Olympie

Olympie, tragédie-lyrique en 3 actes,  de Guillard, musique de Kalkbrenner, 28 frimaire an 7 [18 décembre 1798].

Théâtre de la République et des Arts

Titre :

Olympie

Genre

opéra (tragédie lyrique)

Nombre d'actes :

3

Vers ou prose ,

en vers

Musique :

oui

Date de création :

28 frimaire an VII (18 décembre 1798)

Théâtre :

Théâtre de la République et des Arts

Auteur(s) des paroles :

Guillard

Compositeur(s) :

Kalbrenner

Almanach des Muses 1800

Sujet traité par Voltaire en tragédie, et mis par le C. Gaillard en opéra. Le seul changement qu'on ait remarqué dans ce dernier ouvrage, c'est qn'il n'offre ni la mort d'Olympie, ni son bûcher.

Style correct et coupé heureusement pour la musique ; peu de chaleur ; musique à laquelle on a reproché de la monotonie.

Le Dictionnaire lyrique ou Histoire des opéras de Félix Clément et Pierre Larousse, p. 495, donne comme auteur des paroles Voltaire et Guillard.

Courrier des spectacles, n° 666 du 29 frimaire an 7 [19 décembre 1798], p. 2-3 :

[Article fort long, comme il se doit pour une tragédie lyrique. Le compte rendu s’ouvre sur l’analyse du sujet, identique à celui de la pièce homonyme de Voltaire, sauf pour le dénouement (mais le critique ne dit pas d’emblée en quoi il est changé). Un grand sujet, aux résonances religieuses qui « sembloit devoir produire un plus grand effet sur la scène lyrique ». Mais il n’échappe pas au risque de la langueur. Le critique se risque ensuite à résumer l’intrigue qui plonge le spectateur dans les méandres de l'histoire de la Macédoine. Elle contient tout ce qu’il faut de violence pour une tragédie, mais le dénouement évite la mort d’Olympie, qui est unie avec l'assentiment de sa mère à Cassandre, pourtant meurtrier de son père. C’est là que le critique signale les deux grands changements effectués à la tragédie de Voltaire : celui-ci avait rendu le mariage moins scandaleux en enlevant à Cassandre la responsabilité du meurtre du père d’Olympie, et Olympie se suicidait plutôt que de se soumettre à un mariage odieux : ce n’est pas possible dans un opéra. L’auteur du poème est nommé, et son livret est jugé « bien écrit ». Quant aux interprètes, ils sont jugés de façon très positive. La musique a « de grandes beautés », même si elle devrait avoir « de plus fréquens effets » et que le récitatif « a paru inférieur au chant ». Le critique se livre à l’énumération, habituelle dans les comptes rendus d’opéra, des airs les plus remarqués, mais aussi de ceux qui sont jugés moins réussis. L'air plus remarquable, souligne l’article, unit la triple qualité du poème, de la musique et du jeu de l’interprète. On ne trouve à lui reprocher qu’une « expression mal appliquée ». Le ballet final est tout aussi remarqué ; il est « superbe »; et les danseurs y ont été « couverts d’applaudissement ». Ils portaient des costumes « riches et pleins de goût ».]

Théâtre de la République et des Arts.

Le sujet de l’opéra d’Olympie, donné hier pour la première fois à ce théâtre, est exactement celui de la tragédie que Voltaire a donnée sous le même titre. Le dénouement seul a été changé. Rien ne sembloit devoir produire un plus grand effet sur la scène lyrique, qu’une action qui se lie par une suite continuelle d’idées religieuses, et sur les incidens de laquelle influe à chaque instant ce pouvoir divin, dont les peuples de l’antiquité croyoient leurs prêtres dépositaires. Mais à moins que les passions ne soient fortement prononcées et les intérêts des différens personnages très-marqués, un poëme établi sur ce fonds court le risque de languir quelquefois, et c’est peut-être le seul reproche que l’on puisse faire à l’auteur d’Olympie, ou plutôt au poëte tragique dont il a emprunté son sujet. Retraçons-le ici en peu de mots :

