L'Auberge de Calais

L'Auberge de Calais, comédie en un acte, en prose, de d'Orvigny, Georges Duval et Bonnel. 28 frimaire an 10 [19 décembre 1801].

Théâtre Français, rue de Louvois

Almanach des Muses 1803

Un Gascon, personnage ridicule, se trouve dans une auberge de Calais avec un Lord qui a des vues sur une jeune veuve. Il offre au Lord de le servir, et, pour y réussir, dit à l'hôtesse, qui se méfie de lui, qu'il est chargé des pouvoirs de l'oncle de cette veuve. Obligé de produire cet oncle, il s'adresse à un homme récemment débarqué à Calais, qui court après sa nièce ; cet homme est précisément l'oncle de la femme que le Lord veut séduire. Le Gascon n'a pas tenu tout ce qu'il avait promis, son stratagème n'a pas réussi ; mais il s'en console avec cinquante guinées qu'il avait reçues d'avance pour prix de ses loyaux services.

Espèce d'imbroglio, action assez difficile à saisir ; des détails comiques.

 

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Huet ; chez Ballard, an 10 :

L'Auberge de Calais, comédie en un acte et en prose ; Représentée pour la première fois par les Comédiens de l'Odéon, sur le théâtre de Louvois, le 28 Frimaire, an 10. Par les Citoyens Bonel, Dorvigny et Georges Duval.

Courrier des spectacles, n° 1755 du 29 frimaire an 10 [20 décembre 1801, p. 2 :

[L'article commence par une mise en garde : le fait que la pièce se passe à Calais ne signifie pas que c'est une pièce de circonstances, « c'est tout bonnement une comédie d'intrigue ou d’imbroglio », ce que confirme le résumé de l'intrigue, qui utilise la ressource classique de l'auberge pour faire se rencontrer les personnages et nouer une intrigue aux multiples ressorts. On a un oncle et sa nièce, une veuve, un officier qui la courtise, et un gascon, bien utile dans une comédie. Tout ce petit monde multiplie les actions, et en particulier un enlèvement avec une erreur sur la personne... Tout cela provoque un bon gros rire, dû au moins autant à des « traits assez saillans » qu'au jeu remarquable des principaux acteurs. On peut regretter « des détails souvent oiseux, des entrées et des sorties peu motivées, et en général un style lâche » : on sent la rapidité de l'écriture. Les auteurs sont nommés, et ils doivent une fière chandelle à Picard dans le rôle du gascon.]

Théâtre Louvois.

L'Auberge de Calais n’est point, comme le prétendoient quelques personnes avant 1a représentation , une pièce de circonstances, c'est tout bonnement une comédie d'intrigue ou d’imbroglio (comme on voudra) et la scène se passe dans une auberge où descendent les voyageurs qui arrivent d'Angleterre par le paquebot, et de Paris par la diligence. Parmi ces derniers sont un oncle qui va à Londres rejoindre une niece, mad. de Murville, qui y est allée recueillir la succession de son mari, mort prisonnier de guerre, un jeune officier qui, sans connoître cet oncle et sans en être connu, court après cette même madame de Murville, dont il est l’amant, et enfin, un monsieur Versac, qui, vivant sur la bourse d’autrui, va à Londres élever un théâtre gascon. Le paquebot arrive, et madame de Murville descend à l’auberge, accompagnée d’un 1ord à qui elle ne peut accorder que de l’estime et de l’amitié. Elle se prépare à repartir bientôt pour Paris, sans le Lord, qui regrette de ne pouvoir obtenir son amour, et de n’avoir pas à son service un de ces valets français si adroits, si entreprenans pour seconder ses projets sur la jolie veuve. Le Gascon, qui ne voit pas jour à vivre davantage aux dépens de ses anciens compagnons de voyage, s’offre à ses yeux et lui paroît l'homme le plus propre à ses desseins Il lui fait part de son amour ; Versac lui propose un plan d'enlèvement honnête : quatre domestiques de milord conduiront la dame dans une chaise de poste ; le maître se présentera et sera censé la délivrer. L'Anglais approuve ce projet et remet 50 guinées à Versac. Mais il faut mettre l’Hôtesse dans ses intérêts, et pour cela il feint que l'oncle de madame de Murville veut la faite enlever pour la soustraire à un jeune homme qui ne lui convient pas. L’Hôtesse veut voir l'oncle : surcroît d’embarras ; où se trouver ? Versac se rappelle ce bon bourgeois qui est venu avec lui dans la diligence, et il l’engage à faire l’oncle. Celui-ci ne se fait pas prier ; son projet d’ailleurs étoit de hâter le départ de sa nièce. On vient bientôt lui annoncer que l’on enlève madame de Murville. Versac triomphe ; son amant vole sur les traces du ravisseur, et ramène, avec Milord, l’Hôtesse, que l’on avoit prise pour la jeune veuve, lorsqu’elle arrangeoit les paquets dans la chaise de poste.

Tel est le fonds de l'Auberge de Calais.

Des incidens nombreux, du mouvement et un dialogue semé de traits assez saillants, et qui ont provoqué plusieurs fois le gros rire, et sur-tout le jeu des citoyens Picard et Vigny ont décidé le succès de cet ouvrage auquel on peut justement reprocher des détails souvent oiseux, des entrées et des sorties peu motivées, et en général un style lâche et qui se sent un peu de la précipitation. Les auteurs sont les citoyens Dorvigny, Georges-Duval et Bonel. Heureux d'avoir pu faire jouer leur rôle de gascon par Picard !

F. J. B. P. G***.          

 

Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, VIIe année, tome IV (an IX-1801), p. 551-552/

Théâtre Louvois.

L'Auberge de Calais.

La première représentation de cette petite pièce, donnée le 29 frimaire, n'a pas eu de succès. Le défaut d'intérêt et l'extrême foiblesse du dénouement n'ont pu être réparés par quelques plaisanteries, et deux ou trois scènes assez bien faites.On y reconnoît la main de plusieurs auteurs.

Toute l'intrigue roule sur un enlèvement, retardé par quelques imbroglio : elle se termine par un quiproquo assez mal-adroit. Les valets ont enlevé, au lieu de Mme. Murville, la grosse aubergiste, qui se débat, et fait voir la méprise. Cette intrigue est conduite par un Maigrac, gascon, personnage assez bas, et qui est toujours en scène. Ce rôle a été joué avec gaieté par Picard ; mais il n'a pu soutenir l'ouvrage, qui a été sifflé à la fin. Quelques personnes ont demandé les auteurs, et quand Picard est venu pour les nommer, il n'a pu se faire entendre. On les a pourtant mis sur l'affiche le lendemain. Ce sont les CC. Georges Duval et Dorvigni, connus par plusieurs ouvrages aux Troubadours et au théâtre Montansier. Le troisieme est le C. Bonel.

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