Azéline, opéra en prose et en 3 actes, mêlé d'ariettes. Par les C. Hoffman et Solié. 15 frimaire an 5 [5 décembre 1796].
Théâtre de la rue Favart, ci-devant Théâtre italien
-
Titre :
|
Azéline
|
Genre
|
opéra comique
|
Nombre d'actes :
|
3
|
Vers / prose
|
en prose, avec des couplets en vers
|
Musique :
|
ariettes
|
Date de création :
|
15 frimaire an 5 (5 décembre 1796)
|
Théâtre :
|
Théâtre de la rue Favart
|
Auteur de l’intrigue :
|
Hoffman
|
Compositeur(s) :
|
Solié
|
Almanach des Muses 1798.
Sujet tiré d'un conte d'Imbert.
Dénouement qui produit de l'effet.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Vente, etc., l'an V (1797) :
Azeline, comédie en trois actes et en prose, mêlée de musique ; Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l'Opéra-Comique de la rue Favart, le 15 Frimaire, an 5.e (5 décembre 1796, v. st.). Paroles d'Hoffman, musique de Solié.
L'Esprit des journaux français et étrangers, vingt-sixième année (1797), tome I (janvier et février), p. 258-262 :
[Le compte rendu s’ouvre par un long résumé d’une intrigue plutôt sombre, que le dénouement seul éclaire : à l’Opéra Comique, tout finit par des mariages... Mais le terme de comédie qu’emploie la brochure publiant la pièce ne doit pas faire attendre une pièce comique. L’intrigue est jugée « intéressante », et elle est « très-dramatiquement enchassée », elle s’achève par une « double surprise, assez inattendue pour frapper, & cependant assez ménagée pour n'être pas trop brusque », preuve du sens dramatique de l’auteur, à qui le critique ne reproche, outre les traditionnelles lenteurs, que des détails dans le caractère de personnages, Eymard trop cruel, et de c efait trop peu intéressant, Azéline trop « fausse dans les promesses qu’elle renouvelle ». Il lui semble aussi que la pièce, trop peu variée, ne passant pas « du grave au doux, du plaisant au sévère » comme c’est l’usage dans l’opéra comique : il croit reconnaître dans la prose d’Hoffman les traces d’une pièce versifiée qui aurait été mise en prose. La musique de Solié ne reçoit que des éloges, « à la fois agréable & savante ». Elle est parfaitement adaptée aux situations et aux caractères.]
THÉATRE DE L'OPÉRA COMIQUE.
La pièce d'Azéline en prose & en trois actes, mêlée d'ariettes, des citoyens Hoffmann & Solié, a obtenu sur ce thêatre un véritable succès.
Eymard, tyran farouche, & de plus amant souvent perfide, a délaissé Mathilde, après l'avoir séduite ; il espère sans doute en faire autant d'Azéline, jeune orpheline qu'il retient dans son château sous la garde la plus austère ; mais l'amour, comme d'usage, prend pitié de la beauté opprimée & lui envoie un vengeur qu'elle préfère à son tyran ; la nouvelle victime n'a pu être insensible aux soins délicats d'Azémon, jeune & beau vassal d'Eymard, & qui tous les matins franchit les fossés du château, pour venir déposer un bouquet sur un maronier qui se trouve devant les fenêtres d'Azéline. Elle veut répondre par le même moyen ; mais l'Argus qui la surveille, surprend cette correspondance muette, & sur le champ fait arrêter & conduire devant lui son rival ; il intimide celui ci sur le sort qu'il réserve à Azéline au point de le faire consentir à désavouer son amour devant sa maîtresse, seul moyen de l'arracher à la vengeance d'Eymard ; mais au moment où pour tromper Azéline, Azémon feint de nommer devant elle un autre objet de sa flamme, l'intéressante captive s'évanouit de douleur : à cet aspect l'amant, sûr d'être aimé, brave tout, vole à son secours, désavoue sa ruse, renonce à toute feinte, & force le tyran à prendre les moyens de la violence pour le séparer d'Azéline.
