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Morale

Les mots du théâtre au XVIIIe siècle.

Morale.

Chamfort et Laporte, Dictionnaire dramatique, tome II, p. 260-262 :

MORALE. On désigne sous ce nom, en Poësie Dramatique, les réflexions utiles & sages que l'homme fait sur lui-même à la vue des malheurs & des crimes, où les passions précipitent des hommes, ou des ridicules qu'elles leur donnent dans la société : réflexions qui tendent à lui faire haïr le vice & aimer la vertu & l'ordre ; qui l'engagent à se défier de lui même, à craindre de tomber dans les mêmes abîmes, où la colère, la vengeance, l'ambition, la jalousie, & sur-tout l'amour, ont précipité des hommes souvent moins foibles, plus sages, & plus vertueux que lui. C'est pour cela que par-tout on lui montre le crime puni, la vertu triomphante. Si quelquefois on la lui représente dans le malheur & dans l'infortune, ce n'est que pour la lui rendre plus aimable encore, & l'en faire sortir plus brillante. Si au contraire on lui fait voir le crime en honneur & dans la prospérité, c'est pour le rendre plus odieux, & pour le faire tomber de plus haut dans l'abîme. Les Anciens, tant Grecs que Romains, n'étoient pas si jaloux que nous le sommes de la Morale. Ils attribuoient tout au Destin, à une fatalité aveugle & inévitable : & quelle instruction recueillir d'un crime, d'un assassinat, d'un inceste, commis nécessairement ? Au lieu que quand on voit, comme sur nos Théâtres, tous ces désordres occasionnés par des passions trop écoutées, il est naturel d'en combattre de toutes ses forces, comme les sources trop certaines de tous nos malheurs.

On reproche aux Auteurs Dramatiques de rendre les passions trop aimables. Il y en a en effet qu'on ne rend peut-être pas assez haïssables sur le Théâtre ; ce qui est tout-à-fait contraire à la bonne politique. Par exemple, Molière n'a guères représenté que comme une galanterie pardonnable, l'infidélité dans le mariage ; ce qui est du plus dangereux exemple.

M. Diderot prétend que les points de Morale les plus importans pourraient être discutés au Théâtre, & cela sans nuire à la marche violente & rapide de l'action Dramatique II faudroit pour cela disposer la Fable, ou Poëme, de manière que les choses y fussent amenées, comme l'abdication de l'Empire l'est dans Cinna. C'est ainsi que le Poëte agiteroit la question du suicide, de l'honneur, du duel, de la fortune, des dignités, &c. Nos Poëmes en prendraient une gravité qu'ils n'ont pas. Si une telle Scène est nécessaire, si elle tient au fond , si elle est annoncée, & que leSpectateur le désire, il y donnera toute son attention; & il en sera bien autrement affècté, que de ces petites Sentences alambiquées, dont nos Ouvrages sont confus,

Références :

Pièces :

Corneille, Cinna : la pièce aborde la grave question de l’abdication par Auguste.

Molière, dans ses pièces, traite de façon peu morale de la question de l’infidélité dans le mariage.

Critique littéraire :

Diderot, De la poésie dramatique, III. D’une sorte de Drame moral (Œuvres complètes, librairie Garnier, 1875, tome 7, p. 313) considère que « les points de Morale les plus importans pourraient être discutés au Théâtre ».

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