Aymar et Azalaïs, ou le Château de Serdar

Aymar et Azalaïs, ou le Château de Serdar, drame en trois actes, à spectacle, de Mellinet, 30 Prairial an 7 [18 juin 1799].

Théâtre Cité Variétés, et de la Pantomime Nationale

Almanach des Muses 1800.

Titre sujet à des variations : le titre est parfois réduit à Azalaïs ou le Château de Serdar, château qui peut devenir le Château de Sendar...

Pour Emmet Kennedy, Theatre, Opera, and Audiences in Revolutionary Paris: Analysis and Repertory, p. 260, comme pour la base César, la pièce a connu cinq représentations en 1799. La base César indique que l'auteur est inconnu et donne comme dates de représentation les 18, 20, 24 et 26 juin et le 2 juillet 1797.

Le Courrier des spectacles donne un court compte rendu de la représentation du 18 juin dans son numéro 848 du 1er messidor an 7 [19 juin 1799], p. 3 :

Théâtre, de la Cité.

Le Drame en trois actes et à spectacle donné hier pour la première fois à ce Théâtre sous le titre d'Aymar et Azalaïs,ou le Château de Serdar, a obtenu un succès assez flatteur. L’auteur a été vivement demandé : c’est le cit. Mellinet de Nantes. Lorsqu'il s’est rendu à l'invitation du public, sa modestie lui a à peine permis de recueillir les applaudissements qu’on lui a prodigués.

Le lendemain 2 messidor [20 juin], le Courrier des spectacles n° 849, p. 3, publie une lettre de deux auteurs qui essaient de se prémunir contre une possible accusation de plagiat. Ils ont écrit une pièce intitulée Clémence et Formose, inspirée de la même source qu'Aymar et Azalaïs, qui va être jouée au Théâtre de la Gaîté.

AU RÉDACTEUR
du Courrier des Spectacles.

Citoyen,

Nous vous prions de vouloir bien insérer dans votre Journal l’avis suivant :

Par 1'affiche d'aujourd’hui, 30 prairial, nous voyons annoncé au théâtre de la Cité, un ouvrage ayant pour titre Aymar et Azalaïs. Il y a six mois que nous présentâmes au citoyen Saint-Elme, directeur de ce spectacle une pantomime dialoguée, en un acte, intitulée : Aimar, ou le Chateau de la Durance, tirée d’un roman nommé le Gentil Aimar.

Le cit. St-Elme n’accepta point notre ouvrage, par des raisons qui nous parurent plausibles. Ne voulant point qu’on nous accuse de plagiat, veuillez bien faire connoitre à vos lecteurs que nous avons remis ce même ouvrage sous le titre de Clémence et Formoze, mélodrame en trois actes, accepté par le cit. Rosny. directeur du théâtre de la Gaité.

Salut et estime.

Chateauvieux. Armand.          

Mercure de France, tome 6, numéro du décadi 10 messidor an 7, p. 65-66 :

[Le compte rendu de la pièce s'ouvre par un résumé de l'intrigue, tout à fait digne d'un drame : on y trahit allègrement, mais le héros est sauvé par une femme à qui on a coupé la langue, le traître est poignardé, et le héros sauve une jeune femme prisonnière du château. Le père de la jeune femme arrive opportunément pour un dénouement que le critique trouve nul : le beau jeune homme épouse celle qu'il a sauvée. Hormis la condamnation sans appel du dénouement, prononcée sans justification, sinon qu'il « dépare ce drame », le critique trouve la pièce « remplie d'intérêt », les événements s'enchaînent bien, et le personnage de la femme privée de sa langue permet « une scène neuve ». Après ce compte rendu, une anecdote d'entracte montre combien les spectateurs sont susceptibles de se tromper sur le spectacle auquel ils assistent...]

THÉATRE DE LA CITÉ.
30 Prairial.

Le Château de Serdar, ou Aymar et Azalais, drame en trois actes et en prose.

