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La Marquise de Pompadour, ou Germon et Juliette

La Marquise de Pompadour, ou Germon et Juliette, comédie en 3 actes et en prose. An V. Par le C. Cubieres. Barba. in-8°. de 62 pag.

Théâtre de Molière.

Almanach des Muses 1798.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, an cinquième :

La Marquise de Pompadour, ou Germon et Juliette, comédie en trois actes en prose, Représentée sur plusieurs Théâtres de Société, et au Théâtre de Molière, an 5. Par le C. Cubieres.

La pièce est précédée d'une préface, p. 3-6 :

PRÉFACE.

J’ouvre un jour les mémoires de madame de Pompadour, et j’y lis, page 163 de l'édition de Liège, une lettre d’une jeune religieuse, qui se plaint de ce que, dans un âge prématuré, on l‘a forcée de faire des vœux dont elle n‘a point senti la conséquence. J’y lis ensuite que, pour obvier à cet inconvénient, le roi donna un arrêt, par lequel il était défendu aux communautés religieuses de recevoir à l‘avenir aucune novice, à moins qu’elle n‘eût vingt-quatre ans et un jour.

Cette lettre, et l’arrêt qui l’a suivie, me donnèrent l’idée de la comédie que je mets au jour ; il n’y a rien, toutefois excepté quelques phrases de cette lettre que j’aye cru devoir conserver, il n’y a rien, dis-je, qui ne soit de mon invention.

Quant aux caractères, j’ai tâché de les peindre tels qu’ils étaient. Ainsi, j’ai fait le roi bon, galant et faible, le duc de Richelieu gai, entreprenant et volage, et la marquise aimable, sensible, généreuse et spirituelle. On me dira peut-être que c’est accorder à cette dernière beaucoup plus qu'elle ne méritait, et que l’histoire ne la traitera point d'une manière aussi favorable. Je répondrai que dans ma comédie, je considère madame de Pompadour comme une femme qui aime les arts, et non comme la maîtresse d’un roi ; que je la peins à sa toilette, et non dans les conseils ; que je cherche, en un mot, à faire briller les charmes de sa figure et de son esprit, et non ses talens pour l’intrigue, ou son influence sur les opérations ministérielles.

L’auteur de la vie privée de Louis XV, qui n’est autre chose que la vie publique de Louis XV, parle de madame de Pompadour avec beaucoup de mépris, et cherche beaucoup plus à la faire haïr qu’à la rendre aimable. Il est possible qu’il ait raison ; la favorite d’un roi est presque toujours un fléau pour les peuples ; mais ma comédie n’offre point la marquise tenant les rênes de l’état ; c’est un hochet que j’ai mis dans ses mains, celui de la bienfaisance ; et ce hochet, il en faut convenir, vaut bien le sceptre des‘rois.

Je n’ai point connu madame de Pompadour, mais j’ai lu ma pièce à plusieurs contemporains qui l’ont vue dans l’intimité, et qu’elle avait initiés au secret de ses affections particulières et de ses passions même ; tous m’ont dit que j’avais deviné son caractère, et que, dans son domestique, madame de Pompadour était vraiment telle que je l’avais représentée. Je joindrai à ce suffrage un suffrage d’un plus grand poids , celui de Voltaire. Voltaire, dans plusieurs de ses poésies, dans plusieurs lettres de sa correspondance, parle toujours de madame de Pompadour avec les plus grands éloges, et voici le passage qu’on trouve dans une première édition, devenue très-rare, de l'histoire de la guerre de 1741 ; histoire qu’il a habilement refondue dans le siècle de Louis XV.

« Il faut avouer que l’Europe peut dater sa félicité du jour de cette paix, (la guerre avait été terminée en 1748). On apprendra, avec surprise, qu’elle fut le fruit des conseils pressans d’une jeune dame d’un haut rang, célèbre par ses charmes , par des talens singuliers , par son esprit, et par une place enviée. Ce fut la destinée de l’Europe dans cette longue guerre, qu’une femme la commença et qu’une femme lafinit. La seconde a fait autant de bien que la première avait causé de mal, s’il est vrai que la guerre soit le plus grand des fléaux qui puissent affliger la terre, et que la paix soit le plus grand des biens qui puissent la consoler. »

Supposé que j'aie eu tort de voir en beau madame de Pompadour, ce passage me justifie, et l'autorité de Voltaire vaut bien, sans doute, celle de l'anonyme, qui a composé, d’après des gazettes, la prétendue vie privée de Louis XV.

Madame de Pompadour jouait si bien la comédie en société, qu’elle aurait pu être une fort bonne actrice sur les théâtres publics. Peignant cette femme célèbre dans sa vie privée, j’ai dû faire mention de ce talent, et voilà pourquoi je parle si souvent de comédie et de théâtre dans ma pièce ; voilà pourquoi c’est la représentation d’une tragédie de Crébillon qui en fait le noeud, et que, dans l’exposition et le dénouement, il en est question encore. Je dirai, en passant, aux actrices qui prendront, dans ma pièce, le rôle de la marquise, qu’elles sont obligées à y montrer plus de perfection que dans tout autre rôle, et qu'il faut, pour y réussir, qu'elles jouent aussi bien madame de Pompadour, qu'elle joua elle-même le Prince de Noisi dans l’opéra de ce nom, Héro dans l'acte de Héro et Léandre, Vénus dans le prologue de la Toilette de Vénus, etc....... qu’il faut que, par la pensée, elles se transportent aux petits appartemens, et y copient, avec fidélité, la noblesse, la décence, et toutes les graces de leur modèle.

Mais en voilà beaucoup sur une bagatelle qui ne méritait pas les honneurs d‘une préface, et qui ne peut avoir quelque mérite qu’autant qu’elle sera embellie par le jeu des acteurs. Je n’en dirai plus qu’un mot, qui me paraît nécessaire, afin qu’on ne croie pas que les CC. Monvel et Duval soient les premiers qui aient mis le duc de Richelieu sur la scène, et que je me suis traîné sur leurs traces. Je rends hommage à leurs talens. Je dois le rendre aussi à la vérité.

J’ai composé la Marquise de Pompadour au commencement de l’année 1789 ; et voulant que cette pièce fut représentée sous l'anonyme, je priai un de mes amis d’en remettre une copie à la Comédie Française, sans dire le nom de l’auteur. Trois ou quatre mois après, un certain M. Bonneval, substitut du souffleur, M. Delaporte, lui écrivit les lignes suivantes :

« J’ai remis, monsieur, à MM. les comédiens, le manuscrit que vous m’avez envoyé. L'assemblée doit nommer un examinateur pour lui en rendre compte, et alors j'aurai l’honneur de vous en donner des nouvelles. J ’ai l’honneur d’être, etc.

Signé BONNEVAL.

Le 14 juillet arriva, le despotisme royal et le despotisme comique furent également renversés ; et malgré les assurances de M. Bonneval, je n’ai eu, depuis ce moment, aucunes nouvelles de ma pièce.

Pas de trace de cette pièce dans la base César. Je n'en connais pas de date de représentation.

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