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Ordre et Désordre

Ordre et Désordre, comédie en trois actes en vers, de Chazet et Sewrin, 27 mars 1808.

Théâtre de l'Impératrice.

Titre :

Ordre et désordre

Genre

comédie

Nombre d'actes :

3

Vers ou prose ,

en vers

Musique :

non

Date de création :

27 mars 1808

Théâtre :

Théâtre de l’Impératrice

Auteur(s) des paroles :

Chazet et Sewrin

Almanach des Muses 1809.

Solange, jeune homme sans ordre et sans prévoyance, est poursuivi par ses créanciers. Il vient se réfugier chez son frere, homme plein d'ordre et d'économie. Là il fait du pis qu'il peut ; il bouleverse les papiers de son frere, prend un acte de vente pour répondre à un billet d'invitation, et par suite de ses inconséquences et de ses étourderies, est prêt à se battre avec un marin, qu'il désarme pourtant par un bon procédé.

Peu de fonds, mais des scènes bien filées, un dialogue piquant, des tirades bien écrites et des vers heureux.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Mad. Masson, 1808 :

Ordre et désordre, comédie en trois actes et en vers, Par MM. Sewrin et Chazet, Représentée sur le Théâtre de l'Impératrice, le 26 Mars 1808.

Journal de l’Empire, 28 mars 1808, p. 2-3 :

[Les comptes rendus du Journal de l’Empire ont souvent quelque chose d’un peu rigide, un peu sévère, et les auteurs devaient redouter l’article qui parlerait de leur pièce. C’est le cas ici, où la mise en cause commence par le titre, qui donnerait une fausse image de la pièce : il n’y est pas question d’ordre, vertu pourtant essentielle dans les sociétés, mais seulement de désordre. Les deux personnages qui symbolisent l’ordre et le désordre sont présentés séparément, Dupont qui symbolise l’ordre, un homme sans qualités, « sans ordre, sans mémoire, sans jugement », un homme dont la conduite est « pleine de foiblesses et d’irrésolutions », qui ne sait que « se fâcher, gronder et prêcher » ; et son frère Solanges, l’« homme du désordre », qui cumule tous les défauts (« jeune étourdi. dissipateur, criblé de dettes, occupé de niaiseries, tout entier aux plaisirs frivoles ») tout en étant « brave, et le meilleur cœur du monde ». Une riche collection de détails montre sa capacité à semer le désordre : celui qui ne fait que des bêtises est aussi celui à qui tout réussit. Le critique ironise sur ce désordre si fructueux, et souhaite que « le désordre aimable et vif qui règne dans la pièce » profite aussi aux auteurs. Parce que la pièce pose un sérieux problème au critique, qui avait « imaginé sur le titre qu'on vouloit faire contraster les bons effets de l’ordre avec les mauvais effets du désordre », et ce n’est pas du tout le cas : Dupont, l’homme de l’ordre, n’agit pas tandis que Solanges le désordonné attire toute la lumière, et par sa réussite ne peut guère que « dégoûter de l’ordre ». Le jugement porté sur la pièce qui suit cette analyse de l'intrigue est tout aussi sévère : pas d’action, pas de ligne directrice (marche et conduite, deux éléments indispensables, absents de la pièce). Par contre, elle est riche « en esprit, en saillies, en jolis mots, en détails élégans, en belles sentences morales » : par ignorance de ce qu’est l’art, les auteurs ont oubli ce qui est nécessaire dans une comédie : « mais l’action, mais l'intrigue, mais la liaison des scènes, mais le jeu des personnages entr'eux », tout cela manque. La pièce n’est pas sans qualités : « du mouvement, et de la chaleur dans le dialogue, de petits incidens multipliés, et une foule de traits comiques » La pièce est originale, et elle peut réussir par là, d’autant que l’interprétation est de qualité.]

Théâtre de l’Empire.

Première représentation d'Ordre et Désordre,
comédie en trois actes, de MM. Chatet et Sewrin.

