Adèle et Dorsan, comédie en trois actes en prose, mêlée d'ariettes, de Marsollier, musique de d'Aleyrac. 8 floréal an 3 [27 avril 1795].
Opéra comique national
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Titre :
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Adèle et Dorsan
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Genre
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comédie mêlée d’ariettes
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Nombre d'actes :
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3
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Vers / prose
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en prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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oui
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Date de création :
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8 floréal an 3 [27 avril 1795]
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Théâtre :
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Opéra comique national
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Auteur(s) des paroles :
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Marsollier
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Compositeur(s) :
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Daleyrac
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Almanach des Muses 1796.
Jeune villageoise abandonnée par Dorsan, qui est sur le point d'épouser une jeune veuve. Adèle survient au moment de la cérémonie. Les deux amans se réunissent et fuyent ensemble ; le père les poursuit, les atteint, et se laisse fléchir à la fin en attendant les vœux qu'ils forment pour lui sans qu'ils puissent soupçonner qu'il les écoute.
De l'intérêt, des situations, des longueurs.
Décade philosophique, littéraire et politique, an iii (1795), tome V, p. 301-302 :
[Article réduit à un résumé de l'intrigue (mais un résumé fort long), simplement suivi du nom des deux auteurs, paroles et musique.]
Théatre de l'Opéra-Comique.
Adele et Dorsan, comédie en 3 actes, mêlée d'ariettes, donnée le 8 floréal.
Dorsan est sur le point d'épouser Hortense ; déjà les, paysans du village et les domestiques de la maison se préparent à la fête qui doit accompagner cette noce : ils dansent une ronde très jolie, et répètent des évolutions militaire ; enfin, Dorsan, sa future, le père de Dorsan sortent pour aller à la municipalité, lorsqu'Adèle, éplorée, égarée, vient se jeter au milieu du cortège.
Adèle est une jeune fille, appartenant à de pauvres gens ; elle a été aimée de Dorsan, et lui a accordé du retour. Mais Dorsan, abusé par un rival envieux, l'a crue inconstante, et c'est ce qui l'a déterminé à s'unir à Hortense. Le père de Dorsan, lui-même, a trempé dans cette fourberie, pour l'empêcher d'épouser une fille de rien.
Les pleurs, les cris d'Adèle, au milieu de cette noce, parviennent à en faire surprendre [sic] la conclusion. Tout le monde se disperse. Dans cet intervalle le père de Dorsan vient parler à Adèle. Il l'exhorte à ne plus mettre d'obstacle à la tranquillité de sa famille ; il lui offre une pension honnête, et finit par lui déclarer que sa volonté est que son fils achève le mariage commencé, que la noce doit se terminer le soir même, et que, jusqu'à ce moment, il lui a défendu de la voir. Adèle refuse tout secours, et ne peut se résoudre à abandonner son amant : elle persiste à rester à la porte de cette maison. La nuit vient ; deux domestiques sont envoyés pour l'engager à se retirer, et pour l'accompagner où elle voudra ; mais elle veut rester, et désarme par sa douceur les domestiques, jusqu'au moment où Dorsan, qui lui est resté fidèle, descend par sa fenêtre, et s'enfuit avec elle. Cependant la fête recommence ; la maison est magnifiquement illuminée, mais on apprend la fuite de l'époux. Son père se désespère ; il prend la résolution de courir après lui. C'est ainsi que se termine le second acte.
Au commencement du troisième, Adèle et Dorsan sont dans la chaumière d'une pauvre femme, auprès de laquelle ils ont trouvé l'hospitalité ; et le père de Dorsan, blessé, malade, repose sur un lit, dans le même endroit. En poursuivant, à cheval, les fugitifs, il a fait une chûte dangereuse, près de cette chaumière ; un évanouissement en a été la suite ; son fils et Adèle sont accourus et I'ont transporté, sans connaisance, dans la chaumière. Il reprend ses sens : les deux jeunes gens, de peur de l'irriter, se retirent. II demande à la vieille femme, maîtresse de la chaumière, où il est, ce qui lui est arrivé : la vieille le lui raconte. Il veut voir ceux qui lui ont donné de si généreux soins. Mais ils ont exigé le secret de la bonne femme. Cependant pour satisfaire la curiosité du vieillard, elle veut qu'il feigne d'être retombé dans son assoupissement, et saisit ce moment pour introduire les jeunes gens. Les sentimens tendres que tous deux manifestent pour lui, sans supposer qu'on les entende, les vœux qu'ils adressent au ciel pour son rétablissement, le désarment, et il leur pardonne.
