Le Complot inutile, comédie en trois actes, en vers, de Joseph. Patrat, 1790.
Théâtre de Monsieur.
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Titre :
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Complot inutile (le)
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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3
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Vers / prose ?
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en vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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1790
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Théâtre :
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Théâtre de Monsieur
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Auteur(s) des paroles :
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M. Patrat
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Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Dentu, chez Hugelet et chez Laloi, l’an VI de la République :
Le Complot inutile, comédie en trois actes en vers; Par le Citoyen J. Patrat. Représentée pour la premiere fois sur le Théâtre de l’Odéon, le 8 Frimaire, an 6 [28 Novembre 1797].
Courrier des spectacles, n° 281 du 9 frimaire an 6 [29 nevembre 1797], p. 2-3
[Un bien long compte rendu pour une pièce que le critique prend pour une nouveauté. L'article commence par des remarques très positives, « un plan fortement conçu, une intrigue intéressante et bien conduite, de la gaité décente, une morale pure, des pensées ingénieuses, rendues en vers faciles », qui expliquent un accueil très chaleureux du public. Le critique entame ensuite un très long résumé d'une intrigue dont il ne dit rien (surtout pas qu'elle est très embrouillée, ajoutant à une affaire de mariage secret les manœuvres d'un homme malhonnête et d'une soubrette sa complice. Le dénouement est bien celui qu'on attendait : l'oncle accepte que sa pupille ait épousé celui qu'il lui destinait (on ne voit pas bien pourquoi il dirait non !), mais c'est aussi l'occasion d'un premier reproche fait à la pièce : après l'acceptation du mariage, les scènes où on punit le méchant sont inutilement longues, sans intérêt pour le public – mais il fallait bien le punir : la morale doit être préservée. Autre défaut, une exposition un peu obscure (le critique est indulgent). Mais la pièce est promise à un bel avenir. Le jugement sur le style est également très positif. Le critique y souligne le caractère très moral de la pièce riche en « traits de morale […] louables ». Les interprètes sont également jugés, entre excellents acteurs (tous sauf un) et acteur qui ont besoin de faire preuve de « plus d'à-plomb ». On relève que Patrat acteur interprète très bien le rôle qu'il s'est écrit...]
Théâtre de l'Odéon.
Rien de plus joli, de plus agréable que la comédie que le cit. Patrat fit représenter hier à ce théâtre sous le titre du Complot inutile. Un plan fortement conçu, une intrigue intéressante et bien conduite, de la gaité décente, une morale pure, des pensées ingénieuses, rendues en vers faciles, voilà ce que j'ai continuellement remarqué dans cet ouvrage, qui a été accueilli du public avec transport, et dont l’auteur a été demandé et couvert des plus justes applaudisssemens.
Julie, pupile de M. Vernon Dablancourt qu’elle ne connoit que sous le dernier de ces noms, a épousé, à l’insçu de son tuteur, et pendant son absence, mais avec l’approbation de sa tante, chez laquelle elle demeuroit, un jeune officier nommé Dagueville. Ce dernier, en contractant ce mariage, a obéi à un oncle qui ne lui a laissé ses biens qu’à cette condition. Depuis, Dagueville a été obligé de s’éloigner, et Julie est revenue à Paris dans la maison de son oncle. Uniquement occupée de son mari, elle voit avec l’indifférence la plus parfaite un jeune fat nommé Fierval, qui n’éprouve pas de sentimens plus vifs pour elle, mais qui a un amour tout particulier pour sa dot. Flerval met dans ses intérêts Finette, suivante de Julie, qui cède moins à la bourse du faux amant, qu’au désir de se venger de sa maîtresse, à qui elle ne peut pardonner le peu de confiance qu’elle lui témoigne. Le projet de Fierval est de persuader à Dablancourt, d’accord avec Finette, qu’il aime Julie et qu’il en est aimé. Des signes qu’ils doivent se faire en présence du tuteur, des mots adressés devant lui à l’oreille de sa pupile, doivent servir à l’abuser. Robert, serviteur fidèle de Dablancourt, ne voulant pas entrer dans le complot, et promettant d’instruire son maître de tout, sert encore par ce moyen, et sans s’en douter, le projet de Fierval. Julie vient de recevoir une lettre de son mari ; elle y voit qu’il est à Paris, et se détermine à découvrir tout à son tuteur, à qui elle fait demander un entretien. A peine l’a- t-elle envoyé chercher, qu’elle appercoit à la lettre un post-scriptum qui lui recommande le plus profond silence. Son embarras est grand, et donne à penser à Dablancourt à qui l’arrivée et les manières mystérieuses de Fierval inspirent de grands soupçons, lesquels sont bientôt confîrmés par le rapport de Robert.
Dagueville vient d'arriver chez Vernon dont il a fait connoissance sur mer, et avec qui il s’est étroitement lié. Ce der nier lui offre la main de sa pupile, mais Dagueville lui raconte et son mariage, et les circonstances qui l'ont amené, sans cependant nommer Julie. Celle-ci a voulu répondre à la lettre qu’elle a reçue de de son mari, et cette réponse est tombée sous les mains de Finette, qui la remet à Fierval, lequel se promet d’en tirer bon parti. En effet, après avoir engagé Dablancourt à solliciter un régiment pour lui ; sous prétexte de lui remettre des renseignemens sur son compte, il lui laisse la lettre de Julie. Dablancourt, en la lisant, s’imagine que c’est une inadvertence de la part de Fieival, et il ne lui reste plus de doute sur ses intrgues avec sa pupile. Il en témoigne tout son ressentiment à celle-ci, qui croyant qu’il est instruit de son mariage, en convient, sans nommer son mari, de sorte que Dablancourt croit toujours qu’elle aime Fierval, et que c’est de lui dont il est question. Ce dernier qui a intérêt de persuader à tout le monde qu’il est on ne peut mieux avec Julie, fait une fausse confidence à Dagueville, et le quitte pour monter, lui dit-il , à la fenêtre de sa maîtresse. Dagueville augmente le chagrin de son ami, en lui racontant ce qu’il a appris, et lui propose de voir Julie, pour la détromper sur le compte de Fierval.
