La Bienfaisance de Voltaire, ou l’Innocence reconnue

La Bienfaisance de Voltaire, ou l’Innocence reconnue, pièce en un acte, en vers, de Villemain d’Abancourt, 30 mai 1791.

Théâtre de la Nation.

Titre :

Bienfaisance de Voltaire (la), ou l’Innocence reconnue

Genre

pièce dramatique

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en vers

Musique :

non

Date de création :

30 mai 1791

Théâtre :

Théâtre de la Nation

Auteur(s) des paroles :

Villemain d’Abancourt

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Brunet, 1791 :

La Bienfaisance de Voltaire, pièce dramatique, en un acte, en vers, Par M. Willemain d’Abancourt. Représentée pour la prmeière fois sur le Théâtre de la Nation, le Lundi 30 Mai 1791.

Tantùm Religio potuit suadere malorum.

Lucrèce.

L'épigraphe est emprunté au De rerum natura, livre 1, vers 101 et signifie : « tant la religion a pu inspirer de maux ».

Mercure universel, tome 3, n° 92 du mardi 31 mai 1791, p. 494-496 :

[L'article sur les spectacles de ce dernier jour de mai mélange bien des sujets d'actualité. D'abord la rivalité des deux « théâtre françois », le Théâtre de la Nation et son rival le Théâtre de la rue de Richelieu, rivalité manifestée le 30 mai lorsque les deux théâtres ont célébré l'anniversaire de la mort de Voltaire en jouant tous les deux le Brutus du grand homme. On pourrait s'attendre à ce qu'il soit question ensuite de la représentation de la tragédie, mais l'article dérive sur la représentation, au Théâtre de la Nation, de la petite pièce de l'Innocence reconnue ou la Bienfaisance de Voltaire, pièce plus à la gloire de Voltaire qu'à l'hommage à Calas. Le critique ne cache pas qu'elle avait pour but de « répandre des fleurs sur la tombe de ce grand homme ». Il résume le résumé de la pièce, dont l'intrigue tient en peu de mots : l'acte de générosité de la gouvernante des Calas dont Voltaire est témoin et qu'il encourage, le rappel du rôle de Voltaire dans la réhabilitation de Calas, sa satisfaction de voir l'effet de sa générosité, l'annonce de la disparition du fanatisme et de la liberté à venir en France. La pièce est jugée bien écrite, mais le critique regrette qu'elle cède au besoin de mêler à des sentiments patriotiques une forme d'idolâtrie « indigne d'un homme libre ». L'auteur a été demandé, mais il est resté anonyme, et le critique ne peut que suggérer un nom vraisemblable (et qui n'est pas le bon...). Puis, retour à la tragédie : pendant toute la représentation de Brutus, le buste de Voltaire a été visible sur la scène, et l'interprétation des rôles de Brutus et de son fils Titus a été remarquable, l'acteur jouant Titus ayant ensuite, dans la petite pièce, « joué avec beaucoup de vérité le rôle de Voltaire ». Une note finale indique que la mise en scène du Brutus au Théâtre François de la rue Richelieu a été magnifique, et qu'elle a eu un grand succès, le public ayant redemandé la pièce : le critique promet de rendre compte de la prochaine représentation donnée à ce théâtre.]

Théatre de la Nation.

Depuis long-tems le vœu le plus ardent des auteurs dramatiques, étoit de voir s’élever un second théâtre françois, dépositaire des ouvrages de nos grands maîtres, qui sont des richesses nationales. Leurs efforts et leurs écrits ont contribué à l’exécution de ce projet, et le théâtre françois de la rue de Richelieu est entré plus d’une fois en lice avec celui de la nation. Mais jamais cette rivalité et cette émulation de talent, ne se sont manifestées plus hautement que hier 30 mai, jour de l'aniversaire [sic] de la mort de Voltaire, tous deux ont rendu hommage à ses mânes en donnant Brutus.

Après la représentation de cette tragédie, les comédiens du fauxbourg St. Germain, ont joué pour la première fois, un ouvrage annoncé -modestement, comme petite pièce en un acté et en vers, sous le double titre de l'innocence reconnue, ou la bienfaisance de Voltaire.

