L'Antichambre, ou les Valets chez eux, opéra comique, en un acte, en prose, de Dupaty, musique de Dalayrac, 8 ventôse an 10 [27 février 1802].
Théâtre de l'Opéra Comique National, rue Feydeau
Almanach des Muses 1803
Intrigue usée, situations qui se trouvent par-tout, et particulièrement dans les Valets Maîtres, de Richon. Pièce qui n'a été représentée qu'une fois.
On trouve d'autres titres : l'Antichambre, ou les Valets entr'eux, l'Antichambre, ou les Valets maîtres, et la pièce a été reprise (modifiée) sous un autre titre : la Folle soirée ou Picaros et Diégo, (3 mai 1803).
Courrier des spectacles, n° 1825 du 9 ventôse an 10 [28 février 1802], p. 2 :
[Ce bref article semble indiquer que la pièce a connu un certain succès. Elle n'aurait pourtant été représentée qu'une fois.]
Théâtre de l'Opéra-Comique, rue Feydeau.
Le citoyen Dupaty, dont les deux derniers ouvrages ont eu, l’un une chûte, l’autre un succès contesté , vient de prendre sa revanche, et d’une manière victorieuse. Il a donné l'Antichambre, opéra bouffon en un acte, représenté hier pour la première fois : le succès a été complet. La musique , qui est du cit. Dalayrac , a été couverte d’applaudissemens.
Le défaut de place nous force de remettre au N°. prochain les détails , ainsi que 1'analyse de ce joli opéra.
Courrier des spectacles, n° 1826 du 10 ventôse an 10 [1er mars 1802], p. 2 :
[Après avoir annoncé le succès la veille, le critique revient sur la pièce, à laquelle il reproche de beaucoup ressembler aux pièces avec des personnages récurrents comme Jodelet et Mascarille (des pièces avec des valets, dont on sait l'importance dans la comédie), mais dont il reconnaît la rapidité de la succession des situations comiques et « la gaîté du dialogue », et surtout la qualité remarquable de la musique. Il entreprend ensuite l'analyse de l'intrigue, très compliquée, au point qu'il lui faut constamment expliquer l'identité des personnages; au moins double. Chacun prend une autre identité, les anciens valets pour devenir des gendres potentiels dans une bonne famille, les domestiques des maîtres pour donner une leçon aux anciens valets enrichis qu'ils ont reconnus, et qu'ils veulent punir de leur désir de tromper. L'intrigue avance difficilement, les vrais maîtres finissent par venir jouer leur rôle, et sans qu'on sache trop pourquoi, un des deux valets enrichis est chassé, quand l'un peut épouser une soubrette, ce qui pourrait être une sorte de promotion sociale, et qui est de toute façon une forme d'absolution. Cette intrigue a la chance d'être mise en lumière par une musique excellente, dont le critique dit le plus grand bien, sauf en ce qui concerne son « caractère vraiment italien », ce qui n'est pas vraiment un compliment. Certains morceaux sont commentés de façon positive : « cette musique en général nous a paru ajouter à la réputation du citoyen Daleyrac ». Elle vaut en tout cas bien mieux que le livret, ce que le critique laisse entendre plus qu'il le dit.]
Théâtre de l'Opéra-Comique, rue Feydeau.
Quoique l’opéra de l'Antichambre, représenté avant-hier avec le plus grand succès, puisse être accusé de rappeler en partie les Jodelet, les Mascarille, etc., néanmoins les situations comiques qui s’y succèdent fréquemment, la gaîté du dialogue, et sur-tout la musique délicieuse dont il est enrichi en font un des ouvrages les plus agréables que l’on ait donnés depuis quelque tems à ce théâtre. En voici l'analyse :
Lafleur a fait fortune avec son camarade Picard, et les deux valets-maîtres ont acheté une terre près de la maison de campagne de M. Belval, riche propriétaire. Celui-ci a auprès de lui une fille et une nièce veuve, à qui les nouveaux voisins se proposent de rendre visite. L’Olive, un des gens de M. Belval, qui a reconnu Lafleur et Picard, quoique cachés sous les noms de Saint-Clair et de Desguérêts, se concerte avec les autres domestiques, qui tous se promette [sic] de rire aux dépens de leurs anciens camarades. Ils s’emparent à cet effet d’habits propres pour les rôles qu’ils veulent jouer. L’un (Chenard) devient M. de Belval ; l’autre (Philis ainée) sa fille ; une autre (madame Gonthier) la nièce veuve ; un autre (Dozainville) un ancien militaire, M. de Saint-Germain. Messieurs Saint-Claire [sic] et Desguérêts arrivent. Point de suisse, point de laquais pour les annoncer : c’est affreux. Une discussion sur un titre de 40.000 francs que Saint-Clair réclame de Desguérêts, et pour lequel celui-ci cède à son camarade ses prétentions à la main de mademoiselle Belval, est entendue de l'Olive, qui est entré sans être apperçu, et qui se présente ensuite pour annoncer que ses maîtres se préparent à répondre dignement à leur visite. Après son départ, Desguérêts (Picard) , qui se défie de la gaucherie de Saint-Clair (Lafleur) lui fait répéter la manière dont ils doivent se présenter : le compliment est tout-à-fait plaisant. C’est alors que le faux M. de Belval paroît, il présente sa fille, sa nièce et son frère le militaire. Celui-ci au moment de la déclaration adressée par Desguérêts à la nièce, est près de lui, le front sourcilleux, la lame au côté et la menace à la bouche. Il faut bien que Desguérêts se contente, bon gré malgré, de cette bonne fortune. Quant à Saint-Clair, mademoiselle de Belval vient le trouver de la part de son père, et tandis qu’il lui fait sa déclaration, qu’il trouve entr’elle et son ancienne maitresse beaucoup de rapports frappans, les valets de Belval ont repris 1eurs habits ordinaires. Thomas, ci-devant M. Belval, nomme Lafleur et Picard : adieu les noms de Saint-Clair et Desguérêts. Ce dernier est mis à la porte, et l’autre qui est un bon garçon assez innocent, épouse la soubrette, ci-devant madame de Belval.
La musique de cet opéra est remplie de choses très-jolies et d’un caractère vraiment italien. Peut-être même en quelques endroits l’imitation du genre est elle trop marquée. Mais ce reprocha n’est applicable qu’au dernier duo, morceau au surplus écrit avec autant de goût que d'esprit. Quant à celui : Ecoute-moi , je t'en supplie, chanté par les citoyens Martin et Elleviou, il présente, à l’exception du presto qui le termine, une suite d’idées fraîches et parfaitement liées entr’elles ; le début est d’un très beau cantabile ; le citoyen Elleviou fait avec un véritable talent la charge de toutes les phrases et de tous les ornemens que fait avant lui le citoyen Martin. Cependant cette leçon qu’un valet donne à un autre, est trop longue, si l’on considère le peu d’intérêt de la situation.
Le trio qui ouvre pour ainsi dire la scène, est écrit avec habileté, tout y est fin, tout y est senti, les à-parte comme les ensemble [sic]. La partie de l’orchestre y est également bien traitée ; les accornpagnemens ont tous le caractère qui leur est propre, et le comique y est joint au sentiment ; cette musique en général nous a paru ajouter à la réputation du citoyen Daleyrac.
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