Le Billet trouvé, comédie-proverbe en un acte, de Barré, Radet et Desfontaines, 3 mai 1813.
Théâtre du Vaudeville.
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Titre :
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Billet trouvé (le)
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Genre
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comédie-proverbe
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Nombre d'actes :
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1
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Vers / prose ?
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en prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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3 mai 1813
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Théâtre :
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Théâtre du Vaudeville
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Auteur(s) des paroles :
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Barré, Radet et Desfontaines
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L’Esprit des journaux français et étrangers, tome VI, juin 1813, p. 288-291 :
[Le Théâtre du Vaudeville, apparemment mal en point, cherche son salut dans « une pièce imitée de l’allemand, sans mariage et sans unité de lieu » (trois énormes défauts, en apparence). Le critique pense que le Vaudeville ferait mieux de revenir à ses fondamentaux : « beaucoup d'esprit, de la gaîté, un peu de malice, quelques jolis couplets », au lieu de faire une pièce avec cinq ou six changements de décor. Il fait ensuite l’analyse assez rapide de l’intrigue, une histoire bien embrouillée de billet perdu, mais pas pour tout le monde, et qu’on a bien du mal à récupérer, au prix de démarches pénibles. Finalement, tout le monde est content, sauf le public qui a été « fort édifié de voir sur le théâtre deux bons ménages, composés chacun de la femme, du mari et de l'amant, le tout vivant en bonne intelligence » (la pièce est très moralisatrice, mais elle ne semble pas morale à un critique français sous le Premier Empire). Les auteurs ? Le fameux trio du Vaudeville, qu’on a vu mieux inspiré : « aucun couplet saillant ». Et une interprétation qui a droit à un jugement ambigu (est-il suffisant de jouer « aussi bien que possible » ?)]
Le Billet Trouvé, pièce imitée de l’allemand, sans mariage et sans unité de lieu.
Aux grands maux les grands remèdes. Le Vaudeville, fatigué de ses chutes, ou, ce qui revient au même, de ses demi-succès, a fait comme un malade désespéré qui, se voyant abandonné des médecins, a recours à l'orviétan. En effet, il ne fallait rien moins qu'un danger véritable pour faire admettre à ce théâtre une pièce imitée de l’allemand, sans mariage et sans unité de lieu, selon les auteurs, et à laquelle il manque beaucoup d'autres choses, si l'on s'en rapporte au public. Ce petit essai, n'ayant pas réussi, je conseille au Vaudeville de reprendre un certain régime dont il se trouvait très-bien, il y a quelques années, et dont il a eu tort de s'écarter. Beaucoup d'esprit, de la gaîté, un peu de malice, quelques jolis couplets ; voilà tout ce qu'il faut. Les auteurs de la pièce le savaient si bien autrefois ! Pourquoi ne veulent-ils plus s'en souvenir ? Pourquoi le machiniste a-t-il le principal rôle dans le Billet Trouvé ? Les décorations jouent avec une prestesse admirable. Le théâtre change cinq ou six fois d'aspect, les personnages font un exercice prodigieux, promènent les spectateurs dans tous les coins de la ville de Hambourg où se passe la scène : on les suit, dans l'espoir d'attraper le plaisir, et l'on arrive tout essoufflé, à la fin de la pièce , sans en être plus avancé.
Un peintre décorateur a confié à sa femme un billet de 500 florins, qu'elle a perdu. Il y a un an que ce malheur est arrivé, lorsque la pièce commence. Comme les maris ne demandent qu'un prétexte pour gronder, le mari querelle encore sa femme sur la perte du billet. Un ami de la dame vient annoncer aux deux époux, qu'un épicier, nommé Drogman, a fait mettre dans les Petites-Affiches qu'on pouvait s'adresser à lui pour ravoir le billet. Le peintre, qui est une espèce de misantrope, prétend que les gens qui rendent l'argent qu'ils ont trouvé sont fort rares, et ne croit point à-la vérité de l'annonce. La dame et l'ami se transportent chez l'épicier. Celui-ci refuse de rendre le billet, quoiqu'il l’ait trouvé effectivement ; ce n'est pas lui qui a fait insérer l'avis : c'est un mauvais tour que lui a joué un confident perfide. On va chez le magistrat, qui trouve l'affaire assez obscure, et charge un vieil huissier, nommé Fureterre, de la débrouil ler. Ce personnage que Joli essaie en vain de rendre plaisant, n'est que ridicule, malgré le talent de l'acteur pour les caricatures.