L’intention de l’auteur a été de répandre des fleurs sur la tombe de ce grand homme. En voici une légère esquise [sic] :

Le théâtre représente l'appartement de Voltaire ; on distingue dans le fonds les portraits, de le Kain et du roi de Prusse. L’épouse infortunée du malheureux Calas, gémit avec sa fille sur son sort ; la bonne Jeanne, gouvernante de cette famille déplorable, vient déposer aux pieds de sa maîtresse une succession modique, qu’elle a recueillie d’un de ses parens. Madame Calas pénétrée d’attendrissement et d’admiration, pour un si beau trait refuse de l’accepter, lorsque Voltaire entrant voit Jeanne à genoux, suppliant sa maîtresse de recevoir ce don, et détermine cette dernière à l’accepter. Ensuite arrive le généreux la Salle, qui a si bien défendu la cause de Calas. Un avis clandestin répand l’allarme dans le cœur de la mère et de la fille. Mais Voltaire en révoque l’authenticité. En effet, le plus jeune des fils de Calas vient de Paris, et rend la vie à la mère et à la sœur, en leur apprenant qu’ils doivent à Voltaire la réabilitation [sic] de la mémoire de leur père. Voltaire payé de ses peines par le plaisir de faire le bien, exprime ainsi l’épanchement de son ame :

» J’ai de la gloire aussi connu la jouissance ;
» Mais la gloire n'est rien près de la bienfaisance ».

Ensuite il gémit sur les ravages du fanatisme, prédit son anéantissement , ainsi que la liberté future de sa patrie, et les honneurs décernés à ses cendres par des législateurs éclairés et philosophes.

Tel est le canevas de cette piece bien écrite, et heureusement terminée par cette pensée gravée dans tous les cœurs honnêtes et vertueux :

« L’être bienfaisant seul a des droits au bonheur ».

Nous voyons avec douleur que l'auteur ait souillé cette conception patriotique par une adulation servile et par des rafinemens [sic] d’idolâtrie indignes d’un homme libre. Toujours le petit bout de l'oreille.

On a demandé l’auteur, M. Dunant a annoncé qu’il était anonyme. Quelques personnes prétendent que cette pièce est de M. Charles Vilette. Il n’y auroit rien d'étonnant.

Nous ne devons pas oublier de dire que, pendant toute la tragédie, le buste de Voltaire a été placé sur un côté du théâtre. MM. Vanhove et St. Fal ont très-bien rendus les rôles de Brutus et de Titus. M. St. Fal qui a mis une onction précieuse dans ce personnage, a joué avec beaucoup de vérité le rôle de Voltaire dans la petite piece.

P S. Nous apprenons à l’instant que la tragédie de Brutus a été montée avec une grande magnificence au Théâtre françois de la rue Richelieu et que le public a été si content des acteurs, qu'il l'a redemandée. Nous irons à la seconde représentation pour offrir avec notre impartialité ordinaire une parallèle exact [sic] de l'ensemble et du jeu des acteurs. Le progrès de l'art est intéressé vivement à cette lutte.

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1791, volume 7 (juillet 1791), p. 282 :

THÉATRE DE LA NATION.

A-l'anniversaire de la mort de Voltaire, on a rendu, au théâtre de la nation, un nouvel hommage à cet homme célèbre dans une piece en un acte en vers, intitulée : la Bienfaisance de Voltaire, ou l'lnnocence reconnue. C'est la suite du drame de Calas, ou la réhabilitation de la mémoire de cet infortuné. Sa veuve est réfugiée à Ferney ; elle & sa fille y attendent avec inquiétude la décision du conseil. Un faux avis les afflige d'abord : mais un fils de Calas vient annoncer le triomphe de l'innocence, en présence de Voltaire qui y a tant contribué, & qui, comme l'on doit bien s'y attendre, joue un grand rôle dans la piece, du moins par ses discours, & en s'élevant avec force contre les préjugés.

Le public a demandé le nom de l'auteur : on est venu dire qu'il est inconnu. Quoi qu'il en soit, il a trouvé un moyen sûr de faire parler à son héros un langage digne de lui : c'est de mettre souvent dans sa bouche des vers tirés de ses ouvrages ; mais ce ne sont pas les seuls qui aient été applaudis. La piece en général a eu beaucoup de succès.

D'après la base César, l'auteur est François-Jean Villemain d'Abancourt, dit Léonard Gobemouche. La pièce a eu quatre représentations au Théâtre de la Nation, du 30 mai jusqu'au 17 juillet 1791.

Ajouter un commentaire

Anti-spam
 
×