Il y a dans le titre, ordre et désordre ; dans la pièce, il n’y a que désordre ; on n'y voit point de plan, de liaison, de dessein ; c'est une suite de scènes épisodiques plutôt qu'une comédie. M. Dupont, l’homme d'ordre, est représenté comme un homme triste, maussade, minutieux, sordide : ce n'est pas faire beaucoup d’honneur à l’ordre, l'une des premières vertus sociales, source de paix et de bonheur pour les gouvernemens, les nations, et pour les innombrables familles répandues sur la surface d’univers.

L’homme qui a véritablement de l'ordre dans sa tête et dans sa maison n'est ni avare, ni fantasque, ni grondeur, ni imbécille. M. Dupont est un homme sans ordre, sans mémoire, sans jugement ; il ne s'aperçoit pas que son frère a enlevé, d'un de ses cartons, un titre essentiel pour une affaire dont il est chargé : il s’imagine avoir oublié l'endroit où il a mis ce papier et cet oubli ne l’inquiète pas beaucoup. Il chasse une servante qui lui dit franchement la vérité ; il a placé son bien entre les mains d’un homme qui fait banqueroute ; il n'a pas une volonté ferme et stable ; sa conduite est pleine de foiblesses et d’irrésolutions ; et il ne fait guère autre chose que se fâcher, gronder et prêcher : ce n’est pas là l’homme d’ordre

Solanges. au contraire,. frère de M. Dupont, est le véritable homme de désordre : c'est un jeune étourdi. dissipateur, criblé de dettes, occupé de niaiseries, tout entier aux plaisirs frivoles ; du reste brave, et le meilleur cœur du monde. Ses créanciers l’ont forcé de déguerpir de chez lui, et de se réfugier chez son frère : la première chose qu’il fait en arrivant, est d’écrire un billet doux sur un acte de vente qu'il trouve dans le carton ; puis d'ouvrir et de jeter les livres qui sont sur le bureau ; enfin de se mettre à table, et de boire du vin de Madère. La tête échauffée par le vin, il veut brûler la cervelle d’un capitaine de vaisseau, qui se plaint avec raison qu’on lui ait fait perdre son procès, en se servant d'un acte de vente pour écrire un billet doux. Mais quoiqu'il ne fasse que des sottises, tout lui réussit ; il a une étoile qui favorise son désordre. Il lui tombe des nues cent mille francs que lui cnvoie d'Amérique un homme d’affaires sur lequel il ne comptoit plus ; tandis que son frère, l’homme d'ordre, est ruiné par la faillite d’un ami qu’il croyoit sûr, et qu’il avoit sous la min. Quelque temps après l’honnête procureur arrive lui-même du Nouveau Monde, apportant à cet étourdi cinq ou six cent mille francs. Solanges répand les bienfaits à pleines mains sur son frère. sur le banqueroutier et sa femme, sur son fidèle procureur qui le mérite bien, sur ses domestiques : là-dessus il va se battre au pistolet, et revient gaillard. C'est bien là un heureux désordre, qui vaut un effet de l’art.

J'espère que le désordre aimable et vif qui règne dans la pièce ne sera-pas moins favorable aux auteurs qu’à leur principal personnage. S'il ne vient pas à MM. Chazet et Sewrin des cent mille francs d'Amérique, il leur viendra de la bonne ville de Paris une foule d'auditeurs, qui apporteront de la monnaie de France. La caisse de l’administration profitera du désordre qui ruine tontes les caisses et les gens d'affaires viendront apprendre à cette pièce combien le desordre est bon.

J’avois d'abord imaginé sur le titre qu'on vouloit faire contraster les bons effets de l’ordre avec les mauvais effets du désordre ; que Dupont et Solanges, agissant chacun d'après leur caractère, arrivoient à différens résultats analogues à leurs actions différentes : je m'étois trompé ; ce n'est point là l’esprit et l'idée de la pièce. Dupont n'agit point ; c'est tout simplement un fâcheux discoureur qui ne sert que d’ombre au tableau brillant de Solanges : l'ordre n’est là que pour faire valoir le désordre. Solanges est seul sur le premier plan, fatigant la fortune à force de sottises, sans pouvoir la lasser ; écoutant les sermons de son frère pour s'en moquer ; éblouissant tout le monde par l’éclat et le charme de son caractère ; capable, en un mot, de dégoûter de l’ordre, par le bonheur et les grâces attachées à son désordre.

