Les Coq-à-l'âne, vaudeville en un acte. 2 frimaire an 12 [24 novembre 1803].
Théâtre Montansier
Almanach des Muses 1805
Le titre est au pluriel dans l'Almanch des Muses, au singulier dans le Courrier des spectacles.
Courrier des spectacles, n° 2455 du vendredi 3 frimaire an 12 (25 novembre 1803), p. 2 :
[Avant de parler de la pièce, le critique porte un jugement plutôt sévère sur le genre de théâtre qu’on joue chez Montansier, fait pour être drôle, qu’on vient éventuellement siffler, et qu’il n’est pas utile de juger sérieusement. Il peut ainsi passer à la pièce, drôle parfois, et parfois de mauvais goût, un peu longue et bavarde : l’auteur n’a pas été nommé, signe de son échec. Il n’y a plus ensuite qu’à résumer l’intrigue, dont, rien qu’au titre de la pièce, on comprend qu’elle ne brille pas par sa cohérence. Le dénouement est l’occasion de faire la satire du théâtre du temps, où le succès pourrait bien être affaire de claque plus que de talent. Les acteurs vedettes du théâtre, Tiercelin et Brunet, sont excellents, et font passer par leur jeu comique la pauvreté de la pièce.]
Théâtre Montansier.
Première représentation du Coq-à l’âne.
Un coq-à l’âne n’est pas une nouveauté à ce théâtre ; la plupart des pièces que l’on y joue sont autant de coq-à-l’âne. Combien jusqu’ici ont précédé, combien suivront celle jouée hier pour la première fois ! On vient en foule, soit pour rire, soit pour siffler, soit enfin pour juger, et il y a des personnes d’assez bonne-foi pour critiquer sérieusement ces productions du désœuvrement ou d’un accès de gaîté folle. L’auteur et la direction n’attachent pour l’ordinaire quelqu’importance qu’autant qu’elles ont fait rire. La piece nouvelle a atteint le but, en partie. Elle offre quelques traits plaisans, mais aussi plusieurs choses de mauvais goût, des longueurs et des redites, qui ont à la fin refroidi le spectateur, et l’ont rendu indifférent sur le nom de l’auteur, car il n’a pas été demandé.
Un jeune homme de Châteauroux , nommé Milord, fils d’un marchand d’habits, est venu à Paris, où il s’est tellement livré à la lecture des romans , qu’il s’imagine voir dans tous ceux qui l’approchent un personnage d’importance. Sa folie est partagée par Catherine, fille d’un maréchal nommé Ledey, qu’il aime sans la connoître. Catherine a la fantaisie de devenir une grande dame, et pour se rapprocher de Milord, elle commence par éconduire Auguste, son amant, garçon maréchal, qui a renoncé à son état pour suivre la carrière du théâtre, où il joue les premiers rôles au spectacle de la rue du Grand-Hurleur.
Assuré des sentimens de la fille qu’il croit une princesse de Perse, et qui le prend pour un milord anglais, Milord veut se concilier la bienveillance du pere. Sous le bonnet enfumé qui lui couvre la tête, sous les habits grossiers et sous le tablier de cuir, il croit voir et voit le Dey de Perse, et lui fait humblement sa déclaration, appuyée par l’offre d’une bourse peu garnie que le maréchal accepte, et dont il va sur-le-champ boire une partie au cabaret.
L’arrivée d’un cousin qui cherche notre jeune fou, pour le reconduire dans sa famille, découvre tout ; Catherine et Milord ouvrent les yeux, et reconnoissant leur erreur mutuelle, l’un s’en retourne à Châteauroux, l’autre se console en épousant Auguste, qui arrive triomphant du théâtre, où il a été applaudi et claqué par tous les compagnons du quartier, qui lui ont jeté une couronne et des vers, en témoignage du succès éclatant qu’il a obtenu dans Orosmane.
Ce personnage est plaisant, et est rendu burlesquement par Tiercelin.
Le jeu de Brunet a fait valoir celui de Milord, et il faut convenir qu’il faut que ces deux acteurs soient aimés du public, pour qu’il entende avec indulgence toutes les choses ridicules dont leurs rôles sont ordinairement farcis.
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