Aymar, jeune et vaillant chevalier, aime la belle Azalaïs, fille du sire Oudros. Egaré, le soir, dans une forêt, il rencontre un pélerin qui lui propose l'hospitalité pour la nuit. Ce scélérat, qui n'est autre qu'un écuyer déguisé, conduit Aymar au château du sire de Serdar, son plus cruel ennemi. On le reçoit avec une fausse bonté. La chambre rouge, destinée au meurtre, est celle où il doit se reposer. Il a des soupçons ; une femme qui paraît s'intéresser à lui, et à laquelle les cruels hôtes de ce château ont coupé la langue pour assurer leurs secrets, l'instruit, par des signes, du sort qui le menace. Il frémit. Elle l'arme d'un poignard, dont il perce le cœur du perfide écuyer qui venait pour l'assassiner. Les cris d'une infortunée frappent, à l'instant, son oreille ; il vole à sa défense, rencontre le sire de Serdar qu'il combat et punit, sauve Azalaïs, au moment où le sire Oudros, à la tête de ses troupes, accourait la venger. Le père et la fille lui témoignent leur reconnaissance; et il obtient, pour récompense, la main de celle qu'il adore.

Cette pièce est remplie d'intérêt. Les événemens sont assez bien amenés et se succèdent rapidement. Le second acte, sur-tout, est d'un bel effet, et offre même une scène neuve, (celle de la muette.)

Le dénouement ne vaut rien et dépare ce drame, qui émeut quelquefois l'ame et mérite d'être vu.

***

Qu'un auteur dramatique est à plaindre quand il pense que, souvent, l'ignorant le plus dehonté, ose prononcer sur un ouvrage, fruit des veilles les plus pénibles et des soins les plus constans. A la troisième représentation du Château de Serdar, nous nous trouvions à côté d'un individu très-bien vêtu, et dont l'extérieur annonçait une éducation soignée. Pendant l'entr'acte du second au troisième acte de ce drame, un particulier l'acoste et lui demande quelle pièce on représentait ? Nous ne fûmes pas peu surpris d'entendre notre homme qui avait assisté aux deux premiers actes, et y avait beaucoup ri, répondre qu'on allait représenter le dernier acte de Dom-Quichotte (pantomime qui devait terminer le spectacle.) L'autre le crut et se retira. Nous nous contentâmes de hausser les épaules, et nous donnâmes carrière à nos réflexions, en pensant à la réponse ingénieuse de notre savant voisin.

La pièce a été reprise le 7 nivôse an 9 [28 décembre 1799] lors de la réouverture du Théâtre Molière, dont le Courrier des spectacles rend compte le 10 nivôse an 9 [31 décembre 1800] dans son numéro 1402 :

[Dans ce compte rendu, qui concerne la réouverture du théâtre Molière, peu actif auparavant, un prologue promet de la nouveauté; mais la première représentation ne contient que des reprises : celle d'Un trait d'Helvétius et cet Aymar et Azalaïs joué déjà en juin 1799 sur le Théâtre de la Cité. La pièce a été bien reçue, et elle le doit largement à la qualité de l'interprétation, à l'ensemble remarquable. On apprend aussi le nom de l'auteur, Mellinet, présenté comme très prometteur.]

Théâtre Molière:

Une nouvelle administration vient d’ouvrir ce théâtre, et a promis dans un prologue d’ouverture de donner plus de nouveautés que n’en a donné celle qui l’a précédée. En effet, on n’y voyoit naguères que cinq ou six pièces au plus figurer alternativement sur l’affiche ; actuellement il paroît que le zèle y suppléera aux talens : et déjà pour l'ouverture on a donné, avec Un trait d’Helvétius, petit vaudeville que l’on revoit avec plaisir, un ouvrage en trois actes, monté, appris et sçu en huit jours, c’est Aymar et Azalaïs, ou le Château de Serdar. Cette pièce, qui fut applaudie il y a deux ans, au théâtre de la Cité, reçut hier du public l’accueil le plus flatteur. Il est vrai que tous les rôles, sauf un accessoire, y étoient rendus avec beaucoup d’ensemble. Le citoyen Bonet dans le rôle d’Aymar, et le citoyen d’Auvigny dans celui du confident assassin, ont déployé beaucoup d’énergie Mesdemoiselles Kinter et Ribout ont aussi obtenu des applaudissemens, mais nulle n’enleva les suffrages comme madame Delorge (Julie Diancourt) qui rendit le rôle de Précille, Cameriève privée de la langue, avec une vérité et une expression au-dessus de tout éloge ; aussi fut-elle demandée, après la pièce, avec l’auteur, le citoyen Mellinet. Elle parut, amenée par le cit. Bosset. Quand à l’auteur, sa modestie le porta sans doute à se dérober aux applaudissemens du public, qui reconnut dans son ouvrage beaucoup d’imagination, des scènes fortement tracées, et sur-tout beaucoup d’intérêt.

Cette pièce annonce un homme qui connoît la scène, et il est à desirer qu’il exerce souvent son talent pour le théâtre.

F. J. B. P. G***.          

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