Bientôt un des courtisans d'Eymard lui fait sentir que cette conduite lui attire la haine de celle qu'il veut épouser : il lui conseille de promettre & d'accorder la grace & la liberté d'Azémon au prix de l'obéissance d'Azéline : elle paroît y consentir ; mais avec le projet de se soustraire bientôt, à tout prix, à la nécessité cruelle de tenir sa promesse ; elle confie en attendant à son amant sa colombe chérie, qu'il ne lâchera que lorsqu'il aura tout disposé pour rendre l'évasion plus sûre, & qui par son retour, donnera le signal du départ en apportant à sa maîtresse un billet attaché à son col, pour l'instruire de ce qu'elle doit savoir. Par malheur Eymard trouve encore dans la bassesse d'un de ses courtisans, le moyen d'être instruit ; il guette le retour de la colombe si impatiemment attendue, la tue, surprend dans ce billet la preuve de la nouvelle trahison, & jure de s'en venger ; mais Azéline a déjà franchi les passages, ce qui force son persécuteur à se mettre à sa poursuite. Au troisième acte Azémon attend avec la plus vive inquiétude le résultat de son projet ; il ne l'a pas même encore osé confier à sa mère qui l'en presse : bientôt Azéline échevelée, poursuivie, invoque un asile & s'adresse à la mère de son amant qui la recueille & lui fait raconter ses funestes aventures Tous les paysans du hameau rassemblés par les soins d'Azémon jurent de la défendre Le tyran paroît avec ses satellites, demande quelle est l'audacieuse vassale qui veut soustraire ses victimes à son ressentiment & à son pouvoir : Moi, lui dit avec dignité la mère d'Azémon, qu'en ce moment Eymard reconnoît pour cette Mathilde qu'il a délaissée : sa confusion suspend un moment son désir de vengeance ; mais bientôt sa fureur se rallume ; il exige qu'on lui livre les audacieux qui lui résistent, & qui le traversent ; eh bien ! reprend Mathilde, puisque rien ne peut désarmer sa colère, va mon fils, va mourir de la main de ton père : Azémon est le fils d'Eymard : le tyran étonné, confondu, balance, s'attendrit & pardonne.
Cette action intéressante est tirée d'un fabliau & d'un conte d'Imbert ; mais l'auteur l'a très-dramatiquement enchassée, & le troisième acte produit l'effet qu'il doit produire : cette double surprise, assez inattendue pour frapper, & cependant assez ménagée pour n'être pas trop brusque, annonce l'homme accoutumé à manier habilement les ressorts dramatiques. Peut être eût-on desiré qu’Eymard fût plus intéressant & moins cruel ; ce qui auroit sauvé à l'auteur la petite invraisemblance de laisser sans motif, les deux amans libres de causer ensemble assez longtemps, & de se dévoiler longuement leur projet presque sous les yeux de leur farouche argus. Peut-être eût-on désiré qu'Azéline fût moins profondément fausse dans les promesses qu'elle-renouvelle au tyran après l'évasion d'Azemon. Mais malgré ces légères fautes, & quelques lenteurs dans l'exposition, la pièce est d'un effet sur.
On n'a qu'un reproche à faire à cet ouvrage, c'est de n'être pas tout à fait assez varié pour le coloris ; l'opéra comique est surtout le genre dans lequel il est non seulement permis, mais même presqu'indispensable de passer du grave au doux, du plaisant au sévère. L'ouvrage du cit. Hoffmann n'auroit-il pas été destiné pour un plus grand cadre ? On seroit d'autant plus tenté de le penser qu'on croit reconnoître quelques traces d'une pièce versifiée que l'on auroit ramenée à l'humble prose. Quel dommage si un homme d'un talent aussi reconnu que le cit. Hoffmann, s'amusoit à rapetisser ainsi toutes fes conceptions dramatiques, & à dénaturer leur cadre. Quoiqu'il en soit, Azéline a mérité son succès, & nous penfons qu'il doit se soutenir long-temps.
La musique fait honneur au cit. Solié : elle est à la fois agréable & savante ; mais elle a surtout, le mérite rare d'être coloriée d'une manière parfaitement analogue aux situations & aux caractères de l'ouvrage. On distingue particulièrement le final entier du second acte, qui commence par un duo plein de grâce, & finit par un chœur du plus grand effet.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 2e année, 1796, tome IV, p. 537-540 :
[L'essentiel du compte rendu est consacré au résumé d’une intrigue assez compliquée, mais dont le dénouement ne surprend personne : on trouve bien le mariage attendu. La suite est plus rapide : auteurs nommés, musique « constamment applaudie », quelques scènes ont provoqué « de légers murmures, mais les autres « ont eu beaucoup de succès. Pour l’interprétation, on se contente d’uen liste d’acteurs, sans aucune appréciation.]
Les comédiens Italiens ont donné, le 15 frimaire, la première représentation d'Azéline, comédie en trois actes, en prose, mêlée d'ariettes.
