Le Noble roturier

Le Noble roturier, comédie en 1 acte et en vaudevilles, de Radet. 24 Ventôse an 2 [14 mars 1794].

Théâtre du Vaudeville

Titre :

Noble roturier (le)

Genre

comédie en vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

24 ventôse an 2 [14 mars 1794]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Radet

Almanach des Muses 1795.

Pièce qui a réussi.

Valsain, fils d'un roturier qui s'est annobli à prix d'argent, tremble d'être pris pour un ci-devant, et cherche à devenir roturier. Il renonce à tout ce qui l'environnoit, va demeurer faubourg Antoine, et invite à souper tous ses parens, qui sont des ouvriers du quartier. Au milieu du repas, arrive une jeune personne qu'il a enlevée à l'état de couturière, pour en faire sa maîtresse. Elle brûle de reprendre son premier état, et d'épouser Valsain ; mais une ci-devant baronne, qui a la prétention de l'avoir formé, veut faire valoir ses droits. Cette vieille folle est éconduite, comme de raison, tandis que la candeur et les regrets de la jeune fille, touchent toute la famille ; Valsain l'épouse, et tous deux jurent de ne vivre que pour chérir la liberté.

Des couplets agréables ; du patriotisme.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez le Libraire, au Théâtre du Vaudeville, an deuxième :

Le Noble Roturier, comédie en un acte, mêlée de vaudevilles ; Par J. B. Radet. Représentée sur le Théâtre du Vaudeville, le 24 Ventose de l'an deux de la république Française, une et indivisible.

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1794, volume 7 (juillet 1794), p. 307-311 :

[La pièce raconte une sorte de monde à l’envers, avec ce noble de fraîche date qui veut retrouver la roture, devenue plus désirable que la noblesse. la naïveté révolutionnaire de la pièce ne gêne en rien le critique qui résume l’intrigue sans la moindre réticence (il l’approuve même : « on se doute bien que la baronne est évincée », puis en fait l’éloge sans réserves : «  peu de pieces offrent plus d'esprit & plus de patriotisme ; la gaieté, la vérité, le charme du dialogue, le mérite des couplets, & la physionomie de chaque personnage, qui est tracé d'après nature, tout a mérité les plus vifs applaudissemens ». Et la preuve est administrée en citant trois couplets « au hasard » (ce n’est donc pas la liste des meilleurs couplets !). A propos d'un des couplets, une remarque de prosodie (concernant des vers de onze syllabes, "d'un mètre singulièrement tronqué") Allusion finale à une coutume intéressante, le jet sur la scène d’un couplet à la gloire de l’auteur, avec rime finale républicanisme / patriotisme.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE, RUE DE CHARTRES.

Le noble Roturier, comedie en un acte & en vaudevilles.

Valsain, fils d'un roturier qui s'est ennobli à prix d'argent, tremble d'être pris pour un ci - devant, & cherche, à prix d'argent aussi, à redevenir roturier. Le nom de Valsain est d'ailleurs sur la liste des émigrés ; il ne lui reste pas d'autre parti que celui de reprendre le nom de Courtois, qui est le véritable nom de sa famille, Valsain renonce à tout son étalage, & va prendre un modeste appartement au fauxbourg Antoine, avec Dubois son domestique. Valsain a invité à souper tous ses parens, qui sont des bons ouvriers du fauxbourg, & brûle d'être adopté par cette famille de vertueux artisans. Un seul se refuse à son invitation ; c'est le menuisier Courtois: Valfain est obligé d'employer la ruse pour le faire venir. Courtois ne se laisse pas persuader par le costume de Valsain , qui est en carmagnole : Ça ne prend plus, lui dit-il : rien ne peut l’attendrir en faveur du jeune homme, qui lui témoigne le plus vif regret d'avoir déshonoré sa famille par sa noblesse. Cependant tous les autres parens de Valsain arrivent ; íl va en être adopté, lorsqu'une maîtresse à lui, jeune personne qu'il a enlevée à l'état de couturiere pour en faire une femme du bon ton, se présente. Jeannette a quitté son nom de Saint-Julien, ses riches habits ; elle a repris celui de son premier état, & brûla d'épouser Valsain, & d'être reconnue par sa famille ; mais une ci-devant baronne, vieille folle qui a formé le jeune Valsain, & qui a de lui une promesse de mariage, veut à son tour faire valoir ses droits : débats dont Courtois le menuisier est pris pour juge. On se doute bien que la Baronne est évincée, & que les regrets & la candeur de Jeannette touchent toute la famille. Valsain l’épouse, &, pénétrés tous deux des vertus & du patriotisme de leurs parens, ils jurent d'abjurer tout préjugé & de ne vivre que pour chérir la liberté & les sans-culottes, à qui ils se jugent très-heureux d'appartenir.

