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L'Illuminé, ou le Nouveau Cagliostro

L'Illuminé, ou le Nouveau Cagliostro, comédie en quatre actes, de Boursault-Malherbe, 3 janvier 1807.

Théâtre des Variétés Étrangères

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Antoine-Augustin Renouard, 1807 :

L'Illuminé, ou le Nouveau Cagliostro, comédie en quatre actes, imitée de l'allemand de Söden ; Représentée, pour la première fois, sur le théâtre des Variétés Etrangères, le 5 janvier 1807.

La date de création donnée par la brochure est inexacte, puisque cette première a eu lieu le 3 janvier.

Le titre est également sujet à bien des variations : si la brochure porte l'Illuminé, ou le Nouveau Cagliostro, le Courrier des spectacles l'appelle les 3 et 4 janvier le Nouveau Cagliostro, et le 5 janvier le Nouveau Cagliostro ou les Illuminés. Le 7, il annonce simplement l'IlluminéDans le Journal de Paris, en janvier, on trouve aussi comme titre le Nouveau Cagliostro ou Imposture, crédulité et faiblesse.

Courrier des spectacles, n° 3615, du 4 janvier 1807, p. 4 :

[De la pièce qualifiée de drame, quand la brochure parle de comédie, le critique ne retient que le fantastique, apparitions, revenants et fantasmagories, et surtout un dénouement « noir et lugubre ». La pièce a plu pourtant parce qu'elle est bien cons truite, et qu'elle est bien interprétée, avec une débutante aux belles qualités « de chaleur et de sensibilité ».]

Le Nouveau Cagliostro a réussi hier au Théâtre Molière. C’est un drame qui, dans le commencement et même dans le second acte, n’offre rien de bien extraordinaire ; mais au troisième, il sort de la sphère de nos comédies. Cagliostro y déploie tout l’art de la magie et tous les prestiges des apparitions, des revenans et de la fantasmagorie. Le dénouement est noir et lugubre ; mais l’ouvrage a, en général, réuni les suffrages des spectateurs, et a dû son succès autant à la maniere dont plusieurs scènes fortes et pathétiques sont amenées, qu’au jeu des acteurs , et en particulier de Mad. Dacosta, qui a debuté hier, et a joué avec beaucoup de chaleur et de sensibilité.

Courrier des spectacles, n° 3616, du 5 janvier 1807, p. 2-3 :

[Après le court article de la veille, un vrai compte rendu, qui commence par parler de ce Cagliostro dont la pièce présente un successeur. Mais c'est pour ridiculiser la croyance que beaucoup ont en ce genre de personnage, qualifié de charlatan : « Clisonus et Robertson » ont montré qu'il s'agit de simples supercheries. Mais le théâtre continuera longtemps à tirer parti de ce genre de tromperie. Le résumé de l'intrigue est fait pour montrer que le « nouveau Cagliostro » à l'égal de son prédécesseur n'est qu'un escroc jouant de la naïveté de ceux qui l'ont accueilli et qu'il est bien près de tromper, une scène d'évocation étant suffisamment puissante pour conduite au suicide un des personnages. La fin est bien sûr morale : l'escroc est arrêté, et « livré à la juste vengeance des lois ». L'effet d'un tel tableau est riche d'émotions et influence fort « les ames timides ». Le spectacle est tout à fait réussi, à « quelques détails inutiles » et à quelques vices de style » près, et la pièce devrait « obtenir un grand succès ».]

Théâtre Molière, Variétés Etrangères.

Le Nouveau Cagliostro, ou les Illuminés,

Il y a vingt ans que le véritable Cagliostro faisoit tourner toutes les têtes à Paris, que les premiers personnages de la cour, les beaux esprits par excellence payoient chèrement le plaisir et l’honneur d’assister à ses soupers, d’être témoins de ses merveilleuses évocations. Etrange contradiction de l’esprit humain ! De prétendus philosophes, des esprits forts et hautains, qui auroient presque rougi de croire en Dieu, qui affectoient la supériorité des idées, l'indépendance des opinions, se laissoient sottement mystifier par un charlatan, et se pavanoient de leur sotte crédulité.

Clisonus et Robertson ont vendu plus de service qu’on ne croit à l'humanité; en révélant tous les mystères de la fantasmagorie, ils ont montré combien il est facile à quelques jongleurs habiles de se jouer de la foiblesse humaine, et de transformer en prodiges les simples jeux de la lanterne magique.

Le nom de Cagliostro vivra long-tems, et parmi les erreurs dont on pourra tracer l’histoire, les folies des Illuminés tiendront un rang distingué. Une pièce de Théâtre destinée à les retracer ne sauroit manquer d’obtenir beaucoup de succès ; c’est ce qui est arrivé à celle qu’on vient de représenter au Théâtre Molière ; tout est fait pour piquer la curiosité.

Un Baron Allemand fort riche, et gouverneur d'une province, reçoit cher loi un aventurier qui se fait passer pour un homme extraordinaire, issu d’un sang illustre, et décoré du titre de Comte de Santa Vecchia. Le Baron est un personnage crédule, disposé à se laisser mystifier par le premier venu. Il se laisse tellement éblouir par le langage mystique et les opérations de fantasmagorie du prétendu Comte de Santa-Vecchia, qu’il n’ose plus voir que par ses yeux, entendre que par ses oreilles. Le Charlatan profite de l’occasion pour s’établir dans la maison. Il traine à sa suite une jeune personne nommée Mathilde, qu’il a enlevée à son père. Il essaie de s’approprier de la même manière Léonore, fille du Baron. Il lui fait apparoître sa mère, qui lui commande de n’aimer que l’illustre Comte de Santa-Vecchia. I1 est contrarié dans ses desseins par Lindorf, jeune officier amoureux de Léonore, et fort peu disposé à croire aux prétendus prodiges du nouveau Cagliostro. Pour écarter ce rival incommode, Santa-Vecchia exalte la tête de Leonore, et parvient à se faire regarder comme un génie supérieur. D’un autre côté, il engage Mathilde à tenter la foi du Capitaine par de tendres aveux et de séduisantes propositions ; mais Lindorf résiste à tout, et demeure fidèle à Léonore. Alors Santa Vecchia prépare une grande scène d’apparition» pour arriver à se» desseins. Le fantôme ordinaire s'étant esquivé, on. prend pour le remplacer un vieillard inconnu, que l’on ényvre à dessein.

Les évocations commencent, le spectre paroît ; Mathilde reconnoît son père dans la personne de ce vieillard. Le Capitaine témoin de cette scène, court appeler la force-armée. Léonore troublée, presse de ses questions le prétendu magicien ; elle reconnoit qu’elle est sa victime, et désespérée d’avoir immolé son honneur à un misérable, elle prend un breuvage empoisonné et périt. L’aventurier est saisi, et livré à la juste vengeance des lois.

Ou sent combien ce tableau doit inspirer d’émotions ; combien d’allarmes il doit porter dans les ames timides ; de quel appareil il est susceptible. Tout cela a été très-bien rendu au Théâtre des Variétés Etrangères, et si l’on retranche quelques détails inutiles, si l'on remédie à quelques vices de style, cette pièce doit obtenir un grand succès.

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