Antipater, ambitionnant le trône de Macédoine, veut se défaire d’Alexandre qui l’occupe, et médite la ruine de toute sa famille. En conséquence, par ses ordres, Cassandre, empoisonne ce prince, et plonge un poignard dans le sein de Statira, sa femme ; Olympie, fille d’Alexandre, est seule épargnée. Cassandre en est épris, et en s’unissant à la fille de ce vainqueur de l’Asie, croit réparer en partie ses forfaits. L’Hicrophante, ou le grand-prêtre d’Ephese, calme les remords de Cassandre, en lui persuadant que les dieux irrités contre lui seront appaisés par cet hymen. L’oracle nomme, pour serrer ces nœuds, Arsane, l’une des prêtresses de Diane ; cette Arsane est Statira elle-même, mère d'Oiympie, et qui a survécu à l’attentat que Cassandre a commis sur elle. Cette princesse, pénétrée d’horreur pour son hymen qui, par ses mains, uniroit son assassin et le meurtrier de son époux à sa fille, sert au contraire la jalousie d’Antigone, l’un des successeurs d’Alexandre. Ce prince voudroit faire monter Olympie sur son trône, pour couvrir son usurpation par une apparence de justice. Cassandre et Antigone sont sur le point d’en venir aux mains : le grand-prêtre les sépare ; ils se retirent, ne respirent que la vengeance, et disposent leurs troupes. Antigone est tué par Cassandre, au pied même de l’autel qu’OIympie tenoit embrassé. Statira ne voit toujours dans le vainqueur que l’assassin de sa famille : mais cédant à la volonté des dieux, qui pardonnent par l’organe du grand-prêtre, elle est forcée d’imiter leur clémence, et l’union d’Olympie à Cassandre n’éprouve plus d’obstacle.

Voltaire a pu prendre quelques idées de son sujet dans le roman de Cassandre par la Calprenède , qui a rendu le personnage de Cassandre moins odieux, en faisant de Perdiccas le meurtrier d’Alexandre. Dans la tragédie, Olympie se tue ; ce qui ne pouvoit avoir lieu dans le poême.

Celui-ci est du cit. Guillard, auteur des opéra d'Œdipe, d’Arvire et Evelina, ouvrages couronnés autrefois à l’académie Française ; il est généralement bien écrit.

Cet opéra est parfaitement joué ; le beau rôle de Statira est rempli avec beaucoup de vérité par la cit. Maillard ; le pathétique mis par la cit. Chéron dans celui d’Olympie ; l’ame avec laquelle le cit. Lainez joue celui de Cassandre ; le ton de dignité que le cit. Adrien répand sur celui d'Antigone, leur ont mérité de fréquent applaudisse mens.

Le cit. Dufresne étoit chargé du personnage de l’Hycrophante, et s’en est acquitté avec le talent qu’il prouve toujours dans ces sortes de rôles.

La musique a de grandes beautés, et quoiqu’elle laisse à desirer de plus fréquens effets ; elle ne fait cependant jamais languir l’action. Le récitatif en général a paru inférieur au chant ; mais celui-ci est d’un style toujours très-correct. Il est même peu de morceaux qui ne soient à citer. Le serment des soldats d’Antigone , qui termine le premier acte, est d’une belle composition, aussi a-t-il été très-applaudi. On a trouvé trop peu de caractère à la marche qui suit immédiatement ce chœur ; effectivement, elle ne répond point à la dignité du sujet.

L’air que Statira chante : Allons soumettons aux volontés des dieux, a été aussi très-goûté.

Peut-être la scène entre Cassandre et Antigone rentre-t-elle trop sensiblement dans le style du duo d’Iarbe avec Enée dans l’opéra de Didon ; mais il est possible que l’identité de ces situations ait amené celle de la composition ; l’ouverture est fort belle.

Terminerons-nous l’article de la musique sans parler d’un air du plus grand effet, c’est-à-dire l’air de désespoir chanté par le cit. Lainez au second acte ? Non , sans doute, et c’est dans ce morceau que l’on retrouve le genre de l’auteur de la superbe scène d'Œnone. Il faut ajouter que le jeu de l’acteur en cette circonstance est au-dessus de tout éloge, et que la poésie prête à la déclamation par 1e charme de son harmonie. On regrette d’y voir une expression mal appliquée, sans doute, dans ce vers :

Ces lieux pour moi n’ont plus de privilège.

