Le Mariage par imprudence

Le Mariage par imprudence, opéra comique en un acte, de M. Jouy, musique de M. Dalvimare, 4 avril 1809.

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Titre :

Mariage par imprudence (le)

Genre

opéra comique

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

4 avril 1809

Théâtre :

Théâtre impérial de l’Opéra-Comique

Auteur(s) des paroles :

de Jouy

Compositeur(s) :

Dalvimar

Almanach des Muses 1810.

Un gentilhomme campagnard a une fille nommée Adele ; il s'est retiré avec elle dans sa terre, pour se soustraire aux importunités des amants. Il la destine à un homme qu'elle n'aime point. Le jeune Valbrune s'introduit auprès d'elle comme dessinateur et peintre. Le pere est dupe de ce stratagême. Un jardinier malin, et jaloux d'une soubrette, découvre tout le mystere, mais le pere entend raison ; les époux sont unis, et le valet est chassé.

Intrigue légere ; style agréable ; jolie musique.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Mad. Masson, 1809 :

Le Mariage par imprudence, opéra-comique en un acte, Paroles de M. de Jouy, Musique de M. Dalvimar. Représenté pour la première fois sur le théâtre Impérial de l'Opéra-Comique, par les Comédiens ordinaires de S. M. l'Empereur et Roi, le 4 Avril 1809.

L'Esprit des journaux français et étrangers, tome V, mai 1809 p. 277-279 :

[Après avoir montré que le titre était inexact (il y a toute une liste d’imprudences, de tous les personnages, qui conduisent à ce mariage, liste qui suffit à raconter de façon décousue l’intrigue), le critique souligne que la pièce, avec une intrigue aussi mince, ne se sauve que par des accessoires : dialogue piquant, « scènes de valets fort gaie », « situations neuves », mais dont il déplore qu’elles utilisent « des moyens tant soit peu forcés » : « la forme a emporté le fonds, et les détails ont sauvé l'ensemble ». La musique est d’un débutant, et elle est d’un bon niveau, prometteuse, le style en est « élégant et délicat, mais le critique met en garde contre une tendance à l’afféterie et « la manière » (le maniéré), avec renvoi à Marivaux, qui n’est pas considéré comme un modèle. Le paragraphe consacré aux morceaux remarqués est abondant, et c’est le vaudeville qui est surtout mis en avant (« de jolies paroles reçoivent un tour plus piquant encore de l'air qui leur est adapté » / tout est bien !). Il y a bien sûr quelques éléments à reprendre (longueurs, « coupe de quelques morceaux », un peu trop d’artifice dans la scène du balcon), mais il y a des traits de dialogue piquants, et on reconnaissait le style de de Jouy avant même qu’il soit nommé. Pas de restriction pour les interprètes, tous sont bien dans leur rôle, avec une mention spéciale à Mme Belmont, qui a su sortir de ses rôles habituels, ce qui autorise à la comparer à la prestigieuse Mme Dugazon, le meilleur des modèles.]

Le Mariage par imprudence.

Le titre de ce nouvel opéra n'est pas précisément exact : ce n'est pas le Mariage par imprudence, mais bien le Mariage par imprudences ; car tous les personnages de la pièce en font plus ou moins.

M. de Valbrune, fils d'un homme titré, fait le première imprudence en s'établissant au château de M. de Clénor, comme peintre de paysage, et en parlant d'amour à sa fille assez haut pour être entendu.

Le jardinier qui l'a entendu en fait une, en avouant qu'il a surpris ce secret, à une suivante dont il est amoureux, et en menaçant de tout dire.

Mlle de Clénor en fait une en écrivant à son amant de s'éloigner, et sur-tout en laissant surprendre cette lettre par son père.

Ce dernier en fait une bien plus grave, en ne devinant pas la véritable adresse de cette lettre, en se laissant abuser par la soubrette, au point d'envoyer à l'amoureux de sa fille une lettre qu'il croit écrite par la suivante à son prétendu.

Le jardinier en fait une seconde en dénonçant l'intrigue au père ; car il a tout à craindre des amant découverts, et de la soubrette qui le menace d'un rival.

