La Jolie blanchisseuse

La Jolie Blanchisseuse, vaudeville en un acte, d'Hyppolite, 26 janvier 1808.

Théâtre du Vaudeville.

L'orthographe du nom de l'auteur varie d'un critique à l'autre, sans que cela aide l'identifier.

Titre :

Jolie blanchisseuse (la

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

26 janvier 1808

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Hyppolite (ou Hippolyte)

Almanach des Muses 1809.

L’Opinion du parterre, ou Revue des théâtres, cinquième année, janvier 1808, p. 260 :

[Comment dépenser beaucoup d’argent sans profit, ou une première représentation houleuse...]

Première représentation de la Jolie Blanchisseuse, vaudeville en un acte. Chute très-prononcée. L'auteur avait cependant pris d'excellentes mesures pour s'assurer un grand succès. La somme qu'il avait dépensée en achat de billets à distribuer à ses amis excédait les trois quarts de la recette : sa pièce n'en fut pas moins huée de toute la salle. Ce n'est donc plus la peine de travailler ses succès autant que ses ouvrages. Au reste, les amis de l'auteur lui obtinrent au moins l'honneur ou la honte d'être nommé au public, mais on n'en fut guère plus instruit en apprenant que le père de la Jolie Blanchisseuse, s'appelait M. Hippolyte.

L'Esprit des journaux, français et étrangers, mars 1808, tome III, Premier trimestre, p. 275-279 :

[La première représentation de cette pièce a été fort animée : sifflets, dialogue public-acteurs, « rien n’y manquait ». Et « les amis de l'auteur » ont tout fait pour montrer leur enthousiasme, au point de faire nommer l’auteur (ce qui fait qu’on ne parle pas de chute : pièce achevée, auteur nommé). Un auteur à son coup d’essai, et jeune. La pièce développe une situation inverse de ce qu’on voit d’ordinaire au théâtre : le mariage de la jeune blanchisseuse avec un jeune et riche seigneur est empêché par la mère de la jeune fille, qui refuse que sa fille se marie hors de son milieu. Le mariage se fait bien sûr après bien des événements, et grâce à une ruse (on fait croire à la mère que le prétendant est ruiné). La fin n’est pas très sûre, parce que le parterre, très bruyant, empêchait de bien entendre ce qui se disait sur la scène (et le critique ne craint pas d'ironiser en supposant le contenu de la fin de la pièce). Car c’était le parterre qui faisait le spectacle par ses réparties et sa gaîté, et il était plus drôle que ce que l’auteur avait écrit.]

La jolie Blanchisseuse. L'art des sifflets se perfectionne ; ils ont fait hier le charme de la représentation. Accompagnement obligé pour les couplets, dialogue très-animé avec les personnages de la pièce, rien n'y manquait ; ils ont fait rire jusqu'aux acteurs eux-mêmes ; et les amis de l'auteur, qu'apparemment ils divertissaient aussi, pour prolonger le plaisir de les entendre, ont soutenu la pièce par des applaudissemens et des cris si obstinés, que le public a eu la satisfaction d'apprendre que celui qu'il avait si bien sifflé était un jeune Homme nommé Hyppolite. Hyppolite soit ; M. Hyppolite doit être bien obligé à ses amis, car c'est un vrai service à rendre à un auteur sifflé que de faire proclamer son nom en plein théâtre, afin que personne ne l'ignore. Au reste,

L'amour toujours n'attend pas la raison,

l'amitié non plus ; et on a facilement pardonné ce zèle inconsidéré de quinze ou vingt jeunes figures qui, placées au milieu du parterre, attestaient, s'il est possible, encore mieux que l'ouvrage, la jeunesse de l'auteur, dont on nous a dit que c'était le coup d'essai, et qui probablement avait assemblé, pour le soutenir, tous ses camarades de collége.

