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Le Mariage aux fraix de la nation

Le Mariage aux fraix de la nation, pantomime à grand spectacle, avec intermède, mêlé de chants et de danses, par Desaudray, musique de Leblanc, 10 frimaire an 2 (31 octobre 1793).

Théâtre du Lycée des Arts.

Titre :

Mariage fait aux frais de la Nation (le)

Genre

pantomime à grand spectacle avec intermède, mêlé de chants et de danses

Nombre d'actes :

 

Vers / prose ?

 

Musique :

oui

Date de création :

10 frimaire an 2 (31 octobre 1793)

Théâtre :

Théâtre du Lycée des Arts

Auteur(s) des paroles :

Desaudray

Compositeur(s) :

Leblanc

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1795, volume 4 (juillet-août 1795), p. 252-257 :

[Une belle pièce patriotique, qui met en scène les deux camps, les Espagnols et les valeureux et vertueux Français. Pour l’essentiel, le compte rendu résume l’intrigue en mettant en valeur la vertu des jeunes filles françaises, la générosité des paysans envers les plus démunis, le courage des jeunes français (mais aussi leur supériorité dans le maniement des armes). Tout est raconté de manière à montrer la supériorité de la nouvelle société française face à des Espagnols inefficaces. Et la générosité de la Nation apparaît à plusieurs reprises : une bourse pour « la plus vertueuse fille du village », une autre pour permettre le mariage de Paulin et d’Agathe, qui se fera « aux fraix de la nation ». Le compte rendu cite longuement les couplets que le père chante à son fils au moment de son mariage : se marier, c’est donner un fils à la patrie. La pièce est à grand spectacle, et les coups de feu y abondent. Pas de jugement explicite sur la pièce (mais l’adhésion de l’auteur du compte rendu est claire). Simplement, « Cette piece a produit beaucoup d'effet ».]

THÉATRE DU LYCÉE DES ARTS.

Le Mariage aux fraix de la nation, pantomime à grand spectacle, avec intermede, mêlé de chants & de danses, par Desaudray, musique de Leblanc. (Le sujet est puisé dans la derniere guerre avec l’Espagne.)

La villageoise Agathe est en même-tems aimée par le chef d'un détachement des troupes espagnoles, & par Paulin, jeune volontaire françois, dont le peu de fortune a long-tems retardé le mariage. Ce jeune homme soupire après le moment de faire une belle action, pour mériter la main d'Agathe, à laquelle la nation vient d'accorder une dot comme à la plus vertueuse fille du village.

Lorsque le jour commence à poindre, le chef des Espagnols descend seul des retranchemens, examine les postes voisins; & s'avance furtivement jusqu'à la maison d'Agathe. Il y voit avec autant de surprise que de fureur l'inscription suivante, sur un drapeau blanc entouré de franges tricolores : Dot nationale. Au plus courageux, Il va rejoindre son détachement en concentrant sa rage ; mais il se promet bien de troubler la fête qui se prépare.

Paulin arrive ; la vue du drapeau anime son courage, & il jure à son tour d'employer tous ses efforts pour obtenir la préférence sur ses rivaux. Cependant il s'apperçoit que le poste retranché & voisin du village a été abandonné par l'ennemi. II frappe à la porte .d'Agathe ; ses parens sortent avec elle ; il les exhorte à aller avertir la garde nationale ; & lui, avant de sonner de son cornet, renverse le poteau sur lequel sont les armes d’Espagne. Ils vont tous au-devant des François, qui ont répondu dans éloignement par un roulement de tambour.

Alors le chef des Espagnols reparoît dans la redoute avec ses gens qui s'y cachent, & il va ensuite placer sur la montagne divers détachemens en embuscade. Les volontaires françois arrivent avec le général lui-même ; il veut s'assurer de la vérité du rapport de Paulin ; & lorsqu'il s'est convaincu qu'on ne lui a rien dit de trop, il montre l'inscription du drapeau à ce jeune homme, qu'il invite par-là à mériter Agathe. On amene des canons, & lorsque toutes les dispositions nécessaires pour la conservation du poste sont faites, on apporte l'arbre de la liberté, on le plante sur le territoire ennemi, on chante les couplets : Veillons au salut de l'empire, & les villageois qui les répetent en chœur, dansent autour de l'arbre chéri.

