Les Comédiens au Caire, pièce de circonstance en un acte et en prose, mêlée de couplets, par Léger, Chazet, Armand Gouffé et Georges Duval, 12 frimaire an 8 [3 décembre 1799].
Théâtre des Troubadours.
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Titre :
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Comédiens au Caire (les)
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Genre
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pièce de circonstance
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Nombre d’actes
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1
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Vers / prose
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prose, avec couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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12 frimaire an 8 [3 décembre 1799]
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Théâtre :
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Théâtre des Troubadours
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Auteur(s) des paroles :
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Léger, Chazet, Armand Gouffé et Georges Duval
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Courrier des spectacles, n° 1005, du 13 frimaire [4 décembre 1799], p. 2 :
[En se donnant des airs d'indulgence, le critique signale que les acteurs de la pièce nouvelle ne savent pas leur rôle, faute d'avoir eu le temps de l'apprendre. C'est l'occasion de critiquer la hâte des auteurs et des gens de théâtre à monter des pièces de circonstance avant tout le monde. L'intrigue se réduit à raconter la libération d'une esclave égyptienne, que la troupe des comédiens français prend pour jouer les ingénues. Pour le critique, pas moyen de voir là une pièce : les auteurs ont choisi de l'appeler un impromptu, et « c'est un des plus jolis que l’on ait donnés de long-tems ». Il est riche de couplets pleins de grâce et de joie. Les auteurs de cette jolie production sont cités.
La pièce est contemporaine de l'expédition de Bonaparte en Égypte.]
Théâtre des Troubadours.
Pourquoi ces éclats de rire ? pourquoi ces sarcasmes contre deux acteurs qui ne savent pas leur rôle ? Ah ! soyez un peu plus indulgens. Quoi ? vous voulez qu’une pièce faite en une nuit et apprise en une matinée soit sçue, et sçue parfaitement ? encore une fois, de l’indulgence. Mais pourquoi, me direz-vous, n’attendent-ils pas vingt-quatre heures plus tard ? ils nous offriroient un ouvrage mieux rendu, ils en feroient mieux ressortir les beautés. J’en conviens, mais que voulez-vous ? La rivalité, le mérite de la priorité, tout cela fait qu’on se hâte, et de-là bien des faux pas. C’est ainsi que s’entretenoient deux témoins de la représentation des Comédiens au Caire, vaudeville donné hier à ce théâtre avec beaucoup de succès.
Victor, jeune Français au Caire, est parvenu à plaire à Fatmé, esclave de Bettyn, vieillard avare. Melcour, directeur de la troupe de comédiens français qui viennent de débarquer en Egypte, lui promet de l’aider à enlever sa maîtresse à son gardien. La maison de l’avare a été donnée à la troupe pour son logement, et Fatmé s’étant échappée de l’intérieur du Sérail, est reçue par le Directeur pour jouer les Ingénues. Bettyn se voit forcé de consentir à la céder, moyennant une rançon.
Ce n’est pas là une pièce, certainement ; aussi les auteurs lui ont-ils plutôt donné le nom d’impromptu, et c'est un des plus jolis que l’on ait donnés de long-tems. Il est plein de couplets qui, à la critique la plus fine, réunissent la grâce et l’enjouement. Quelques-uns ont été redemandés. On doit cette jolie production à la plume des citoyens Léger, Gouffé, Duval et Chazet. G.
La Décade philosophique, littéraire et politique, an VIII, 1er trimestre, n° 8 (20 Frimaire), p. 487-488 :
[Le critique de la Décade philosophique est de méchante humeur : contre les pièces écrites à la va-vite (plus c’est vite fait, mieux c’est), que les acteurs ne savent pas (c’est le souffleur qui joue !). C’est ce qui arrive avec ces Comédiens au Caire, « pièce qui n’a d’ailleurs ni plan ni action ni vraisemblance », et destinée à « gagner de vitesse » un autre théâtre qui veut aussi faire sa cour au général français qui triomphe (croit-on) en Égypte en faisant jouer le Vaudeville au Caire. Le critique irrité y voit la conséquence de la multiplication des théâtres jouant le vaudeville, alors que « la tragédie française et la bonne comédie peuvent à peine en obtenir deux ». Curieusement, il cite néanmoins deux « fragmens de couplets ».]
