Le Tour de France

Le Tour de France, voyage en un acte, en prose, mêlé de vaudevilles, de Charles Henrion et Brazier fils, 9 brumaire an 14 [31 octobre 1805].

Théâtre des Jeunes Artistes/

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Mad. Masson, 1805 :

Le Tour de France, voyage en un acte, en prose, mêlé de vaudevilles ; Par les deux Compagnons de route Henrion et Brazier fils. Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre des Jeunes-Artistes, le 9 Brumaire an 14.

Courrier des spectacles, n° 3205 du 12 brumaire an 14 [3 novembre 1805], p. 2 :

[Le public avait apparemment besoin qu’on lui explique le sens du titre, et le critique se dévoue pour révéler ce qu’est le tour de France des jeunes ouvriers, et pour rappeler la hiérarchie des théâtres, en rapport strict avec le niveau social du public qu’il accueille. Un petit théâtre est voué à des pièces mettant en scène des gens « du bas étage », ici, un loueur de voitures, un cocher de fiacre, un conducteur de cabriolet. Chacun porte un nom en rapport avec un type de voiture à chevaux. L’intrigue tourne bien sûr autour du mariage de la fille du loueur de voitures, couritsée par deux cochers, de fiacre et de cabriolet (ils portent le nom de leur véhicule, l’un leste et rapide, l’autre balourd). C’est le leste qui l’emporte, ayant ébloui sa future belle-mère par la description de voyages imaginaires au cours d’un tour de France inventé. La pièce est jugée sévèrement, et les auteurs, dont on donne les noms, sont accusés de ne pas avoir beaucoup travaillé : un recueil de « propos de cocher et de conducteurs de diligence » noyés dans quelques scènes.]

Théâtre des Jeunes Artistes.

Le Tour de France.

Pour comprendre le titre et le sujet de cette pièce, il faut savoir que la plûpart des ouvriers, avant de choisir une résidence, sont dans l’usage d’aller travailler dans plusieurs villes, ce qu’ils appellent faire le tour de France, ce voyage forme pour celui qui l’a fait, une sorte de titre de noblesse ; la considération croît en raison du chemin qu’on a fait et du tems qu’on a employé à cette espèce d’Odyssée.

Il est juste que dans un état qui renferme tant de professions, il y ait des spectacles, des théâtres et des auteurs pour tout le monde. L'Opéra est destiné aux Dieux, la Scène Française aux Rois, aux Ducs, aux Marquis, aux gens d’une éducation distinguée ; Louvois, l’Opéra-Comique et le Vaudeville s’accommodent des gens de lettres, des bourgeois et même des campagnards aisés.

Les artisans, les compagnons du bas étage sont le domaine de Montansier et de quelques petits théâtres subalternes. Il ne s’agit ici que d’un loueur de voilures, d’un cocher de fiacre et d’un conducteur de cabriolets.

Le Héros principal se nomme Vélocifère ; c’est un homme passionné pour sa profession. Il veut que tous les gens de sa maison portent un nom analogue à son état, ainsi sa femme se nomme Mad. Fourgon, sa fille Mlle. Diligence, et sa servante, la Dormeuse. Mlle. Diligence a deux amans, l’un leste et fringant, qui, pour plaire à la famille, a pris le nom de Cabriolet ; le second, lourd et grossier s’appelle Fiacre. Cabriolet plaît davantage à Vélocifère, et Fiacre à Mad. Fourgon. Comme Mlle Diligence, en fille honnête, ne peut pas posséder deux maris, ou convient qu’elle épousera celui des deux rivaux qui aura fait son tour de France, Cabriolet et Fiacre qui, l’un et l’autre n’ont jamais passé la barrière de Chaillot, se trouvent très-embarrassés ; mais Cabriolet paie d’effronterie ; il parle avec une confiance extraordinaire des pays qu’il n’a pas vus, et charme de ses récits et de son babil , la bonne Mad. Fourgon. Fiacre, qui ne peut répondre qu’avec gaucherie et balourdise, est décidément renvoyé , et Mlle. Diligence devient ainsi la conquête de Cabriolet.

Il est à présumer que MM. Henrion et Brazier, auteurs de cette pièce, n’ont point attaché leur honneur à son succès.

Si l’on en excepte quelques Couplets assez bien tournés, cette pièce n’offre rien qui puisse faire honneur à leur esprit et à leur imagination. Leur but paroit avoir été de recueillir des propos de cocher et de conducteurs de diligence, et de les encadrer dans quelques scènes : une entreprise de ce genre n’exigeoit pas qu’ils fissent le tour de France.

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