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L'Héritier de Paimpol

L'Héritier de Paimpol, opéra-comique en trois actes, de Sewrin, musique de Bochsa, 29 décembre 1813.

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Titre :

Héritier de Paimpol (l’)

Genre

opéra comique

Nombre d'actes :

3

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

29 décembre 1813

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique

Auteur(s) des paroles :

Sewrin

Compositeur(s) :

Bochsa

Almanach des Muses 1815.

Un vieil oncle lègue son château à M. Casimir-Sylvain Rupert. Un frère de celui-ci est appelé à partager l'héritage, mais il est absent ; on ne sait où il est, et M. Casimir fait acte de propriétaire, se montre même passablement insolent, tant il est vrai que, du petit au grand, la richesse, comme les honneurs, dérange aisément la tête. Cependant le frère absent arrive, et, grâce à quelques ruses employées par son valet, obtient sa part dans la succession et facilite le mariage de sa nièce.

Ouvrage dont la musique a été surtout remarquée.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, sevend au Magasin de la rue Neuve St.-Marc, 1814 :

L'Héritier de Paimpol, opéra-comique en trois actes, Paroles de Mr. Sewrin, Musique de Mr. Charles Bochsa : Représenté, pour la première fois, à paris, sur le Théâtre de l'Opéra-Comique, rue Feydeau, le 29 Décembre 1813.

L'Esprit des journaux français et étrangers, année 1814, tome I (janvier 1814), p. 294-298 :

[Le compte rendu s’ouvre sur un constat heureux : la nouvelle pièce vient couronner une année très active au Théâtre de l’Opéra-Comique. Puis il livre l’analyse du sujet, une histoire d’héritage qu’un jeune homme a reçu seul, du fait de l’absence de son frère, qui resurgit et obtient sa part d’héritage par la ruse de son valet, et par le hasard d’un général de passage dans le village et qui donne crédit à ses affirmations. Mais la richesse qu’il a proclamée consiste en dettes, qu’il peut désormais payer : le frère trompé ne peut que s’incliner, et laisser sa fille profiter de la dot que lui donne son oncle nouvellement apparu (oui, l’intrigue est compliquée). La musique est d’un débutant et elle convient parfaitement à la pièce. Elle prouve « que notre opéra-comique peut s'enrichir, sans se dénaturer, des formes brillantes de l'opéra-buffa » (il y a un vif débat sur les rapports entre opéra-comique français et opera buffa italien : le critique souhaite que l'opéra-comique ose « s'enrichir, sans se dénaturer, des formes brillantes de l'opéra-buffa »). Bonne interprétation de Martin (un des ténors vedettes du temps), mais son grand air n’a pas eu l’effet qu'on en attendait, par manque d’expression : ces grands airs « fatiguent plutôt l'oreille qu'ils ne la flattent ». Même appréciation très élogieuse pour Madame Gavaudan, parfaite dans son rôle.]

THÉATRE DE L'OPÉRA-COMIQUE.

L'Héritier de Paimpol.

Ce serait ici le moment de dresser la liste des nouveautés qui ont paru sur le théâtre Feydeau pendant le cours de l'année 1813. Si toutes n'ont pas été heureuses, la rapidité avec laquelle nous les avons vu se succéder atteste au moins le zèle presque sans exemple des sociétaires ; et le public avouera lui-même que les succès ont été plus fréquens et les chutes moins nombreuses que le cours ordinaire des choses ne permettait de l'espérer. L'année vient enfin de se terminer par un grand ouvrage en trois actes, enrichi d'une musique beaucoup plus remarquable encore que la pièce : pouvait-on mieux faire ?

M. Casimir-Sylvain Rupert est tranquillement établi dans un château, près de Paimpol en Bretagne, qu'un vieil oncle lui a légué par testament. Un autre frère, Hippolyte Rupert, est bien appellé au partage de la succession ; mais il est absent, et son séjour est totalement inconnu. Le testateur lui donne, en conséquence, huit ans pour se représenter, mais, passé ce terme, l'aîné doit demeurer seul héritier légal. Il y a déjà si long-temps qu'Hippolyte n'a donné signe de vie, que Casimir s'abandonne sans crainte sur l'avenir au plaisir de posséder un château, un parc, des fermes et des bois magnifiques. Insolent comme un parvenu, oubliant même, sous le nom de baron de Paimpol, celui qu'il porta jadis, et les parens qui le portent encore, il a donné les ordres les plus précis à son valet, Luc, de repousser impitoyablement tout individu de chétive apparence. Sa digne moitié, coquette surannée, ou plutôt vieille caricature jouant la grande dame, est encore plus arrogante, plus dure et plus avare. Qui croirait que de ce couple impertinent est née la jeune personne la plus aimable qu'il soit possible de se figurer ?