Théâtre des Troubadours.
Rien n’égale aujourd’hui la désespérante abondance de nos faiseurs d’impromptus, si ce n’est la complaisance excessive du public qui les supporte, et la bénignité de quelques journalistes qui les louent.
Les vingt théâtres de Paris remplissent les feuilles quotidiennes de réclamations tendantes à revendiquer la primauté de conception pour des sujets qu’aucun des réclamans n’a pourtant inventé ; de la crainte d’être prévenu naît la précipitation des auteurs à brocher des canevas informes qu’on ne se donne le tems ni de revoir ni de perfectionner ; on se réunit quatre, cinq, six auteurs et quelquefois davantage pour enfanter en résultat une scène et trois couplets, et l’on croit avoir des droits à l’indulgence en mettant le public dans la confidence du peu de tems qu’on a mis à les faire : le public a raison de répondre comme Alceste,
Voyons, Messieurs, le tems ne fait rien à l’affaire.
qui vous obligeait de paraître si vite ? et pourquoi faut-il que je paie votre précipitation de quelques heures d’ennui ?
Ces réflexions sont dictées par l’humeur que nous a donnée une première représentation au théâtre des Troubadours.
L’ouvrage était intitulé les Comédiens au Caire ; aucun des acteurs ne savait son rôle, et le souffleur a joué seul presque toute la pièce qui n’a d’ailleurs ni plan ni action ni vraisemblance. Or, pourquoi les auteurs étaient-ils tant pressés ? Pour gagner de vitesse le théâtre chantant de la rue de Malte, qui annonçait depuis plusieurs jours le Vaudeville au Caire. Belle priorité !
Il n’est personne qui dorénavant ne puisse faire une pièce dans une matinée s’il ne s’agit que de coudre bien ou mal une douzaine de couplets faits d’avance.
Voilà pourtant les conséquences de cette multiplicité dégoûtante des théâtres. Le Vaudeville a maintenant à Paris cinq ou six théâtres, et la tragédie française et la bonne comédie peuvent à peine en obtenir deux. A travers l’ennui d’une représentation interrompue par de nombreux et bruyans éclats de rire, on distingue ces fragmens de couplets,
Si l’on voit de la scène anglaise
Trop de sombres imitateurs,
Le goût, sur la scène française,
A retrouvé deux Précepteurs.
Un petit maître fait ainsi de détail de sa décade ;
Air : En quatre mots.
On voit en France Aglaé triompher primidi,
On l’aime duodi,
On le lui dit tridi ;
Le quartidi l’on s’empresse
De demander son adresse
Qu’on sait quintidi.
Tendre billet est remis sextidi,
On prend jour septidi,
On triomphe octidi,
On s’en vante le nonidi,
Puis l’on part décadi.
Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, V. année (an VIII – 1799), tome quatrième, p. 555 :
[Rapide compte rendu, centré sur la différence de traitement entre les deux pièces rivales : la qualité de l'intrigue ? « plus de couplets saillans » ? un public « plus indulgent et mieux disposé » ? On a tout de même demandé les auteurs.]
Les Comédiens au Caire.
La pièce des Troubadours sur le même sujet que celle représentée au Théâtre du Vaudeville, a été mieux accueillie. Ce n’est pas que l’intrigue fût meilleure ou plus compliquée, mais il y avoit plus de couplets saillans, ou peut-être le public étoit-il plus indulgent et mieux disposé. Les auteurs ont été demandés ; ce sont les CC. Léger, Chazet, Armand Gouffé et Georges Duval.
La pièce a été faite en sept heures, et apprise en quinze.
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