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L'Imprimeur, ou la Fête de Franklin

L'Imprimeur, ou la Fête de Franklin, comédie en deux actes & en prose, de M. Desfontaines, 8 avril 1791.

Théâtre de Monsieur.

Titre :

Imprimeur (l’), ou la Fête de Franklin

Genre

comédie

Nombre d'actes :

2

Vers / prose

prose

Musique :

non

Date de création :

8 avril 1791

Théâtre :

Théâtre de Monsieur

Auteur(s) des paroles :

M. Desfontaines

Journal de Paris, n° 101 du 11 avril 1791, p. 408 :

[Ce compte rendu met fortement l’accent sur les données politiques : l’essentiel, c’est l’affaire du pamphlet traitreusement imprimé par le directeur malintentionné. Et le succès de la pièce montre qu’elle reflète les sentiments patriotiques des « gens honnêtes ».]

THÉATRE DE MONSIEUR.

L’Imprimeur, ou la Fête de Franklin, Comédie en deux actes, en prose, représentée vendredi à ce Théâtre avec succès, est une Pièce sur les Pamphlets incendiaires contre lesquels l’Auteur s’éleve de toutes ses forces, à la grande satisfaction des gens honnêtes. Cet Imprimeur, nommé Germeuil, n’en laisse sortir aucun de ses presses. cependant le Directeur de son Imprimerie y a fait travailler la nuit à un Libelle dangereux. On vient le saisir, & on en trouve grand nombre d’exemplaires. Germeuil est arrêté, mais ensuite le complot est découvert : un Ouvrier qu’on avoit gagné le révèle : c’est le perfide Directeur qui avoit voulu se venger du refus qu’avoit fait Germeuil de lui accorder sa fille. Celui-ci donne sa place à un Ouvrier garçon fort zélé, & la main de sa fille à Dorlis, qui en est aimé. Ce jour-là même il célèbre la fête de Franklin, & fait de son buste une espèce d’inauguration. La Pièce finit par un vaudeville.

Il y a dans ces deux actes de bons principes sur la liberté de la presse, & des traits agréables qui n’ont pas échappé aux Spectateurs. Le rôle de l’Imprimeur a été très bien joué par M. Paillardelle, & celui du Gascon par M. Pélissier.

L’action est supposée très moderne : car il y est question de la perte encore bien sensible d’un des plus illustres Fondateurs de la Constitution françoise. On a demandé l’Auteur, qui est M. Desfontaines.

Mercure universel, n° 40 du samedi 9 avril 1791; p. 143 :

[Compte rendu un peu ironique d’une pièce qui vaut plus par ses intentions, louables, que par son exécution, contraire aux règles de l’art. La dernière remarque sur le dénouement montre le ridicule de ces mariages qui closent obstinément toutes les pièces de théâtre. On note que la dimension politique de l'œuvre est passée sous silence : une simple allusion à Franklin, rien sur les risques politiques du métier d’imprimeur, ou sur la liberté de la presse.]

THEATRE DE MONSIEUR.

On a donné hier la première représentation de l’Imprimeur ou la fête de Franklin, comédie en deux actes et en prose.

Si pour prononcer sur un ouvrage, il faut séparer l’intention de l’exécution, le jugement qu’on portera de celui-ci doit lui être favorable ; mais si, au contraire, on consulte moins le but que les règles de l'art, cette dernière manière de l'analyser ne tourne pas à l'avantage de cette production. En voici une légère esquisse.

M. Germeuil, honnête imprimeur, dispose une fête où il se réjouit de couronner le buste de Franklin, lorsque la garde nationale fait une descente et une visite chez lui. Dubois son prote, a imprimé et fait distribuer secrettement un écrit dangereux, qui, répandu avec profusion, a compromis M. Germeuil. Il est arrêté ; mais Fabrice, complice de Dubois, découvre tout, le fourbe est puni ; M. Germeuil conserve sa réputation, et unit sa fille à Dorlis. Comment en effet hasarder une pièce sans y coudre de mariage !