Un jour que la consigne de Luc venait d'être renouvellée avec un surcroît de rigueur, se présentent à la porte du château deux piétons, dont la mise extrêmement simple n'est pas de nature à la leur faire ouvrir : aussi sont-ils traités nettement de vagabonds par M. Luc. Un soufflet est le prix de son audace. Luc sonne bravement le tocsin, comme si le feu était dans le village : monseigneur arrive en haute personne, et s'apprête à faire châtier le téméraire voyageur, lorsque celui-ci se fait reconnaître pour le frère Hippolyte. Quelle source d'appréhensions cruelles ? Rien n'est plus pressé que de faire repartir ce frère incommode, et vingt-cinq louis lui sont offerts pour prendre une place à la diligence de Paris ; mais les créanciers d'Hippolyte l'attendent dans cette ville : que devenir ? Un stratagême du fidèle Pierre, son valet, opère une révolution soudaine dans le cœur, ou du moins dans les manières des deux époux : Pierre, s'appercevant que M. de Paimpol est aux écoutes, s'amuse à dépeindre quel sera l'excès de sa surprise lorsqu'il découvrira que dans la poche de son modeste surtout, ce frère, censé si pauvre, cache un porte-feuille de cinq cent mille francs, et que ce piéton poudreux est cependant arrivé dans une voiture superbe, qu'il a laissée à la poste voisine. M. de Paimpol ne doute point qu'Hippolyte ne soit venu, sous ce modeste appareil, mettre sa tendresse fraternelle à l'épreuve. Il n'a pas de peine à faire partager cette idée à sa femme ; et, de ce moment, l'on peut se représenter de combien de soins et de prévenances sont comblés le maître et le valet. Quant à la jeune personne, elle fait précisément tout le contraire de ses parens. Au lieu de dissimuler avec son oncle, elle lui ouvre son ame toute entière; il apprend donc qu'elle aime et qu'elle est aimée à l'insçu de ses parens ; que sa mère ne lui donne que des leçons de solfége ; mais qu'elle sait des chansons beaucoup plus gaies ; que son père ne lui a enseigné que de gauches révérences ; mais que sa danse devient tout-à-coup vive et légère, lorsqu'elle peut prendre une part furtive aux fêtes du village. Hippolyte met à profit l'ascendant que lui donne sa situation : il se fait admettre sans peine au partage de la succession, quoique le terme fixé soit passé depuis un jour, et il obtient le double consentement nécessaire au mariage de son aimable nièce. Les paysans se rassemblent pour offrir des bouquets à la demoiselle, et saluer le frère de monseigneur, qu'un quiproquo a fait prendre pour un général inspectant les côtes ; mais à l'instant même se présente un huissier, porteur d'un décret de prise de corps : toute feinte cesse ; les sieur et dame de Paimpol se voient joués et dépouillés ; mais que leur reste-t-il à faire ? De se livrer à des accès de fureur qui ne remédieraient à rien, ou de prendre leur mal en patience. Ils prennent ce dernier parti, et la pièce finit assez gaîment, beaucoup moins pourtant qu'elle n'avait commencé. M. Sewrin en est l'auteur.

La musique est le coup d'essai d'un jeune artiste connu par un talent du premier ordre, sur la harpe, et par des œuvres détachées qui donnaient l'idée la plus avantageuse de son goût : il a pleinement réalisé l'espoir des amateurs dans cette composition dramatique : les chants en sont faciles, gracieux, le style élégant, et toute la facture, en général, d'une excellente école. Uue introduction singulièrement piquante, et plusieurs morceaux d'ensemble, tels qu'un quintetto vivement applaudi, rangent déjà M. Bochsa parmi les compositeurs qui sont appellés à prouver que notre opéra-comique peut s'enrichir, sans se dénaturer, des formes brillantes de l'opéra-buffa ; il ne faut rien outrer, rien précipiter, et, en dépit de quelques clabaudeurs étrangers à l'art, cette révolution, ou plutôt cette amélioration dans notre systême musical, sera consacrée par le temps et le perfectionnement du goût.

