L'Avare (de Molière), mis en vers par M. Mailhol ; 24 août 1813.
Théâtre de l'Impératrice.
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Titre :
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Avare de Molière mis en vers (l’)
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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5
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Vers / prose
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en vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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24 août 1813
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Théâtre :
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Théâtre de l’Impératrice
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Auteur(s) des paroles :
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Mailhol
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Almanach des Muses 1814.
Entreprise hardie que le succès n'a pas tout-à-fait justifiée.
La mise en vers de la pièce de Molière a eu lieu en 1775 :
L'Avare, comédie de Molière, en cinq actes, Mise en vers, avec des changemens. Par M. Mailhol. A Bouillon, De l'Imprimerie de la Société Typographiq. 1775.
La pièce y est précédée, p. i à vii, d'un avertissement :
On sçait que l'Avare de Molière, est, presque à tous égards, un chef- d’œuvre ; & que cet Ouvrage en prose a fait éprouver jusques ici au Lecteur, & encore plus au Spectateur, un plaisir inexprimable.
Mais, on sçait aussi, que Molière n'avoit d'abord composé cette Comédie, en prose, que pour la mettre ensuite en vers : & le dessein, qu'il avoit eu, ne se reconnoît peut-être que trop dans quelques endroits de son Ouvrage, où sa prose, toute pleine d'ailleurs de sens & de génie, paroît négligée, prolixe, traînante.
On lit enfin dans la vie de ce célèbre Auteur, que son Avare eut à-peine sept représentations dans sa nouveauté, parce que cinq Actes de prose dégoûtoient le public. A la vérité, les sentimens ont bien changé depuis, touchant cet excellent Ouvrage : les beautés du fonds n'ont plus laissé prendre garde à la forme.
Je crois devoir ajouter à l’exposition de ces faits, le sentiment & les propres paroles du plus grand Poëte, & de l'un des meilleurs Juges de nos jours, en littérature : Dans les grandes pièces, dit-il, remplies de portraits, de maximes, de récits, & dont les personnes ont des caractères fortement, dessinés, les vers [en] paroissent absolument nécessaires.
De plus, il m'a toujours semblé que le spectateur, sur-tout, est obligé de se faire violence, & pour ainsi dire, de s'étourdir sur des choses qui sont devenues vieilles dans l'Avare en prose. S'il étoit possible que l'Auteur eût vécu jusqu'à nous, il les auroit certainement changées. On peut, je crois, se faire encore, touchant les pères, au titre de Seigneur, qui leur est donné, dans la piece, & à l'habillement de vieille date que porte Harpagon : mais quand on voit Cléante, habillé comme nous, sans haut-de-chausses, sans rubans : comment peut-on, sans une sorte de peine, lui entendre dire par son père : Je voudrois bien sçavoir à quoi servent tous ces rubans dont vous voilà lardé depuis les pieds jusqu'à la tête ; & si une demi-douzaine d'aiguillettes ne suffit pas pour attacher un haut-de-chausses ? Quel mal-aise ne doit-on pas éprouver aussi, lorsque le même Harpagon dit, en parlant des jeunes gens, qui n'ont certainement plus l'air débraillé, & qui ne portent point de moustache : Avec leurs trois petits brins de barbe, relevée en barbe de chat, leurs haut-de-chausses, tout tombans, & leurs estomacs débraillés.
Ce sont, sans contredit, autant d'imperfections, fort réelles aujourd'hui. Eh ! combien ne nuisent-elles point à la vérité des mœurs & à l'illusion, dans laquelle il est nécessaire que soit plongé le spectateur de tout drame !
Le peu de préparation & la longueur du dénouement de l'Avare en prose, m'ont aussi paru produire toujours un effet désagréable.
C'est sur de telles considérations que j'ai osé prendre la plume. J'ai d'ailleurs' été encouragé par l'exemple & le succès du Poëte, qui mit en vers, embellit, & transforma pour jamais,.le comique & invraisemblable Festin de Pierre du même Auteur, & par l'espoir de ranimer l'attention du public, pour un ouvrage, trop connu sous sa propre figure, & qui paroîtroit sous un masque nouveau.