Quel est l’étonnement de Dagueville, lorsqu'il attend la pupile de son ami, et qu’il voit entrer son épouse. Pendant qu’ils s’embrassent, Vernon Dabancourt revient, et après un long, mais agréable quiproquo, produit par le fond de la pièce et son double nom, ils sont tous au fait, et se proposent de jouer Fierval, ce qu’ils exécutent en feignant de l’unir à Julie. Le fat voit enfin qu’on se mocque de lui et se retire. Les deux époux obtiennent aisément du tuteur de Julie, qu’il approuve un mariage qu'il avoit lui-même projetté.
Les scènes qui sont employées à punir Fierval, dégénèrent un peu en longueur, en ce qu’elles viennent après le dénouement qui s’opère par la réunion des deux époux. Le reste ne me semble pas présenter un grand intérêt au spectateur, dont le principal but est rempli ; mais la difficulté étoit de faire revenir Fierval, et de le punir. D’ailleurs ces scènes sont comme le reste de la pièce parfaitement traitées. On pourroit peut-être aussi reprocher un peu d’obscurité dans l’exposition qui n’est pas annoncée très-naturellement, et qui est difficile à suivre. Mais on doit passer sur ces légers défauts dans un ouvrage qui fera sans doute le plus grand plaisir, et qui doit attirer beaucoup de inonde à ce spectacle.
Le style en est généralement aisé, souvent agréable, sans être jamais affecté, et quelquefois d’un vrai comique. Tel est ce vers de Julie, qui ayant répondu négativement à son tuteur, qui lui demandoit si elle n’a voit pas laissé un ami à Tours ; dit à part :
Il en étoit parti, ce n’est pas là mentir.
On aime entendre un serviteur fidèle répondre à Finette, qui lui demande quels sont les défauts de son maître :
Il en a peut-être ;
Mais moi vieux serviteur, chargé de ses bienfaits,
Je serois un ingrat si je les publiais.
On rencontre souvent dans cette pièce des traits de morale aussi louables.
Cet ouvrage est parfaitement joué. Le cit. Patrat met dans le rôle de Vernon Dablancourt, le mélange de bonhomie, de sévérité et de finesse qu’il comporte. Le cit. Dorsan rend parfaitement celui de Dagueville. Le cit. Barbier est moins fort dans celui de Fierval ; mais il le jouera mieux quand il aura pris plus d’à-plomb. Le cit. Barret a bien saisi le personnage du bon Robert. La cit. Dorsonville a soutenu sa réputation dans le rôle de Finette, et la cit. Dourdé dans celui de Julie, confirme l’espoir qu’elle a déjà fait concevoir de son talent. Nanine jouée avant a été fort bien rendue.Le public a saisi plusieurs applications pour prouver au cit. Dorsau combien il lui devient cher.
L. P.
Mercure de France, tome CXXXIX, n° 29 du samedi 17 juillet 1790, p. 131-132 ;
[Compte rendu plutôt rapide de la comédie nouvelle du Complot inutile, dans lequel il est peu question de la pièce : après avoir noté que le Théâtre de Monsieur, si cher au cœur des rédacteurs du Mercure, voit son répertoire s’enrichir « dans le trois genres qu’il réunit », c’est du retour réussi d’un acteur éloigné de la scène par la maladie qu’il est question.]
Le Répertoire de ce nouveau Théatre commence à devenir nombreux, même dans les trois genres qu'il réunit. Quelques jours auparavant, on avoit donné, avec beaucoup de succès, le Complot inutile, Pièce en trois Actes & en vers. M. Paillardelle, que sa santé avoit éloigné de la Scène pendant quelque temps, a reparu dans cette Comédie par un rôle qu'il a joué avec le talent qu'on lui connoît: Cet Acteur est vraiment précieux à ce Théatre, par sa profonde connoissance de la Scène, & par l'art qu'il possède si bien de donner une physionomie à tous les Personnages qu'on lui confie.
Dans le N°. prochain, nous donnerons l’Article du Théatre Italien.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1790, tome VIII (août 1790), p. 346 :
Le Complot inutile, comédie en trois actes ; en vers, par M. Patras, a été donnée avec succès. C'est un imbroglio qui ne manqueroit ni d'intérêt ni d'action, s'il n'étoit pas si compliqué. Le complot est formé entre une soubrette & un roué, qui veut forcer une jeune personne à lui donner la main le même soir. Le roué suppose, aux yeux du tuteur de son amante, une intelligence, une correspondance, des rendez-vous, & sans doute il réussiroit s'il ne se découvroit pas un incident qui rend son complot inutile ; c'est que la jeune personne est mariée secrétement. L'époux arrive, le tuteur approuve tout, & notre aimable roué est berné comme il le mérite. Cet ouvrage offre de jolis vers & des détails piquans. Il auroit encore intéressé davantage, si l'intrigue étoit plus claire, & si la partie du style étoit un peu plus soignée. Il y a sur-tout une profusion d'adverbes, qui rappellent le vers de moliere :
Ces adverbes-là font admirablement.
D’après la base César, la pièce de Patras ou Patrat a été joué une seule fois, le 28 novembre 1797, au Théâtre de l’Odéon. C’est en fait la date et le lieu d’une reprise de la pièce de 1790, dont César paraît ignorer qu’elle a connu le succès à cette date.
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