Aimar, épris des charmes d'Azéline, craint de la perdre, et la soustrait à tous les regards. Mais vainement n'épargne-t-il rien pour prolonger l'esclavage affreux d'Azéline ; le jeune Azémon est parvenu à voir cette jeune infortunée ; la voir, l'aimer, est pour lui même chose, et tous les jours il chante sous les fenêtres de l'aimable prisonnière ; tous les jours il attache des roses à l'arbre le plus voisin du séjour qu'elle habite. Azéline, sensible à tant d'amour, veut trouver un moyen d'y répondre ; sa bonne lui en indique un fort simple ; elle l'engage à composer un bouquet des fleurs qui pourront le mieux exprimer sa pensée. Azéline consent ; Aimar a tout entendu, il se cache : Azéline et sa bonne unissent la violette à l'immortelle, Azéline reporte la corbeille de fleurs, la bonne va placer le bouquet : aussitôt paroît le jaloux Aimar ; il accable la bonne d'Azéline des reproches les plus violens, et la sépare d'Azéline, qui ne tarde pas à revenir. Aimar s'étoit emparé du bouquet ; il le dérobe aux jeux d'Azéline et dissimule sa fureur. Azéline croit qu'il ne sait rien, aussi se prête-t-elle de bonne-foi au désir que témoigne Aimar d'offrir quelques fleurs à Matilde ; mais bientôt Aimar lui présente le bouquet surpris entre les mains de la bonne. Azéilne est interdite ; Aimar lui défend de penser désormais à Azémon ; les gardes d'Aimar avoient ordre d'amener ce jeune homme, s'ils le rencontraient ; il n'a pu-leur échapper ; ils l’amènent. Aimar ordonne à Azéline de se retirer. Aimar confie ensuite a Azémon, le projet qu'il a de s'unir- avec Azéline ; il exige qu'Azémon déclare en sa présence à Azéline qu'il ne l'aime pas ; si Azémon refuse, Aimar veut poignarder Azéline. Pour la soustraire à la fureur du cruel Aimar, Azémon promet tout : Azéline vient donc entendre le discours imposteur de son amant ; d'abord elle est inquiète, agitée ; mais les habitans du village arrivent ; Azémon se jette entre les bras d'Azéliae, proteste de son amour .pour elle, et jure de mourir plutôt que de l'abandonner au pouvoir d'un rival odieux. Les gardes à?Aimar triomphent des villageois qui favorisoient Azémon et ce dernier succombe sous le nombre. Ainsi finit le premier acte.
Aimar accorde la liberté à Azémon, à condition qu'il retournera chez sa mère. Azémon, pour être libre, a paru céder aux désirs d’Aimar. Mais quand il est sur le point de partir, il ne peut soutenir l'idée de la séparation à laquelle Aimar veut le condamner ; il réfléchit un moment, le sort en est jeté, il reste. La bonne, qui est libre aussi, trouve Azémon ; tous deux avisent aux moyens de tromper de nouveau le jaloux Aimar, et c'est une colombe qui les tire d'embarras l'un et l'autre. Il est convenn qu’Azémon, dès qu'il sera chez sa mère, préparera tout pour enlever Azéline, à laquelle il donnera un rendez-vous dans un billet caché sous l'aile de la colombe. Ce projet est encore découvert par Aimar ; dès que la colombe se dispose à porter la lettre, Aimar, d'un coup de fusil, tue le pauvre animal, et décachète l'épître d’Azémon. Nouvelles fureurs A'Almar, qui prend de nouvelles mesures pour déjouer les manœuvres employées par son rival.
Le troisième acte se passe chez la mère d’Azémon. Azémon est rêveur ; sa bonne mère est inquiète ; elle voudrait pénétrer la cause du chagrin qui paroît, depuis quelque temps, dévorer Azémon. La sollicitude de la bonne mère est de peu de durée ; Azéline et sa bonne ont échappé à la vigilance d'Aimar et de ses gardes ; elles accourent avec précipitation, parce qu'elles sont poursuivies. Azémon se met en état de les défendre ; les gardes d’Aimar se présentent ; les habitans du village op posent une résistance vigoureuse ; Aimar, indigné, se présente lui-même avec d'autres forces ; mais combien sa situation change en un instant ! il reconnoît, dans la mère d!'Azémon,, une épouse estimable qu'il avoit abandonnée ; il est contraint de faire l'aveu de ses erreurs, et d'unir Azémon avec Azéline.
Tel est le sujet à'Azéline, dont on a demandé les auteurs. Le citoyen Michu, chargé du rôle d’Azémon, a appris que le poème est du citoyen Hoffman, et la musique du citoyen Solié, artiste du théâtre de l’Opéra-Comique.
La musique a été constamment applaudie ; plusieurs scènes de la comédie ont excité de légers murmures ; les autres ont eu beaucoup de succès.
Les acteurs qui ont joué dans Azéline sont les citoyens Michu, Philippe, FLeuriot, Grange, et les citoyennes Saint-Aubin, Desbrosses et Philippe.
D’après la base César, la pièce est une comédie en prose mêlée de musique. Elle est l'œuvre de François-Benoît Hoffman, et la musique est de Jean-Pierre Solié ; elle a été jouée 29 fois au Théâtre Italien (salle Favart), du 7 décembre 1796 au 26 octobre 1799 (7 fois en 1796, 11 fois en 1797, 11 fois en 1799, après une interruption de plus d’un an).
Ajouter un commentaire