtre :

Théâtre de Louvois

Auteur(s) des paroles :

 

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1794, volume 2 (février 1794), p. 288-291 :

[Le compte rendu s’ouvre, comme d’habitude, par le résumé de l’intrigue, mais ce résumé rompt avec la règle de la neutralité : dès le troisième paragraphe, un personnage est qualifié d’« inutile peut-être pour la pièce », accusation reprise à la fin. La partie proprement critique part de l’anonymat réclamé par l’auteur (que le critique connaît) : il l’approuve, et critique vertement la pièce ; « froide », « dialogue... facile sans être bien piquant », « les entrées & les sorties ne sont pas en général motivées, sur-tout dans le troisieme acte ». Et deux rôles féminins sont, l’un inutile, l’autre invraisemblable. «  On reconnoit dans cet ouvrage la touche d'un homme qui a passé sa vie dans ce qu'on appelloit autrefois la bonne compagnie ;on y rencontre très fréquemment ces nuances fines & légeres » que ne connaissent que les hommes du monde, mais ce n’est pas suffisant.]

La généreuse supercherie, comédie en trois actes, en prose.

Mme. de Vilnord, jeune veuve, riche, aimable, coquette, & aimant à l'excès, à ce qu'on nous apprend, la dissipation & le plaisir, a pris chez elle une niece, dont le pere est mort dans l'Inde, entiérement ruiné. Elle veut la former pour le monde où elle vit ; mais Mlle. d'Erville ne peut heureusement plier son ame à tous les petits travers qui font le bonheur de sa tante. Aussi Mme. de Vilnord auroit envie de la marier en province à un benêt qui ne voudroit que la vertu.

Elle parlé de ce projet à son ami, M. de Versan ; elle veut l'engager à en parler à M. de St-Alvire, un autre de ses amis, & à ce sujet elle fait, avec un certain plaisir, l'éloge de ce dernier. Rien n'est plus naturel ; elle l'aime en secret ; elle voudroit l'épouser : mais M. de St.-Alvire a donné son cœur à une autre personne, c'est à la jeune d'Erville. Comme il est fort riche, il craint que ses parens ne lui permettent pas de satisfaire le penchant de son cœur. Sa tendresse pour Mlle. d'Ervills lui inspire alors un projet noble & généreux. Il fait tenir au notaire de M. de Grémont, grand-oncle de la jeune orpheline, une somme de cent mille écus, que l'on suppose revenir à cette aimable personne des débris recueillis dans l'Inde, de la fortune de son pere.

Au milieu de cette intrigue , se trouve une Mme. de Mireval, inutile peut-être à la piece, amoureuse aussi de M. de St.-Alvire. Cette femme craint que Mme. de Vilnord n'ait également des vues sur lui, & pour s'en éclaircir, elle parle à celle-ci d'un mariage qu'on dit qu'elle va contracter avec un M. Dorceil, jeune dissipateur. Mme. de Vilnord s'en défend beaucoup. Elle est même étonnée que Dorceil ait pu faire courir un pareil bruit, qui n'a aucun fondement. Cependant, apprenant que M. de St.-Alvire aime sa niece d'Erville, elle cherche aussi-tôt à se débarrasser d'une telle rivale, en la mariant à ce même Dorceil.

Heureusement pour tout le monde, M. de Grémont, qui a entendu parler de ce mariage qu'il rejette, tandis qu'il approuve au contraire celui de St.-Alvire, annonce à Mme. de Vilnord que Dorceil est un joueur, entiérement ruiné, ainsi que son pere, qui passoit pour un riche avare, & qu'il a perdu au jeu jusqu'au prix d'une maison de campagne qu'elle l'avoit chargé de vendre. Voilà donc Mme. de Vilnord détrompée sur Dorceil ; elle apprend en même-tems la supercherie généreuse de M. de St.-Alvire : alors elle se repent d'avoir cherché à troubler une passion aussi tendre que délicate, elle consent au mariage de sa niece, elle se punit même en ajoutant deux cents mille francs à la dot de Mlle. d'Erville, & elle récompense du don de sa main l'attachement de M. de Versan, qui n'a pu s'empêcher de l'aimer. Bien mieux, elle leur promet à tous qu'elle ne s'entourera a l'avenir que d'ames honnêtes, sensibles & vraies. « J'aime le monde, ajoute-t-elle, j'y jouirai des charmes qu'y répandent sans cesse l'esprit, le talent, le goût, les graces & les plaisirs ; mais ils ne seront plus pour moi que comme les fleurs dont on se pare, & sur la durée desquelles on » ne sauroit compter. » Nous avons retenu cette derniere phrase avec plaisir.

L'auteur de cet ouvrage ayant désiré de garder l'anonyme, nous ne le nommerons pas ; nous dirons seulement que, quelque brillant qu'eût été son succès, il n'auroit rien ajouté à sa réputation. Cette comédie nous a paru froide ; le dialogue en est facile, sans être bien piquant ; les entrées & les sorties ne sont pas en général motivées, sur-tout dans le troisieme acte. Mme. de Mireval, par exemple, ne tient point à la piece, & l'on ne conçoit pas comment Mme. de Vilnord, qui a le grand usage du monde, peut être un seul instant la dupe de Dorceil. On reconnoit dans cet ouvrage la touche d'un homme qui a passé sa vie dans ce qu'on appelloit autrefois la bonne compagnie ; on y rencontre très fréquemment ces nuances fines & légeres, qui échappent à ceux de nos écrivains dramatiques qui prétendent peindre le monde & la société sans être sortis de leur cabinet.

La base César signale la première de la Généreuse supercherie, comédie en 3 actes, d’auteur inconnu, jouée seulement le 7 octobre 1793 au Théâtre des Amis de la Patrie.

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