La dame, l'ami et Fureterre vont chez le rédacteur des Petites-Affiches, pour savoir qui a fait insérer l'avis. Le rédacteur répond qu'il n'eu sait rien, qu'il ne se mêle point des articles qu'on lui apporte ; qu'il compte les lignes, touche l'argent, et voilà tout. On retourne chez Drogman, et on découvre, par une querelle fort maladroitement amenée entre les deux époux, que depuis quelques jours, l'épicier s'est brouillé avec un cousin, de sa femme employé à la douane. « Allons à la douane » ! dit Fureterre. Le petit cousin n'y est pas : il vient toujours fort tard ; ce jour- là, il n'est pas venu du tout. On se rend chez lui, et on le trouve déjeunant tête-à-tête avec sa cousine, à laquelle il avoue que c'est lui qui a voulu se venger de l'épicier, en le forçant à rendre le billet. Drogman arrive bientôt lui-même. Le petit cousin, interpellé par Fureterre, déclare qu'il a fait insérer l'avis, et qu'il est chargé par Drogman de restituer les 500 florins. Il les paie, en effet, de sa poche ; ce qui est très-noble et très-magnifique pour un employé à la douane : l'épicier est enchanté de garder l'argent ; le peintre est charmé de retrouver son billet, et le public, moins content qu'eux, a pourtant été fort édifié de voir sur le théâtre deux bons ménages, composés chacun de la femme, du mari et de l'amant, le tout vivant en bonne intelligence. Quoique cette nouveauté soit de trois auteurs naguères fameux, on n'y a trouvé aucun couplet saillant. La pièce a été aussi bien jouée que possible.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 18e année, 1813, tome III, p 172-173 :
[D’abord l’indication que la pièce est inspirée d’une pièce allemande. Peut-être que cette infidélité aux règles d’Aristote, explicitement signalée dès le titre de l'article, fait-il plaisir à ceux qui aiment à se délasser. Jugement assez positif : la pièce est « un tableau assez vrai », « chaque changement de décoration amène une situation assez piquante », « du naturel et de l'observation ». Un acteur est cité de façon favorable. Les auteurs sont cités.]
Le Billet trouvé, comédie-proverbe en un acte, imitée de l'allemand, sans mariage et sans unité de lieux, jouée le 3 mai.
Le Vaudeville, enfant gâté, qui se croit tout permis, a voulu faire une excursion sur les terres de nos voisins les Allemands. Les gens d'esprit aiment à se délasser quelquefois en disant des bêtises, comme Esope donnoit du relâche à son génie en jouant aux noix avec des enfans. Les habitués du Vaudeville ne sont peut-être pas fâchés que l'on s'écarte un peu des règles d'Aristote pour les faire rire, lorsqu'on les a violées tant de fois pour les ennuyer.
La pièce nouvelle est un tableau assez vrai de tout le mouvement que se donnent des gens qui ont perdu un billet d'une somme considérable, et chaque changement de décoration amène une situation assez piquante. Il y a dans la pièce du naturel et de l'observation. Joly y joue fort bien le rôle de M. Furter. Que voudroit-on de plus dans un vaudeville ? Celui-ci est de MM. Barré, Radet et Desfontaines.
Mémorial dramatique: ou Almanach théatral pour l'année 1814, p. 131-132 :
[D’abord le résumé de l’intrigue, une intrigue qui a un petit côté policier (Furter, premier détective dans l’histoire du théâtre ?). Le jugement est rapide et sans ambiguïté : intrigue pas assez piquante, couplets faibles et dialogue peu soigné, la pièce n’a pas rencontré le succès et a disparu du répertoire. Cela ne valait pas la peine de faire une infraction aux règles d’Aristote (au moins l’unité de lieu). On peut encore en faire reproche en 1814.]
LE BILLET TROUVÉ, comédie-proverbe en un acte, imité de l'allemand, sans mariage et sans unité de lieu, par MM. Barré , Radet et Desjfontaines. (3 mai.)
La scène se passe à Hambourg. Un peintre querelle sa femme sur ce qu'elle a perdu, il y a un an, un billet de caisse de 500 florins. Dans ce moment même , l'ami qui accompagnait madame, lorsqu'elle a égaré ce billet qui était caché dans son sein, vient ramener la joie dans le ménage, sur la lecture d'un article des Petites Affiches du jour. L'épicier Drogman, y donne avis qu'il est prêt à rendre un billet pareil, trouvé par lui à l'époque désignée. Sur le champ la dame et son ami se transportent chez cet honnête homme. Malheureusement ce n'est pas lui qui a fait insérer cet avis, et quoiqu'il ait réellement trouvé le billet, sa femme et lui se gardent bien d'en convenir. La femme du peintre et l'ami vont chez le bourguemestre ; celui-ci leur donne pour les guider dans leurs démarches un certain Furter, qu'il veut bien nommer son commis.
On court chez le rédacteur des affiches, on n'y apprend rien. On retourne chez Drogman ; Furter fait jaser l'épicière, et apprend que son mari avait pour ami un petit cousin de sa femme, employé à la douane, avec lequel il s'est brouillé depuis quelque temps. Et vite on court à la douane ; le petit cousin n'y est point venu, il est indisposé. L'actif et soupçonneux Furter prend son numéro, et l'on se rend chez lui. On force sa porte, il est en tête à tête avec la belle épicière, qui est venu [sic] le prier de ne pas perdre son mari. Le petit cousin est aussi honnête que galant et malin. Que fait-il ? Il paie les 500 florins, en déclarant que c'est bien lui qui a fait insérer l'avis, et qu'il était chargé par M. Drogman de faire cette restitution. On se doute bien que le mari ne tient pas à un pareil trait et se réconcilie avec un ami si rare.
Cette intrigue n'a pas paru assez piquante, pour excuser l'infraction des règles d'Aristote ; les couplets étaient faibles, le dialogue peu soigné, et l'ouvrage accueilli froidement, n'est pas resté au répertoire.
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