Les auteurs sont : Marsollier et Dalairac. S.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1795, volume 3 (mai juin 1795), p. 224-226 :
[Après le rituel résumé de l'intrigue – ce que le critique appelle « le plan de cet ouvrage » –, le jugement porté est globalement positif. Seules des longueurs ennuient un peu. Il manque aussi un peu d’équilibre entre un début trop fort et une suite qui n’est pas au même niveau. L’ouvrage aurait besoin d’être rendu plus parfait. La musique, elle, est remarquable, « remplie d'expression, de finales & de morceaux d'ensemble faits en maître qui connoît la scene & l’accent des passions ».
THÉÂTRE DE L’OPÉRA COMIQUE NATIONAL, RUE FAVART.
Adele & Dorsan, opéra en trois actes.
Dorsan a aimé Adele, jeune paysanne qu'il a même séduite ; mais il croit Adele infidele, & se détermine à épouser Hortense. Au moment de la célébration de son hymen, Adele revient dans le pays ; elle est dans un état de délire effrayant : elle réclame le cœur & les promesses de Dorsan, aux yeux duquel elle brûle de se justifier. Le pere de Dorsan, furieux de ce contre-tems qui dérange ses projets sur l'établissement de son fils, veut bannir Adele : l'insortunée s'obstine à rester : elle a su toucher le cœur de deux des serviteurs de Dorsan, qui lui permettent de passer une partie de la soirée sous les fenêtres de son amant. Celui-ci vient bientôt la rejoindre lui-même & fuit avec elle, loin de la maison paternelle. Le pere de Dorsan, désespéré, monte à cheval pour suivre ce fils ingrat ; mais, renversé bientôt par son cheval, il tombe sans connoissance : Dorsan & Adele ont le bonheur de le secourir & de le porter chez une pauvre femme qui le couche dans son lit & lui prodigue tons les soins de l'humanité. Ce pere malheureux ne recouvre l'usage de ses sens que pour demander le nom de ses libérateurs ; on les lui cache d'abord : mais enfin la bonne vieille les lui désigne si bien qu'il reconnoît les deux fugitifs qu'il poursuivoit : il feint de retomber dans son assoupissement, pour être témoin des regrets & des marques de tendresse que lui prodiguent à l'envi & son fils & Adele. Il n'y peut plus résister ; il se jette dans leurs bras, leur pardonne, & les unit, aux yeux même d'Hortense, qui étoit devenue la meilleure amie d'Adele.
Telle est l'esquisse du plan de cet ouvrage, qui offre de l'intérêt & une foule de détails neufs & piquans. On ne peut lui reprocher que des longueurs, & sans doute il y en a beaucoup, sur-tout dans les scenes du second & dans le troisieme actes, où la situation du pere de Dorsan, dans le lit, est trop prolongée. Peut-être aussi l’action se prononce-t-elle d'une maniere trop forte, au .premier acte, pour ne pas faire désirer, dans la suite, des situations plus fortes encore. Les scenes de sentiment pénetrent l’ame ; mais il leur faut une juste mesure pour qu'elles ne manquent pas leur effet, Telles sont les remarques que le public a faites sur un ouvrage qui mérite d'être parfait par son intérêt, ses détails & le charme des situations dramatiques dont il est rempli. Dire qu'il est du citoyen Marsollier, c'est justifier assez l'éloge que nous en faisons. La musique, du citoyen d’Aleyrac, est remplie d'expression, de finales & de morceaux d'ensemble faits en maître qui connoît la scene & l’accent des passions : on y trouve l'harmonie, la mélodie, tout ce qui sait le mérite des ouvrages de ce compositeur estimable. La piece est mise avec un soin qui fait honneur au zele des artistes de ce théatre.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 1e année, 1795, tome I, p. 423-425 :
[Après le traditionnel résumé de l’intrigue, le critique commence son propos personnel par une restriction : face à un « fonds romanesque » qui « n’est pas sans invraisemblance », son rôle n’est pas de « rendre un compte sévère de ces ouvrages », mais de montrer ce qu’il peut y avoir de positif dans une pièce : « l'intention dramatique, la situation neuve, ou l'idée touchante que l'on peut trouver dans la foule de scènes oiseuses qui prolongent d'ordinaire nos opéras comiques ». Il met en avant une des scènes de la pièce, qui lui paraît « intéressante » et « théâtrale », mais il ajoute que « cette situation est presque toujours la même dans toute la pièce, où il relève aussi des « longueurs » dans les « accessoires ». Quant à la dernière scène, elle « est si près du ridicule, qu'elle nuit au charme attaché au fonds de l'ouvrage ». La musique réunit « de la grace, du chant et de la mélodie ». Les « artistes » auraient simplement souhaité « de plus grands effets dans plusieurs scènes ».]