Enfin Valbrune commet la dernière, la plus décisive et la plus heureuse des imprudences, lorsque surpris par M. de Clénor, sous les fenêtres de sa fille, il se trouve forcé à parler d'une lettre qu'il en a reçue et même à la montrer sans compromettre sa délicatesse ; il prononce son véritable nom ; ce nom réconcilie M. de Clénor avec l'idée d'une alliance qu'il rejettait bien loin, et les amans sont unis.

Tout autre que l'auteur eût aussi commis une assez haute imprudence en traitant un sujet aussi simple, ainsi dénué d'action, d'incidens, et d'intérêt ; mais il a pensé que des détails piquans dans le dialogue, des scènes de valets fort gaies, et quelques situations neuves, quoique dues à des moyens tant soit peu forcés, ne permettaient pas au public de s'appercevoir de la faiblesse de l'idée principale, et il ne s'est point trompé : la forme a emporté le fonds, et les détails ont sauvé l'ensemble.

La musique est de M. Dalvimare ; c'est le coup d'essai au théâtre de cet agréable harpiste , dont toutes les productions pour son instrument portent la cachet de l'expression et de l'originalité. Cet essai n'est point une imprudence ; c'est un pas heureux dans une carrière nouvelle, c'est-à-dire, que c'est un succès qui demande et appelle d'autres travaux dans le même genre. Le style de M. Dalvimare est en général élégant et délicat ; il a de l'expression, de la douceur et du charme ; il n'a qu'un écueil à éviter, c'est de tomber dans l'afféterie et dans la manière : la musique peut avoir son marivaudage ; et quoique Marivaux soit toujours entendu avec plaisir, toujours est-il vrai de dire que ce n'est pas lui qu'on peut citer comme modèle.

Cette remarque n'est ici que comme exception à une observation générale, et cette observation est que M. Dalvimare paraît s'être rappellé l'impression que produisirent les premières productions du malheureux Della Maria, et qu'il s'est souvent rapproché de son style. En l'imitant, il a souvent aussi trouvé des motifs gracieux, des accompagnemens légers, et une expression juste ; son premier air, Tableau charmant, frais paysage, est lui-même un tableau plein de fraîcheur : l'air du Chasseur ne pouvait guères lui offrir que des moyens d'imitation connus : les romances étaient en quelque sorte le domaine de l'auteur, et il en a tiré en cette occasion un excellent parti. Un duo très-piquant entre le jardinier et la soubrette est du style des maîtres du véritable opéra comique. D'autres morceaux ont été distingués ; tous applaudis ; le vaudeville sur-tout, où de jolies paroles reçoivent un tour plus piquant encore de l'air qui leur est adapté.

Cet opéra a eu beaucoup de succès ; on pourrait y désirer quelques retranchemens, certains changemens dans la coupe de quelques morceaux ; et dans la scène du balcon, des moyens qui sentissent moins l'artifice théâtral ; mais au total il est agréablement conçu et non moins agréablement écrit ; il y a des traits de dialogue assez piquans, et même assez comiques pour que le public, avant d'entendre nommer l'auteur, ait deviné M. de Jouy,

La pièce est bien jouée : Chenard y remplit, avec sa complaisance ordinaire , un de ces rôles de pères auxquels il a depuis long-temps accoutumé sa physionomie : Mme. Moreau et Baptiste sont très-bien placés dans leurs rôles : Moreau joue celui de jardinier avec cette naïveté sournoise qui en est le cachet ; et l'on voit pour la première fois Mme. Belmont sous l'habit de suivante, elle qu'on voyait hier sous celui de Françoise de Foix, de Ninon, ou de Mlle. de Guise ; ainsi Mme. Dugazon se montrait tantôt sous l'habit de Marguerite, et tantôt sous le chapeau de Babet ; nous ne rapprochons point encore l'imitation du modèle ; mais en ce genre aucun modèle ne fut meilleur à suivre, et Mme. Belmont mérite déjà bien des éloges pour avoir eu, non la témérité, mais le bon goût de le choisir.              S. . .

Il semble que cette pièce est la seule œuvre de M. Dalvimar à avoir rencontré le succès...D’après Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 322, le Mariage par imprudence a connu 18 représentations.

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