Le chef des Espagnols se montre sur la montagne ; & à un coup de pistolet, qui sert de signal, tous ses gens embusqués paroissent & fondent sur les François. Paulin armé seulement d'un bâton, terrasse un soldat espagnol, & s'empare de son épée. Le canon est pris par l'ennemi, & Agathe faite prisonniere, est emmenée dans le fort par le commandant. Les troupes nationales que Paulin a ralliées, arrivent : elles emportent la redoute & se mettent en devoir d'attaquer les retranchemens. Mais notre jeune volontaire s'y oppose, dans le dessein de ménager le sang des citoyens de la république. II va seul avec un tambour au pied du premier bastion où il fait battre un banc. Le chef des Espagnols se présente sur l'extrémité du retranchement. Paulin le défie ; il accepte le combat ; mais il déploie une banniere sur laquelle est écrit : Agathe sera le prix du vainqueur. Paulin accepte le défi : le commandant paroît, les sabres sont tirés, l'Espagnol est vaincu; la rage & le désespoir s'emparent de son ame, & au moment où Paulin se tourne pour aller au-devant d'Agathe, le chef des ennemis lui tire un coup de pistolet, & le manque. Notre villageois plus adroit, riposte par un autre coup de pistolet, & blesse le commandant à mort. Combat, mêlée. Le général françois arrive : on place un obus sur la redoute ; le fort est bombardé : une fougade [une espèce de petite mine] en fait sauter le bastion ; les François conduits par Paulin, montent à l'escalade ; ce jeune homme arrache le pavillon espagnol, & il arbore à sa place l'étendard national. Cris de joie & de victoire.

Un trompette annonce un nouvel événement. C'est un courier porteur d'une bonne nouvelle. Tout le village le suit, Avant de remettre au commissaire national une bourse & un paquet dont il est chargé , il déploie un rouleau sur lequel est écrit : Mariage aux fraix de la nation.

Aussi-tôt le général françois prend Paulin & Agathe par la main, & les présente au maire. Le commissaire national remet à Paulin la dot fournie par la république, & une couronne civique ; mais le jeune homme ne veut pas garder l'argent, & il le partage entre la mere Bobi & un vieil invalide. Nouveaux cris de joie & de victoire. Une marche nombreuse commence ; des sans-culottes apportent la statue de la liberté, & l'on dresse l'autel de la patrie, au-devant duquel le maire unit Paulin & Agathe.

Le bruit du canon & d'une musique militaire se font entendre en signe de réjouissance, & du milieu du retranchement s'éleve tout à coup un obélisque sur lequel est gravé en lettres d'or ; République françoise, une & indivisible. L’intermede commence. Paulin montre au peuple un étendard portant ces mots : Acte constitutionnel de 1793, & l'invite à jurer d'être toujours fidele à la république. Un coup de tonnerre & une musique harmonieuse se font entendre aussi, & l'on voit descendre un nuage dans lequel on lit, en caracteres de feu : amitié, fraternité. Les villageois prêtent le serment avec le plus vif enthousiasme, & le vieil invalide, adressant la parole à son fils, chante ensuite les couplets suivans, dont l’auteur est celui de la Femme jalouse, le cit. Desforges.

Mon fils , vois-tu ce peuple immense ?
Comme il accourt de toutes parts !
De ces guerriers chers à la France,
Vois-tu flotter les étendards ?
C'est à l'autel de la patrie
Que l'amour dirige leurs pas ;
Tous vont à leur mere chérie,
Se dévouer jusqu'au trépas.

Dans tes regards brille un flamme
Qui plaît à mon cœur paternel ;
Ouvre les yeux, fixe ton ame
Sur ce spectacle solemnel.
C'est à l'autel de la patrie
Qu'il faut consacrer tes quinze ans,
Et c'est-là que l'honneur te crie
D'apporter tes premiers sermens.

Il est d'autres sermens encore,
Qu'exigent ton pere & l'honneur ;
Un dieu puissant que tout adore
Va bientôt appeler ton cœur.
Mais sur l’autel de la patrie,
A la beauté jure en ce jour
Que jamais la vertu flétrie
Ne gémira de ton amour.

Dans cette chaîne fortunée,
Si tu deviens pere à ton tour,
Pour premier don si l'hyménée
Accorde un fils à ton amour,
Offre à l'autel de la patrie
Ce fruit heureux de ton lien :
Dans ton cœur c'est elle qui crie
Qu'il est son fils comme le tien.

Quand le tems qui marche en silence,
Par d'imperceptibles efforts
Aura miné mon existence
Et décompose ses ressorts,
C'est sous l'autel de la patrie
Que tu creuseras mon tombeau.
Est-ce perdre en entier la vie,
Que de rentrer dans son berceau ?

La marche recommence, & quelques citoyens des grouppes qui la composent, chantent des couplets patriotiques. Mais un bruit de guerre & de canon se fait entendre du côté de la montagne. La surprise est générale. Un officier françois chante : Entendez vous sur ces montagnes mugir ces féroces soldats, &c. & lorsqu'il dit : Aux armes, citoyens, tous les villageois, tous les volontaires lui répondent en chœur; le son du tocsin se mêle à celui de ce chant guerrier ; le peuple se leve en masse, & suit les troupes au bruit du canon.

Cette piece a produit beaucoup d'effet.

La base César définit la pièce comme une pantomime, sans en dire plus. Elle n’en connaît pas les auteurs. Création le 31 octobre 1793 au Théâtre du Lycée des Arts. Elle a été représentée 17 fois en 1793, 9 fois en 1794, 10 fois en 1795, toujours au même théâtre.

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