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La Nouvelle nouveauté

La Nouvelle nouveauté, comédie épisodique en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles,de Moreau et Lafortelle ; 26 frimaire an 13 [17 décembre 1804].

Théâtre du Vaudeville.

Certaines sources donnent comme coauteur Moras au lieu de Moreau.

Titre :

Nouvelle nouveauté (la)

Genre

comédie épisodique mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

26 frimaire an 13 [17 décembre 1804]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Moras et Lafortelle

Almanach des Muses 1806.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez M.me Masson, an 13 – 1805 :

La Nouvelle nouveauté, comédie épisodique, en un acte, en prose, mêlée de vaudevilles. par MM. Moreau et Lafortelle. Représentée, pour la première fois, sur le Théâtre du Vaudeville, le 26 frimaire an 13 (17 décembre 1804).

Courrier des spectacles, n° 2853 du 27 frimaire an 13 [18 décembre 1804], p. 2 :

[Compte rendu rapide et plutôt réticent d’une pièce satirique où se mùelent le bon et le moins bon. S’il y a de « jolis couplets », il y en a aussi de « vulgaires ». Le public a pris plaisir à reconnaître certains « personnages qu’on y a assez clairement désignés ». Mais la pièce ne plaira pas à tout le monde...]

La Nouvelle Nouveauté, qu’on a jouée hier au Théâtre du Vaudeville, est un ouvrage de MM. Moreau et Lafortelle ; c’est un composé d’idées spirituelles et d’idées communes, de jolis couplets et de couplets vulgaires. C’est une satyre assez gaie et assez douce de quelques-uns de nos petits travers. Le public a reconnu avec .plaisir plusieurs personnages qu’on y a assez clairement désignés. Il est à présumer que les gourmands et les Athénées ne seront pas contents. Les premiers préféreront quelque met bien assaisonné, et les autres quelque pièce fugitive ou quelqu’éloge en prose de M. Ch...

Mercure de France, littéraire et politique, tome dix-neuvième, n° CLXXXI (1er Nivose an 13, samedi 22 Décembre 1804), p. 41-44 :

[Comme annoncé dans le couplet d’annonce, la pièce reprend l’idée de Legrand d’une pièce épisodique à tiroir (il avait fait jouer en 1727 la Nouveauté). C’est l’occasion pour le critique d’évoquer longuement la pièce imitée plutôt que de parler de la pièce nouvelle. Il y arrive finalement, pour faire l’inventaire « des ridicules plus modernes ou des nouveautés plus fraîches », mêlant « partout l’éloge à la critique », la pièce suscitant d’ailleurs alternativement l’un et l’autre (mais il est facile de la corriger, en supprimant ce qui a déplu. On critique (ou loue) les médecins, le contraste des mœurs selon les quartiers de Paris, les Athénées, les petits maîtres, etc. La pièce s’achève sur une (trop) longue série de couplets. Mais elle a pourtant réussi, grâce aussi aux actrices qui la jouent.]

Théatre du Vaudeville.

La Nouvelle Nouveauté, de MM. Moreau et Lafortelle.

Les auteurs ont averti, dans un modeste couplet d'annonce, que l'idée de leur Vaudeville appartenait à Legrand :

Messieurs, pour venir après lui,
Nous avons notre politique ;
Car pour être neuf aujourd'hui,
Partout on imite l'antique.

Les pièces allégoriques et à tiroir nous ramènent doublement à l'enfance de l'art : on en fait peu de ce genre, et on a raison, car le spectateur ne saurait se faire illusion au point d'imaginer qu'il ait sous les yeux la folie, la raison, le temps. Ces êtres métaphysiques d'ailleurs sont nécessairement froids.

