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Catherine ou la Belle-Fermière
Catherine ou la Belle-Fermière, comédie en trois actes et en prose, mêlée de chants (27 novembre 1792,) paroles et musique de Julie Candeile. Paris, Maradan.
Théâtre de la République
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Titre :
Catherine, ou la belle Fermière
Genre
comédie
Nombre d'actes :
3
Vers / prose
prose, avec des couplets en vers
Musique :
chants
Date de création :
27 novembre 1792
Théâtre :
Théâtre de la République
Auteur(s) des paroles :
Julie Candeille
Compositeur(s) :
Julie Candeille
Almanach des Muses 1794.
Succès brillant et soutenu. La Citoyenne Candeille joue le principal rôle et y réunit les applaudissemens comme auteur, comme actrice et comme musicienne.
Intrigue trop compliquée pour pouvoir être exposée dans une simple notice. Ressorts déjà employés, mais résultats nouveaux. Au second acte, scène neuve et théâtrale ; la rencontre inopinée de deux personnages, met tous les autres à la fois en situation, d'une manière différente.
Caractères bien tracés ; dialogue quelquefois à prétention ; romance touchante ; beaucoup de mots heureux.
Sur la page de titre de la brochure,Paris, chez Maradan, 1793. :
Catherine ou la Belle Fermière, comédie en trois actes, en prose, mêlée de chant. Représentée, sur le théâtre de la République, le 27 novembre 1792, sous le titre de la Belle Fermière. Paroles & musique de Julie Candeille.
Sur la page de titre de la brochure,Paris, chez Barba, (1797.) An VI :
Catherine ou la Belle Fermière, comédie, en trois actes et en prose, mêlée de chant. Paroles et musique de Julie Candeille. Représentée, sur le théâtre de la République, le 27 novembre 1792, sous le titre de la Belle Fermière.
Mercure français historique, politique et littéraire, n° 7 du 7 janvier 1793, p. 49-50 :
[Compte rendu favorable d’une pièce dont le critique aurait voulu pouvoir dire plus (faute de place, il a dû se restreindre ?). Il nous prévient que l’intrigue est compliquée, et le résumé qu’il en fait confirme ce jugement. Il conclut d’ailleurs sur son aspect « peut-être un peu romanesque » (il est prudent !), tout en étant attachante et pleine d’intérêt. Certes la contexture de la pièce n’est pas sans défauts, mais le critique ne les détaille pas, puisqu'il ne peut détailler aussi les beautés qu’elle comporte. Le premier acte a été un peu chahuté, en raison surtout du caractère de Catherine, un peu trop moralisateur, un peu trop « métaphysique » : elle s’exprime trop au-dessus de la condition qu’elle se prête. Mais la suite a dissipé ces nuages et « décidé le succès ». Les acteurs ont été excellents, et c’est à l’auteur que le critique rend hommage à la fin, à la fois auteur, musicienne et actrice : elle est venue sur scène recevoir le juste prix de ses talents.]
Catherine, ou la belle Fermiere, comédie en trois actes, a été donné jeudi dernier au théâtre de la République, avec beaucoup de succès. Nous regrettons de n’en pouvoir détailler tout le mérite. Nous ne dirons même qu’un mot de l’intrigue qui est assez compliquée, et dont nous ne pouvons suivre tous les fils.
Une jeune femme, arrivée depuis quelques mois dans la terre d’Armincourt en a pris la ferme à bail. La beauté extraordinaire de Catherine (on ne lui connaît pas d’autre nom), ses talens, son esprit, ce ton d’une éducation distinguée qui fait voir malgré elle qu’elle n’est pas ce qu’elle veut paraître, ont attiré sur elle les yeux de tout ce qui habite le château. Lussan, l’un des amants de mademoiselle d’Armincourt, rebuté par son caractere et sa coquetterie, devient assez amoureux de Catherine pour s’introduire chez elle, sous le titre de son régisseur. Des malheurs inconnus ont rendu Catherine misanthrope ; mais son dégoût pour le mariage, et sa prévention contre les hommes n’ont pu défendre son cœur contre les charmes du jeune Lussan, qui sous le nom de Charles, et le plus humble extérieur, est parvenu à l’intéresser. L’oncle de mademoiselle d’Armincourt revient des Indes avec une fortune considérable, qu’il compte partager avec sa sœur et sa niece, ayant appris la mort de son fils. Après une suite d’incidens, ils e trouve que Catherine est la veuve de ce fils, et comme elle mérite l’attachement et la vénération de son pere, elle obtient naturellement la premiere part dans ses bienfaits.