Le rôle de Pierre est du genre de ceux qui conviennent particulièrement à Martin ; il y est comique sans effort : comme chanteur il est arrivé au point où tous les éloges ne sont plus qu'une répétition de mots. On doit néanmoins observer que, dans ce nouvel opéra, comme dans une foule d'autres, le morceau où cet habile artiste produit le moins d'effet, se trouve être précisément celui qui semble calculé pour en faire davantage. Ces grands airs hors-d'œuvre peuvent démontrer le talent du chanteur, mais ils manquent tous d'expression, et fatiguent plutôt l'oreille qu'ils ne la flattent.

Mme. Gavaudan remplit le rôle de la jeune personne ; elle le joue trop bien, peut-être, puisqu'elle court risque d'y faire oublier ceux où elle a obtenu jusqu'ici le plus de succès. Si je connaissais quelqu'un chargé de peindre la naïveté unie à l'enjouement, et la finesse à la grace, je lui dirais : allez voir Mme. Gavaudan.

Magasin encyclopédique ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1814, tome I (janvier), p. 169-171 :

[Analyse du sujet. Le critique attire ensuite l’attention sur le rôle de la jeune fille et sur l’interprète, qui le joue « de la manière la plus gaie et la plus comique ». Les auteurs : Sewrin, simplement cité (mais a-t-il besoin qu’on le félicite ?) et Bochsa, dont le début « doit donner de grandes espérances ».]

Théâtre de l'Opéra Comique.

L’Héritier de Paimpol,. opéra en trois actes, joué le 29 décembre 1813.

Casimir-Silvain Rupert a recueilli seul la riche succession d'un oncle qui, entre autres propriétés, lui a laissé la belle terre de Paimpol. Rupert en a pris le nom ; il jouit de ses richesses avec une sécurité d'autant plus grande que depuis longtemps on n'a pas de nouvelles d'Hippolyte, son frère d'un second lit, avec lequel le testateur lui prescrivoit de partager l'héritage, s'il se représentait dans l'espace de huit années ; le terme est expiré de la veille, et M. de Paimpol est légitime et unique possesseur de toute la succession. En partant pour la promenade du matin avec sa femme et sa fille Nanine, il a recommandé expressément à Luc, son valet, de ne laisser entrer personne au château, et d'en éloigner surtout les gens mal vêtus et dont l'extérieur annonce le besoin. Hippolyte Rupert et Pierre, son valet, après avoir couru le monde, arrivent à Paimpol. Leur équipage est contenu dans un bissac. Pierre frappe à la porte ; Luc paroît, et, sur la mine, reçoit les deux voyageurs assez rudement ; Hippolyte et son valet pénètrent. malgré lui dans le château. Luc ferme la porte sur eux, et sonne le tocsin ; tout le village accourt; on saisit les deux inconnus, et on va les traîner en prison, quand M. de Paimpol arrive. Hippolyte a la prudence de ne se faire connoître qu'à lui seul, et, dans un entretien particulier, ce frère généreux lui offre magnifiquement des chevaux jusqu'à la première poste et 25 louis pour retourner à Paris. Pendant qu'il va chercher cette somme, le rusé Pierre imagine un moyen de vengeance. Paimpol revient, et le valet, bien sûr d'être entendu, improvise un discours dans lequel il parle à son maître des richesses immenses qu'il auroit eu tant de plaisir à partager avec sa famille ; Hippolyte saisit son intention, et il tire de sa poche un porte-feuille où sont, dit-il, les cinq cent mille fr. dont la moitié étoit destinée à son frère. Paimpol, qui n'a pas perdu un mot de la conversation, devient généreux par avarice ; il s'excuse de la première réception qu'il a faite à un frère chéri, et cherche à la lui faire oublier par l'accueil le plus flatteur. Tout le château est aux ordres du nouveau venu. Cependant un reste de méfiance a engagé les époux bretons à envoyer Luc jusqu'à la poste voisine pour s'assurer de l'existence d'une belle voiture et de valets richement habillés dont Pierre a parlé à dessein. Le hasard permet que l'équipage d'un général, envoyé pour inspecter les côtes, se trouve précisément arrêté à la poste dans ce même instant. Les égards, les attentions redoublent pour Hippolyte ou plutôt pour M. le général. Il y a, en son honneur, cercle au château, fête au village ; le poète de l'endroit lui adresse des vers, et M. de Paimpol lui rend la moitié de l'héritage, bien persuadé qu'il n'aura jamais mieux placé son argent. Mais il est bientôt désabusé. Un maudit huissier de Saint-Brieux vient relancer Hippolyte jusqu'au château pour une lettre-de-change qu'il a laissé protester. En vain l'imperturbable Pierre veut le faire passer pour un vieux militaire ; M. de Paimpol observe qu'il n'a jamais vu d'uniforme pareil au sien. La vérité éclate. Hippolyte, dépouillé du titre de général, publie hautement le noble désintéressement de son frère qui a partagé avec lui la succession qu’i1 pouvoit garder en entier. M. de Paimpol est obligé de faire contre fortune bon cœur, et le nouvel héritier employe généreusement la moitié de ce qu'il vient de recouvrer à doter sa nièce Nanine.