La Nouveauté de Legrand est une de ses plus jolies bagatelles. Nous l'avons vu jouer de notre temps avec succès. Nous ignorons pourquoi on ne la donne plus. Les mœurs et les ridicules qu'on y a peints n'ont pas vieilli. Plusieurs de ses traits ont été pillés et reproduits dans des comédies postérieures ; c'est là qu'on trouve cette plaisanterie tant répétée depuis : « Messieurs, dit Mercure aux amateurs de nouveautés, ne manquez jamais la première représentation d'une pièce ; on n'est pas toujours sûr d'en voir la seconde. » Et Lacascade, qui veut faire des opéras sans paroles, tandis que la Rimaille n'y veut point de musique. Ce la Rimaille tient magasin de vers et vend des garnitures d'opéras. Ses vers ont un agrément, c'est qu'ils prêtent ; on les alonge, on les raccourcit à volonté. Si, par exemple,

Ruisseaux, coulez sans murmure,

paraît trop court, on l'alonge ainsi :

Coulez, coulans ruisseaux, murmurez sans murmure.

Là se trouve aussi une Claudine qui demande un visage nouveau, quoique le sien soit très-joli, parce que Colin, depuis trois ans qu'ils sont mariés, dit qu'il l'a tant vu, tant vu, qu'il en est las, et voudrait qu'il fût fait comme celui de Colette. Le mot de Lucinde, qui a tant vu le soleil, a bien l'air d'un emprunt fait a l'auteur de la Nouveauté par celui de l'Oracle. On y voit encore que déjà, du temps de Legrand, il y a près de 80 ans, les chefs-d'œuvre de Molière, le Tartufe et le Misantrope, pour avoir été trop souvent joués, avaient amené la satiété, et qu'à toute force on voulait du nouveau, n'en fût-il plus au monde ; enfin, que les actrices avaient, comme de nos jours, des factions et des cabales qui prenaient leurs noms.

Les auteurs de la Nouvelle Nouveauté n'ont pris à Legrand que son titre et son plan. Ils ont passé en revue des ridicules plus modernes ou des nouveautés plus fraîches, et ont mêlé partout l'éloge à la critique. C'est ainsi que les spectateurs, et ensuite les journalistes, ont traité aussi leur ouvrage. Il n'en est point, au reste, qu'il soit plus facile de corriger ; il n'y a qu'à supprimer les scènes qui ont déplu. Comme aucune n'est essentielle , comme rien ne se tient dans ces pièces à tiroir, on y ajoute, on en retranche ce qu'on veut ; on ne jisque jamais d'en déranger l'ensemble.

La dispute des médecins Tantpis et Tant mieux , sur la salubrité ou l'insalubrité du Pont des Arts, aurait pu être plus piquante. L'un d'eux dit : « Lorsque tout le monde se porte bien, les médecins sont malades. » Cette plaisanterie n'est rien moins qu'une nouvelle nouveauté. Mais ce qui l'amène est plus plaisant. Tantpis soutenant que cette promenade du pont est mortelle, l'autre répond avec humeur qu'elle n'est que trop salutaire. La scène de la femme auteur n'a pas réussi. Nous n'avons pas deviné à qui on en voulait. Le compliment adressé à madame de Genlis :

. . . On se souviendra long-temps
        Des Souvenirs de Félicie,

a été trouvé plus vrai qu'ingénieux. Ce qui a été le plus goûté, c'est le contraste des mœurs de Paris, d'un quartier à l'autre ;

Car passer l'eau dans cette ville,
C'est presque traverser les mers.

La Nouveauté demande si décidément on soupe ou si l'on ne soupe pas. « Il faut décider la question, répond un interlocuteur; car j'ai été obligé de refuser un dîner à la Chaussée d'Antin, parce que je sortais de souper au Marais. »

Les Athénées ont été criblés d'épigrammes. Un entrepreneur de ces académies en miniature a long-temps balancé entre un établissement de cette espèce et celui d'une manufacture. Il se félicite du parti qu'il a pris. Il a un moyen de succès qui est infaillible, c'est de faire des procès à tous ceux qui oseront critiquer ce qu'on y dit ou ce qu'on y fait ;

Car nos séances littéraires
Sont des prétextes pour danser.

Un petit maître se vante à la Nouveauté de l'extension qu'il donne à son empire. Il fait avec elle un travail sur tous les objets du domaine de cette divinité. Que ferons-nous de la danse, dit-elle ? – Toujours la base de l'éducation, répond l'homme du jour.

Comme beaucoup d'autres, nous n'avons jamais pu deviner le mot de cette énigme, à l'occasion de mademoiselle Duchesnois :

Racine est un tuteur
Dont elle est la pupille.