J'ai eu aussi en vue l'avantage des Acteurs. La mémoire de ceux qui voudront représenter ce drame versifié, sera soulagée par la cadence des vers & le retour des rimes : & quelques-uns d'entre eux pourront développer de nouveaux talens dans leurs rôles, en exprimant quelquefois, dans l'Avare mis .en vers, des choses nouvelles ou autrement arrangées que dans l'Avare en prose.
Je crois d'ailleurs devoir rendre ici quelque compte de mon travail . D'abord, je me suis dit à moi-même ; il faut tâcher, que, dans mes mains, l'ouvrage ne perde, en aucune de ses parties, & que, s'il se peut, il gagne dans quelques endroits : aurai-je réussi ?
J'ai fait, au commencement du quatrième acte, une petite scène, nécessaire à l'accomplissement de mes vues. J'ai élagué la suivante ; & j'ai raccourci l'avant-derniere scène de la piece, autant que cela m'a paru praticable.
J'ai suivi d'ailleurs, le plus exactement qu'il m'a été possible, la prose de Molière. J'ai pris seulement deux sortes de libertés, quand j'ai trouvé quelquefois qu'elle se refusoit sous ma plume, à la gêne des vers : tantôt, j'ai ajouté quelques idées accessoires, ou l'expression des sentimens, que devoit avoir le personnage, dans sa position ; & d'autres fois, j'ai négligé quelques petites choses, qui m'ont paru de peu de conséquence, avec l'attention néanmoins de supprimer seulement de ces légers chaînons, que l'imagination du lecteur & du spectateur peut aisément suppléer.
Une assez longue fréquentation du théâtre m'a fait connoître, par expérience, les grands traits comiques, les mots saillans, qui, dans l'Avare en prose, n'ont jamais manqué d'exciter le rire des Spectateurs : & je me suis fait, comme de raison, une loi expresse de n'en soustraire pas.
Au reste, j'ai cru devoir respecter les expressions de mon Auteur, au point d'employer, assez souvent, de celles qu'on pourroit trouver, ou foibles, ou peu nobles ; mais, outre qu'elles ont été adoptées dans toute l'Europe, par nos pères & nous ; outre qu'elles conviennent sans doute aux personnages qui s'en servent ; je me suis persuadé qu'elles en paroîtront plus naturelles : & j'ai pensé, en un mot, que dans l'Avare en vers, on ne sçauroit, par trop de côtés, reconnoìtre l'inestimable Molière.
J'ai supprimé aussi un morceau de la derniere scène du quatrième acte, que déja bien des Acteurs ne récitoient point, avec raison. Harpagon, qui est censé se trouver seul dans sa chambre, a certainement grand tort de dire : Que de gens assemblés !. Je ne jette mes regards sur personne, qui ne me donne des soupçons ; & tout me semble mon voleur, &c. au cas néanmoins que ce morceau parut à regretter ; le voici en vers, tel qu'il pourroit être entrelacé dans cette scène :
A toute la maison qu'on donne la torture,
A servante, à valets, à fils, à fille, à moi.
Que de gens assemblés ! sur chacun que je voi,
Je jette des soupçons, & crois que c'est mon traître.
On s'entretient là-bas ; on en parle peut-être.
Quel bruit fait-on là-haut ? N'est-ce pas mon voleur ?
Par grâce, par pitié pour mon pressant malheur,
Que quelqu'un, s'il se peut, m'en dise des nouvelles.
N'est-il point parmi vous ? Quelles âmes cruelles !
Un ris moqueur se joint à leur malin regard :
Au vol que l'on m'a fait vous verrez qu'ils ont part.
Allons, nombre d'Archers, avec leurs Capitaines....
Enfin, s'il devoit aussi rester au Lecteur quelque regret sur la suppression dont j'ai déja parlé, & que j'ai cru devoir faire, vers le commencement du quatrième acte, d'environ trente-cinq lignes du sujet; je vais les rapporter ici, mises en vers ; &. ce morceau pourroit aussi s'entrelacer, comme on va voir :
ELISE.
Pour rompre ton ouvrage
Trouves quelque moyen.