Cette intrigue est peut-être un peu romanesque, quelques caracteres fortement prononcés commençaient à déplaire : le style de Catherine sur-tout, non-seulement, est beaucoup au-dessus de l’état qu’elle annonce, mais un peu trop métaphysique, et ressemblant à celui des livres de morale, avait excité queques murmures ; mais le naturel des deux actes suivans, les développemens pleins de chaleur et de sensibilité qu’ils contiennent ont enlevé tous les suffrages, et décidé le succès. Le jeu de Michau, simple et d’une vérité exquise ; le talent naïf et pleine de grace de l’aimable et jeune Dumont, qui remplit le rôle de la petite fille de basse-cour, ont encore ajouté à l’enthousiasme des spectateurs. Tous les autres acteurs les ont dignement secondés, et méritent les mêmes éloges.
Catherine a développé de nouveau des talens déjà chers au public, et comme actrice, et comme musicienne; mais elle n’a en cela d’autre mérite que celui du courage, puisqu’elle est en même temps l’auteur de cette charmante piece et des morceuax de musique qui y sont joints. Cette actrice, cette musicienne, cet auteur, est l’estimable et belle Candeille, qui est venue recevoir des applaudissemens bien mérités.
L'Esprit des journaux français et étrangers, 1793, tome III, p. 322-327 :
[La pièce n'est pas facile à résumer, et le critique a bien de la peine de mettre un peu de clarté dans une histoire compliquée. Après avoir fait le portrait de la belle fermière, il tente de décrire un cercle de connaissances étonnant ; une femme et sa fille, qu'il n'est pas facile de marier, un prétendant que le méchant caractère de la jeune fille décourage de l'épouser, et qui s'introduit sous une fausse identité chez la belle fermière qu'il trouve si séduisante. Il finit par se déclarer, mais la belle fermière ne lui répond pas à sa déclaration, parce qu'elle reçoit à ce moment une lettre d'un autre homme qui lui déclare à son tour son amour pour elle. Arrive un troisième homme, de retour des colonies où il s'est bien sûr enrichi. C'est l'oncle de la jeune fille. Mais il soupçonne la belle fermière qui menace de quitter sa ferme. Bien sûr tout finit par s'arranger : la belle fermière, qui est une grande dame, peut épouser son chevalier servant grâce à la fortune de l'oncle, qui n'est autre que le père de son indigne mari. La fin de l'article est consacrée à dire tout le bien qu'il faut penser des interprètes qui jouent avec un ensemble parfait auquel s'ajoutent leurs qualités individuelles, naturel, noblesse, gentillesse.]
Catherine, ou la belle Fermiere, comédie en trois actes, par Mlle. Candeille.
Une femme charmante est venue, il y a deux ans, à la terre de madame Darmicourt, & a obtenu la ferme de son château, dont elle lui remet six cens livres de plus. Cette femme est active, laborieuse, douce, compatissante ; mais la mélancolie dont elle est souvent atteinte, annonce un chagrin profond. Elle pense mal des hommes, & une aversion telle pour le mariage, qu'elle ne veut pas que ceux qui l'approchent se marient. Cette aversion contrarie beaucoup Fanchette, sa servante, jeune & gentille, qu'elle a élevée, & qui aime Henri, valet de Fierval.