On devait plutôt dire que Racine est un pupille dont elle est la tutrice. puisqu'on ajoute qu'on ne va voir jouer ses tragédies que pour mademoiselle Duchesnois, ce qui est un peu étrange. Une des dernières scènes est celle de la Cuisinière, se récriant sur ce qu'on a mis l'effigie de son maître, qui aime beaucoup la table, à la porte de la salle à manger. « Quelle place, dit-elle, pour un gourmand ! »

Le Vaudeville est personnifié, et propose à la Nouveauté de l'épouser, en observant que ce sera un mariage d'inclination.

Les couplets qui terminent la pièce la terminent malheureusement. On les a trouvés trop nombreux, sans doute parce qu'ils ne sont pas assez saillans. Elle a néanmoins réussi, et, à notre avis, mérité son succès. Madame Belmont et mademoiselle Delille n'y ont pas nui. On les revoit avec un plaisir toujours nouveau ; et c'est toujours dans la dernière pièce qu'elle joue, que la première paraît plus fraîche et plus jolie.

La Revue philosophique, littéraire et politique, an XIII, n° 10, 10 Nivose (31 décembre 1804), p. 57 :

[Article repris dans le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome V, pluviôse an XIII [janvier 1805], p. 287-289.

La pièce qui se présente comme nouvelle dans la lignée des comédies épisodiques utilisant un cadre allégorique, mais le critique lui dénie cette qualité : « on n'y trouve qu'un cadre usé et des détails rebattus dans toutes les pièces épisodiques ». Après une première scène offrant « un aperçu piquant », les auteurs sont retombés « dans les calembours usités, dans les épigrammes rebattues sur les Athénées, sur les romans du jour, sur les antiquités modernes et les antiques nouveautés, etc., etc. », bref loin de toute nouveauté. Et ils n’ont été applaudis que par habitude : la pièce n’a dû d’aller à son terme qu’à « plusieurs couplets piquans et bien tournés ». Les auteurs ont même été demandés, mais l'attribution à Moras plutôt qu'à Moreau est sans doute une erreur.]

Théâtre du Vaudeville.

La Nouvelle Nouveauté.

Le Grand a fait une pièce intitulée la Nouveauté, et son titre était rempli, parce que c'en était une de voir ces scènes épisodiques et critiques amenées avec finesse dans un cadre ingénieux quoiqu'allégorique. Boissi, Pannard et plusieurs autres ont quelquefois adopté ce même cadre pour introduire des personnages ridicules qui recevaient des conseils utiles et moraux, et pour faire aussi la censure des originaux et des travers de leur siècle ; mais ce genre qui peut séduire et plaire deux ou trois fois, finit par la satiété lorsqu'il n'est pas relevé par beaucoup de sel et de grâce, autrement ce n'est plus qu'une contre-épreuve effacée.

Le titre du vaudeville nouveau est d'autant plus mal choisi, ce me semble, qu'il paraît être un engagement formel de ne rien copier de ce qui s'est déjà fait, et qu'au contraire on n'y trouve qu'un cadre usé et des détails rebattus dans toutes les pièces épisodiques.

La première scène offrait un aperçu piquant : la Nouveauté, consultée par une mère coquette sur les moyens de conserver un empire et des hommages que sa fille lui enlève, lui donne d'excellens conseils sur les devoirs d'une mère, sur les moyens de faire succéder l'estime et le respect à des triomphes plus frivoles, et ces conseils étaient d'autant plus plaisans qu'ils sortaient de la bouche de la Nouveauté. Mais les auteurs ont bientôt abandonné cette première idée pour se jeter dans les calembours usités, dans les épigrammes rebattues sur les Athénées, sur les romans du jour, sur les antiquités modernes et les antiques nouveautés, etc., etc. On a applaudi par habitude; mais on se disait tout bas : cette nouveauté là n'est pas du tout nouvelle. Cependant à la faveur de plusieurs couplets piquans et bien tournés, l'acte a franchi sans obstacle toute sa carrière, et les auteurs ont été demandés. Ce sont MM. Moras et Lafortelle.               L. C.

 

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