C'est dommage qu'une action soit nécessaire à une pièce ; que cette action ait besoin d'une marche et d'une certaine conduite, et que l’esprit ne puisse se passer du jugement ; car nous abondons en esprit, en saillies, en jolis mots, en détails élégans, en belles sentences morales ; mais l’action, mais l'intrigue, mais la liaison des scènes, mais le jeu des personnages entr'eux ; c'est là la difficulté, c’est là l’écueil : hoc opus hic labor est. Beaucoup de nos auteurs n'ayant pas assez étudié l’art, épuisés par des productions prématurées, gâtés par l’habitude des bagatelles faciles, n'ont pas dans la tête assez de combinaisons théâtrales pour conduire un sujet de quelqu’étendue. Cependant il y a dans la pièce nouvelle du mouvement, et de la chaleur dans le dialogue, de petits incidens multipliés, et une foule de traits comiques qui peuvent suppléer au défaut d’unité et d'ensemble. L'ouvrage a un coin d'originalité qui peut amuser et attirer les spectateurs. Le jeu des acteurs, spécialement celui de Clozel et de Barbier, sera un puissant motif de curiosité.

L'Esprit des journaux français et étragers, 1808, tome V, mai 1808 p. 265-270 :

[Partant d’une belle idée philosophique – il y a toujours du pour et du contre – le compte rendu parle d’une pièce où un frère ordonné tente de ramener à la raison un frère faiseur de dettes. La pièce joue de cette opposition entre un amateur d’ordre et un amoureux de désordre ; elle montre que l’ordre est tout à fait susceptible de produire de grands désordres. Puis c’est l’inverse qui est montré : malgré le désordre de ses affaires, l’homme aux dettes voit tout s’arranger au lieu de se dégrader, comme le voudrait la morale. La pièce est pleine de mouvement et contient « de l'esprit, des vers heureux, des traits de caractère, des tirades bien écrites ». Le critique y trouve cependant peut-être un peu de trop de désordre. Mais elle a été applaudie et les auteurs ont été nommés.]

Ordre et Désordre.

En toute chose il y a du pour et du contre; la philosophie ordonne de ne prononcer qu'avec circonspection, et l'on sait assez que le doute est le commencement de la sagesse. On doit convenir pourtant que l'ordre a de grands avantages ; mais..... il est certain aussi que le désordre a de grands inconvéniens ; mais..... et voilà précisément le sujet de la pièce nouvelle, d'où on pourrait conclure peut-être que soit ordre, soit désordre, dans cette pièce-là, tout le monde a tort ; mais aussi,

Quant tout le monde a tort, tout le monde a raison,

c'est ce qui arrive ; ils ont tous tort, ils ont tous raison; ils sont tous honnêtes gens, ils font tous des sottises ; elles leur tournent toutes le mieux du monde ; ainsi donc , ils ont beau avoir tort, il est bien clair qu'ils ont eu raison. M. Dumont, avocat ou procureur, je ne sais lequel des deux a bien raison certainement de ne pas vouloir que son frère Solanges, qui.vit de son bien, ou plutôt de celui de ses créanciers, fasse des dettes; mais; Solanges a bien raison de vouloir que son frère les paie, et de penser qu'il vaut mieux ruiner son frère que ses créanciers, car au fait ils ne sont pas ses parens si proches. Dumont, bonhomme au fond, quoiqu'il ne veuille pas qu'on dérange rien chez lui, qu'il fasse enrager sa servante tout le jour à force d'ordre et ennuie son frère toute l'année à force de remontrances, Dumont promet de payer ; il vous devra tout, dit le valet ; il ne me devra rien s'il se corrige, répond Dumont;

Pour ne vous rien devoir il se corrigera,

s'écrie le valet , qui ne sait apparemment pas que son maître, comme Figaro, aimerait mieux devoir toute sa vie que de le nier un seul instant. Solanges est en effet si incorrigible et les dettes si fortes, que Dumont renonce à payer ; mais Solanges vieut de recevoir cent mille francs sur ses biens des îles qu'il croyait perdus ; une Mme. Dercourt arrive désolée pour dire à Dumont que son mari, chez qui il avait placé de l'argent, parce que c'était un homme d'ordre, vient d'être obligé de se cacher, après avoir fait faillite par suite d'un malheur non mérité, et Solanges qui sait ce que c'est que d'avoir des dettes,

