Clovis, tragédie en cinq actes, en vers, de F. J. Depuntis, 1813.
Pièce non représentée.
Sur la page de la brochure, parue à Toulouse, de l’Imprimerie de Benichet le cadet, 1813 :
Clovis, tragédie en cinq actes, en vers. Par F. J. Depuntis.
Que le nom de Français soit un titre d’honneur !
Acte V, scène dernière.
[Le texte de la pièce est précédé d’une longue préface, p. 3-7, dans laquelle l’auteur donne le sens de son projet, écrire une pièce à la gloire de l’Empire au moment de la naissance du Roi de Rome, avant d’évoquer toutes les démarches qu’il a faites pour faire jouer sa pièce, mais en vain.]
AVERTISSEMENT.
Lors de la naissance de sa majesté le roi de Rome, je conçus le projet d'un ouvrage dramatique dont le sujet, intéressant par lui-même, le devint encore davantage par d'heureuses allusions.
Je n'en trouvai point qui pût mieux remplir mon objet que le grand évènement de l'établissement de la monarchie française par Clovis : plus je m'en occupais, plus je m'étonnais qu'un de nos grands auteurs dramatiques ne s'en fût pas emparé.
Quel plus beau spectacle en effet à mettre sous les yeux des Français que celui que présente cette étonnante et glorieuse époque de notre histoire ! et quelle plus heureuse circonstance pour en relever l'éclat et la majesté, que celle où ce vaste édifice, écroulé de nos jours avec fracas, vient d'être réédifié par un génie plus grand encore, et de recevoir cette consistance et cette solidité qui brave les ravages du temps et l'effort des plus violentes tempêtes !
Animé par un si beau choix, je me hâtai de mettre la main à l'œuvre, et ma pièce fut terminée quelque temps avant les fêtes.
Je l'envoyai aux personnes chargées de les diriger ; elles la firent examiner par M. Esménard ; il se disposait à faire un rapport favorable, lorsque des circonstances impérieuses l'appelèrent en Italie ; on la soumit à l'examen de deux autres censeurs, qui en portèrent le même jugement.
Cependant les fêtes approchaient ; on ne décidait rien ; je sollicitai avec instance une détermination, et l'on me fit dire qu'il était impossible de monter un ouvrage aussi considérable pour l'époque à laquelle je le destinais.
Je demandai la permission de le faire imprimer ; on insista pour que je le présentasse à la comédie française : je cédai, et je priai un des sociétaires de ce théâtre, également recommandable par ses talens et par son excessive politesse, de le soumettre à l'examen.
J'eus la satisfaction de voir que l'examinateur était parfaitement entré dans mes vues : je cède au plaisir de donner un extrait de son rapport.
« Malgré l'obscurité, dit-il, que treize siècles répandent nécessairement sur les premiers temps de notre histoire, le fondateur de la monarchie française dans les Gaules jouit encore de toute la gloire due à ses exploits : ils peuvent donc fournir un beau sujet de tragédie nationale, et l'auteur de Clovis mérite déjà des éloges pour le choix qu'il en a fait; il en mérite encore pour sa manière de le traiter ; son plan est simple, son exposition claire, sa marche raisonnable, et si le nœud de son ouvrage n'est pas très-fortement conçu, du moins a-t-il su arriver à un dénouement convenable et satisfaisant.
» Clovis, Clothilde, Syagrius et Gondebaud sont les personnages marquans de sa pièce. Tout le monde connaît les deux premiers ; le troisième est ce général qui lutta vainement contre la décadence de l'empire romain et contre la fortune naissante des Francs ; le quatrième ce roi des Bourguignons, oncle de Clothilde, dont nos historiens ne parlent pas d'une manière honorable, et que l'auteur a judicieusement choisi pour lui donner un rôle odieux nécessaire à son plan.
» Le caractère de ces personnages principaux est bien tracé pour le théâtre. Clovis et Gondebaud n'offrent point, il est vrai, tous les traits que l'histoire leur a conservés ; mais on doit en savoir gré à l'auteur : les héros de ce siècle n'étaient que des barbares; une peinture fidèle eût révolté.
» L'intérêt dans un ouvrage de ce genre, où l'auteur, cherchant, à ce qu'il paraît, la simplicité d'action, n'a eu garde de presser les évènemens, ne peut être aussi fort que dans une pièce implexe ; peut-être même serait-il trop faible, si des rapprochemens naturels, d'heureuses allusions ne les renforçaient en quelque manière, etc. etc. »
L'examinateur termine, en déclarant qu'il est fâcheux de mêler des critiques aux éloges mérités par le talent que montre cet ouvrage ; il fait des observations très-judicieuses sur le style, indique à l'auteur plusieurs passages défectueux, relève les beautés de quelques autres, et déclare la pièce digne d'être admise à la lecture.
J'ignore quel est l'auteur de cet examen ; mais nous nous serions concertés pour avoir une opinion commune, qu'à quelques éloges près il n'eût pas mieux énoncé la mienne.
Je m'empressai de mettre à profit ses sages avis ; je donnai au style le degré de perfection dont je suis capable ; je réduisis la pièce de deux mille vers à seize cens ; je l'envoyai ainsi corrigée à la comédie française, et j'attendis sa décision, sinon sans inquiétude, du moins avec patience.
Je l'attendis long-temps : en vain je faisais prier, presser, solliciter ; mes amis ne pouvaient rien obtenir. J'implorai l'assistance de son excellence le ministre de l'intérieur, je lui exposai ma situation, je mis sous ses yeux le rapport de l'examinateur ; le choix du sujet, le plan de l'ouvrage l'intéressèrent ; il donna des ordres ; ma pièce fut lue et rejetée ; j'ignore sur quel fondement.
S'il ne s'agissait que d'un ouvrage purement littéraire, aveuglément soumis à la décision de la comédie française, je me serais empressé de le remettre dans mon porte-feuille, d'où il ne sortirait que pour paraître sous les yeux toujours indulgens de quelques amis.
On a vu qu'un motif plus puissant m'a animé. J'ai voulu élever un monument national, et j'ose penser que, quelque faible qu'en soit l'exécution, mes concitoyens daigneront y prendre quelque intérêt.
Pourraient-ils être insensibles aux grands évènemens qu'il rappelle, et qui se sont presque tous renouvelés de nos jours ?
En effet, dans le génie, la grandeur d'ame et les immortelles conceptions de notre magnanime souverain ; dans les vertus, les charmes et la dignité de son auguste épouse; dans la fidélité, le dévouement et le courage des Français d'aujourd'hui, ne retrouve-t-on pas toutes les qualités perfectionnées de Clovis, de la vertueuse Clothilde et des invincibles Francs ?
Sans doute il eût été à désirer qu'un pinceau plus mâle et plus vigoureux que le mien se fût chargé de ce grand et magnifique tableau.
Espérons que mon exemple éveillera quelqu'un de ces esprits supérieurs dont notre siècle s'honore : le dépit de voir un si beau sujet si faiblement traité sera un aiguillon de plus pour exciter sa verve, enflammer son imagination, et donner à son génie ce degré de force et d'élévation qui enfante des chefs-d'œuvre.
Telles sont les raisons qui m'ont engagé à publier cet ouvrage. Eh ! pourquoi m'en défendrai-je ? Une autre, purement personnelle, m'y a encore déterminé. Il n'est pas de Français qui, dans nos jours de triomphe, ne recherche avec empressement l'occasion de rendre public le témoignage de sa vive reconnaissance, et de porter aux pieds du trône l'hommage particulier de son admiration, de son respect et de son amour ; je n'ai pu m'empêcher de saisir la première qui s'est offerte.
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