Première représentation d' ADÈLE et DORSAN.
Adèle et Dorsan, opéra comique en trois actes, joué le 8 floréal, a obtenu un succès qui a paru avoir, par intervalle, un caractère d'indécision. En voici le sujet :
Une jeune personne, née de parens pauvres et honnêtes, aime un jeune homme, fils d'un riche cultivateur, et elle en est aimée. Elle a eu l'imprudence de quitter sa famille pour lui. Mais il l'a délaissée en l'aimant toujours. Revenu chez son père qui a vu avec un mécontentement secret l'amour de son fils, et qui a causé par une adresse cruelle l'abandon d'Adèle, il est au moment d'épouser une jeune femme riche et belle. Mais Adèle au désespoir, et toute à son amour, vient réclamer la foi de son amant, au moment même de la cérémonie du mariage : le père est inflexible ; son fils, qu'il a abusé, est vivement ému. Adèle est repoussée, et par les ordres du père elle doit partir sans délai. Cependant sa rivale, généreuse et compatissante, et qui a voulu qu'on différât le mariage, vient en secret la consoler, et lui promettre le succès des vœux de son amour. Dorsan, qui de sa fenêtre a entendu son Adèle, en descend mystérieusement pour se rejoindre à elle ; et au moment où son père, dans son inquiétude, vient le chercher, il emporte son amie dans ses bras et fuit loin de la maison paternelle. Le père se met à leur poursuite. Tombé de cheval et blessé sur la route, il est recueilli dans la chaumière d'une bonne femme, par les soins d'Adèle et de Dorsan qui lui ont prodigué leurs tendres secours, sans en être reconnus. Mais ils finissent par l'être, et ils obtiennent de sa sensibilité, pour les secours qu'il en a reçus et pour les sentimens qu'ils lui expriment pendant un sommeil simulé, le bonheur de s'unir enfin l'un à l'autre.
Ce fonds romanesque n'est pas sans invraisemblance ; mais notre objet n'est point de rendre un compte sévère de ces ouvrages. Nous voulons pourtant qu'un article tel que celui-ci ait du moins quelque utilité ; notre but est de démêler et de signaler l'intention dramatique, la situation neuve, ou l'idée touchante que l'on peut trouver dans la foule de scènes oiseuses qui prolongent d'ordinaire nos opéras comiques. Par exemple, nous citerons comme très-intéressante la scène des deux rivales , et en général comme théâtrale la situation d'Adèle abandonnée, en contraste avec la jeune épouse destinée à Dorsan. Mais cette situation est presque toujours la même dans toute la pièce. Elle perd de son effet aussi par les longueurs des accessoires, et au dernier acte, la scène du lit où le blessé repose, est si près du ridicule, qu'elle nuit au charme attaché au fonds de l'ouvrage. Les artistes et le public ont applaudi à la musique ; ils y ont reconnu de la grace, du chant et de la mélodie. Mais les premiers auroient desiré de plus grands effets dans plusieurs scènes qui les motivent, entr'autres dans celle où Adèle, sous les yeux des deux surveillans qu'elle a touchés, chante avec mélancolie sous les fenêtres de son amant. Les auteurs sont encore les citoyens Marsollier et d'Aleyrac.
César : succès jusqu'à la fin du siècle : 15 représentations en 1795, 15 en 1796, 3 en 1797, 9 en 1798, 5 en 1799.
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