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1791, volume 5 (mai 1791), p. 321-324 :

[Le compte rendu est tout à fait élogieux, du moins au début : la pièce correspond aux attentes du jour : « Un but utile, des intentions sages, une morale pure & des sentimens honnêtes », le théâtre est une véritable école de vertu civique. Le résumé de l’intrigue fait apparaître le trouble de l’époque, et on voit triompher le bon citoyen contre les manœuvres de ses ennemis (qui agissent d’ailleurs pour des mobiles personnels : un amour déçu...). La pièce mobilise tous les acteurs nouveaux de la vie civique : les officiers municipaux, la garde nationale, les soldats citoyens. Le tout oppose clairement la noirceur des ennemis de la liberté et les citoyens honnêtes. On en profite pour définir la véritable liberté de la presse « qui ne doit pas être, dit Dormeuil, la liberté du mensonge, mais celle de la vérité ». La pièce ne mérite pourtant pas que des éloges : l’acte 2 paraît confus, sans que la pièce en perde sa valeur : « elle doit néanmoins faire honneur à M. Desfontaines ». Bien jouée, elle s’achève par une nouvelle allusion au temps présent : chanter Franklin mort, c’est aussi rappeler la perte toute récente de Mirabeau.]

Le 8 avril, on a donné, pour la premiere fois, l'Imprimeur ou la fête de Francklin, comédie en deux actes, & en prose, de M. Desfontaines.

Un but utile, des intentions sages, une morale pure & des sentimens honnêtes, voilà ce qui distingue cette jolie bagatelle, où l'on remarque un dialogue rapide & précis, & un bon comique.

L'imprimeur Dormeuil, au moment d'unir sa fille à un jeune chasseur de la garde nationale, & de célébrer dans son jardin la fête de Francklin, qui, comme l'on sait, travailla long-tems dans une imprimerie, est interrompu par un officier qui, suivi d'un détachement, lui annonce qu'il est soupçonné d'avoir imprimé un pamphlet horrible. Dormeuil, homme honnête qui n'a jamais souillé ses presses par des libelles calomnieux, nie le fait : on fait des recherches dans sa maison, & l'on trouve en effet dans un de ses magasins, un nombre considérable d'exemplaires du pamphlet imprimé avec ses caracteres & sur son papier. Dormeuil, au désespoir, est conduit devant les officiers municipaux ; & pendant son absence, les ouvriers de son imprimerie, qui le chérissent comme un pere, s'assemblent. Un gascon est leur orateur : il soupçonne Dubois, prote & homme de confiance de Dormeuil ; Dubois qui s'excuse faiblement, & qui n'a point assisté au serment fait par toute la maison, de n'imprimer que des ouvrages avoués par la raison, la- modération & l'honnêteté.

Cependant Dormeuil vient d'être arraché, par le peuple, des mains de la garde nationale : il va devenir la victime de l'effervescence populaire, lorsque le jeune chasseur, son ami, son gendre arrive, le soustrait au malheur qui le menace, & le ramene dans sa maison, au milieu des soldats citoyens, ses amis, ses camarades. Alors tout se découvre : un vil agent de Dubois vient, pressé par ses remords, avouer à Dormeuil que son prote a commis ce crime dans le dessein de le perdre. Le scélérat est arrêté : c'est l'amour qu'il avoit pour Mlle. Dormeuil, dit-il, c'est la jalousie, la rage de la voir unie à un autre, & le désir de se venger de. cette famille, qui l'ont porté à ce forfait. Il est entraîné, & l'on continue la fête de Francklin, qui rappelle celle donnée l'année passée, dans la salle des cordeliers, par les ouvriers imprimeurs de la capitale, dans le tems de la mort de ce grand homme.

Le premier acte de cette piece marche bien ; mais le second est trop serré, & les événemens y sont trop brusquement amenés. Elle doit néanmoins faire honneur à M. Desfontaines : on y trouve des réflexions sages sur la liberté de la presse, qui ne doit pas être, dit Dormeuil, la liberté du mensonge, mais celle de la vérité : c'est l'ouvrage, en un mot, d'un véritable patriote & d'un honnête homme. M. Paillardelle a mis beaucoup de mesure & de bonhommie dans le rôle du vertueux Dormeuil ; & M. Pélissier mérite beaucoup d'éloge pour le comique qu'il a mis dans le rôle du gascon, rôle vraiment neuf & original.

On se doute bien que l'idée de la perte de Francklin réveilloit naturellement celle d'un[e] perte plus récente & bien douloureuse : aussi M. Desfontaines a-t-il. su planter çà & là quelques cyprès sur la tombe de Mirabeau : voici un des couplets du vaudeville, qui a été redemandé :

Air d'Estelle : Ah ! s'il est dans votre village, &c.

Si vous voulez au vrai civisme
Décerner 1'immortalité,
Offrir à qui l'a mérité
L'hommage du patriotisme :
C'est
Mirabeau qu'avec Francklin
Vous nommera notre refrein.

D’après la base César, la pièce de Desfontaines a connu 9 représentations au Théâtre de Monsieur, du 8 avril au 14 août 1791.

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