Un superbe ballet termine cet opéra : nous avons distingué une musique charmante dans le pas dansé par la citoyenne Delisle et le citoyen Beaupré. Les citoyens Vestris et Beaulieu, les citoyennes Gardel, Chevigny, Vestris, Collomb, Saulnier, Pérignon, ont été également couverts d’applaudissement.

Des costumes riches et pleins de goût, ont encore ajouté au plaisir que cette partie a procuré.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an 6, IIe trimestre, n° 10 du 10 Nivôse, p. 49 :

[Guillard est présenté comme un spécialiste de la transposition des tragédies en opéra, et c’est une tragédie de Voltaire qui est à l’affiche. Une seule modification notable, la suppression de la mort d’Olympie, ce qui change profondément le sens de la pièce l’auteur substitue « une grande immoralité à un dénouement tragique ». Sur le style, pas de vrai reproche, sinon celui d’une certaine froideur. Pour la musique, le jugement est assez circonspect : il faudrait la réentendre pour la juger, mais elle semble monotone. L’article s’achève sur des considérations sur l’état, « très précaire », du Théâtre de la République et des Arts.]

Théâtre de la République et des Arts.

Olympie.

C'est le sujet traité par Voltaire. Le C. Guillard, accoutumé à transporter avec succès nos tragédies sur le théâtre lyrique, s'est permis seulement de retrancher de celle-ci le bucher et la mort d'Olrmpie, sans doute pour amener un ballet d'une manière plus vraisemblable. Mais il me paraît par ce changement avoir détruit le caractère de l'ouvrage, et substitué une grande immoralité à un dénouement tragique.

Le style, comme celui de tous les ouvrages de Guillard, est ferme et correct, sur-tout adroitement coupé pour la musique ; mais en général un peu froid.

La musique a sans doute besoin d'être entendue souvent pour être sentie, c'est un peu le sort de la musique purement dramatique : celle du C. Calkprener ne me paraît pas exempte du reproche de monotonie.

Le moment actuel et la situation encore très-précaire de ce beau théâtre influent aussi peut-être sur le degré d'intérêt qu'on y porte. La rentrée de Lays dans Anacréon, et celle de Chéron qui doit reparaître, dit-on, dans Atar de l'opéra de Tarare, doivent pourtant contribuer à remonter cette belle réunion de talens dans la faveur publique. Une bonne et stable administration, le sort des Artistes enfin fixé, et surtout la paix, peuvent encore rendre à ce théâtre toute son antique splendeur.               L. C.

L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-huitième année, volume V, pluviôse an 7 [février 1799], p. 217-218 :

[Après avoir rappelé l’Olympie de Voltaire, qui n’a pas laissé un souvenir impérissable, la pièce de Gaillard semble poser un problème au critique, qui réserve son jugement : la seule première représentation ne suffit pas à se faire une opinion. Mais la suite de l’article accumule les compliments, pour le livret comme pour la musique, et même pour les décorations et le ballet final.]

THÉATRE DE LA RÉPUBLIQUE ET DES ARTS.

Olympie, opéra.

Voltaire a traité le sujet d'Olympie, & son succès a été médiocre. Le C. Guillard, accoutumé à faire applaudir sur la scène lyrique les beaux sujets du Théâtre français, y a présenté Olympie. Il est difficile & il seroit injuste de prononcer sur l'opinion générale à la seule première représentation. Nous remettons aux suivantes à rendre compte du jugement que le public en portera. Nous pouvons dire d'avance, cependant, que dans le poëme, le dialogue est simple & bien versifié ; que l'auteur y a mis de la sensibilité, qu'il a présenté dans l'ensemble des situations propres aux grands effets, que les chœurs y sont variés; que les prêtres, les prêtresses & les guerriers forment un contraste favorable à la musique ; que les costumes y sont riches & élégans. Plusieurs morceaux de musique ont été vivement applaudis, & chacun des acteurs a reçu du public le tribut d'éloges qu'il mérite. Le ballet, qui sagement a été remis à la fin, pour ne pas interrompre l'action, est exé cuté avec cette perfection que l'on chercheroit en vain partout ailleurs.

La base Chronopéra signale trois représentations d’Olympie, les 18, 20 et 24 décembre 1798.

Ajouter un commentaire

Anti-spam