Le Volcan, ou l'Anachorète du Val des Laves

Le Volcan, ou l'Anachorète du Val des Laves, pantomime magique en 3 actes, à grand spectacle, par J.-G.-A. Cuvelier, musique de M. Alexandre [Piccini], ballets de Camus, décors de Moench, costumes exécutés sur les dessins d'Isidore, créée au Cirque olympique le 11 mars 1812.

Publication : à Paris, chez Barba, 1812.

Bibliographie de l'Empire Français ou Journal de l'imprimerie et de la librairie, première année, n° 28 du 4 avril 1812, p. 314 :

2132. LE VOLCAN, ou l’ Anachorète du val des laves, pantomime magique en trois actes, à grand spectacle, par J. G. A. Cuvelier, musique de M. Alexandre, ballets de M. Camus, décors de Moench, costumes exécutés sur les dessins de M. Isidore; représentée pour la première fois au Cirque olympique, le 11 mars 1812. In-8° d'une feuille et demie, tiré à 1000 exempl. Imprimerie d'Everat, à Paris.

A Paris, chez Barba , au Palais-Royal.

Journal de l'Empire du 22 mars 1812, p. 3-4 :

[Encore une pantomime, magique de surcroît, qui a les honneurs du feuilleton de Geoffroy dans le Journal de l'Empire. Le compte rendu s'attache d'abord à souligner la stricte conformité de la pièce aux lois du genre : le combat entre le crime et l'innocence, cette dernière devant toujours triompher ; un scélérat, ici amoureux de sa belle-sœur, et qui se donne au diable pour arriver à ses fins ; une belle protégée par un ange, «  sous le costume d'un anachorète ou hermite », un hermite étant indispensable dans une pantomime. L'intrigue se réduit à une succession de combats entre anges et démons, chacun prenant tour à tour l'ascendant sur l'autre. Au momen toù le scélérat va triompher, l'Etna entre en éruption, dans un dans un déluge d efeu. Les diables tombent dans l'abîme qui vient de s'ouvrir, tandis que l'hermite se révèle être un ange qui monte au ciel. Tout finit comme de juste par un mariage entre la belle et son amant. La pantomime est un spectacle total, et Geoffroy énumère tout ce que les Franconi ont mis en œuvre pour la satisfaction du public, danses, décors, costumes, machines de scène. Bien sûr, ni littérature, ni style, ni art dramatique. Il s'agit de nou rrir les yeux, de les repaître. Occasion pour Geoffroy de citer Horace (le vieil oratorien ne peut pas s'en empêcher). Et il enchaîne sur une critique indirecte de la pièce, le ridicule des combats sur scène. Il donne quelques exempels de dénouement qui font rire malgré le tragique de la situation, comme à la fin d'Iphigénie en Tauride ou, scandale absolu, à la fin d'Athalie, quand les lévites se battent contre les soldats d'Athalie. Et de rappeler une représentation toute récente où quelques soldats sont tombés, suscitant des éclats de rire sacrilèges (Geoffroy considère Athalie comme le chef-d'œuvre de la tragédie). Le lecteur doit faire lui-même l'application de ces réflexions à la pantomime du jour, qui n'est certes pas un chef-d'œuvre absolu.]

CIRQUE OLYMPIQUE.

Le Volcan, ou l'Anachorète du Val-des-Laves.

Il y a quelques jours que les curieux vont en foule admirer les éruptions de ce volcan, tout à la fois magnifiques et terribles. Cette pantomime réunit tout ce qui a coutume de flatter les yeux et de frapper l'imagination ; c'est un combat entre le crime et l'innocence entre un ange et un diable. Le scélérat est un marquis italien, amoureux de sa belle sœur : autrefois les marquis étoient scélérats en amour ; celui-ci se donne au diable pour venir à bout de sa belle, et ce diable paroît sous la figure d'un nègre. La jeune beauté dont il est épris est protégée par un ange, sous le costume d'un anachorète ou hermite. Dans les pantomimes, rien de plus imposant qu'un hermite. Pendant la plus grande partie de la pièce, l'ange et le diable combattent presque à forces égales ; on ne voit que miracles angéliques et diaboliques, tous plus étonnans les uns que les autres ; le scélérat, tantôt victorieux, tantôt vaincu, toujours endurci dans son abominable dessein, est enfin sur le point de triompher et de recueillir le fruit de son amour. Il est minuit : le crime va se consommer dans la chapelle des Laves, au fond du mont Etna. Tout-à-coup l'éclair brille, la foudre éclate, la terre mugit et s'entr'ouvre, le volcan de l'Etna vomit des torrens de flammes : les diables qui s'étoient déguisés en hermiles, se précipitent dans l'abime ; l'anachorète paroît, devient un ange, et s'élève au ciel, et tout se termine par le mariage de la belle-sœur du marquis avec un comte son amant.

La pantomime est ornée de danses : les décorations, les costumes, les machines ne laissent rien à desirer ; et MM. Franconi n'ont rien épargné de ce qui pouvoit attirer le public à ce spectacle. Il n'est ici question ni de littérature, ni de style, ni d'art dramatique ; c'est la rareté, la curiosité faite pour repaitre les yeux : souvent on se fait mieux entendre en parlant aux yeux qu'en s'adressant à l'esprit ; c'est Horace qui le dit dans l'Art Poétique :

Segnius irritant aninos demissa per aurem,
Quam quæ sunt oculis subjecta fidelibus.

L'oracle n'est cependant pas infaillible, c'est suivant l'occasion ; car il y a des choses qu'il vaut mieux entendre que voi  : les combats, par exemple, sont ridicules sur la scène ; on rit au dénoûment d'Iphigénie en Tauride ; on rit même au dénoûment d'Athalie, lorsque les lévites se battent contre les soldats d'Athalie ; et dans la dernière représentation de cette tragédie, quelques soldats d'Athalie qui sont tombés par terre, ont excité des éclats de rire qui ont profané la fin de ce chef-d'œuvre.

Geoffroy.          

Françoise Lavocat, « Le volcan dans l'opéra ballet et le théâtre à machines », in L'Imaginaire du volcan, dirigé par Marie-Françoise Bosquet et Françoise Sylvos (Presses Universitaires de Rennes, 2005), note 73, page 94 

Le décor volcanique (l'action est située en Sicile) est connoté négativement ; l'intérieur de l'Etna est le cadre d'une lutte entre anges et démons. Lors d'une éruption de l'Etna, fomentée par les puissances du mal, des personnages sont dévorés par la lave (cet aspect du danger volcanique me semble mis en scène pour la première fois).

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