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Arlequin sorcière

Arlequin sorcière, vaudeville en un acte, d’auteur inconnu, 1er juin 1809.

Théâtre du Vaudeville.

Les informations sur la pièce proviennent du Dictionnaire universel du Théâtre en France et du théâtre français de J. Goizet, tome I (Paris, 1867), p. 205. Il y est précisé que la pièce n’a pas été imprimée.

Titre :

Arlequin sorcière

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

1er juin 1809

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville.

Auteur(s) des paroles :

 

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome VIII, août 1809, p. 283-288 :

[Une belle chute, suffisamment puissante pour que le critique s’en émeuve. Il n’avait jamais vu le parterre dans cet état. La conséquence, c’est qu’il n’a entendu que la moitié de la pièce, entre sifflets et applaudissements. Au milieu de ce « sabat », il a cru comprendre une histoire très compliquée où Arlequin et Colombine, qui se sont enfuis loin de leur famille, utilisent la fausse sorcellerie pour tromper tout le monde, la pièce consistant à faire défiler les personnages qu’ils bernent. Malgré la violente réaction du public (au début, l’article paraît suggérer qu’elle n’était pas si spontanée...), le critique trouve que la pièce en vaut bien d’autres. Elle a bien sûr des défauts (scènes trop longues, dialogue « pas bien brillant », plaisanteries « pas toujours bien neuves », mais elle a du mouvement (les événements y sont en effet nombreux !), il y a des scènes amusantes, et l’Arlequin joué par Laporte méritait de l’indulgence.]

Théâtre du Vaudeville.

Arlequin sorcière.

Je ne sais quelle sorcière avait soufflé sur le parterre, je ne l'ai jamais vu de si mauvaise humeur ; il avait oublié son indulgence ordinaire, ce n'était plus le parterre du Vaudeville, à moins que,