Ce rôle de Nanine est un de ceux qui ont assuré le succès de la pièce : il est joué par Madame Gavaudan de la manière la plus gaie et la plus comique.

La pièce est de M. SEWRIN. La musique est le premier ouvrage que donne au théâtre M. Bochsa, connu par son talent sur la harpe. On a remarqué, entre autres morceaux, le premier trio et l'air chanté par Madame Gavaudan. Le début de ce jeune compositeur doit donner de grandes espérances.

Mémorial dramatique: ou Almanach théatral pour l'an 1815, p.41-43 :

[Après le traditionnel résumé de l’intrigue, le jugement porté est mitigé : le sujet n’est pas neuf, et le critique cite plusieurs pièces sur le même thème. Il a fallu procéder à des coupures entre les premières représentations. C’est la musique qui doit être valorisée.

L'Habitant de la Guadeloupe est une comédie en quatre actes (puis trois) de Louis-Sébastien Mercier. Elle a été publiée en 1782.]

L'HÉRITIER DE PAIMPOL. opéra-comique en 3 actes, paroles de M. Sewrin, musique de M. Bochsa.                (30 décembre.)

La scène est à Paimpol, en basse-Bretagne. M. Rupert a hérité de la terre et du château de ce nom ; mais l'oncle qui les avait légués, se souvenant qu'il avait encore un neveu, sur la mort duquel on n'a que des présomptions ; a stipulé, dans son testament, que si ce neveu reparaissait avant un terme fixé, il aurait droit à la moitié de l'héritage. Le terme est expiré, et M. Rupert est devenu seul propriétaire de Paimpol. Tout-à-coup le frère déshérité y arrive dans un costume qui n'annonce pas que ses voyages l'aient beaucoup enrichi, mais accompagné d'un valet qui est pour lui un véritable trésor. Rupert, forcé enfin de le reconnaître, a poussé la tendrese [sic] fraternelle jusqu'à lui offrir six cents francs pour s'en retourner bien vîte, c'est alors que le valet dispose ses batteries. Par une ruse adroite, il persuade à Rupert que son frère Hypolyte, imitant la conduite de l'Habitant de la Guadeloupe, a voulu l'éprouver, et qu'il possède une fortune de plus de 500,000 francs. Rupert et sa femme donnent dans le piège : ils s'empressent de jouer les beaux sentimens, et de rendre à Hippolyte, par un acte en bonne forme, sa portion d'héritage. Un huissier, chargé de poursuivre le prétendu crésus, vient dévoiler tout le mystère ; mais Hippolyte, par sa générosité, console un peu M. et Madame Rupert d'avoir été si prompts à lui faire une restitution. La moitié de ce qu'on lui a rendu devient la dot de sa nièce, la petite Nanine; qu'il marie à son amant.

L'idée principale de cette pièce se retrouve dans le Tartuffe de Mœurs, l’Habitant de la Guadeloupe, et plusieurs autres ouvrages ; quelques longueurs ont nui à la première représentation, mais des coupures ont affermi son succès : la musique qui a plu généralement a fait concevoir du talent de M. Boscha les plus heureuses espérances.

Nicole Wild, David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 275, disent que la pièce a été jouée jusqu’en 1814. Mais elle  a été créée à la fin de 1813...

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