Armand et Mathilde ou la Carrière

Armand et Mathilde ou la Carrière, mélodrame en trois actes, d'André-Joseph Grétry neveu, musique de Grétry, 7 octobre 1806.

Théâtre de la Gaîté.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Ducrocq, 1806 :

Armand et Mathilde, ou la Carrière, mélodrame e, trois actes, en prose ; Par A. Grétry, neveu. Représenté, pour l première fois, à Paris, sur le Théâtre de la Gaité, le 7 octobre 1806.

Courrier des spectacles, n° 3530 du 9 octobre 1805, p. 2-3 :

[Compte rendu sévère et même un peu moqueur d'un mélodrame que le critique trouve bien mauvais. Un premier long paragraphe est consacré à dénoncer la stupéfiante rapidité de la pièce, dans laquelle tout se passe en un rien de temps, si bien qu'on n'a qu'une esquisse de pièce ou à un canevas, le critique laisse le choix à ses lecteurs. La soirée n'est pas plus courte pour autant, les entractes étant fort longs, ce qui a d'ailleurs permis que les spectateurs marquent leur « improbation » qu'ils ont répété à la fin. Un seul point positif, les décors, tous beaux. Quant aux acteurs, ils ont bien joué, si bien que la cause de l'échec de la pièce est bien de la responsabilité de l'auteur. Après ce long préambule, le critique passe au traditionnel résumé de l'intrigue. Il le fait sans faire de commentaires, mais sans non plus déguiser qu'il n'y a guère d'originalité dans cette accumulation de poncifs où rien ne manque, ni le messager mystérieux, ni l'enlèvement, ni la prison, ni l'évasion, le tout sans souci de vraisemblance dans leur enchaînement. Bien entendu, tout finit par le triomphe de l'amour. Reste un dernier, point la musique. Elle est attribuée au « célèbre Grétry », oncle de l'auteur du texte, et que le critique soupçonne d'avoir voulu faire plaisir à son neveu en l'autorisant à reprendre « divers passages de ses productions ». Mais cela ne fait une œuvre nouvelle, malgré la qualité de l'ouverture et de certains airs. De même certains ballets on tété vivement applaudis. Mais le nom du chorégraphe n'est pas donné.

Le précepte d'Horace : hâte-toi toujours vers le fait...]

Théâtre de la Gaîté.

La Carriere, ou Armand et Mathilde.

On ne fera pas à l’auteur de ce mélodrame le reproche d’être trop prolixe ; il a suivi à la lettre le précepte d’Horace : Semper ad eventum festina. Aussi ses personnages sont-ils toujours en mouvement, et ils vont si vite en besogne que l’on a à peine le tems de les suivre. Préparer une fête, l’exécuter, conclure un mariage, envoyer un espion chez l’ennemi, faire avancer une armée, enlever le futur époux, tout cela se fait dans un quart-d’heure. Sa captivité, sa délivrance, c’est l’affaire d’un quart-d’heure ; son retour et la défaite de ses ennemis, c’est encore l’ouvrage d’un quart-d’heure, ce qui annonce assez clairement que cet ouvrage n’est que l’esquisse ou le cannevas d’un mélodrame, dans lequel on reconnoît des intentions de scène, mais trop écourtées, des sentimens du genre, mais mal préparés et froidement exprimés. Cependant la représentation de cette pièce dure autant qu’une autre ; les entr’actes ont, par leur longueur réparé la brièveté des actes ; ainsi tout a été compensé. Cette circonstance n’a pourtant point contenté le public, qui a essayé dans les intervalles ses moyens d’improbation, et qui les a fait à à la fin éclater d’une manière trop bruyante. Une seule chose le désarmoit à chaque acte, c’étoit la beauté du décor. Celui du premier acte est très-riche ; celui du second, très-pittoresque ; le troisième n’est point non plus à dédaigner. Les acteurs aussi ont bien rendu leurs rôles pour la plupart, d’où il résulte que si cet ouvrage n’a point réussi, c’est plûtôt la faute de l’auteur, que du directeur et des acteurs.

Armand d’Herbourg est un jeune chevalier qui allie aux travaux de Mars l’étude de la philosophie ; son courage et sa haute naissance lui ont mérité l’amitié d’un comte puissant, qui se dispose à lui donner sa fille Mathilde en mariage. Le jeune Jules, frère d’Armand, et le vieux Hubert, concierge du château, ont tout préparé pour le moment de la noce ; mais au milieu des réjouissances, arrive un de ces hommes à la figure sinistre, qui épie le moment où Armand est au jardin avec son beau-père futur et son amante, pour lui remettre un billet dont il attend la réponse. A la lecture de ce message, Armand déconcerté répond par un non formel, et l’écuyer se retire en le menaçant. Cependant l’instant de la cérémonie est arrivé, les deux amans s’approchent d’un autel dressé en plein air ; tout-à-coup des hommes armés se précipitent sur Armand, et munis d’un ordre d’arrêter ce chevalier comme traître au duc de Bavière, ils l’entraînent dans des souterrains voisins des Carrières. Là il reçoit la visite d’une Comtesse, qui a eu autrefois des prétentions sur lui, et qui, irritée de se voir sacrifiée à une autre, a conduit tout le projet de l’enlèvement. Elle ne retire d’autre fruit de sa visite qu’un torrent d’imprécations, après lesquels Armand, plus calme, attend que le Ciel lui envoye un libérateur.

Sous sa prison se trouve une carrière où des paysans travaillent ; le hazard leur a déjà fait découvrir un an auparavant le cachot où il gémit ; ils y pénétrent, trouvent près de lui le petit Jules qui s’y est introduit par un soupirail, et parviennent à briser ses fers, malgré les gardes qui arrivent, mais trop tard. Armand les suit dans la carrière ; et lorsqu'il va pour rentrer dans son château, la Comtesse et ses gens qui sont en embuscade, l’attaquent de nouveau ; mais ses fidèles paysans ne sont pas loin ; ils enveloppent les gardes et les font prisonniers. Armand , par cette victoire, se retrouve en possession de ses domaines et de Mathilde.

On avoit annoncé que la musique de ce mélodrame étoit de Grétry ; ce célèbre compositeur veut bien reconnoître que l'on a emprunté divers passages de ses productions, et c’est un véritable cadeau qu’il a fait à son neveu ; mais cette composition n’est pas nouvelle. Du reste, l'ouverture a fait beaucoup de plaisir, ainsi que quelques airs dans le cours de l'ouvrage. Le ballet du premier acte, et sur tout l'allemande ont merité de vifs applaudissemens ; c’est une des compositions chorégraphiques qui ont plu davantage à ce théâtre.

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