Lentement dans son cœur amassant la vengeance,

il n'eût projetté depuis long-temps un coup d'éclat, et qu'il n'ait voulu acquitter la dette de sifflets qu'il a contractée pendant toute l'année, il sera difficile de s'expliquer cet emportement si contraire à son caractère. A la vérité, les roses manquent absolument dans Arlequin sorcière ; mais en revanche il s'y donne force coups de poing ; apparemment l'exemple était contagieux, il ne s'en est fallu de guères qu'on ne fît dans la salle comme sur le théâtre. Le sabat était partout, et quand le diable, au lieu de se déguiser en chat comme c'est son usage dans ces occasions, se serait déguisé en sifflet, il n'aurait pas pris une voix plus aigre que ceux que nous avons entendus. Ce pauvre Arlequin, quand il s'est fait sorcière, ne comptait nullement avoir affaire à lui. L'occasion a fait sa vocation; on sait que l'occasion fait le larron, et c'est si souvent faute de pouvoir prendre ce métier-là en sûreté de conscience, qu'on en embrasse un autre. De tous les métiers, Arlequin a choisi le moins lucratif, il est peintre et je ne sais pourquoi ; car il n'est question de rien dans la pièce qui ait particulièrement rapport à cet état. Ce dont il est question, c'est qu'il a enlevé Colombine, que son oncle l'alcade, car la scène est en Espagne, voulait donner à un Gille de son pays ; il s'en trouve par-tout, ainsi que des Cassandre, et par-tout où l'on en rencontre, il se rencontrera des Arlequin et des Colombine pour les attraper. Ceux-ci se sont réfugiés à un sixième étage, dans une chambre habitée longtemps par une sorcière, mise en fuite, depuis deux jours, par les inquiétudes que commençait de lui donner l'inquisition. On vient encore de tous côtés pour la consulter ; Arlequin, qui n'a pas le sou, imagine de tirer parti de la vogue et de la robe de sorcière, ainsi que de son bonnet pointu, de son grimoire et de sa baguette qu'elle a laissés dans une armoire. Il achève à peine sa toilette, qu'on vient demander dona Malagrida, c'est le nom de sa devancière. Il ouvre, c'est l'alcade M. Cassandre qui vient, chargé bien malgré lui par l'inquisition d'arrêter la sorcière dont il a une peur terrible, et qu'il voudrait bien d'ailleurs consulter sur la disparition de sa nièce. Etonné des savantes réponses d'Arlequin à ce sujet, il lui promet, s'il lui fait retrouver sa nièce, de le sauver des poursuites de l'inquisition. Après lui arrive Gille, aussi en quête de Colombine ; c'est elle, cette fois-ci, qui, cachée sous un voile, fait le rôle de sorcière, et qui, au moyen de quelques coups de baguette bien appliqués sur les doigts de Gille, et de quelques signes de tête très-expressifs qui, l'instruisant très-clairement des sentimens et des projets de Colombine son égard, le renvoyait battu et peu content, lorsqu'il apperçoit sur une chaise un schall qu'il a donné à Colombine, ce qui lui persuade que la sorcière s'entend avec elle ; il s'en empare sans qu'on le voie, et, muni de cette pièce de conviction, court chercher M Cassandre, pendant que les dupes continuent d'affluer chez la sorcière. Les premières qui arrivent sont quatre jeunes filles qu'Arlequin ne trompera pas pour la première fois. Il leur a fait à toutes quatre des promesses de mariage. Elles veulent savoir laquelle il épousera. Les réponses que leur fait la sorcière, et l'intérêt que prend Colombine à cette scène qui lui déplaît beaucoup, leur persuade qu'elle est venue consulter pour le même objet, et qu'elle est l'heureuse rivale ; elles la menacent et battent la sorcière qu'elles laissent très-embarrassée à calmer Colombine, à renvoyer deux créanciers d'Arlequin, qui sont venus consulter pour savoir quand on les paierait, et sur-tout fort embarrassée des sifflets qui depuis un instant commençaient à se faire entendre sur un ton non équivoque. Son embarras est augmenté par l'arrivée de l'alcade, qui vient réclamer la promesse faite par dona Malagrida de lui donner des renseignemens sur Colombine. Arlequin montrant les deux créanciers, les désigne à M. Cassandre comme les ravisseurs de sa nièce. Gille arrive avec le schall qui accuse la sorcière ; l'alcade fait arrêter Gille, la sorcière et les créanciers ne trouvent pas cela bon. On sort de la chambre en se battant, et dans le tumulte l'alcade y est laissé seul sans lumière, sans savoir par où sortir, et mourant de peur, d'autant plus qu'il voit de temps en temps dans l'ombre se remuer un rideau blanc derrière lequel est cachée sa nièce Colombine, et qu'il ne manque pas de prendre pour un fantôme. Sa terreur est augmentée lorsqu'il entend la voix de la sorcière, qui a trouvé moyen de s'échapper des mains des familiers, et qui est rentrée doucement dans la chambre. La frayeur le fait consentir au mariage de Colombine avec son amant, et il est bien loin de rétracter sa promesse, lorsqu'on rapporte de la lumière et qu'au lieu de la sorcière on ne trouve plus qu'Arlequin, qu'il prend alors pour un véritable démon, à qui il se garde de rien refuser. Voilà du moins ce qu'il a été possible de comprendre au milieu des sifflets qui, pendant la dernière moitié de la pièce, ont couvert la voix des acteurs, et que tâchaient de couvrir les applaudissemens de ceux qui voulaient sinon soutenir, du moins entendre l'ouvrage. Il faut convenir que leur fantaisie était assez raisonnable, et que la complaisance avec laquelle la partie indifférente du public laisse passer d'ordinaire les orages d'applaudissemens qui ont maintenant l'habitude de fondre sur un vaudeville nouveau, méritait bien qu'on leur fît grace de cet orage de sifflets qui semblait s'être préparé à accabler celui-ci. Je ne prétends pas que les sifflets aient eu tout-à-fait tort; la scène des quatre jeunes filles, qui a élevé la tempête, et sur-tout celle des deux créanciers, sont trop longues et n'ont rien d'assez piquant ; le dialogue n'est pas bien brillant et les plaisanteries ne sont pas toujours bien neuves ; mais la pièce est assez bien conduite ; elle a, en générai. du mouvement; Arlequin se trouve presque toujours dans des embarras qui soutiennent une sorte d'intérêt, mais d'où l'on aurait pu, à la vérité, tirer plus de comique. Cependant il y a des scènes amusantes ; les lazzis d'Arlequin, la franche gaieté de Laporte, m'auraient semblé devoir obtenir un peu plus d'indulgence pour le reste. En vérité, le public a laissé passer mieux que cela.

L'auteur n'a point été demandé.                 P.

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