Annette et Lubin, ballet-pantomime en un acte, de la composition de Dauberval, remis au théâtre par Aumer, sur le Théâtre de la Porte Saint-Martin, le 3 prairial an 12 [23 mai 1804].
Courrier des spectacles, n° 2644 du 4 prairial an 12 [24 mai 1804], p. 2 :
[L'essentiel du compte rendu tourne autour des interprètes. Madame Queriau est félicitée pour son « jeu plein de grâce, et sa danse remplie d'expression ». Mais son costume est critiqué : sa coiffure (son chapeau) ne convient pas : trop éloigné « du genre villageois », il cache son visage, et donc son jeu. Son équivalent masculin, Morand, doit danser avec moins de froideur, et « donner à sa phisionomie plus de mobilité », sous peine de paraître inférieure à Madame Queriau. La remise du ballet permet au Théâtre de la Porte Saint-Martin d'échapper au mélodrame, son répertoire ordinaire. Une dernière observation porte sur le costume d'un troisième personnage, jugé vêtu de façon trop simple : il est le « Seigneur du village » !]
Théâtre de la Porte St.-Martin.
Depuis que ce théâtre s’est attaché Mad. Queriau, la réputation de cette danseuse y attire du inonde. Au ballet de la Fille mal gardée, où elle déploie une parfaite intelligence, a succédé celui d’Annette et Lubin, dont la reprise eut lieu hier. Le dernier offre sans doute moins d’intrigue, moins de situations que l’autre, mais il fournit encore aux artistes qui y paroissent l’occasion d’y deployer leurs moyens, et d’y mériter de nombreux applaudissemens.
Mad Queriau, dans le rôle d’Annette, répond, par son jeu plein de grâce, et sa danse remplie d’expression, à l’idée très-avantageuse que sou début dans la Fille mal gardée a fait concevoir de ses talens. Nous désirerions que son costume, et sur-tout sa coëffure s’écartassent moins du genre villageois. Le chapeau à l’anglaise dont elle a fait choix couvre trop sa figure, dont il cache le jeu, et elle doit savoir que c’est sur tout par là qu’elle a su réunir déjà tous les suffrages. Le rôle de Lubin étoit confié a M. Morand. Ce jeune danseur se distingue par sa souplesse et par sa légèreté ; mais nous ne pouvons que l’engager encore à soigner son jeu, qui est froid, et à donner à sa phisionomie plus de mobilité. Cette dernière qualité est sur tout indispensable pour soutenir le parallèle avec Mad. Quenau, dont les traits animés expriment parfaitement tons les sentimens que lui font éprouver les situations où l’auteur l’a placée. Ce ballet, de Dauberval, remis par M. Aumer, est monté avec soin, et varie le répertoire de ce théâtre, qui sembloit il y a quelque tems en être réduit au point de ne pouvoir plus offrir alternativement que les mélodrames usés de l'Hermite de Saverne et de Clodomire.
Puisque nous avons fait une remarque sur le costume d’Annette,qu’il nous soit permis d’adresser une observation à M. Philippe sur le sien : il joue le rôle du Seigneur, et lorsqu’au commencement du ballet, il revient de la chasse, sa petite veste de nankin, simple et sans ornement, a semblé contraster avec sa dignité de Seigneur du village.
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