Qui ne sait compâtir aux maux qu'il a soufferts !

met le portefeuille aux cent mille francs dans la poche du petit garçon de Mme. Dercourt, afin que celle-ci paie les créanciers de son mari. Ceux de Solanges arrivent ; celui ci les adresse à son frère ; ils crient contre Dumont qui avait promis de payer et ne paie pas, contre Solanges qui n'avait rien promis et ne paie pas davantage. Un libraire vient crier de ce que Dumont ne finit pas les Tablettes chronologiques qu'il lui avait promises,et que son amour de l'ordre ne lui permet de faire qu'avec poids et mesure. Un capitaine de vaisseau crie à son tour- de ce qu'un procès , dont il avait confié le soin à Dumont, n'avance pas, parce que, vu son ordre , celui-ci ne peut pas s'en occuper avant d'en avoir terminé quatorze autres. Dumont veut lui remettre ses papiers, il en manque un :

Je l'ai si bien serré que je ne le vois plus,

dit-il- Le marin crie encore plus fort pour avoir son papier ; Dumont les laisse tous crier, et s'en va. Solanges se fâche contre le marin ; ils sortent pour se battre, et les créanciers, le libraire, les valets sortent après eux pour les séparer.

Nous voici au troisième acte; la toile se lève, et c'est maintenant chez Solanges que nous sommes. Une jolie chambre bien claire, une belle vue, de jolis meubles , un secrétaire ouvert, une valise sur un fauteuil, un violon sur l'autre, des habits sur un troisième ; enfin, une vraie chambre de garçon. Marie, la gouvernante de Dumont, qui est venue rendre visite à Frontin, observe qu'il n'y a pas moyen de trouver une chaise pour s'asseoir : rien de si aisé, dit Frontin, il pousse à terre un sac et des papiers qui embarrassent un des fauteuils, et voilà une place faite. Ensuite, après que les valets se sont entretenus de leurs amours, de leurs petites affaires, du caractère de leurs maîtres, etc., nous apprenons un peu tard que le duel n'a pas eu lieu, et qu'il est remis à trois heures. Dumont arrive désespéré pour empêcher son frère de se battre ; Solanges le plaisante. Le maître de danse arrive et commence sa leçon ; un autre personnage arrive, c'est le chargé d'affaires des îles qui vient apporter à Solanges le reste du prix de la vente de ses biens dont les cent mille francs n'étaient qu'un à-compte. Il lui remet quatre cent mille francs en portefeuille. Solanges, au comble de la joie, fait mille projets de dépense, dote Frontin et Marie, donne sans compter à son frère, je ne sais si c'est en pur don, pour le placer, ou le lui garder, une partie de ce qu'il a reçu, entend sonner trois heures, prend ses pistolets et part, fermant sa porte à double tour pour qu'on ne le suive pas. Dumont voudrait sortir, se désole inutilement :

II n'a seulement pas mis ordre à ses affaires,

s'écrie-t-il. Enfin la porte se r'ouvre, on ne s'est point battu ; le procès qui ne devait être jugé qu'après quatorze autres, s'est, je ne sais trop comment, jugé dans la matinée. Solanges, je ne sais aussi comment, a su que le marin l'avait perdu faute d'un papier sur lequel Solanges se souvient d'avoir écrit le matin un billet à une femme, ne trouvant pas chez son frère d'autre papier sous sa main. Il a remis au marin sur-le-champ la somme qui faisait le sujet du procès perdu par sa faute ; celui-ci n'a pu tenir à tant de générosité, ils se sont embrassés; Mme. Dercourt vient se jetter aux pieds de Solanges, dont les cent mille francs lui ont rendu son mari ; la joie de Frontin et de Marie complette le tableau, et la conversion de Dumont le couronne. Il promet de renoncer à ses manies d'ordre, et de ne conserver que le bon de la chose ; il se flatte que son frère fera aussi quelque pas vers la réforme :

J'irai moins doucement, et vous irez moins vite,

dit-il; mais Solanges me paraît homme à le mener bon train, et quand on s'est converti sur d'aussi beaux exemples, il me semble qu'ils doivent profiter encore davantage par la suite. Ainsi gare les quatre cent mille francs.