Madame Darmicourt est sur le point de marier sa fille Elise, jeune personne, haute & capricieuse, gâtée par un séjour à Paris trop court, & où elle n'a pu prendre que des travers, & par la lecture des romans. M. de Lussan, propriétaire d'une terre voisine, jeune homme honnête & sensé, a désiré sa main ; mais le caractere d'Elise a détruit sa passion ; & au moment où le mariage étoit sur le point de se conclure, il éprouve l'amour le plus violent pour la belle fermiere. Secondé par Fanchette, il s'introduit chez elle sous l'habit d'un paysan & sous le nom de Charles. Tous les matins il sort du château, & ainsi travesti, il vient reprendre son travail, qui consiste principalement à tenir les comptes de la ferme : & Catherine (c'est le nom de la belle Fermiere) croit qu'il retourne chaque soir chez ses parens. Lussan, plus près de Catherine, en devient épris. Sa conversation, le goût & le talent qu'elle a pour les arts, tout lui annonce qu'elle n'est pas une femme ordinaire. Catherine, malgré sa haine pour les hommes, éprouve, en écoutant Charles, un intérêt dont elle ne peut pas non plus se défendre.
Elise est humiliée de se voir négligée par Lussan, mais elle est trop fiere pour le laisser paroître. Un autre homme prétendoit à sa main, M. de Fierval, jeune fat plein de travers & de ridicules : elle accepte son hommage A la suite d'un déjeûner champêtre, apprêté par Catherine, celle-ci se permet sur le mariage en général, des réflexions qu'Elise trouve trop libres & déplacées. Catherine s'apperçoit aussi de l'amour de Fanchette, & lui défend de-parler à Henri.
Le second acte se passe dans la ferme. Catherine, plus rêveuse qu'à l'ordinaire, se plaint souvent de l'absence de Charles, que Fanchette excuse de son mieux. Elle se retire dans son cabinet où elle dessine. Charles arrive : Catherine à ce moment prend sa harpe, & s'accompagne. Charles répete le refrein de sa romance ; Catherine surprise descend. Charles veut voir son sort fixé : la conversation s'anime : il se déclare. Catherine, sensible à la générosité qu'il témoigne, à la vérité qui caracterise ses sentimens, lui avoue qu'elle n'est pas ce qu'elle paroît être, que sa naissance est illustre, & que son sort a été brillant. Elle va faire la confidence entiere ; on entre : c'est Henri, valet de Fierval, qui apporte à Catherine un billet de son maître, billet écrit avec une impertinente présomption, & qui contient l'aveu indiscret d'une flamme insolente. Catherine, indignée de ce procédé, dit qu'elle fera elle-même la réponse au château, pendant la fête qu'on doit donner à Elise. Henri reconnoît Lussan, mais Fanchette l'engage au silence. En revenant il rencontre un homme d'un certain âge, dont la voiture s'est brisée ; il le conduit à la ferme. La beauté de Catherine frappe cet homme & l'intéresse : c'est un riche particulier, homme franc & loyal, qui a fait une fortune immense dans les colonies, fortune qu'il vient partager avec sa sœur Darmicourt & sa niece Elise, si elles en font dignes. Ce qu'il apprend de sa sœur, lui fait plaisir ; mais les témoignages sur Elise ne sont pas aussi satisfaisans. L'impudent Fierval vient lui-même chez Catherine : il reconnoît Lussan ; tout se découvre. L'oncle d'Elise doute de la vertu de Catherine : celle-ci s'indigne d'avoir été trompée, & exposée à l'humiliation & au mépris ; elle chasse Fanchette, & veut quitter la ferme.