F R O S I N E.
Que d'adresse il faudroit !
A Mariane.
Votre mere n'est pas ce qui m'arrêteroit ;
Elle est douce &. sensée, on pourroit la réduire ;
A votre but commun je pourrois la conduire :
A Cleante.
Mais, c'est que votre père, à.qui nous en voulons,
Est votre père.
CLEANTE,
Eh ! mais ; c'est ce que nous sçavons.
FROSINE.
J'entends que s'il se voit refusé de Madame,
Ce refus contre vous irritera son ame ;
Et-qu'il-ne voudra pas consentir au lien
Qui doit faire, je crois, votre souverain bien,
Il faudroit donc d'abord, par quelque stratagème,
Qu'en ceci-le refus pût venir de lui-même ;
Qu'on pût le dégoûter.
CLEANTE.
Tu n'as pas tort vraiment.
FROSINE.
J'ai raison, je le sçais. Mais quel expédient
Trouver pour réussir ? Oh ! c'est-là l'encloueure.
Attendez... Il faudroit une femme assez mûre,
Qui fut de mon talent, adroite, à l'air pincé.
Par le moyen d'un train, à la hâte amassé,
D'une chaise à porteurs, ou d'un brillant remise,
Sous le titre pompeux de Comtesse, ou Marquise,
Elle viendroit jouer la femme de grand nom,
Arrivant de Bretagne, ou seroit sa maison.
Votre père d'abord la croit, par mon adresse,
Outre plusieurs châteaux, opulente en espèce,
II croit qu'elle l'adore, & veut sa main ; si bien
Qu'elle doit, au contrat, lui donner tout son bien.
A Mariane.
Soudain, notre vieillard, entraîné vers l'amorce,
De suivre son penchant ne se sent plus la force ;
Car enfin, s'il vous aime, il aime plus l'argent.
S'il consentoit alors à votre engagement,
Peu nous importeroit que, s'informant ensuite,
La Marquise sans biens par lui fut éconduite.
CLEANTE,
La ruse seroit bonne.
FROSINE.
II faut donc en user ;
Et j'ai certain sujet que je veux déguiser.
CLEANTE.
Frosine, compte-bien sur ma reconnoissance...
La base César, qui connaît cette édition, ne connaît pas de représentation pour la fin du XVIIIe siècle.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1813, tome V (septembre), p. 219 :
[Curieusement, le compte rendu ne dit pas que le travail de Mailhol date de 1775. Il ne fait pas preuve d’enthousiasme devant le résultat de la mise en vers de la prose de Molière et constate des gains et des pertes dans cette transformation. En tout cas, il n’exprime pas d’indignation devant l’entreprise. Jouée, la nouvelle version a été habilement jouée, au moins pour les rôles de l’avare et de Maître-Jacques.]
Odéon. Théâtre de l'Impératrice.
L'Avare de Molière, mis en vers.
Les comédiens de l'Odéon se plaigoient depuis longtemps de manquer de répertoire ; grâces à M. Mailhol, voilà leurs chagrins prêts à finir.
On sent qu'il n'est guères possible, sur une représentation, de rendre compte du genre de travail que l'Odéon nous a présenté ; il faut nécessairement comparer la phrase de prose écrite par Molière aux vers qui ont cherché à la rendre, pour juger du mérite de ces vers. Il suffira donc d'annoncer que les traits du grand-maître ont paru en général assez bien conservés ; que si la franchise de quelques-uns ont été altérés par le besoin de la rime, quelques autres ont acquis par la tournure du vers une sorte de physionomie proverbiale qui ne sauroit déplaire. Les scènes de caractère n'ont presque rien perdu de leur mouvement comique, et les scènes d'amour ont gagné quelque élégance ; enfin cette poésie n'est pas un outrage trop vif à la prose la plus parfaite que le théâtre nous ait jamais offerte.
L'Avare a été habilement joué par Perroud. Il y a longtemps que la finesse, le talent comique et la chaleur de cet acteur l'ont rendu digne d'un plus grand théâtre ; il a été fort bien secondé par Armand, dans le rôle de Maître Jacques.
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