Tel est le cadre plaisant du noble roturier ; peu de pieces offrent plus d'esprit & plus de patriotisme ; la gaieté, la vérité, le charme du dialogue, le mérite des couplets, & la physionomie de chaque personnage, qui est tracé d'après nature, tout a mérité les plus vifs applaudissemens à cette production civique, qu'on doit encore à M. Radet. Dans l'impossibilité de citer tous les couplets, qui sont également piquans, nous en offrirons à nos lecteurs deux ou trois au hasard.

AlR : Vous m'ordonnez de la brûler.

Tu sais bien que dernièrement
    Le peuple , avec ivresse,
A brûlé solemnellement
    Les titres de noblesse:
Réduite à sa juste valeur,
    
En cendre consumée,
Nous avons vu notre grandeur
    S'en aller en fumée;

Courtois le menuisier, qui s'obstine à ne pas reconnoître Valsain pour son cousin, malgré tout l'étalage de son civisme, lui dit :

AIR de Joconde.

Dans notre révolution,
    Si grande, si sublime,
Le peuple, en mainte occasion,
    Des fourbes fut victime.
Ah ! l'on a tant, depuis quatre ans,
    Trompé fa confiance,
Qu'il ne veut plus juger les gens
    Sur la simple apparence.

Valsain a chez lui les bustes de Maras, Chalier & Lepelletier ; ce qui fait dire à Courtois :

AIR : Servantes, quittez vos panniers.

Chez l'ami de l’égalité,
    Patriote sincere,
Ces martyrs de la liberté
    Sont des dieux qu'il révere !
Mais les modérés doucereux,
    Les aristocrates peureux,
Sans les aimer, les ont chez eux
    Comme un paratonnerre.

Le dernier couplet du vaudeville offre (quoiqu'en vers d'un mètre singuliérement tronqué) la plus belle leçon qu!on puisse donner à tous les spectacles:

AlR des portraits à la mode.

Au théâtre offrir, sous des traits séduisant ,
Des rois orgueilleux, des lâches courtisans
Des peres trompés, des valets complaisans,
        
C'étoit l'état monarchique.
Peindre tels qu'ils sont les tyrans oppresseurs,
Chanter les exploits de nos fiers défenseurs,
Faire du théâtre une école des mœurs,
        Voilà quelle est la république.

Cette jolie piece est jouée de la maniere la plus satisfaisante.

A la seconde représentation du Noble roturier, on a jetté sur le théatre le couplet suivant, qui n'a point été chanté, mais dont on a promis, au public, l'insertiòn dans les journaux.

A M. Radst.

AIR du vaudeville de la soirée orageuse.

Toi qui réunis aux talens
Le saint amour de la patrie,
Et qui, dans des couplets charmans,
Démasques aristocratie,
Pouvois-tu ne pas réussir,
Prêchant le républicanisme,
En offrant les fleurs du plaisir
Et les fruits du patriotisme ?

D'après la base César, la pièce a été jouée 47 fois en 1794, à partir du 14 mars, 7 fois en 1795, 27 fois en 1796.

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