Le troisieme acte se passe au château. L'aventure de Lussan y fait grand bruit : on a répandu que c'étoit pour Fanchette qu'il étoit à la ferme. Boniface (c'est le nom de l'oncle d'Elise) ne veut condamner personne sans l'entendre. Cet homme sensible & généreux a été d'abord entraîné par l'air décent & honnête de Lussan, qui lui a fait un sincere aveu de son amour pour sa niece, des causes de son refroidissement, enfin de sa conduite avec Catherine. Boniface reconnoît son erreur, & que cette femme est aussi sage que belle. Mais sa conduite réveille en lui des idées qu'il chérit : il veut la voir ; elle vient elle-même ; elle ne veut pas, en. partant, laisser ignorer à Boniface quel est l'homme à qui il va sacrifier sa niece, & elle lui remet la lettre de Fierval. Boniface la presse de questions ; Catherine est étonnée, interdite. « Il n'est plus tems de feindre, dit-il ; vous êtes Julie Dorneville, qu'un indigne époux qui vous devoit tant a maltraitée, faute qu'il a expiée par une mort prématurée. Venez dans mes bras, ma fille, ne dissimulez plus ; n'ôtez pas au vieux Boniface Dorneville la douceur de réparer tous les maux que vous a faits son indigne fils ». Catherine ne peut plus résister à un sentiment si pressant, elle tombe dans les bras de Boniface : celui-ci la presse de mettre le sceau à son bonheur, en faisant celui d'un homme honnête & sensible, en épousant Lussan. Catherine y consent. La fête commence. Boniface devoit donner son bien à sa niece, mais à condition qu'il seroit rendu à la femme persécutée par son fils, qu'elle avoit enrichi, si on la retrouvoit. Fierval n'est pas de cet avis, mais Elise y consent avec joie ; & cette preuve de désintéressement est au moins aux yeux de Boniface une compensation de ses travers. Le sort de Catherine est enfin connu ; elle épouse Lussan, & Boniface partage son immense fortune entr'eux & sa niece. Fierval, confondu par la lettre envoyée à Catherine, se retire : Henri épouse Fanchette, à qui Julie remet sa ferme.
Il est impossible de dissimuler qu'il n'est guere naturel que Lussan quitte depuis trois mois le château pour se travestir chaque jour en valet de ferme, sans être connu, lui, dont personne ne doit ignorer la figure dans le canton : mais cette invraisemblance une fois oubliée, l'ouvrage amuse, occupe, intéresse, & l'esprit & le cœur sont également satisfaits. Le style du premier acte a paru un peu négligé, mais celui des deux derniers est pur, naturel, délicat & piquant. L'intrigue est neuve, & le sujet a une originalité qui plaît. L'ouvrage a été très-applaudi, & l'auteur vivement demandé : on juge bien que son intérêt pour lui a doublé, quand on a nommé Mlle. Candeille, qui ce jour-là a prouvé qu'elle unissait tous les dons & tous les talens. L'ouverture & les airs de la piece sont d'elle, & elle chante & s'accompagne à merveille. Elle a joué le principal rôle avec le talent qu'on lui connoît. Nous ne lui ferons qu'un reproche ; c'est son costume, qui, mêlé de gaze & de soie, n'étoit pas celui d'une paysanne. Il est étonnant qu'une femme dont l'esprit est si cultivé, n'ait pas senti l'inconvénient d'un pareil contre-sens.
La piece a été jouée parfaitement par tous les acteurs. Il est impossible de voir un ensemble plus satisfaisant & une exécution mieux soignée. Il est difficile d'avoir un naturel qui aille plus droit à l'ame, que Michaud dans le rôle de Boniface. Devigny jouoit Lussan : il a été plein de feu, de noblesse & de sensibilité : & la Dlle. Dumont a mis une vérité & une gentillesse vraiment piquantes dans le petit rôle de Fanchette. Baptiste a été très comique dans le rôle de Fierval. Les autres rôles ont été bien remplis par les Srs. Fusil, Simon & Givernes.
Les décorations sont faites avec goût, fraîches & neuves.
(Journal encyclopédique ; Journal de Paris ; Magasin encyclopédique.)
[César : paroles et musique de Mlle Candeille.
Première le 27 décembre 1792 (la brochure donne pour date de création le 27 novembre 1792).
La pièce a été jouée 2 fois en 1792, 49 fois en 1793, 19 fois en 1794, 6 fois en 1795, 1 fois en 1796.
Elle est reprise au Théâtre Molière le 19 juin 1798, pour 8 représentations jusqu'au 3 novembre 1798. En 1799, elle est jouée 22 fois dans divers théâtres.]
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