Il y a beaucoup de mouvement dans le troisième acte de cette pièce ; il y a dans toute la pièce de l'esprit, des vers heureux, des traits de caractère, des tirades bien écrites ; mais pour être tout-à-fait fidèle au titre, ce qui manque dans la marche de la pièce , ce n'est pas le Désordre.

Les auteurs, demandés au milieu des vifs applaudissemens d'une nombreuse assemblée, sont MM. Chazet et Sewrin.

L'Esprit des journaux français et étrangers, 1808, tome VII, juillet 1808, p. 294 :

[Retour sur la pièce, pour signaler son insuccès, attribué à l’inversion morale qu’elle montre, puisque le désordonné est valorisé quand l’ordonné paraît bien inquiétant.]

Ordre et Désordre, comédie de MM. Chazet et Sewrin, et dont nous avons donné l'extrait dans le volume de Mai, page 265, n'a pas obtenu une réussite plus brillante que la pièce dont nous venons ds parler.

MM. Folleville et Bourson, dans les rôles de Dumont et de Solanges, le premier ami de l'ordre, et le second du désordre ; M. Paulin , dans celui de valet de Solanges, se sont assez bien acquittés de leurs rôles. Mais rien ne peut cacher le vice capital de cette pièce, où l'ami du désordre est peint de manière à devenir l'ami de tout le monde : tandis que l'ami de l'ordre est représenté comme un homme que personne ne voudrait rencontrer en son chemin, et chez qui l'on ne voit pas l'ordre, mais une manie méthodique, plutôt nuisible qu'utile à la société.

Archives littéraires de l'Europe, tome dix-septième (1808), Gazette littéraire, mars 1808, p. lxxi :

[Le compte rendu s’ouvre par une comparaison avec le Tartuffe de mœurs, mais avec un changement important : le frère aîné n’est pas hypocrite, il est au contraire sage et ordonné. Il raconte rapidement l’intrigue. Le critique souligne le caractère léger de la morale de cette pièce. Brillant succès, grâce à « de l'esprit, des mots de situation, des vers heureux et des tirades bien écrites ».]

Ordre et désordre, comédie en trois actes et en vers de MM. Chazet et Sewrin.

Prenez le Tartuffe de mœurs, de M. Chéron ; laissez le caractère du jeune étourdi tel qu'il est, mais ôtez à son frère aîné son hypocrisie et ses vices, en lui conservant ses dehors de sagesse et de régularité, et vous aurez déjà quelque idée de la pièce nouvelle. II n'y manque pas de mouvement : l'homme d'ordre, M. Dumont, semble peu fait pour en produire, car à force d'ordre et de précautions, il met des entraves à tout ; mais son frère, Solanges, à force de désordre, fait naître à chaque pas des événemens. Nous n'en rendrons pas un compte détaillé, parce que cela nous meneroit trop loin Ce qu'il y a de remarquable, c'est que l'homme dérangé a tout l'avantage sur son frère. Solanges semble avoir un pacte avec la fortune qui répare toutes ses sottises, et lui donne même le moyen de remédier aux malheurs que Dumont éprouve sans les mériter. Aussi, à la fin de la pièce, n'est-ce point Solanges mais bien Dumont qui se convertit et promet de n'avoir plus à l'avenir autant d'ordre. Nous ne chicanerons point les auteurs sur la morale assez légère qu'on pourroit extraire de leur pièce ; l'exemple de Solanges ne peut tirer à conséquence que pour les gens qui attendent des Indes des fortunes de 500 mille francs, et ces gens-là sont assez rares. Pour Dumont, si, comme on le dit dans la pièce, il ne renonce point à l'ordre même, mais à son excès, il n'y a pas de quoi le blâmer. Il nous suffira donc de dire que l'ouvrage a obtenu un brillant succès, qu'on y a trouvé de l'esprit, des mots de situation, des vers heureux et des tirades bien écrites.

 

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