Arlequin incombustible, ou l'Onguent pour la Brûlure, vaudeville, de Bourgueuil et Dieulafoy, 26 thermidor an 7 [13 août 1799].
Théâtre du Vaudeville.
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Titre :
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Arlequin incombustible, ou l'Onguent pour la Brûlure
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Genre
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vaudeville
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Nombre d'actes :
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Vers / prose
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en prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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26 thermidor an 7 (13 août 1799)
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Théâtre :
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Théâtre du Vaudeville
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Auteur(s) des paroles :
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Bourgueuil et Dieulafoy
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Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 5e année, 1799 , tome III , p. 126 :
[La pièce exploite le filon de l’actualité récente, un essai, apparemment peu réussi de maison incombustible, pour se moquer de la multitude des ouvrages récents qui sont « à la glace », selon la formule du temps (« qui glacent le lecteur ou le spectateur, qui le laissent sans émotion », selon Littré), romans d’Ann Radcliff, drames nouveaux, journaux. Ce n’est pas l'intrigue qui a sauvé la pièce (encore une fois Arlequin épouse Colombine à la place de Gilles), mais des « couplets piquans et soignés », œuvres de deux auteurs réputés.]
THÉATRE DU VAUDEVILLE.
Arlequin incombustible, ou l'Onguent pour la brûlure.
L'expérience de la maison incombustible, faite et manquée à l'Elysée, le 10 thermidor, a donné lieu à celte plaisanterie impromptue , jouée au Vaudeville le 26 de ce mois. Voici le couplet d'annonce
Air d'Arlequin Afficheur.
Le titre qu'ici l'on a pris,
Annonce un feu de tragédie :
Pourtant, rassurez vos esprits.
Ce n'est qu'un feu de comédie.
Quand même l'ouvrage tombé
Prouveroit notre maladresse,
Vous ne verriez rien de flambé
Que l'auteur de la pièce.
Cassandre, pour rétablir son honneur, qui a reçu quelqu'atteinte de l'expérience manquée de sa maison incombustible, a fait faire une armoire dans laquelle un homme sera renfermé lorsqu'on y mettra le feu. Une robe d'amyanthe et de plâtre sympathique l'empêchera de ressentir les effets de la flamme. Gilles doit entrer dans l'armoire, et épouser M.lle Cassandre, si l'expérience réussit ; mais Gilles est poltron, il tremble à la vue de l'armoire, et Arlequin, qui aime Colombine, lui propose de prendre sa pince ; Gilles accepte. Arlequin, affublé de la robe merveilleuse, est introduit dans l'armoire, Gilles est le seul qui sache cet échange. On met le feu à l'armoire, elle est consumée en un instant, et Arlequin en sort sain et sauf, au grand'étonnement des spectateurs, qui admirent la vertu du plâtre et de l'amyanthe ; mais Arlequin leur dit de ne pas vanter si vivement la composition de la robe, mais plutôt celle de la doublure. En effet, il ôte sa robe, qui n'est qu'un peu roussie, et on le voit vêtu d'une seconde robe de papier, composée de radcliffades, de drames nouveaux, et surtout de journaux. On lui demande l'explication de cette énigme, et il répond qu'il est impossible de brûler lorsqu'on est si bien entouré de glace. C'est cette mauvaise plaisanterie qui fait le dénouement de la pièce. Gilles et Cassandre sont bafoués, et Arlequin épouse Colombine.
Voici la fin du dernier couplet, chanté par Colombine.
Lorsque l'auteur en passant
A recu quelqu'égratignure,
Votre indulgence au dénouement.
Voilà l'onguent pour la brûlure.
Des couplets piquans et soignés ont assuré le succès de ce vaudeville des CC. Bourgueuil et Dieu-la-Foi, tous deux auteurs d'autres pièces jouées avec succès.
Les rôles ont été très-bien joués par les CC. Laporte, Vertpré et Carpentier, et par la C.e Sara.
L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-huitième année, tome XII, fructidor an 7 [août 1799], p. 219-220 :
[Une arlequinade (Cassandre, Colombine, Gilles et Arlequin sont au rendez-vous, et Arlequin épouse une fois de plus Colombine, ou l’inverse). La pièce a connu le succès, malgré un plan faible, un sujet sans intérêt. Ce qui la sauve, c’est la qualité des couplets, « bien tournés » et riches en « épigrammes remplies de sel ». Tout ce comique n’est pas du meilleur goût, ni très neuf. Mais il faudrait peu de choses pour faire disparaître ces taches et assurer le succès durable de la pièce. Les auteurs ont été demandés et ont paru.]
THÉATRE DU VAUDEVILLE.
Cassandre, père de Colombine, & charlatan de son métier, croit avoir inventé le moyen de rendre incombustibles tous les corps qu'il veut préserver du feu ; il annonce qu'il va en faire l'expérience sur un homme enfermé dans une armoire livrée aux flammes, & déjà il a trouvé le personnage qui doit se prêter à ses vues. Gilles, aussi cupide que sot, a promis de subir l'épreuve en public, à condition d'épouser ensuite mademoiselle Colombine, & de toucher une dot de 1500 francs ; mais au moment de remplir ses engagemens, le poltron regrette de les avoir souscrits, & fait part de ses craintes à son rival Arlequin, qui consent à perdre sa place. Peu d'instans après, le public paroît dans le lieu des séances ; Arlequin, affublé d'une robe enduite de plâtre, est introduit dans la fatale armoire, sans que personne le reconnoisse ; le feu s'allume ; l'expérience réussit, Arlequin sort de sa prison sans mal ni douleur, &, en dépit des réclamations de Gilles, obtient la main de Colombine, dont il étoit, depuis long-temps, l'amant préféré.
Tel est le fond de la petite pièce en un acte, jouée avec succès sur ce théâtre, sous le titre d'Arlequin incombustible ; il est aisé de voir, par cette analyse, que le plan en est foible, & le sujet sans intérêt ; mais ces deux défauts, excusables dans un vaudeville, sont compensés dans celui ci par un grand nombre de couplets bien tournés, & d'épigrammes remplies de sel ; en général, l'esprit y est répandu avec la plus grande profusion. On y a bien remarqué un assez bon nombre de pointes & de calembourgs, qui ne sont pas du meilleur goût, & qui étoient connus depuis long-temps ; mais ces taches peuvent être facilement enlevées à la 2e. représentation, & la pièce sera pour lors comptée au nombre des plus agréables productions de ce théâtre.
Les auteurs ont été demandés, nommés & applaudis. Ce sont les CC. Bourgueil & Dieulafoi, déjà connus par des succès.
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