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La Noblesse au village

La Noblesse au village, opéra comique en un acte & en prose, mêlé de vaudevilles, d'André-Joseph Grétry neveu, 30 mai 1793.

Théâtre des Variétés Amusantes.

Date fournie par Louis-Henry Lecomte, Histoire des théâtre de Paris : la renaissance (Paris, 1908), p. 203. Il qualifie la pièce d'« opéra-vaudeville », ce qui explique qu'on ne nomme pas de compositeur.

Titre :

Noblesse au village (la)

Genre

opéra comique mêlé de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

30 mai 1793

Théâtre :

Théâtre des Variétés Amusantes

Auteur(s) des paroles :

André-Joseph Grétry neveu

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1793, volume 8 (août 1793), p. 325-328 :

[Compte rendu indulgent d’une pièce à laquelle le critique trouve des défauts : des incorrections, une « poésie » trop peu soignée, un développement insuffisant de certains motifs, des transitions pas assez ménagées. Mais elle mérite l’indulgence, son créateur étant un débutant, et de surcroît « privé de la vue »...]

THÉATRE DES VARIÉTÉS AMUSANTES.

La Noblesse au village, opéra comique en un acte & en prose, mêlé de vaudevilles, par M. Grétry.

Un seigneur de village voulant savoir si les hommes qui tiennent de plus près à la nature, sont susceptibles de se laisser aussi facilement éblouir que les autres par les vains éclats des grandeurs, fait préparer une grande quantité de parchemins, de cordons bleus & de cordons rouges. On les lui apporte sur la grande place, où tout le village est assemblé, & là, il déclare à tous ses vassaux qu'il va leur donner les plus grandes preuves de fraternité & d'égalité, en leur accordant à tous des titres de noblesse. Ceux qui n'ont pas encore cinquante ans, dit-il, je les fais ducs ; de trente à quarante, on sera comtes ; de trente à vingt-cinq, marquis ; & de vingt-cinq à quinze, chevaliers. Tout le village est au comble de la joie ; chacun prend son cordon & son parchemin : ô le bon seigneur ! Dorval leur chante alors, sur l'air du vaudeville, des petits Savoyards :

Mes amis, je dois vous le dire,
Je crois que combler tous vos souhaits,
Vous rendre contens pour jamais,
Est le seul bonheur où j'aspire :
Mais pour être heureux, fuyez bien
L'épine qui cache 1a rose :
sans la vertu, la noblesse n'est rien ;
La vertu seule est quelque chose.

A peine tous ces bons paysans sont-ils ennoblis, que tous les défauts qu'on reprochoit autrefois à la noblesse, s'emparent d'eux. C'est pis qu'une contagion. Julien, qui aime Fanchette de tout son cœur, cherche à la disputer, l'épée à la main, au chevalier Nicodême, son rival, qui, par bonheur, est trop prudent pour cela. Colas ne veut plus que son fils, le chevalier Julien, épouse Fanchette, parce qu'il lui destine une dame de la ville. II refuse même au collecteur Guillot, de payer la contribution patriotique, parce que celui-ci ne l'a pas demandé avec la politesse qu'il doit employer auprès d'un duc. La baronne Margot refuse de payer au comte Blaise les dix écus qu'il lui a prêtés, & si elle en agit ainsi : c'est pour l'honneur de la noblesse. Le bon sens, en un mot, a abandonné toutes les têtes du village. L'amour seul est demeuré dans le cœur des jeunes gens.

Eh quoi ! malgré l'opposition du bailly, qui vouloit l'obtenir pour son neveu Nicodême, Julien étoit parvenu à obtenir la main de Fanchette, & cet maudits titres de noblesse seuls les éloignent ; quel est donc le funeste présent que M. Dorval leur a fait, en les gratifiant de ces titres qu'ils ne demandoient pas ? Bientôt tous les paysans du village partagent cette façon de penser. Avant d'être nobles, ils vaquoient paisiblement à leurs occupations ; depuis qu'ils le sont, on n'entend que disputes, on ne voit que brouilleries, & les titres, & les droits, font oublier le labourage. Aussi, viennent-ils trouver monseigneur, & lui rendre ses parchemins & ses rubans.

Dorval feint d'être surpris de cette résolution, qu'il leur voit prendre avec plaisir ; mais vainement il leur fait l'éloge des prérogatives qu'ils abandonnent ; ils n'en veulent plus. Débarrassés de l'idée qui leur avoit tourné la tête, Colas & Margot se rappellent qu'ils avoient promis à leur fils & à leur fille, Julien & Fanchette, de les marier, & ils s'empressent de faire leur bonheur. Le noble Dorval, enchanté que ses vassaux n'aient pas voulu de sa noblesse, leur dit, en finissant, sur l'air du vaudeville de la soirée orageuse :

Mes amis, n'oubliez jamais,
Que la grande vertu du sage
Est de répandre ses bienfaits
Sur celui que le sort outrage.
Secourir tous les malheureux.
Souffrir ses maux avec courage,
Dans la paix mettre tous ses vœux,
Voilà la noblesse au village.

Quelques incorrections déparent le style de cette piece. La poésie n'en est pas assez soignée. Ce sujet exigeoit d'ailleurs de plus grands développemens ; aussi, certains motifs, tels que celui qui porte les paysans à ne plus vouloir de la noblesse, ne sont pas assez marqués ; aussi, certaines transitions ne sont-elles pas assez ménagées. Mais lorsqu'on fait attention que cet ouvrage est le premier pas d'un homme dans la carriere dramatique, & sur-tout, lorsqu'on observe que la nature, moins mere que marâtre pour ce jeune homme, l'a privé de la vue, on est étonné qu'il ait si bien réussi ; l'on forme des vœux, non-seulement afin qu'il continue de travailler pour le théatre, mais encore pour qu'il puisse y voir représenter ses ouvrages.

César : pièce non trouvée dans la base.

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