On n'imaginerait peut-être pas ce qui fait le nœud de cette pièce ; c'est la difficulté qu'éprouve un jeune homme riche, un seigneur de château, à obtenir la main d'une jeune blanchisseuse qu'il aime ; cette difficulté vient de ce que Mme. Simone, mère de la jolie blanchisseuse et comme elle blanchisseuse de naissance, a déclaré ne vouloir jamais consentir à ce que sa fille Catherine quittât son état. Elle veut d'ailleurs pouvoir choisir son gendre. Or, il est bien certain que si elle avait pris Linval pour gendre, elle ne pourrait plus choisir ; de plus, elle chante qu'elle veut un gendre doux, aimable, complaisant, bienfaisant, et c'est apparemment pour cela qu'elle ne veut pas qu'il soit riche et bien élevé. Toutes ces raisons sont si bonnes, que M. Linval, qui les a apparemment prévues, écrit à sa blanchisseuse, en lui envoyant timidement des couplets pour lui déclarer son amour, que c'est sans doute une grande témérité à lui que d'oser lui écrire, et Mlle. Catherine est disposée le trouver aussi, car elle a été bien élevée par Mme. de Florincourt, dame du village qu'elle habite, qui lui a donné tous les talens possibles, ce que la mère Simone a bien voulu permettre, à condition que sa fille ne quitterait pas son état ; en sorte que Mme. de Florincourt en a fait une musicienne de la première force, afin qu'elle exerçât avec plus d'agrément son métier de blanchisseuse de village, qui doit lui rendre les doigts extrêmement souples et légers pour jouer de la harpe. Elle n'en va pas moins chanter au château, où elle est reçue comme société, ainsi que la mère Simone, qui raconte ce qui s'est passé la veille dans le salon de Mme. de Florincourt, où elle était allée apparemment faire son état, et je ne vois pas alors ce qui l'empêcherait de le faire aussi bien dans le salon de Linval. Quoi qu'il en soit, Mme. de Florincourt, à qui la vertueuse Catherine croit de son devoir de confier les secrets de son cœur, est consternée à cette nouvelle qui menace le repos de l'intéressante blanchisseuse, sans songer le moins du monde à celui de son ami Linval, à qui elle ne s'avise pas de faire la moindre réflexion sur cette fantaisie d'épouser Catherine. Elle promet, au reste, d'employer tout son pouvoir à servir ces illustres amours, mais ne se hasarde qu'avec les plus grandes précautions à en parler à la mère Simone, qui s'indigne en effet de ce qu'un homme qui n'est pas blanchisseur ose prétendre à sa fille, et le congédierait tout net, si le jardinier de Linval, présent, comme de raison, à tous ces entretiens, ne s'avisait de dire à la mère Simone que son maître vient de perdre un procès qui lui enlève toute sa fortune ; alors celle-ci, enchantée de trouver un gendre qui puisse faire la lessive avec elle, donne son consentement, qui équivaut apparemment ici à la signature du contrat de mariage, que nous avons pris le parti de regarder, dans les comédies, comme le mariage même, après lequel on ne peut plus revenir ; car bien que la mère Simone apprenne sur-le-champ, par Linval lui-même, le stratagême de son jardinier, comme une blanchisseuse n'a que sa parole, elle confirme son consentement, et se console sans doute par l'espérance que son gendre, fils de laboureur, riche par hasard, et par choix mari d'une blanchisseuse, ne doit pas être un homme très-fier, et pourra permettre par conséquent à sa femme de continuer son état comme amateur,

Je dis sans doute, car ce ne sont que des conjectures ; la part très-active que, vers la fin de la pièce, le parterre avait prise à la représentation, n'a guères permis que de conjecturer à-peu-près ce qui se disait sur le théâtre ; mais il ne pouvait y avoir d'amusant que ce qui venait de la salle : le bonheur des à-propos saisis par un parterre disposé à se divertir lui-même, puisqu'on ne s'occupait pas de le divertir, la promptitude de ses réparties, la gaîté dont il accompagnait les marques non équivoques de son improbation, ont produit des scènes plus piquantes que ne l'avait sans doute espéré l'auteur : elles pourront lui profiter ; on voit bien qu'il est encore en âge d'apprendre.

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